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18/10/2018 | FRANCE | N°16/05708

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 18 octobre 2018, 16/05708


DD



N° RG 16/05708



N° Minute :













































































Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :









Me Wilfried L...



la SCP X... K... & ASSOCIES









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 18 OCTOBRE 2018







Appel d'une décision (N° RG 15/00700)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 28 novembre 2016

suivant déclaration d'appel du 07 Décembre 2016



APPELANTE :



Association APAJH 38 ESAT CPDS représenté par son représentant légal en exercice domicilié [......

DD

N° RG 16/05708

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Wilfried L...

la SCP X... K... & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 18 OCTOBRE 2018

Appel d'une décision (N° RG 15/00700)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 28 novembre 2016

suivant déclaration d'appel du 07 Décembre 2016

APPELANTE :

Association APAJH 38 ESAT CPDS représenté par son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Xavier Y... de la SCP JACQUES BARTHELEMY & ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de STRASBOURG,

ayant pour avocat postulant Me Wilfried L..., avocat inscrit au barreau de GRENOBLE,

INTIME :

Monsieur Hédi Z...

[...]

comparant en personne, assisté de Me Peggy X... de la SCP X... K... & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ:

Mme Dominique DUBOIS, Présidente,

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

M. Jérôme A..., Magistrat honoraire,

Assistés lors des débats de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffier.

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Juillet 2018,

Madame Dominique DUBOIS est entendue en son rapport.

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 18 Octobre 2018.

L'arrêt a été rendu le 18 Octobre 2018.

M. Z... a été embauché le 2 février 2009 en qualité de moniteur d'atelier au sein de l'APAJH 38 qui gère une ESAT CDPS établissement et service d'aide par le travail.
Il travaillait au sein de l'atelier routage.
En septembre 2010, il a entrepris une formation pour devenir éducateur technique spécialisé et a obtenu son diplôme en juin 2013.

Placé en arrêt de travail à compter du 23 août 2014, il a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble par requête du 6 décembre 2013, réceptionnée au greffe le 3 janvier 2014 pour voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et voir condamner son employeur à lui payer des indemnités de rupture et des dommages et intérêts.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2014, M. Z... prenait acte de la rupture de son contrat de travail à effet au 25 août 2014.

Par jugement de départage du 28 novembre 2016, le conseil a:

- dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné l'APAJH 38 à lui payer les sommes de:

- 4127,98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 412,79 € au titre des congés payés afférents

- 5159,97 € au titre de l'indemnité de licenciement,

outre intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2014

- 12.400 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, toutes causes de préjudice confondus

- 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Débouté M. Z... de ses autres demandes, notamment de harcèlement moral et de frais de déplacement professionnels

Condamné l'employeur aux dépens.

L'employeur a interjeté appel le 7 décembre 2016.

Dans ses conclusions du 19 juin 2017, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des moyens et des demandes ,il demande à la cour de:

- Dire et juger la prise d'acte de M Z... injustifiée et infondée

- Dire et juger que cette prise d'acte doit produire les effets d'une démission

-Infirmer le jugement rendu

En conséquence:

- Débouter M. Z... de l'intégralité de ses demandes

- Le condamner à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions du 21 avril 2017, M. Z... demande à la cour de:

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné 1'l'APAJH 38 ESAT CPDS à payer à Monsieur Hédi Z... les sommes de:

4127.98 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

412.79 € bruts au titre des congés payés incidents,

5159.97 € nets à titre d'indemnité de licenciement

outre intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2014,

1200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Sauf à:

A titre principal,

DIRE ET JUGER que Monsieur Hédi Z... a été victime de harcèlement moral;

En conséquence,

DIRE ET JUGER que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul ;

CONDAMNER I' l'APAJH 38 ESAT CPDS à payer à Monsieur Hédi Z... la somme de 20 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul;

A titre subsidiaire, si la Cour devait confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit et jugé que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse:

CONDAMNER l'APAJH 38 ESAT CPDS à payer à Monsieur Hédi Z... de plus justes dommages et intérêts en lui versant la somme de 20 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;

En tout état de cause,

CONDAMNER l'APAJH 38 ESAT CPDS à paver à Monsieur Hédi Z... les sommes de:

- 3 400 € bruts à titre de contrepartie aux temps de déplacements professionnels;

- 5000 € nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral;

- 10 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour manquements à l' obligation de loyauté;

CONDAMNER I' l'APAJH 38 ESAT CPDS à payer à Monsieur Hédi Z... la somme de 2000 € sur le fondement de 1'article 700 du Code de procédure civile;

ASSORTIR les condamnations des intérêts légaux;

CONDAMNER l'APAJH 38 ESAT CPDS aux entiers dépens.

M. Z... reproche à son employeur les manquements suivants:

- le non-respect des engagements contractuels

- des conditions de travail délétères

S'agissant du non-respect des engagements contractuels, l'employeur expose que le salarié a été reclassé sur un poste d'éducateur technique spécialisé car sa qualification et son classement indiciaire ont été modifiés sur son bulletin de salaire de septembre 2013 alors qu'il a transmis son diplôme en août 2013.

La fiche de poste d'éducateur technique spécialisé a été construite avec le salarié lors de 8 réunions début 2013 en tenant compte du référentiel de formation, de l'organigramme et des spécificités de l'établissement.

Par ailleurs la fiche de poste n'est pas une obligation légale et il n'existe pas de fiche de poste réglementaire.

M. Z... a refusé de signer la fiche de poste en juin 2013;
Il était positionné hiérarchiquement sous le moniteur principal, M. B... et non sous Madame C...qui n'était pas sa supérieure hiérarchique.

Le salarié soutient quant à lui qu'il a été maintenu dans ses fonctions de moniteur d'atelier en lui proposant tout au plus d'occuper certaines seulement des fonctions d'éducateur spécialisé.

La partie relations avec les entreprises était totalement absente de sa mission .

Il se réfère au référentiels relatifs aux éducateurs techniques spécialisés.

Raison pour laquelle il a refusé de signer sa fiche de poste.

Ainsi l'employeur a manqué à son obligation de loyauté en ne respectant pas les engagements pris auprès du salarié.

Par ailleurs l'entreprise n'a pas indemnisé M. Z... de ses frais de déplacement pour se rendre une semaine sur trois à Lyon pour suivre sa formation d'éducateur spécialisé en infraction aux dispositions de l'article L 3121-4 du code du travail.

Quant aux conditions de travail, l'employeur expose que le salarié se contredit car il a postulé à l'offre de chef de service le 7 octobre 2013 en affirmant qu'il avait un avenir dans l'établissement, qu'il était reconnu en tant que professionnel et exerçait sa mission d'éducateur spécialisé, que ses conditions de travail sont motivantes et que la direction est soutenante et bienveillante.

Il ne produit aucun certificat médical venant confirmer une atteinte à sa santé.

L'absence de M. D..., chef de service, en maladie, a été compensée partiellement par l'embauche de M. B...;
M. Z... n'a pas remplacé M. D... pendant son arrêt maladie.

Les moniteurs d'atelier sont polyvalents au sein des divers ateliers.

Madame C... a soutenu le salarié dans son parcours de formation alors qu'il remettait en cause les autres services de l'établissement.

M. Z... n'avait pas les compétences ni la stature pour obtenir le poste de chef de service en octobre 2013.

L'APAJH 38 qui a connu des changements importants au cours de la période 2008-2013 a mis en place un management adapté en faisant intervenir l'inspection du travail et la médecine du travail et a pris en compte leur regard sur la structure.

Elle a mis en place un nombre important de mesures en 2013 pour ce faire et les salariés sont satisfaits de leurs conditions de travail.

La mise à jour du document unique d'évaluation des risques professionnels a été faite en mars 2014 après que de nombreuses actions aient été réalisées en 2013.

Il en résulte que M. Z... ne prouve aucun manquement grave se l'employeur ayant empêché la poursuite du contrat de travail.

M. Z... a fait une prise d'acte après avoir été recruté sur un poste d'éducateur technique spécialisé en août 2014.

Le salarié expose que l'absentéisme croissant, l'absence de remplacement des salariés absents et la création de nouvelles activités, sans embauche de personnels, ni de travailleurs, augmentaient inexorablement la charge de travail des salariés présents.

Il a ainsi remplacé M. D... son chef de service absent depuis juillet 2011 avec deux de ses collègues et n'a pas été augmenté ou perçu de prime pour autant alors qu'un autre de ses collègues,

M. E..., l'a été.

Il a dû tourner sur les différents ateliers du CPDS alors que tel n'était pas le cas auparavant.

Il a alerté son employeur par courrier du 22 mars 2013 sans qu'aucune mesure sérieuse ne soit prise.

La médecine du travail est intervenue à plusieurs reprises pour alerter l'employeur sur la dégradation des conditions de travail des salariés et demander à l'employeur d'agir, de même que les délégués du personnel, le CHSCT et l'inspection du travail.

Le DUER établi en mars 2013 n'était pas mis à jour par l'employeur malgré plusieurs contrôles de l'inspection du travail.

Aucune réponse à la demande de formation d'encadrant du salarié en juin 2013 n'était donnée.

Le CPDS proposait à M. Z... une rupture conventionnelle en juillet 2013 qu'il refusait.

Sa candidature au poste de chef de service était rejetée sans entretien et explication.

Il était pris à partie par Madame C....
Son état de santé se dégradait et il était placé en arrêt maladie le 5 novembre 2013.

M. Z... a donc été victime d'un harcèlement moral et d'une exécution déloyale du contrat de travail.

L'employeur a également manqué à son obligation de sécurité résultat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2018 et l'audience de plaidoirie fixée au 4 juillet 2018.

SUR CE

- Sur le harcèlement moral:

En application de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Ainsi, la reconnaissance du harcèlement moral suppose la réunion de trois conditions cumulatives:

- Des agissements répétés

- Une dégradation des conditions de travail

- Une atteinte aux droits, à la dignité, à la santé physique ou mentale ou à l'avenir professionnel du salarié

En application de l'article L 1154-1 du code du travail, il appartient au salarié d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, le juge doit dire s'ils laissent présumer un harcèlement moral et, dans ce cas, l'employeur doit démontrer que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié soutient que:

- L'employeur n'a pas respecté ses engagements contractuels en ne lui confiant pas un poste d'éducateur spécialisé bien qu'il ait obtenu son diplôme.

- Ses conditions de travail se sont dégradées. Il a subi une surcharge de travail, des changements intempestifs et des injonctions qui l'ont atteint dans sa santé.

1) Le non-respect des engagements contractuels pris envers le salarié:

Il est constant que le salarié, qui avait été embauché comme moniteur d'atelier à temps plein, a suivi, dans le cadre du plan de formation, une formation pour obtenir la qualification d'éducateur technique spécialisé et qu'il a eu son diplôme en juin 2013;
Il n'est pas contesté que l'ancien directeur M. F..., en poste jusqu'à fin décembre 2012, avait pris l'engagement dès l'obtention de ce diplôme de définir un poste en adéquation avec le diplôme obtenu.

Une attestation signée par M. F... et M. Z... en date du 18 mars 2010 est versée aux débats.

Le salarié a transmis son diplôme à son employeur en août 2013 et sa qualification ainsi que son classement indiciaire ont été modifiés sur son bulletin de salaire de septembre 2013.

Le référentiel métier indique que l'éducateur technique spécialisé est un travailleur social . «Il contribue à l'intégration sociale et à l'insertion professionnelle de personnes handicapées ou en difficulté, par l'encadrement d'activités techniques et par des relations avec les entreprises de son environnement au cours d'un accompagnement professionnel, technique et social.»

La fiche de poste présentée au salarié et qu'il a refusé de signer comprend trois grands paragraphes: activités de prise en charge de la personne handicapée, activités de production, concertation et communication.

Cette fiche de poste, comme l'a relevé le premier juge , correspond en plus détaillé et plus développé à la fiche de poste de moniteur d'atelier établie le 28 janvier 2009 par M. F... annexé au contrat de travail de M. Z....

La partie relation avec les entreprises est totalement absente de la mission du salarié , ce que reconnaît l'employeur qui a établi des comparaisons avec le référentiel professionnel, la fiche de poste de l'APAJH 38 ESAT CPDS, et la fiche de poste de ESTHI, employeur actuel de M. Z....

A l'APAJH 38 ESAT CPDS, cette mission de démarche partenariale avec les milieux sociaux professionnels est confiée à une chargée de mission insertion (CMI), en l'espèce Madame C..., démarche validée par l'ARS.

Lors d'une réunion des délégués du personnel du 5 septembre 2013, il était demandé quel était le positionnement hiérarchique de M. Z... avec le moniteur principal et M. G..., nouveau directeur à compter du 1er janvier 2013, répondait «inchangé».
Il résulte donc de ces éléments que malgré l'obtention de son diplôme, les fonctions de M. Z... n'ont pas changé, contrairement aux assurances données antérieurement.
Ce fait est donc établi.

M. Z... qui s'est rendu une semaine sur trois pendant trois ans pour suivre sa formation à Lyon, n'a pas perçu le moindre dédommagement en temps ou en indemnité.
Ce fait est établi.

2) La dégradation des conditions de travail:

Dès le mois de juillet 2012, le médecin du travail écrit au CPDS pour signaler que les agents de maîtrise notent depuis 1 an la dégradation de leurs conditions de travail avec surcharge de travail , perte de confiance envers les collègues, reproches injustifiés de la direction, soulignant que les conséquences en termes de santé étaient graves et concluant qu'il était urgent de faire un état des lieux et de faire intervenir un cabinet spécialisé.
Ce conseil sera renouvelé le 16 mai 2014 par le médecin du travail.

En octobre 2012, les délégués du personnel avaient demandé l'intervention d'un médiateur afin de gérer les tensions au sein du CPDS.

Des réunions du CHSCT s'étaient tenues en 2012 et 2013 pour alerter sur les conditions de travail et l'inspection du travail est intervenue à plusieurs reprises les 3 et 9 mai 2012, le 25 octobre 2012, le 21 janvier 2014 pour finalement dresser procès-verbal à l'encontre de M. G..., responsable pénal.
De ces éléments, il résulte que la relation de travail au sein de l'ESAT était dégradée mais pour autant, il n'est pas démontré que cette situation concernait directement M. Z..., lequel a été en formation pendant trois ans et a postulé au poste de chef de service en octobre 2013, se projetant dans l'établissement à plus long terme, affirmant qu'il est reconnu en tant que professionnel et qu'il exerce sa mission d'éducateur spécialisé, que ses conditions de travail sont motivantes, que la Direction est soutenante et bienveillante.

M D..., chef de service en arrêt maladie à compter de juillet 2011, a été remplacé seulement par le recrutement d'un moniteur principal fin 2013, M. B....
Ce fait est établi.
M. Z... n'a pas été gratifié d'une prime alors que M. E... l'a été.
Ce fait est établi.

De retour de sa formation professionnelle, M. Z... qui travaillait dans l'atelier routage a été amené à changer d'atelier à plusieurs reprises avec des changements fréquents.

Ce fait est établi.

M. Z... sera déclaré incompatible avec l'activité SRPM par le médecin du travail.

L'employeur mettra en doute le certificat médical et demandera confirmation du médecin.
Ce fait est établi.

Le 22 mars 2013, M. Z... se plaindra par courrier de sa situation auprès de l'employeur et notamment des changements fréquents ainsi que de la dégradation de son état de santé.

Ce fait est établi.

Le 24 juin 2013, M. Z... faisait une demande de formation d'encadrant et de responsable d'unité et d'intervention sociale à laquelle il n'était donnée aucune réponse.
Le 22 juillet 2013, l'employeur lui proposait de réfléchir à une demande de rupture conventionnelle qu'il refusait.
Ce fait est établi.

Au cours du mois d'octobre, le salarié faisait acte de candidature à un poste de chef de service et sa candidature était rejetée par l'employeur sans explication ni entretien le jour même.
Ce fait est établi.

Au vu des éléments produits par le salarié, la communication avec Madame C..., chargée de mission insertion , était difficile.

Le 17 octobre 2013, M. Z... demandait à rencontrer Madame H... au service RH qui lui répondait qu'elle n'était pas habilitée à le recevoir.
Ce fait est établi.

Le 4 octobre 2013, le médecin du travail adressait M. Z... à un confrère, le salarié disant être mal dans son travail, dormant mal, se disant stressé, les tensions avec la direction étant selon lui fréquentes'

Ce fait est établi.

Le médecin traitant du salarié lui prescrivait un arrêt de travail à compter du 5 novembre 2013;
Ce fait est établi.

Ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral.

L'employeur justifie le fait que la fiche de poste de M. Z... n'ait pas véritablement été modifiée par le fait qu'avant son embauche, la partie insertion était déjà confiée à Madame C..., en poste depuis 1 an, et qu'il s'agit d'un choix des ESAT de l'Isère d'avoir des responsables d'insertion puisque début 2000 , ces postes étaient validés et financés par les pouvoirs publics ainsi que par l'ARS.

Par conséquent, ce choix est fondé sur des éléments objectifs,étrangers à tout harcèlement moral.

Sur les frais de déplacement, l'employeur justifie qu'il avait été convenu avec M. Z... avant qu'il ne la commence, ce qu'il avait accepté, le coût de la formation étant importante.

Par ailleurs, M. Z... qui ne fournit aucun planning, n'établit pas que ses déplacements professionnels pour se rendre à cette formation, ne coïncidaient pas avec ses horaires de travail ni qu'il ne rentrait pas chez lui ce soir.
Cet élément est donc étranger à toute situation de harcèlement moral.

Quant à la dégradation des conditions de travail, l'employeur souligne que le salarié avait fait avant même la fin de sa formation d'éducateur technique spécialisé et l'obtention de son diplôme une nouvelle demande de formation et que par conséquent l'employeur était en droit de ne pas y donner suite.

S'agissant de la candidature au poste de chef de service, en octobre 2013, le salarié n'avait que trois mois d'expérience en tant qu'éducateur spécialisé, métier qui ne prépare pas à un poste de chef de service, raison pour laquelle le salarié avait fait une demande de formation CAFERUIS (certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale).

Le refus de l'employeur est donc justifié par des raisons objectives.

Quant à la prime reçue par M. E..., l'employeur justifie que M. Z... était en formation, que Madame J... I... était absente quelques jours et que M. E... a géré le fonctionnement du routage sans opérer un remplacement, raison pour laquelle seul ce salarié obtiendra une prime.

Cet élément est donc étranger à toute situation de harcèlement moral.

L'employeur justifie par ailleurs que M. Z... n'a pas remplacé son chef de service absent pour maladie par de nombreuses pièces et que le niveau de production a d'ailleurs chuté , les résultats du CPDS étant fortement déficitaires en 2011 et 2012 et le chiffe d'affaires du Routage en baisse constante de 2011 à 2013.

S'agissant de la polyvalence au sein des ateliers, elle a été mise en place courant 2013 au cours de séances de travail et M. Z... y a participé en tant que futur éducateur spécialisé susceptible d'accompagner l'ensemble des travailleurs en situation de handicap, ce qui était noté dans le courrier qui lui était adressé le 5 avril 2013.

Cette décision de l'employeur, afin de développer la polyvalence des moniteurs pour assurer la continuité du service dans le cadre des absences pour congés, RTT, formation ou maladie, est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute situation de harcèlement moral.

6 salariés sur 7 étaient soumis à cette polyvalence et non seulement 3.

Par ailleurs, l'avis du médecin du travail a été pris en considération, en ce qui concerne le salarié s'agissant de l'activité SRPM qui lui est contre-indiquée.

Il résulte par ailleurs des emails échangés entre Madame C... et M. Z... que les échanges sont cordiaux et collaboratifs malgré les divergences.

Enfin, l'employeur répondra à la lettre du salarié du 22 mars 2013 dans un courrier détaillé du 5 avril 2013, recevra à plusieurs reprises Z..., et fera d'autres propositions de rendez-vous.
Il justifie ainsi avoir adopté une démarche exempte de harcèlement moral à l'encontre de son salarié.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il ne résulte d'agissements répétés caractérisant une situation de harcèlement moral.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

- Subsidiairement, sur le manquement de l'employeur à son obligation de loyauté et à son obligation de sécurité de résultat:

Il résulte des éléments développés ci-dessus que malgré l'obtention de son diplôme, les fonctions de M. Z... n'ont pas changé, contrairement aux assurances données antérieurement et que l'employeur n'a pas respecté ses engagements.

En effet, l'employeur savait déjà qu'il avait une chargée de mission insertion avant de prendre cet engagement avec le salarié.
Et par ailleurs, il ne pouvait engager son salarié à entreprendre une formation longue et difficile pour finalement le cantonner dans ses anciennes fonctions en lui donnant seulement la rémunération correspondante.
Il s'en suit que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a décidé que l'employeur a manqué à son obligation de loyauté vis-à-vis de son salarié.

Quant aux méthodes de management inadaptées, comme il a été relevé ci-dessus, le salarié n'établit pas qu'elles l'ont concerné spécifiquement.

De plus, l'employeur justifie avoir pris des mesures pour répondre aux alertes de la médecine du travail et de l'inspection du travail qui ont porté leurs fruits début 2014 ainsi que le montre l'évaluation externe de l'établissement par le cabinet EQM et les entretiens des salariés.

Ainsi l'employeur a mené de très nombreuses actions, faisant intervenir un cabinet spécialisé en cohésion d'équipe, ACP Management, menant des entretiens individuels avec chaque salarié, analysant les fiches de poste en concertation avec les salariés, remettant en forme l'organigramme, modifiant les horaires de travail comme demandé par l'inspection du travail, actualisant le projet d'établissement, présentation et validation de ce travail à l'ensemble des salariés au cours d'une réunion institutionnelle en octobre 2013, menant réunions techniques, éducatives, médico-sociales, administratives, des délégués du personnel, réunions institutionnelles, droit d'expression des salariés, conduisant des action de formation spécifiques pour accompagner les professionnels dans leurs missions éducatives auprès des personnes accueillies, mise en place d'une démarche Qualité entre autres, le tout afin de prévenir, éliminer ou réduire les problèmes de stress au travail.

Le DUERP a été établi en mars 2013 et actualisé en mars 2014 au vu des actions réalisées dans l'intervalle.
Enfin, le tribunal de police a relaxé M. G... le 7 septembre 2016 des infractions à la législation du travail.
Par conséquent, le manquement à l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur, s'agissant de

M. Z..., n'est pas fondé.

- Sur la prise d'acte:

En droit, le salarié qui a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation du contrat de travail en raison des manquements de l'employeur peut prendre acte de la rupture de son contrat en cours d'instance pour les mêmes motifs.
Le juge doit se prononcer uniquement sur la prise d'acte en prenant en considération aussi bien les faits invoqués à l'appui de la demande initiale en résiliation judiciaire que ceux invoqués au soutien de la prise d'acte.

Les griefs retenus doivent être suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Il a été retenu que l'employeur avait manqué à son obligation de loyauté envers son salarié.

M. Z..., malgré l'obtention de son diplôme d'éducateur et en dépit des engagements faits par l'employeur, était cantonné comme auparavant dans des fonctions de moniteur d'atelier.
Ce manquement est suffisamment grave pour que le salarié prenne acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le premier juge a fait une exacte appréciation des droits et du préjudice du salarié au vu du fait que

M. Z... avait trouvé un travail d'éducateur spécialisé avant sa prise d'acte.

- Sur la demande au titre des frais professionnels:

Sur ce point, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et moyens de première instance.
Le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la cour adopte. En l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves, le jugement sera confirmé.

- Sur les autres demandes:

L'employeur qui succombe supportera les entiers dépens.
Aucune considération d'équité ne commande d'allouer aux parties une somme au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au Greffe après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE l'APAJH 38 ESAT aux entiers dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 16/05708
Date de la décision : 18/10/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 13, arrêt n°16/05708 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-18;16.05708 ?
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