La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/05/2022 | FRANCE | N°20/01215

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 12 mai 2022, 20/01215


C7



N° RG 20/01215



N° Portalis DBVM-V-B7E-KMW3



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL GIBERT-COLPIN



la SELARL FTN



la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT


r>AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00222)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 13 février 2020

suivant déclaration d'appel du 12 mars 2020





APPELANTE :



Madame [G] [B]

Les Charmettes - Bâtiment A1

2 rue Mariu...

C7

N° RG 20/01215

N° Portalis DBVM-V-B7E-KMW3

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL GIBERT-COLPIN

la SELARL FTN

la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00222)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 13 février 2020

suivant déclaration d'appel du 12 mars 2020

APPELANTE :

Madame [G] [B]

Les Charmettes - Bâtiment A1

2 rue Marius Charles

38420 DOMENE

représentée par Me Sylvie GIBERT de la SELARL GIBERT-COLPIN, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEES :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

168-170 rue Victor-Hugo

92309 LEVALLOIS-PERRET

représentée par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE

SCP BTSG, ès qualités de liquidateur de la SASU SKYLAR FRANCE,

15 rue de l'Hôtel de Ville

92200 NEUILLY-SUR-SEINE

représentée par Me Catherine GOARANT de la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Eric LENARD, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 mars 2022,

Madame FRESSARD, Présidente, chargée du rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [G] [B] a été engagée par contrat de travail écrit à durée indéterminée le 4 novembre 2010 avec une prise d'effet au 15 novembre 2010 par la SOCIETE PRIVE DE GESTION DE PATRIMOINE, devenue par la suite la société SKYLAR France, en qualité d'assistante de gestion, statut non cadre, catégorie I-B.

La société SKYLAR France avait son siège social à Paris mais Madame [B] exerçait son activité dans les locaux de la société situés à Grenoble.

Par avenant en date du 26 mai 2014, les parties sont convenues que Madame [B] accédait au statut de « cadre relevant de la catégorie III B au sein de la classification de la convention collective applicable'» et que la durée du travail de Madame [B] serait régie par une convention de forfait en jours sur l'année de 217 jours.

L'employeur a convoqué Madame [B] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique fixé au 24 mai 2018.

Le 29 mai 2018 Madame [B] a accepté d'adhérer au CSP, son contrat de travail prenant fin d'un commun accord le 19 juin 2018.

La société SKYLAR a régularisé une déclaration de cessation des paiements auprès du tribunal de commerce de Paris le 9 avril 2019, lequel a prononcé sa liquidation judiciaire le 23 avril 2019 et fixé la date de cessation des paiements au 9 avril 2019.

Mme [B], qui avait saisi le conseil de prud'hommes le 08 mars 2018 notamment d'une demande de résiliation judiciaire et d'un rappel de salaires, sollicitait, aux termes de ses dernières écritures, outre des dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination salariale, que son licenciement économique soit jugé sans cause réelle et sérieuse et le versement des indemnités afférentes.

Le conseil des prud'hommes de Grenoble a rendu son jugement le 13 février 2020, aux termes duquel il a débouté la salariée de ses demandes au titre du harcèlement, de la discrimination et de la rupture du contrat de travail mais a fixé les créances de Mme [G] [B] au passif de la SAS SKYLAR aux sommes suivantes, le salaire brut mensuel moyen de la salariée étant fixé à 3256 € :

- 27 371, 46 € bruts au titre de rappel de salaires

- 2 737, 14 au titre des congés payés afférents

- 2 958, 66 € nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement

- 1 539, 13 € bruts à titre de rappel de l'indemnité de congés payés

- 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a déclaré les créances opposables à l'AGS CGEA ILE DE F RANCE OUEST, dit que l'AGS doit sa garantie dans les conditions légales et mis les dépens à la charge de la liquidation.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec accusés de réception des 17 et 22 février 2020 ; Mme [G] [B] en a régulièrement relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction du 12 mars 2020.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2020, Mme [G] [B] sollicite de la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- jugé que la société SKYLAR France n'a pas respecté les salaires minima conventionnels, à son égard,

- ordonné l'établissement d'un bulletin de salaire rectificatif et un dossier de CSP rectificatif,

- dit que le jugement était opposable à l'AGS et que cette dernière devait apporter sa garantie,

- condamné la société SKYLAR France à la somme de l500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les dépens à la charge de la liquidation,

Réformer le jugement en ce qu'il a :

- limité le montant des condamnations aux sommes de :

- 27 371,46 euros brut à titre de rappel de salaire,

- 2 737,14 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 2 958,66 euros nets à titre de rappel de l'indemnité de licenciement,

- 1 539,13 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

- débouté Mme [B] de la somme de 10 000,00 euros nets de dommages intérêts pour harcèlement moral.

- débouté Mme [B] de sa demande au titre de rappel de salaire soit la somme de 102,20 euros bruts et 10,22 euros bruts de congés payés afférents suite à la suppression irrégulière de 2 jours de congés payés supplémentaires (dénonciation d'usage).

- débouté Mme [B] de sa demande de 62 304,53 euros nets à titre de dommages intérêts eu égard à la discrimination salariale subie.

- rejeté à titre principal, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [B] à la date du 19 juin 2018.

- jugé à titre subsidiaire que le licenciement pour motif économique était fondé.

- débouté Mme [B] de sa demande de 26 792,00 euros nets de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Et statuant à nouveau :

Sur le non-respect du salaire mensuel minimum garanti la convention collective des marchés financiers:

- Juger que Mme [B] exerçait les attributions relevant de la catégorie III B,

- Juger que l'avenant au contrat de travail signé au 26 mai 2014 octroyait à Madame [G] [B] la catégorie III B,

- Fixer le salaire mensuel moyen de la salariée à hauteur de 3.349,00 euros bruts ou à titre subsidiaire à 3 256 € bruts (salaire minima prévus par la convention collective).

Par voie de conséquence, inscrire au passif de la société SKYLAR France la condamnation aux

sommes suivantes :

- 30 185,96 € bruts ou, à titre subsidiaire 27 371,46 € bruts, à titre de rappel de salaire afférent au non-respect du salaire mensuel minimum prévu par la convention collective applicable (du 1er mars 2015 au 19 juin 2018),

- 3 018,59 € bruts ou, à titre subsidiaire 2 737,14 € bruts, à titre des congés payés afférents,

- 3 322,92 € nets ou, à titre subsidiaire 2 958,66 € nets, à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

- 1 751,93 € bruts ou, à titre subsidiaire 1539,13 € à titre de rappel de l'indemnité compensatrice de congés payés perçue lors du solde de tout compte,

- Ordonner l'établissement d'un bulletin de paie rectificatif et du dossier de CSP rectificatif et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard par document manquant, à compter d'un délai de 15 jours suite à compter de la signification de l'arrêt, la cour d'appel se réservant le droit de liquider l'astreinte.

-Débouter la société SKYLAR France de sa demande d'infirmation du jugement l'ayant condamnée au paiement des rappels de salaires (27 371,46 € bruts), congés payés afférents (2 737,14 € bruts), rappel d'indemnité de licenciement (2 958,66 €) et de rappel d'indemnité de congés payés (1 539,13 € bruts),

Sur le harcèlement moral subi par la salariée en vue de la voir signer un protocole transactionnel ainsi qu'un avenant au contrat de travail :

- juger que Madame [G] [B] a subi des pressions et l'insistance de la société SKYLAR France afin de faire signer à un accord transactionnel inférieur au montant de ses droits et un avenant à son contrat de travail de rétrogradation,

-inscrire au passif de la société SKYLAR France la somme de 10 000 euros nets à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice lié au harcèlement moral subi,

Sur la suppression irrégulière des 2 jours de congés payés supplémentaires offerts aux salariés (selon usage)

-juger que la société SKYLAR France n'a pas respecté la procédure de dénonciation d'usage,

-inscrire au passif de la société SKYLAR France les sommes suivantes :

102,20 euros à titre de rappels de salaire,

10,22 euros au titre des congés payés y afférents,

Sur la discrimination salariale subie par Mme [B] au sein de la Société SKYLAR France :

-juger que Madame [G] [B] avait le même poste et les mêmes attributions que Monsieur [J],

-juger que Monsieur [J] percevait un salaire largement supérieur que celui perçu par Madame [B]

-juger que la société SKYLAR France ne justifie pas, par des éléments objectifs, cette différence de rémunération,

- juger que la société SKYLAR France n'a pas respecté les principes légaux d'égalité entre les hommes et les femmes et d'égalité salariale entre les hommes et les femmes,

-par conséquent, juger que Madame [G] [B] a subi une discrimination salariale,

-inscrire au passif de la société SKYLAR France la somme de 62 304, 53 Euros nets à titre de dommages-intérêts eu égard à la discrimination salariale subie.

Sur la rupture du contrat de travail:

A titre principal, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [B] aux torts de la société SKYLAR France, à la date du 19juin 2018 :

- Juger que la Société SKYLAR France a commis des manquements graves et n'a pas respecté ses obligations légales, conventionnelles et contractuelles, empêchant la poursuite du contrat de travail de Mme [B]

- Prononcer la. résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [G] [B] aux torts de la société SKYLAR France à la date du 19 juin 2018,

- inscrire au passif de la société SKYLAR France la condamnation à la somme suivante :

- 26 792,00 euros nets à titre de dommages-intérêts (8 mois) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

A titre subsidiaire, si la Cour d'appel ne prononçait pas la résiliation judiciaire du contrat de travail:

- juger que la société SKYLAR France n'a pas respecté son obligation de recherche de reclassement,

- juger que la société SKYLAR France ne justifie pas de difficultés économiques réelles et sérieuses au moment de la rupture du contrat de travail de Mme [B],

- juger que la rupture du contrat de travail de Mme [B] suite à son adhésion au CSP ne repose pas sur un motif économique réel et sérieux ;

- inscrire au passif de la société SKYLAR France la condamnation à la somme suivante :

- 26 792,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (8 mois).

En tout état de cause

- Débouter la société SKYLAR France de l'intégralité de ses demandes,

- inscrire au passif de la société SKYLAR France la somme de 2.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'Assurance de Garantie des Salaires et dire qu'elle garantira le paiement des condamnations prononcées par la Cour d'Appel en cas d'impécuniosité de la Société SKYLAR France

- inscrire au passif la condamnation de la Société SKYLAR France aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2021, la SCP BTSG, ès qualités de liquidateur de la société SKYLAR FRANCE, sollicite de la cour de :

- INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation

judiciaire les sommes suivantes :

- 27.371, 46 € au titre de rappel de salaires

- 2.737, 14 au titre des congés payés afférents

- 2.958, 66 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement

- 1.539, 13 € à titre de rappel de l'indemnité de congés payés

Statuant à nouveau :

- REJETER l'ensemble des demandes de Madame [B] ;

Pour le surplus :

- CONFIMER le jugement entrepris ;

- REJETER l'ensemble des demandes de Mme [B].

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 janvier 2022, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF OUEST sollicite de la cour de :

Réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE le 13 février 2020 en ce qu'il a fixé le salaire mensuel moyen de Madame [G] [B] à la somme de 3.256 € bruts et fixé les créances de Madame [G] [B] au passif de la SASU SKYLAR, en liquidation judiciaire, représentée par la SCP BTSG, ès-qualité de mandataire-liquidateur, aux sommes suivantes:

' 27.371,46 € bruts à titre de rappel de salaire

' 2.737,14 € bruts au titre des congés payés afférents

' 2.958,66 € nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement

' 1.539,13 € bruts à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés

' 1.500,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Ordonner le remboursement, au profit de l'AGS, des sommes par elle avancées à tort au profit de Madame [G] [B], soit la somme de 29.304 € bruts.

Confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE le 13 février 2020 pour le surplus, sauf en ce qu'il a dit que l'AGS devait sa garantie sur la base d'indemnités salariales nettes.

Statuant à nouveau,

Dire et juger que l'AGS doit sa garantie dans la limite du plafond applicable, ce compris les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou conventionnelle imposées par la loi, à savoir 79.464 € bruts compte tenu du plafond 6 applicable en l'espèce.

A titre subsidiaire,

Si la Cour devait réformer le jugement entrepris et faire droit à la demande formée par Madame [G] [B] pour harcèlement moral,

Débouter Madame [G] [B] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral en l'absence de tout élément de nature à établir la réalité et encore moins le quantum du préjudice qu'elle prétend avoir subi pour harcèlement moral ou, à tout le moins, ramener le montant des dommages et intérêts sollicités à une somme symbolique.

Si la Cour devait réformer le jugement entrepris et faire droit, sur le principe, à la demande de résiliation judiciaire formée par Madame [G] [B] :

Ramener le montant des dommages et intérêts sollicités par Madame [G] [B] pour licenciement abusif au plancher bas du barème issu des dispositions de l'article L.1235-3 du Code du Travail, soit 3 mois de salaire (7.750 € ou 10.047 € selon le salaire de référence retenu par le Conseil).

A titre infiniment subsidiaire

Ramener le montant des dommages et intérêts sollicités pour licenciement abusif au barème haut fixé par l'article L.1235-3 du Code du Travail, soit 8 mois de salaire (20.666,64 € ou 26.792 € selon le salaire de référence retenu).

En tout état de cause,

Débouter le salarié de sa demande de condamnation à l'encontre de l'AGS, la décision à intervenir pouvant seulement lui être déclarée opposable (Cass. Soc. 26 janvier 2000 n° 494 P / Cass. Soc. 18 mars 2008 n° 554 FD), celle-ci étant attraite en la cause sur le fondement de l'article L.625-3 du Code de Commerce.

Débouter le salarié de toutes demandes qui excèderaient le plafond applicable en application des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du Code du Travail, en l'espèce le plafond 06, lequel inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposée par la Loi ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du Code Général des Impôts.

Débouter le salarié de toute demande directe à l'encontre de l'AGS, l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pouvant s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire (Art. L. 3253-20 du Code du Travail), les intérêts légaux étant arrêtés au jour du jugement déclaratif (Art. L.621-48 du Code de Commerce).

Débouter le salarié de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, cette créance ne constituant pas une créance découlant du contrat de travail et, partant, se situe hors le champ de garantie de l'AGS ce conformément aux dispositions de l'article L.3253-6 du Code du Travail.

Débouter le salarié de sa demande de condamnation de l'AGS aux dépens

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 janvier 2022 et l'affaire fixée pour être plaidée à l'audience du 02 mars 2022. La décision a été mise en délibéré le 12 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le non-respect du salaire mensuel minimum garanti par la convention collective des marchés financiers

Sous la réserve de l'hypothèse où l'employeur confère contractuellement une qualification professionnelle supérieure aux fonctions exercées, la classification se détermine par les fonctions réellement exercées à titre principal par le salarié.

En cas de contestation sur la catégorie professionnelle dont relève le salarié, il appartient au juge de rechercher la nature de l'emploi effectivement occupé par ce dernier et la qualification qu'il requiert, la charge de la preuve des fonctions réellement exercées pesant en principe sur celui qui revendique une classification autre que celle qui a été attribuée au salarié.

Il apparaît, au cas particulier, que suivant contrat de travail à durée indéterminée formalisé le 4 novembre 2010, Madame [B] a été engagée à compter du 15 novembre 2020 en qualité d'assistante de gestion «'statut non-cadre, catégorie I-B'». Et, il est constant qu'aux termes de l'avenant signé le 26 mai 2014, les parties ont convenu d'un commun accord, à l'initiative de l'employeur, de modifier le statut de la salariée et de lui accorder le «'statut de cadre relevant de la catégorie III B'», la durée du travail étant, dès lors, soumise à une convention de forfait en jours.

Et, l'ensemble des bulletins de salaire, produits aux débats, porte la mention de cette nouvelle classification.

Or, la société, qui allègue que la mention de la catégorie III B était en réalité une erreur de plume qu'elle aurait tentée de corriger sans succès alors que rien, dans le parcours de Madame [B], ne laisse apparaître qu'elle aurait exercé des tâches relevant de cette classification et du salaire qu'elle revendique, ne produit aux débats aucun élément suffisamment probant au soutien de ses prétentions.

En effet, les seules productions du CV de la salariée et du «'tableau des critères classants'» de la convention collective nationale des activités de marchés financiers, en l'absence de tout élément décrivant les tâches effectivement réalisées par la salariée, sont insuffisantes à établir que Mme [B] se serait vu attribuer par erreur la classification qui résulte de manière précise et concordante tant de l'avenant dûment signé par les parties que de l'ensemble des bulletins de paie.

Mme [B] produit la grille des salaires minima hiérarchiques tels que fixés par la CCN des marchés financiers, dont la société n'établit pas, à hauteur de cour, qu'elle ne serait pas applicable à la salariée, et qui établit l'évolution des minima de la façon suivante':

-3 256 € à compter du 1er juillet 2010 selon la nouvelle convention collective du 11 juin 2010, ou à compter du 4 mars 2012 suite à l'arrêté d'extension de cette convention

-3 282 € à compter du 1er janvier 2013 selon l'accord du 17 décembre 2012, non étendu

-3 315 € à compter du 1er janvier 2014 selon l'accord du 17 décembre 2013, non étendu

-3 332 € à compter du 1er janvier 2017 selon l'accord du 8 décembre 2016, non étendu

-3 349 € à compter du 1er janvier 2018 selon l'accord du 16 janvier 2018, non étendu'

alors que Mme [B] était rémunérée à hauteur de 2 455 € bruts (de juin 2014 à mars 2015) puis de 2 583,33 € à compter d'avril 2015.

Dès lors, la salariée est bien-fondée en ses demandes de rappels de salaire sur la période litigieuse de mars 2015 à juin 2018, selon des modalités de calcul qui ne sont pas critiquées par la société intimée, que la cour évalue à la somme totale de 30'185,96 € bruts outre 3018,59 € au titre des congés payés afférents.

La décision entreprise est infirmée en ce sens.

Sur le harcèlement moral

L'article L.1152-1 du code du travail énonce qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1152-2 du même code dispose qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article 1152-4 du code du travail précise que l'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Sont considérés comme harcèlement moral notamment des pratiques persécutrices, des attitudes et/ou des propos dégradants, des pratiques punitives, notamment des sanctions disciplinaires injustifiées, des retraits de fonction, des humiliations et des attributions de tâches sans rapport avec le poste.

La définition du harcèlement moral a été affinée en y incluant certaines méthodes de gestion en ce que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en 'uvre par un supérieur hiérarchique lorsqu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Le harcèlement moral est sanctionné même en l'absence de tout élément intentionnel.

Le harcèlement peut émaner de l'employeur lui-même ou d'un autre salarié de l'entreprise.

Il n'est en outre pas nécessaire que le préjudice se réalise. Il suffit pour le juge de constater la possibilité d'une dégradation de la situation du salarié.

A ce titre, il doit être pris en compte non seulement les avis du médecin du travail mais également ceux du médecin traitant du salarié.

L'article L 1154-1 du code du travail, relatif à la charge de la preuve du harcèlement moral, dispose que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3 et L 1153-1 à L 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

La seule obligation du salarié est d'établir la matérialité des faits précis et concordants, à charge pour le juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble et non considérés isolément, permettent de supposer l'existence d'un harcèlement, le juge ne pouvant se fonder uniquement sur l'état de santé du salarié mais devant pour autant le prendre en considération.

En l'espèce, Mme [B] allègue avoir subi, de la part de son employeur, des pressions inacceptables en vue de lui faire signer un protocole transactionnel ainsi qu'un avenant au contrat de travail de rétrogradation, constitutifs d'un harcèlement moral et qui ont eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail et de sa santé.

Et, elle produit à l'appui de ses allégations la seule attestation de M.[Y] [D], son supérieur hiérarchique, qui témoigne en ces termes': « J'ai été le témoin direct des faits suivants':

A la demande de Monsieur [N] [T] et de Madame [S] [L], PDG et Directrice Générale de la SPGP, Madame [G] [B] a été promue comme Cadre III B en date du 1er juin 2014.

Alerté par Madame [B] du fait que ses salaires n'étaient pas revalorisés et restaient identiques, je suis intervenu de très nombreuses fois auprès de la Direction Générale afin que cette situation ne perdure pas davantage.

Il m'était répondu que la société était en grande mutation, ouvrait des bureaux à l'étranger et tout cela allait être régularisé. Mes interventions étaient réalisées tous les trimestres. J'ai aussi interpellé notre collègue Monsieur [M] [V], délégué du personnel.

Devenu délégué du personnel suppléant enfin d'année 2015, j'ai interpellé à de très nombreuses reprises Monsieur [T] de ces dysfonctionnements.

J'ai été le témoin direct des pressions psychologiques réalisées par Monsieur [I] et Monsieur [W] afin que [G] signe un avenant de régularisation dans lequel elle voyait sa situation être résumée à une erreur administrative en avril et mai 2017.[']'».

La salariée produit également':

- Le compte-rendu intitulé «'REVUE ANNUELLE GESTION PRIVEE'» daté du 15 mai 2017 qui signale, aux termes de cette évaluation, que «'Lors de l'entretien (le premier depuis 2011), il est constaté que suite au passage en catégorie cadre (juin 2014) de [G], réalisé par [S] [L], il n 'est pas fait application de son changement de situation. Il convient d'apporter les correctifs nécessaires»

- Un protocole d'accord transactionnel daté du 28 juin 2017 réglant le litige lié à la classification de la salariée et un avenant n°2 au contrat de travail, daté du même jour, prévoyant la rétrogradation du statut cadre de la salariée, de la catégorie III B en catégorie III A, avec un salaire mensuel de 2 800 € bruts, documents ne portant aucune signature d'aucune des parties

- Des échanges de courriels cordiaux entre Mme [B] et Mme [C], entre le 2 juin et le 10 juillet 2017, relatifs à la proposition de signature, par l'employeur à la salariée, des deux documents susvisés

- Un brouillon de projet de courrier à adresser à la direction qui aurait été soumis à la salariée par son nouveau supérieur hiérarchique, sans valeur probante suffisante sur l'origine et la datation de ce document

- L'arrêt de travail de la salariée à compter du 12 septembre 2017, portant mention d'une souffrance morale liée au travail, et ayant été reconnu par la CPAM, le 09 février 2018, en rapport avec une affection longue durée

- Le courrier que la salariée a adressé à son employeur le 14 février 2018, aux termes duquel elle lui reproche les pressions inacceptables qu'il a exercées sur elle pour obtenir la signature des documents «'projet d'accord transactionnel'» et «'avenant au contrat de travail'», propositions qu'elle ne peut pas accepter alors qu'elle sollicite la régularisation de ses salaires.

Cependant, ces seuls éléments pris dans leur ensemble, s'ils établissent un désaccord profond entre l'employeur et la salariée autour de sa classification et d'une proposition d'accord transactionnel que Mme [B] a maintenu ne pas vouloir signer, sont insuffisants à établir la matérialité d'éléments de faits précis et concordants, constitutifs de pressions inacceptables laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Le harcèlement moral n'étant pas établi, la salariée est déboutée de ses demandes à ce titre et la décision entreprise est confirmée de ce chef.

Sur la discrimination salariale

Il convient de rappeler qu'il appartient à l'employeur d'assurer l'égalité de rémunération entre tous ses salariés, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique.

Et, en application de l'article 1353 du code civil, le salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement en matière de salaire doit soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération. Il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er'de la loi n°'2008-496 du 27'mai'2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article'L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'action, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son sexe.

L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n°'2008-496 du 27'mai'2008, au vu desquels, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Ces principes sont repris par les articles L.1142-1 et L.1144-1 du code du travail relatifs à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Et l'article L. 1142-1 dispose que, sous réserve des dispositions particulière du présent code, nul ne peut'[']: 3) prendre en considération du sexe ou de la grossesse toutes mesures, notamment en matière de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation.

L'article L. 1144-1 dispose enfin que lorsque survient un litige relatif à l'application des dispositions des articles L. 1142-1 et L. 1142-2, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, la situation de famille ou la grossesse.

En l'espèce, Mme [B] invoque la différence importante entre son salaire mensuel et celui de son homologue, [X] [J], alors qu'ils avaient le même poste d'assistant de gestion et les mêmes attributions.

Pour étayer ses affirmations, Mme [B] produit notamment':

- Son contrat de travail signé le 4 novembre 2010, qu'elle compare à celui de M.[J] signé le 26 mars 2007, dont il ressort qu'elle avait pour fonctions, aux termes de l'article 2 du contrat, en qualité de non-cadre, de':

« Assister les gestionnaires de la société,

Assurer les relations avec les dépositaires et les teneurs de compte,

Assurer les relations avec la clientèle,

Assurer la passation des ordres de bourse,

Effectuer le pointage du journal de bourse,

Contrôler les informations d'instructions auprès des dépositaires,

Assurer toutes les tâches administratives afférentes à ces fonctions. »

avec une rémunération annuelle brute de 28'000 €, la durée du travail étant de 35 heures par semaine et le lieu de travail fixé à Montbonnot Saint Martin (38),

tandis que M.[J] était chargé, aux termes de l'article 1er de son CDI, en qualité de cadre autonome, de :

«'assister les gestionnaires de la société, relations avec les dépositaires, relations avec la clientèle, tâches administratives, passation des ordres en bourse, pointage du journal de bourse'»,

«'contrôler les confirmations d'instruction auprès des dépositaires, relation avec la clientèle, et toutes les tâches administratives s'y référent'»

avec une rémunération mensuelle brute sur douze mois de 4 166,67 €, la durée annuelle de travail étant fixée à 214 jours.

- Ses bulletins de salaire ainsi que ceux de M.[J] établissant, alors qu'ils ont l'un et l'autre la qualification de cadre, qu'en juin 2018 ce dernier percevait une rémunération brute de 4833,33 € quand Mme [B] percevait, en mai 2018, un salaire brut de 2 583,33 €, soit une différence mensuelle de 2 500 € bruts

- Les deux «'compte rendus de la visite du bureau de Grenoble'» des 2 et'3 décembre 2013 et des 8 au 10 mars 2017, dont il ressort que dès le 6 janvier 2014, M.[V] évaluait ainsi la salariée': «'L'agence de Grenoble a été créée en novembre-décembre 2010. Dès son arrivée, Madame [B] s'est très vite impliquée dans la charge de travail qui lui revenait, ne venant pas du secteur financier. Elle a suivi rapidement une formation à Paris sur l'outil SOFI qu'elle ne connaissait pas. Cela lui a permis de mettre en place rapidement et d'organiser l'ensemble du bureau de Grenoble. Depuis ces trois années, la fonction et la mission travail réalisée par l'assistant de gestion sont globalement satisfaisante, elle est toujours disponible et prête à suivre des formations si nécessaire. Le teneur de compte m'a confirmé du bon contact avec le bureau Grenoble, pas de remarques, travail satisfaisant et rapide.['] Par ailleurs il faut également noter l'absence de réclamations de la clientèle. Ces arguments montrent bien une bonne connaissance et une stabilité la clientèle par le gérant et de l'assistante de gestion'», Mme [B] tirant argument de ces commentaires pour mettre en avant que son absence d'expérience dans le secteur boursier à l'embauche a été très rapidement comblée par ses acquis, au cours de sa collaboration.

Le 5 avril 2017, M.[V] concluait, dans les mêmes termes,'que Mme [B] effectuait de manière satisfaisante les tâches qui lui étaient dévolues.

Mme [B] établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser supposer l'existence d'une discrimination à son encontre.

L'employeur fait valoir que Mme [B] ne prouve nullement l'existence de cette discrimination salariale, se contentant de comparer sa situation avec celle de Monsieur [J], alors que les situations de ces deux salariés ne sont en rien comparables.

Et, la société SKYLAR produit aux débats différents éléments dont il ressort que M. [J] a été embauché le 26 mars 2007 en qualité d'assistant de gestion du bureau de Paris, sous la qualification de cadre, alors qu'il était âgé de 46 ans et qu'il disposait, ainsi que l'établit son CV, d'une expérience de plus de 20 ans dans le secteur du marché financier puisqu'il occupait précédemment les fonctions de responsable compensation et conservation depuis 1997 chez ING.

L'extrait du document intitulé «'réactualisation du programme d'activité de SKYLAR France'» établit que M.[J] a été ensuite nommé «'contrôleur des risques'» de la société SKYLAR dès décembre 2016.

Ce salarié est titulaire d'un DUT de gestion appliquée aux petites et moyennes organisations ainsi que d'un brevet professionnel de Banque, obtenu en 1994.

Madame [B], quant à elle, a été engagée en 2010 alors qu'elle était âgée de 31 ans, soit seize ans de moins que Monsieur [J]. Et son CV établit qu'elle a préparé un BTS de comptabilité et gestion entre 1999 et 2002 et qu'elle ne disposait d'aucune expérience dans le domaine des activités des marchés financiers lors de son embauche, ayant exercé des fonctions d'assistante comptable, comptable et assistante en gestion administrative et financière entre 1999 et 2010.

L'employeur démontre ainsi que les différences de rémunération entre les deux salariés comparés, telles qu'établies par Mme [B], sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la salariée appelante et M.[J] ne se trouvant pas dans la même situation personnelle compte tenu de leur âge et de leur d'ancienneté dans la société SKYLAR, ni au même niveau de qualification et d'expérience professionnelle.

Les demandes relatives à la discrimination doivent, par conséquent, être rejetées.

Le jugement est confirmé à cet égard.

Sur la suppression de deux jours de congés payés supplémentaires

Il est de principe que pour dénoncer un usage ou un engagement unilatéral, l'employeur doit en informer les représentants du personnel et chaque salarié individuellement, suffisamment longtemps à l'avance pour permettre d'éventuelles négociations. En principe l'information des représentants du personnel doit intervenir préalablement à celle des salariés. Le salarié perd ensuite définitivement les avantages dont il bénéficiait en vertu de cet usage.

En l'espèce, Madame [B] sollicite de la cour qu'elle fixe une créance d'un montant de 102,20 € à titre de rappel de salaire relatif à la suppression irrégulière de deux jours de congés payés.

Et, si Madame [B] a parfaitement été informée, par courriel en date du 25 février 2014, que la direction avait «'décidé de mettre fin à l'usage existant depuis plusieurs années au sein de SPGP consistant à accorder gracieusement deux jours de congés payés supplémentaires à ses salariés'» et que «'Dorénavant et à compter de l'année 2014 le vendredi saint et le 26 décembre seraient travaillés et non récupérés'», l'employeur ne verse au débat aucun élément établissant que les représentants du personnel ont bien été informés de cette décision de dénoncer cet usage.

Dès lors, à défaut de preuve de cette information, la dénonciation est irrégulière et Madame [B] est bien-fondée à solliciter un rappel de salaire correspondant à cet usage et aux congés payés afférents.

La décision entreprise est infirmée en ce que la société SKYLAR France est condamnée à verser à Madame [B] la somme de 102,20 € à titre de rappel de salaire outre 10,22 € au titre des congés payés y afférents, cette condamnation devant être inscrite au passif de la société.

Sur la résiliation judiciaire

Sur le fondement de l'article 1224 du code civil, (dans ses dispositions applicables à compter du 1er octobre 2016) il relève du pouvoir souverain des juges du fond d'apprécier si l'inexécution de certaines des dispositions résultant d'un contrat synallagmatique présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation'; les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

Lorsque le salarié n'est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement.

En l'espèce, il résulte de l'ensemble des énonciations qui précèdent que la société SKYLAR France a manqué à certaines de ses obligations légales, conventionnelles et contractuelles en ce qu'elle n'a pas rémunéré Madame [B] pendant plusieurs années, et ce malgré les réclamations fondées de cette dernière, sur la base des salaires minimums conventionnels correspondant à la classification qui lui avait été octroyée dès le mois de mai 2014, la société ayant également supprimé un usage d'octroi de deux jours de congés payés annuels sans respecter la procédure de dénonciation.

Or, le non-respect d'une de ses obligations essentielles par l'employeur, qui n'a pas versé à sa salariée les rémunérations qui lui étaient dues, ainsi que ses réticences à régulariser la situation, font ressortir l'existence d'un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation contractuelle.

Madame [B] est, ainsi, bien-fondée à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, à la date du 19 juin 2018 à laquelle son licenciement a été arrêté.

En conséquence de cette résiliation judiciaire, la salariée appelante est bien-fondée à obtenir de la société SKYLAR le versement de la somme de 3 322,92 € à titre de rappel d'indemnité de licenciement outre la somme de 1751,93 € bruts à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés.

Par ailleurs, en application de l'article L1235-3 du code du travail, le montant des dommages et intérêts en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un salarié est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés à l'alinéa 2.

Au vu des éléments produits sur l'étendue de son préjudice caractérisé par le fait que Mme [B] avait plus de 7 ans d'ancienneté au moment de son licenciement, qu'elle percevait une rémunération moyenne de 3 349 euros par mois, qu'elle a été licenciée alors qu'elle a toujours donné pleinement satisfaction à son employeur et qu'elle était toujours en recherche d'emploi en juin 2020, aucune information relative à sa situation professionnelle plus récente n'étant versée aux débats, une exacte évaluation conduit la cour à fixer à 26 792 € le montant des dommages et intérêts qui l'indemniseront justement.

Le jugement entrepris est infirmé en ce sens.

Sur la garantie de l'UNEDIC DELEGATION de l'AGS IDF OUEST':

L'UNEDIC délégation de l'AGS IDF OUEST doit sa garantie dans les conditions fixées au dispositif du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires':

Mme [B] est valablement fondée à solliciter l'établissement, par le mandataire judiciaire, d'un bulletin de salaire rectificatif conforme aux énonciations du présent arrêt.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas, pour autant, d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.

L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure allouée à Mme [B] à hauteur de 1 500 euros en première instance et de lui allouer la même somme à titre complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Au visa des articles 639 et 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris, il convient de dire que les dépens de première instance et d'appel seront réglés en frais privilégiés de procédure collective suivie contre la société SKYLAR France, partie perdante à l'instance.

PAR CES MOTIFS'

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire dans les limites de l'appel après en avoir délibéré

CONFIRME le jugement entrepris en celles de ses dispositions ayant débouté Mme [G] [B] de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral et de la discrimination salariale et ayant statué sur la garantie de l'AGS, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

L'INFIRME pour le surplus

Statuant à nouveau et y ajoutant,

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [G] [B] à la date du 19 juin 2018 produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

FIXE au passif de la procédure collective suivie contre la SASU SKYLAR France au bénéfice de Mme [G] [B] les sommes suivantes':

- 30 185,96 € bruts à titre de rappel de salaire sur la base du salaire mensuel minimum prévu par la convention collective applicable d'un montant de 3'349 € bruts (du 1er mars 2015 au 19 juin 2018),

- 3 018,59 € bruts à titre des congés payés afférents,

- 3 322,92 € nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

- 1 751,93 € bruts à titre de rappel de l'indemnité compensatrice de congés payés

- 26'792 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 102,20 € bruts au titre des deux jours de congés irrégulièrement supprimés outre 10,22 € bruts au titre des congés payés afférents

-1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

ORDONNE l'établissement d'un bulletin de paie rectificatif conforme aux énonciations du présent arrêt

DIT n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte

DECLARE le présent arrêt opposable à l'UNEDIC délégation de l'AGS CGEA IDF OUEST

DIT que l'UNEDIC délégation de l'AGS CGEA IDF OUEST doit sa garantie dans les conditions des articles L 3253-6 et suivants et D 3253-5 du code du travail (montants en bruts, prélèvements à la source inclus)

DIT que les dépens d'appel seront réglés en frais privilégiés de procédure collective.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 20/01215
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.01215 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award