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12/06/2018 | FRANCE | N°16/01521

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 12 juin 2018, 16/01521


R.G. N° 16/01521

DJ

N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





à :



la SCP X...



la SELARL CABINET C... Y...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



1ERE

CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 12 JUIN 2018





Appel d'un jugement (N° R.G. 13/01530)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP

en date du 05 février 2016

suivant déclaration d'appel du 29 Mars 2016



APPELANTE :



Madame Marjorie Z...

née le [...] à DIGNE LES BAINS

de nationalité Française

Le village

05170 ORCIERES



Représentée par Me Dominique X... de la SCP...

R.G. N° 16/01521

DJ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

à :

la SCP X...

la SELARL CABINET C... Y...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 12 JUIN 2018

Appel d'un jugement (N° R.G. 13/01530)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP

en date du 05 février 2016

suivant déclaration d'appel du 29 Mars 2016

APPELANTE :

Madame Marjorie Z...

née le [...] à DIGNE LES BAINS

de nationalité Française

Le village

05170 ORCIERES

Représentée par Me Dominique X... de la SCP X..., avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU, postulant, et Me Dominique A... de la SCP A... & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE, plaidant par Me D..., avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

INTIMEE :

Le SYNDICAT LOCAL DES MONITEURS DE L'ECOLE DU SKI FRANCAIS D'ORCIERES MERLETTE pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Chalet de l'Ecole du Ski Français- Station 1850

[...] MERLETTE

Représenté par Me C... Y... de la SELARL CABINET C... Y..., avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et Me Marie-Thérèse E... de HAUTECLOQUE-PONCINS avocat au barreau des Hauts-de-Seine, plaidant par Me C... Y... de la SELARL CABINET C... Y..., avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ:

Madame Hélène COMBES, Président de chambre,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Madame Joëlle BLATRY, Conseiller,

Assistées lors des débats de Madame Lætitia Gatti, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Mai 2018, Madame JACOB a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Puis l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE

Marjorie Z... exerce la profession de moniteur de ski.

Elle a adhéré en 2007 au Syndicat local des moniteurs de l'école de ski français (ESF) d'Orcières Merlette (le Syndicat) en qualité de moniteur stagiaire, et a signé la 'convention liant les moniteurs de l'école de ski français membres actifs du Syndicat'.

Au terme de ladite convention approuvée en assemblée générale le 26 juin 2006, les moniteurs, autres que les stagiaires et les retraités, sont répartis en trois catégories :

- moniteurs permanents,

- moniteurs 'renfort saison',

- moniteurs temporaires 'renfort vacances'.

Marjorie Z... a d'abord enseigné en qualité de moniteur stagiaire durant quatre saisons, de 2007 à 2010.

Elle a obtenu son brevet d'Etat de moniteur de ski en novembre 2010 et a ensuite travaillé en qualité de 'renfort saison' durant les deux saisons 2010/2011 et 2011/2012.

Par courrier du 19 juillet 2012, le président du Syndicat l'a informée que les membres du comité de direction réunis le 15 juin 2012 n'envisageaient pas la reconduction de son adhésion à compter de la saison 2012/2013.

Le 13 mai 2013, Marjorie Z... a présenté sa candidature à l'emploi de monitrice de ski pour la saison 2013/2014, ce qui lui a été refusé le 15 juillet 2013.

Par acte du 5 décembre 2013, Marjorie Z... a assigné le Syndicat devant le tribunal de grande instance de Gap aux fins d'obtenir l'annulation des deux décisions des 19 juillet 2012 et 15 juillet 2013, le prononcé de son adhésion au Syndicat, son inscription en qualité de moniteur 'renfort saison' pour les saisons 2012/2013 et l'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 5 février 2016, le tribunal l'a déboutée de ses demandes et condamnée à payer au Syndicat la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Marjorie Z... a relevé appel de cette décision le 29 mars 2016.

Dans ses dernières conclusions du 30 septembre 2016, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

- dire qu'elle remplit toutes les conditions de qualification professionnelle pour être affiliée au Syndicat,

- dire en conséquence que les deux refus d'adhésion des 19 juillet 2012 et 15 juillet 2013 sont injustifiés,

- annuler ces deux décisions manifestement illégales,

- condamner le Syndicat d'avoir à procéder sans délai à son adhésion et à son inscription sur la liste des moniteurs 'renfort saison'au même rang et avec la même ancienneté que celles qu'elle possédait lors de son premier refus de renouvellement (place n° 058 derrière Gaël Marchand et devant Damien B...), sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à compter de la signification de l'arrêt,

- condamner le Syndicat à lui payer les sommes de :

14.700,04 euros en réparation de sa perte de revenus arrêtée en fin de saison 2015/2016, à actualiser, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

25.000 euros en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

8.000 euros en réparation de la résistance abusive,

5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Syndicat aux dépens.

Elle fait valoir que :

- la décision du 19 juillet 2012 est sans objet pour avoir a été prise par anticipation, alors qu'elle n'avait formé aucune demande de renouvellement d'adhésion,

- la décision contrevient aux dispositions conventionnelles et statutaires (articles 8 des statuts et 3 de la convention),

- la décision est empreinte d'excès de pouvoir, en ce qu'elle constitue une véritable sanction qui ne pouvait pas être prise par le comité de direction,

- les allégations qu'elle contient sont mensongères,

- elle a, en réalité, été évincée en raison du climat de tension qui existait au sein de l'ESF,

- la décision du 15 juillet 2013 est irrégulière en ce qu'elle n'est pas motivée,

- elle rapporte la preuve des éléments faisant présumer l'existence de faits discriminatoires.

Elle expose qu'empêchée d'enseigner sous le label ESF, elle n'a eu d'autre choix que de se tourner vers l'Ecole de Ski Internationale dont les conditions professionnelles et financières sont bien moins intéressantes.

Dans ses dernières conclusions du 1er août 2016, le Syndicat demande à la cour de :

- confirmer le jugement,

- subsidiairement, rejeter la demande de réintégration et n'accorder des dommages et intérêts que dans la stricte mesure des préjudices moral et financier qui seront justifiés,

- condamner Marjorie Z... à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Il fait valoir que :

- les deux décisions ont été prises par le comité de gestion de l'ESF en application des dispositions de la convention, notamment de l'article 3,

- les décisions sont motivées par les comportements, attitudes et propos déviants de Marjorie Z... vis à vis de la clientèle, des autres moniteurs, de la direction et du comité de gestion (cf attestations).

Il relève, subsidiairement, que Marjorie Z... a pu adhérer dès la saison 2012/2013 à l'Ecole de Ski Internationale au sein de la station d'Orcières Merlette et qu'elle ne justifie pas du préjudice financier allégué.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 avril 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.

Marjorie Z... conteste les décisions du comité de direction du Syndicat des 19 juillet 2012 et du 15 juillet 2013 refusant de renouveler son adhésion au Syndicat en qualité de moniteur 'renfort saison'.

Les critères d'adhésion et de renouvellement au Syndicat sont définis à l'article 8 des statuts en ces termes :

'Il faut jouir de ses droits civiques et soit être moniteur de ski détenteur d'un diplôme d'Etat ou d'un diplôme reconnu en équivalence (...), soit être stagiaire effectuant son stage en situation dans le cadre des dispositions légales en vigueur.

Tous les membres doivent effectuer par écrit une demande annuelle pour adhérer au Syndicat local et au SNMSF'.

En application de l'article 9 des statuts, les membres actifs ' dont font partie les moniteurs 'renfort' ' doivent respecter notamment la convention entre les moniteurs et les règles déontologiques.

En vertu de l'article 3 b de la convention, l'admission ou le non renouvellement sont décidés par le comité de direction 'selon les besoins de l'ESF'.

En l'occurrence, il est constant que, dès qu'elle a obtenu son diplôme en novembre 2010, Marjorie Z... a exercé au sein de l'ESF comme 'renfort saison' pendant les deux saisons 2010/2011 et 2011/2012.

Avant même de recevoir une demande de renouvellement d'adhésion, le comité de gestion a, lors de sa réunion du 15 juin 2012, décidé de ne pas maintenir Marjorie Z... dans l'effectif de l'école à compter de la saison suivante.

Le président du Syndicat lui a adressé, le 19 juillet 2012, un courrier ainsi rédigé :

'Dans la perspective d'une demande de ta part en vue du renouvellement de ton adhésion au sein de l'ESF d'Orcières, il nous a semblé utile d'anticiper lors de la réunion du comité de direction du 15 juin 2012.

Après deux saisons réalisées au sein de notre groupement, les sérieuses difficultés constatées dans la relation avec la clientèle et avec les autres professionnels constituent un problème majeur.

Nous avions pris soin de te rapporter les plaintes des clients, ton langage souvent inapproprié et les retards au départ des cours pour te demander d'adopter une attitude plus adaptée. Malgré les remarques qui t'ont été faites par le directeur technique ou moi-même, aucune amélioration comportementale n'a pu être notée.

Aussi, conformément à notre convention les membres du comité de direction ont donc décidé de ne pas donner une suite favorable à ton renouvellement d'adhésion'.

Marjorie Z... a, conformément aux dispositions statutaires, renouvelé sa demande d'adhésion pour la saison 2013/2014, par courrier du 13 mai 2013.

Par courrier du 15 juillet 2013, le président du Syndicat l'a informée que les membres du comité de direction, réunis le 12 juillet 2013, n'avaient 'pas souhaité donner une suite favorable à (sa) requête'.

Il ressort des termes mêmes des deux décisions contestées que les refus successifs opposés à Marjorie Z... ne sont aucunement motivés par 'les besoins de l'ESF', mais par des considérations d'ordre disciplinaire tenant aux difficultés dans la relation avec la clientèle et avec les autres professionnels, à l'attitude au travail sur lesquelles le Syndicat insiste tout particulièrement dans ses conclusions devant la cour.

Or les statuts prévoient aux articles 43 et suivants, une procédure spécifique d'exclusion pour des motifs disciplinaires, tels que le manque d'honorabilité portant atteinte matériellement ou moralement au Syndicat local ou national, l'irrespect des statuts et/ou de la convention, avec convocation écrite de l'intéressé devant le comité de direction.

La convocation doit contenir les motifs de celle-ci ainsi que l'indication que le dossier est consultable au siège du Syndicat et que l'intéressé peut être assisté par une personne de son choix.

L'exclusion définitive, sanction la plus élevée dans l'échelle des sanctions prévues par les statuts, ne peut être prononcée que par l'assemblée générale sur proposition du comité de direction.

En l'espèce, le comité de direction a agi en dehors de ses attributions, sans aucun respect de la procédure susvisée, et Marjorie Z... est bien fondée à soutenir que les décisions d'exclusion sont irrégulières.

Il y a lieu par conséquent de les annuler et d'ordonner le renouvellement de l'adhésion de Marjorie Z... au Syndicat et sa réintégration au sein de l'ESF dans la situation qui était la sienne lors de la prise de décision, c'est-à-dire comme 'renfort saison', sans qu'il soit nécessaire de prévoir une astreinte.

Les décisions annulées ont privé Marjorie Z... de toute possibilité d'exercer son activité au sein de l'ESF à compter de la saison 2012/2013.

Alors qu'elle avait perçu, pour la saison 2011/2012, un revenu net imposable de 15.014,34 euros pour 502,50 heures travaillées au sein de l'ESF, soit une rémunération horaire nette de 29,88 euros, elle justifie avoir gagné au sein de l'Ecole de Ski Internationale la somme de 16.065 euros pour 535,50 heures travaillées lors de la saison 2012/2013, soit une somme légèrement supérieure à celle qu'elle aurait perçu, pour la même durée de travail, au sein de l'ESF (535,50 x 29,88 euros = 16.000,36 euros).

Elle ne justifie pas plus d'une perte de revenu sur les années suivantes et sera donc déboutée de sa demande au titre du préjudice économique.

Il est en revanche indéniable que les deux refus d'adhésion lui ont causé un préjudice moral qui sera indemnisé à hauteur de 4.000 euros.

Compte-tenu du contexte du litige et de son issue, Marjorie Z... ne caractérise pas l'abus dans la résistance qu'elle reproche au Syndicat au soutien de sa demande de dommages et intérêts, laquelle n'est pas fondée et doit être rejetée.

L'équité commande que le Syndicat lui verse une indemnité de procédure pour les frais exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement,

- Infirme le jugement déféré,

statuant à nouveau,

- Annule la décision prise par le Syndicat de ne pas renouveler l'adhésion de Marjorie Z... pour la saison 2012/2013,

- Ordonne au Syndicat de renouveler l'adhésion de Marjorie Z... et de la réintégrer au sein de l'ESF en qualité de moniteur 'renfort saison',

- Condamne le Syndicat à payer à Marjorie Z... la somme de 4.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- Déboute Marjorie Z... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice économique et résistance abusive,

- Condamne le Syndicat à payer à Marjorie Z... la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne le Syndicat aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame COMBES, Président, et par Madame GATTI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 16/01521
Date de la décision : 12/06/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 01, arrêt n°16/01521 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-12;16.01521 ?
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