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12/05/2022 | FRANCE | N°20/01271

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 12 mai 2022, 20/01271


C9



N° RG 20/01271



N° Portalis DBVM-V-B7E-KM2I



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL LEXAN SOCIAL



Me Carole GIACOMINI





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



CO

UR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00283)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 17 février 2020

suivant déclaration d'appel du 16 mars 2020





APPELANTE :



SCM ALPES SOINS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qual...

C9

N° RG 20/01271

N° Portalis DBVM-V-B7E-KM2I

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAN SOCIAL

Me Carole GIACOMINI

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00283)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 17 février 2020

suivant déclaration d'appel du 16 mars 2020

APPELANTE :

SCM ALPES SOINS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

2 boulevard Maréchal Foch

38000 GRENOBLE

représentée par Me Emilie ALLAIN de la SELARL LEXAN SOCIAL, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Madame [J] [V]

née le 10 novembre 1960 à OPPIDO MAMERTINA (Italie)

700 rue de la République

38140 RENAGE

représentée par Me Carole GIACOMINI, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 mars 2022,

M. Frédéric BLANC, Conseiller, chargé du rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE :

Le 5 juillet 1994, Madame [J] [V] a été recrutée en contrat de travail à durée indéterminée en qualité de secrétaire par la SCM ALPES SOINS.

Plusieurs avenants à son contrat de travail ont été régularisés afin de modifier son temps de travail et la répartition de ses jours de travail.

Le lundi 22 janvier 2018, Madame [J] [V] a été convoquée par courrier remis en main propre à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave fixé au 1er février 2018.

Madame [J] [V] a été licenciée pour faute grave par courrier expédié par l'employeur le 9 février 2018 et distribué le 13 février.

Par requête reçue le 23 mars 2018, madame [J] [V] a saisi le conseil de prud'hommes de GRENOBLE afin que son licenciement soit jugé nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Suivant jugement en date du 17 février 2020, le conseil de prud'hommes de GRENOBLE a :

DIT le licenciement de Madame [J] [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [J] [V] les sommes suivantes :

-24.000,00 € (vingt quatre mille euros) net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-10.833,83 € (dix mille huit cent trente trois euros et quatre vingt trois centimes) net au titre de l'indemnité de licenciement,

-3.233,98 € (trois mille deux cent trente trois euros et quatre vingt dix huit centimes) brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

-323,40 € (trois cent vingt trois euros et quarante centimes) brut au titre des congés payés afférents,

-1 370,29 € (mille trois cent soixante dix euros et vingt neuf centimes) brut au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

-137,03 € (cent trente sept euros et trois centimes) brut au titre des congés payés afférents,

-1.200,00 € (mille deux cents euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

RAPPELLE que les sommes à caractère salarial bénéficient de l'exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution, en application de l'article R. 1454-28 du Code du travail, étant précisé que ces sommes sont assorties des intérêts de droit à compter du jour de la demande et que la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire à retenir est de 1.403,11 €,

LIMITE à cette disposition l'exécution provisoire de la présente décision,

ORDONNE à la SCM ALPES SOINS de remettre à Madame [J] [V] les documents de fin de contrat rectifiés (certificat de travail, attestation pôle emploi et solde de tout compte), ainsi que les fiches de paie afférentes aux condamnations salariales et indemnitaires, sans astreinte,

DÉBOUTE Madame [J] [V] de ses autres demandes,

DÉBOUTE la SCM ALPES SOINS de sa demande reconventionnelle,

ORDONNE à la SCM ALPES SOINS, en application de l'article L. 1235-4 du Code du Travail, de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Madame [J] [V], dans la limite de six mois,

DIT qu'une expédition certifiée conforme du présent jugement sera adressée par le greffe du Conseil à POLE EMPLOI,

CONDAMNE la SCM ALPES SOINS aux dépens.

La décision rendue a été notifiée par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 18 février 2020 par madame [J] [V] et le 19 février 2020 par la SCM ALPES SOINS.

Appel de la décision a été interjeté par'la S.C.M. ALPES SOINS SCM par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction le 16 mars 2020.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 février 2022, la S.C.M. ALPES SOINS SCM sollicite de la cour de':

A titre principal

DIRE ET JUGER que le licenciement pour faute grave prononcé par la société ALPES SOINS SCM à l'encontre de Madame [V] est fondé et justifié ;

En conséquence

INFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a décidé que le licenciement de Madame [V] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société ALPES SOINS SCM au paiement de diverses sommes à Madame [V],

DEBOUTER Madame [V] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la société ALPES SOINS SCM,

A titre subsidiaire

Si par l'impossible la cour devait considérer le licenciement de Madame [V] soit comme reposant sur une cause réelle et sérieuse, soit dépourvu de cause réelle et sérieuse :

REFORMER le jugement du Conseil de prud'hommes quant aux montants octroyés à Madame [V] à titre de rappel de salaire sur mise à pied, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

En conséquence

ORDONNER leur remplacement par les montants suivants :

-2.495,16 € brut au titre d'une indemnité compensatrice de préavis ;

-249,51 € brut au titre des congés payés afférents ;

-1.096,24 € brut au titre du rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire ;

-109,62 € brut au titre des congés payés afférents

-9.028,19 € net au titre de l'indemnité de licenciement.

CONSTATER l'absence de démonstration par Madame [V] de l'existence d'un préjudice subi du fait de son licenciement et, encore moins, à hauteur du montant exorbitant réclamé,

REDUIRE a de plus juste proportion les éventuels dommages et intérêts qui seraient accordés à Madame [V] si la Cour devait considérer son licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, le montant de 24.000 € octroyé en première instance ayant été calculé sur un salaire moyen faussement augmenté de 20 % et n'est aucunement justifié.

En tout état de cause

CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a refusé d'annuler le licenciement de Madame [V] et l'a débouté de sa demande d'indemnisation à ce titre,

CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a décidé que Madame [V] ne pouvait se prévaloir de la convention collective du personnel des cabinets médicaux et l'a débouté de sa demande de rappel de prime d'ancienneté,

CONSTATER l'absence de démonstration d'un préjudice moral qui aurait été subi par Madame [V] dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail ou en raison de prétendues circonstances vexatoires non établies ayant entouré son licenciement,

CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a débouté Madame [V] de sa demande de dommages et Intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires et pour préjudice moral,

INFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a condamné la société ALPES SOINS SCM à Madame [V] la somme de 1.200 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens,

INFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en ce qu'il a ordonné à la société ALPES SOINS SCM de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Madame [J] [V] et en ce qu'il a ordonné la rectification de documents,

DEBOUTER Madame [V] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la société ALPES SOINS SCM,

ORDONNER à Madame [V] le remboursement des sommes indument perçues de la part de la société ALPES SOINS SCM dans le cadre de l'exécution provisoire,

CONDAMNER Madame [V] à verser la société ALPES SOINS SCM une indemnité de 4.000,00€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER Madame [V] aux dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 février 2022, Madame [J] [V] sollicite de la cour de':

DÉCLARER recevable l'appel incident interjeté par Madame [V], et infirmant le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il n'a pas annulé le licenciement de Madame [V] en raison du fait qu'il est fondé sur son état de santé,

ANNULER le licenciement de Madame [V] en raison du fait qu'il est fondé sur son arrêt de travail pour maladie et donc son état de santé,

En conséquence,

CONDAMNER la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] la somme de 38.807,71€ net, à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire,

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de Madame [V] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais l'INFIRMER dans son quantum,

En conséquence,

CONDAMNER la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] la somme de 38.807,71€ net, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] les sommes suivantes :

-Indemnité de licenciement :10.833,83 € net

-Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) : 3.233,98 € brut

-Congés payés afférents : 323,40 € brut

-Rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 1.370,29 € brut

-Congés payés afférents : 137,03 € brut

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il n'a pas condamné la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] la somme de 30.000 € net, à titre de dommages-intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires et préjudice moral,

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il n'a pas condamné la SCM ALPES SOINS d'avoir à payer à Madame [V] la somme de 8.982,58 € brut, à titre de rappel de salaire sur prime d'ancienneté, outre 898,26 € brut au titre des congés payés afférents,

ORDONNER la remise des documents de fin de contrat rectifiés (certificat de travail, attestation Pôle Emploi, et solde de tout compte), et les fiches de paie afférentes aux condamnations salariales et indemnitaires prononcées, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir,

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [V] la somme de 1.200 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour les frais irrépétibles de première instance, ne correspondant pas à la totalité des sommes déboursées par cette dernière,

CONDAMNER la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [V] la somme de 3.000 €, au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour les frais irrépétibles de première instance,

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCM ALPES SOINS aux entiers dépens de première instance,

Y ajoutant,

CONDAMNER la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [V] la somme de 4.000 €, au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour les frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNER la SCM ALPES SOINS aux entiers dépens d'appel.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2022.

EXPOSE DES MOTIFS :

Sur le rappel de prime d'ancienneté :

L'article L 2261-1 du code du travail énonce que la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur.

En cas de pluralité d'activités rendant incertaine l'application de ce critère pour le rattachement d'une entreprise à un champ conventionnel, les conventions collectives et les accords professionnels peuvent, par des clauses réciproques et de nature identique, prévoir les conditions dans lesquelles l'entreprise détermine les conventions et accords qui lui sont applicables.

L'application d'une convention collective ne peut être déduite du seul indice tiré du code APE de l'employeur.

En cas de litige, le juge doit vérifier la nature véritable de l'activité principale de l'entreprise et apprécier les éléments de preuve apportés par l'employeur. (cass.soc. 19 janvier 1984 n°83-61056 , Bull V n°29 et cass.soc., 28 janvier 2015, pourvoi n° 13-23.550).

S'agissant des entreprises à activités multiples, la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur, les autres activités de l'entreprise n'étant pas prises en considération, pas plus que les fonctions assumées par les salariés. Lorsque l'entreprise exerce des activités commerciales, l'activité principale est en principe celle qui représente le chiffre d'affaires le plus élevé. Lorsqu'il s'agit d'une activité industrielle, l'activité principale est celle qui occupe le plus grand nombre de salariés.

D'autres critères, s'ils sont pertinents et se rattachent à la recherche de l'activité principale de l'entreprise, peuvent être pris en compte par le juge.

Dans l'hypothèse où les salariés exercent une activité nettement différenciée dans un centre d'activité autonome, une convention collective différente de celle applicable en vertu de l'activité principale peut s'appliquer aux salariés affectés dans ce centre d'activité autonome.

Les clauses d'attribution sont licites à condition qu'elles figurent dans chacune des conventions collectives concernées.

S'agissant du rôle du juge, si une partie invoque dans un litige une convention collective précise, le juge doit se procurer par tous moyens ce texte, en invitant, au besoin, les parties à lui en fournir un exemplaire.

En l'espèce, Madame [V] revendique l'application à son bénéfice de la convention collective nationale du personnel des cabinets médicaux au soutien de sa demande de rappel au titre de la prime d'ancienneté.

Elle développe, d'une première part, des moyens totalement inopérants tenant à l'incompétence professionnelle alléguée de l'expert comptable de la SCM ALPES SOINS ayant considéré qu'aucune convention collective particulière ne s'appliquait à l'entreprise et au fait que la SCM ait déclaré au registre du commerce et des sociétés une activité erronée de «'photocopie, la préparation de documents et autres activités spécialisées de soutien de bureau'» dès lors que ces éléments sont impropres à caractériser un rattachement ou non de l'activité principale exercée par l'entreprise à la convention collective revendiquée.

D'une seconde part, alors même que la SCM ALPES SOINS affirme qu'aucun membre de la structure n'a le titre de médecin, qu'elle n'exerce aucune activité médicale et qu'elle est une structure regroupant des infirmiers et kinésithérapeutes, Madame [V] ne conteste pas directement ce fait mais se limite, de manière générale, à indiquer que, nonobstant l'activité erronée déclarée au registre du commerce et des sociétés ayant généré un code NAF inexact pour l'entreprise par l'INSEE, la SCM ALPES SOINS est «'un cabinet regroupant des professionnels de santé exerçant sous forme libérale, essentiellement des infirmiers'».

A aucun moment, Madame [V] n'affirme que, sur la période visée par sa demande de rappel de prime, un médecin a travaillé au sein de la structure, les éléments produits et notamment les avenants des 1er avril 2000 et 1er décembre 2005 évoquant le docteur [G], étant antérieurs.

Il s'en déduit que l'activité principale de la SCM ne saurait être rattachée à l'activité visée à l'article 1er de la convention collective revendiquée.

Madame [V] se prévaut, certes, du fait que dans ses premières conclusions, déposées le 2 juillet 2018 devant le conseil de prud'hommes, la SCM ALPES SOINS a indiqué qu'elle appliquait la convention collective nationale du personnel des cabinets médicaux du 14 octobre 1981 mais ne tire pas les conséquences utiles de ses propres constatations en se prévalant, le cas échéant, d'un éventuel aveu judiciaire ou d'une possible application volontaire d'une convention collective, la cour n'étant pas autorisée à soulever d'office de tels moyens de droit, parfaitement hypothétiques au demeurant.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [J] [V] de sa demande de rappel de primes d'ancienneté.

Sur la nullité du licenciement :

l'article L1132-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 02 mars 2017 au 24 mai 2019 énonce que :

Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de (')de son état de santé, (').

L'article L1132-4 du code du travail prévoit que':

Toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.

L'article L 1133-3 énonce que':

Les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées.

L'article L 1134-1 du code du travail dispose que':

Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Au cas d'espèce, Madame [J] [V] établit matériellement les éléments de fait suivants :

- d'après ses bulletins de paie, elle a été en congés payés du 26 décembre 2017 au 3 janvier 2018, puis en arrêt maladie du 4 janvier au 14 janvier 2018, suite à des difficultés qu'elle présente elle-même, dans ses conclusions, comme personnelles. Madame [J] [V] a ensuite fait l'objet d'une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement, par courrier du 22 janvier 2018, avec mise à pied conservatoire ayant débouché sur un licenciement pour faute grave, dont le courrier a été expédié par l'employeur le 9 février 2018. Il s'est, dès lors, écoulé une semaine entre son retour d'arrêt maladie et l'engagement par l'employeur de la procédure disciplinaire ayant conduit à son licenciement pour faute grave

- d'après le compte-rendu de l'entretien préalable à son licenciement dressé par le conseiller extérieur, Monsieur [U] [B], ayant assisté la salariée le 01 février 2018, elle s'est plainte à son employeur dans les termes suivants «'je suis rentée de maladie pas de bonjour, sauf toi (Madame [C], représentant l'employeur). On m'ignore totalement, pour tant je suis rentrée de congés quand quelqu'un était maladie, je n'ai jamais mis la société en difficulté (...)'»

- le compte-rendu avancé par l'employeur du recadrage dans la lettre de licenciement, contesté dans son principe par la salariée qui n'établit pour autant pas qu'elle n'était pas la seule convoquée le 19 octobre 2017 mais que s'y trouvait également l'autre secrétaire, a été adressé par courriel de Madame [C] en date du 18 janvier 2018, peu ou prou trois mois après la date de la réunion, et trois jours après le retour de Madame [V] dans l'entreprise après son arrêt maladie

- Madame [V] produit un bon cadeau en date du 16 juin 2017, de son employeur, en remerciement de ses efforts pour la mise en oeuvre du logiciel VEGA et un bon cadeau de 60 euros émanant de «'toute l'équipe d'Alpes SOINS'», certes non daté mais lui souhaitant un joyeux noël et un bon début de nouvelle année

- il est produit aux débats deux avertissements par l'employeur, sur l'ensemble de la carrière de la salariée dans l'entreprise, qui a été recrutée le 5 juillet 1994, l'un en date du 14 octobre 2013, soit la veille de son départ en congé sabbatique, qui s'est déroulé du 15 octobre 2013 au 16 septembre 2014, étant relevé que Madame [V] indique, dans ses conclusions, avoir repris le travail en octobre 2014 mais que par courrier du 29 juillet 2013, elle avait informé son employeur d'un congé sabbatique jusqu'au 15 avril 2014, renouvelable 5 mois jusqu'au 15 septembre 2014.

Le second avertissement est en date du 14 novembre 2014, soit 2 mois après le retour de congé sabbatique de la salariée, étant relevé que ledit courrier est manifestement anti-daté car il vise des faits postérieurs jusqu'au 12 décembre 2014 et que la salariée produit un échange de courriels entre associés de la SCM des 14 et 15 décembre 2014 évoquant une version définitive du projet d'avertissement.

Ces faits objectivent matériellement, comme le soutient Madame [V], que les deux seules sanctions disciplinaires résultant de la procédure ont été notifiées par l'employeur peu de temps avant et après une absence de la salariée de l'entreprise.

La salariée produit également un courrier LRAR daté du 24 avril 2013, adressé non seulement à elle mais également à Madame [N], qui vise à mettre fin à la mauvaise ambiance, à la mésentente et aux difficultés relationnelles entre les deux salariées. Après avoir énoncé les mesures prises, il est précisé aux deux salariées, par l'employeur, : «'nous vous confirmons que votre travail a toujours été apprécié et il est évident que nous ferons tout pour satisfaire vos demandes, la bonne volonté de chacun étant garante de la bonne marche de l'entreprise'».

Ce courrier objective à la fois les difficultés relationnelles significatives entre les deux secrétaires, dont l'employeur était parfaitement informé, mais encore que, ce fait mis à part, la SCM ALPES SOINS a exprimé sa satisfaction quant au travail fourni par l'une et l'autre employées, et partant à Madame [V], et ce, quelques mois avant le premier avertissement du 14 octobre 2013, la veille de son congé sabbatique.

- Madame [V] objective, par la production d'un courriel que lui a adressé son employeur le 28 novembre 2014, que la SCM ALPES SOINS a manifestement rencontré des difficultés organisationnelles pendant le congé sabbatique de la salariée, sa collègue de travail, Madame [W] [N], avec laquelle il est, par ailleurs, mis en évidence des tensions et une mésentente récurrente depuis de nombreuses années, en lien avec la coordination du travail de chacune, alternant pour partie sur le même poste de travail, recommandant à son employeur, le 25 mars 2014, pour faire face à un grand retard dans le travail de secrétariat, une augmentation de leur temps de travail à chacune et une réorganisation de la répartition des tâches entre les deux postes et les gérants de la SCM expliquant à Madame [V] que «'l'augmentation du temps de travail durant ton absence concernaient [W] et ta deuxième remplaçante qui a eu quelques difficultés à surmonter le travail à faire et [W] a été très sollicitée pendant cette période. A ton retour, vous avez toutes les deux repris les heures initiales de votre contrat. Ensuite, nous avons rajouté 4 h à chacune de vous (tu étais d'accord pour les faire les samedis !) suite à votre réclamation. Tu as pris cette année sabbatique pour des raisons personnelles. Nous l'avons acceptées, mais cette absence nous a obligé de trouver par deux reprises une secrétaire pour te remplacer. Ces recherches nous ont demandé beaucoup de temps !'».

Madame [I], associée du cabinet, a par ailleurs évoqué, dans un courriel du 18 mai 2014, à la salariée, soit pendant son congé sabbatique, le retard dans le traitement des impayés ayant nécessité d'augmenter les heures de travail des deux secrétaires, précisant par ailleurs que le problème restait actuel, qui plus est, car les remplaçantes ne pouvaient être aussi efficaces, d'après Madame [I].

L'ensemble de ces éléments pris dans leur globalité laisse présumer l'existence d'une discrimination prohibée à raison de l'état de santé en ce que, seulement huit jours après un retour d'arrêt maladie ayant suivi une période de prise de congés payés, Madame [V], après 22 ans d'ancienneté, a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave, le courrier de licenciement évoquant un recadrage antérieur du 19 octobre 2017, dont le compte-rendu n'a été dressé que 3 mois plus tard, après son retour d'arrêt maladie, et ce, alors qu'il est objectivé que 4 ans auparavant, l'employeur a fait expressément part à la salariée des difficultés organisationnelles qu'avait posé son congé sabbatique et lui avait notifié, peu de temps avant et après cette absence, les deux seules sanctions disciplinaires autre que le licenciement pour faute grave dont il est fait état dans la procédure, sous forme d'avertissements.

La SCM ALPES SOINS n'apporte pas les justifications étrangères à toute discrimination prohibée permettant d'écarter avec certitude le fait que la décision de notifier son licenciement à Madame [V] n'a pas été en tout ou partie prise à raison de son arrêt maladie.

L'employeur établit certes à juste titre que par courrier du 14 octobre 2013, Madame [V], épouse [S], avait reconnu au moins en partie les faits qui lui étaient reprochés ou, à tout le moins, une part de responsabilité.

En revanche, le seul fait que les avertissements datés des 14 octobre 2013 et du 14 novembre 2014 (anti-daté) fassent état d'observations verbales et d'entretiens ne sauraient établir de manière certaine l'existence de recadrages antérieurs, l'employeur évoquant d'ailleurs, dans le courrier du 14 octobre 2013, une lettre sans expliciter à quoi il fait référence ni la produire aux débats.

L'employeur se prévaut du recadrage à faire de la salariée, qu'il a mentionné à son comptable dans un échange de courriels du 31 août 2017, suite à une intervention directe de Madame [V], épouse [S], auprès de ce prestataire, dans des termes manquant de retenue mais ne produit aucun courrier en ce sens, qu'il aurait adressé à la salariée.

Par ailleurs, la SCM ALPES SOINS n'apporte aucune explication au fait que l'entretien de recadrage dont elle se prévaut expressément dans la lettre de licenciement n'a donné lieu à la rédaction d'un compte-rendu que le 18 janvier 2018, soit trois mois après, au retour de congé maladie de la salariée et 4 jours avant l'engagement de la procédure de licenciement disciplinaire pour faute grave.

En outre, si la SCM ALPES SOINS ne reproche pas en tant que tel à la salariée les dysfonctionnements et les difficultés qu'elle a rencontrés à l'occasion du congé sabbatique de Madame [V], épouse [S], qu'elle avait accepté, il n'en demeure pas moins qu'elle l'a informée de manière circonstanciée des problèmes organisationnels sérieux que cela a posé et qu'un des griefs figurant dans l'avertissement du 14 octobre 2013 est en lien direct avec le remplacement de la salariée pendant son arrêt maladie, l'employeur rendant la salariée responsable du départ d'une de ses remplaçantes ; ce que Madame [V] a contesté dans son courrier daté du même jour.

De plus, s'il s'est écoulé plus de 4 ans entre le congé sabbatique et le licenciement pour faute grave, il convient de relever que la SCM ALPES SOINS, qui se plaint de manquements récurrents de la salariée au fil de la relation de travail, n'explique et encore moins ne justifie pour quelle raison les sanctions disciplinaires qu'elle a prononcées, dont la dernière a été le licenciement pour faute grave, sont toutes les trois intervenues peu de temps avant ou après une absence de la salariée, les autres mises en garde et recadrages n'étant pas suffisamment démontrés et ce, alors même qu'à distance de ces absences, l'employeur a pu exprimer sa satisfaction pour le travail fourni par la salariée, le seul fait qu'il se soit adressé également à l'autre secrétaire n'étant pas de nature à rendre cette appréciation sur le travail de Madame [V] sans portée et reste taisant sur le fait qu'en juin et décembre 2017, soit à deux reprises au cours de l'année avant l'arrêt maladie litigieux, il a été offert des bons cadeaux à la salariée, dont l'un expressément en remerciement des efforts fournis pour le déploiement d'un logiciel dans l'entreprise.

Enfin, le seul fait que la lettre de licenciement pour faute grave, adressée le 9 février 2018, ne fasse pas référence à l'arrêt maladie de la salariée n'empêche aucunement de retenir que cette sanction disciplinaire a été prise à raison de cette absence et dès lors pour un motif prohibé non évoqué dans le courrier de rupture et ce d'autant que, contrairement à ce que soutient la SCM ALPES SOINS, la preuve d'une faute, a fortiori grave, qui lui incombe, n'est pas suffisamment rapportée en ce que :

- il convient tout d'abord de relever que la lettre de licenciement pour faute grave, non datée mais expédiée le 9 février 2018 ne comporte aucun fait précis et daté alors qu'il s'agit d'un licenciement disciplinaire nécessitant pour l'employeur de se prévaloir de faits déterminés à tout le moins déterminables, étant relevé que la salariée a contesté de manière circonstanciée, par courrier du 20 février 2018, les 4 séries de faits, qui ont, selon elle, été évoqués lors de l'entretien préalable du 1er février 2018 (gestion des clients [F], [A], [H], et erreurs dans la comptabilité)

- l'employeur se prévaut, dans ses conclusions, d'une poursuite du comportement fautif de la salariée, nonobstant l'entretien du 19 octobre 2017 qui avait pour objet, selon lui, de demander à la salariée de modifier son comportement. Or, sans qu'il soit nécessaire d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, et plus particulièrement sur les manquements fautifs allégués antérieurs à cet entretien, la SCM ALPES SOINS ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que Madame [J] [V] aurait eu, postérieurement à cette réunion, un comportement fautif dont elle se prévaut dans le titre 1.2.3 de ses conclusions d'appel. En effet, s'agissant du basculement allégué du standard avant la fin des horaires de travail de la salariée, tels qu'ils résultent du dernier avenant, la SCM ALPES SOINS SCM produit, comme pièce utile, uniquement ce qu'elle présente comme un listing téléphonique du 31 octobre au 30 décembre 2017, non suffisamment probant puisqu'il est certes indiqué un numéro de client mais il n'y a aucune mention du moindre opérateur téléphonique. La cour se trouve dans l'impossibilité de savoir si cela correspond à un document original transmis par l'opérateur téléphonique, le cas échéant dans le cadre d'une facture détaillée, ou s'il s'agit d'un relevé retranscrit par l'employeur.

En particulier, le nombre très limité d'appels passés chaque jour (généralement 3 à 5), même s'il est vraisemblable que la ligne ait davantage d'appels entrants émanant de patients, et la présentation sous forme de deux tableaux distincts avec les mêmes dates, posent question. Il est, en conséquence, impossible à la cour d'appel de savoir si cette pièce correspond à un listing directement établi par l'opérateur des transferts du standard vers les numéros de téléphones mobiles des praticiens ou un tableau dressé par l'employeur à partir du retraitement de ses factures détaillées. De surcroît, à supposer même que ce document eût été considéré comme probant, l'employeur ne répond pas au moyen pertinent développé par Madame [V], qui indique qu'elle ne quittait pas son poste avant la fin de son service et qu'il n'est pas produit, par son employeur, de décompte de ses heures de travail, la cour observant que le basculement allégué se serait produit systématiquement moins de 10 minutes avant la fin du service de Madame [V], les samedis à 12h, alors que la salariée avait d'autres missions lui incombant et que de nombreux éléments versés aux débats mettent en évidence que la charge de travail sur le poste de deux secrétaires était significative au point qu'elles étaient régulièrement, l'une et l'autre, en retard dans certaines de leurs missions ou dans l'impossibilité de les achever ; ce qui a incontestablement joué un rôle déterminant dans la mésentente persistante entre Mesdames [N] et [V].

S'agissant de l'agressivité alléguée à l'égard de certains patients, si Madame [Y] [H] se prévaut du fait que Madame [V] lui a répondu «'c'est fermé'» à une demande alléguée de renseignements sur le vaccin contre la grippe, la salariée indiquant que la patiente voulait en réalité obtenir l'exécution immédiate des actes, ce qui ne caractérise pas, à lui seul, un comportement agressif tel que décrit par le témoin, l'employeur s'abstient de répondre au moyen pertinent développé par la salariée selon lequel seul le cabinet de kinésithérapie était ouvert, expliquant la présence de deux patients dans le cabinet.

Les pièces produites ne permettent pas de déterminer avec certitude et précision à quels horaires et selon quelles modalités s'effectuaient les travaux infirmiers de la SCM.

Concernant l'attestation de Madame [K] [Z], elle fait part du comportement agressif de Madame [V] mais reste très générale et ne donne aucun détail s'agissant des circonstances de temps des faits dont elle témoigne de sorte que cette attestation ne permet pas de corroborer la persistance d'un manquement de Madame [V] après le 19 octobre 2017 dans sa manière de recevoir la patientèle.

L'attestation de Madame [T] est encore moins précis puisque Madame [V] n'est pas même citée.

Monsieur [O] se plaint du manque de courtoisie frisant la grossièreté de Madame [V] à plusieurs reprises mais ne donne pas davantage de renseignements sur la date de ses dernières visites ou appels avec le cabinet, de sorte que cette attestation ne permet pas davantage de conclure de manière certaine à la persistance d'un comportement fautif de la salariée après le 19 octobre 2017.

L'attestation de Madame [X], infirmière et associée de la SCM, est non seulement imprécise mais encore dépourvue de valeur probante eu égard au fait qu'elle est détentrice de parts de la société et, dès lors, directement intéressée à l'issue du présent litige.

La seule attestation de Madame [F] ayant indiqué avoir appelé le 4 décembre, sans mention d'ailleurs de l'année, pour une visite infirmier pour deux vaccins anti-grippe et s'être vu répondre que l'infirmière ne pouvait se déplacer du fait du mauvais temps et de son indisponibilité ne constitue pas davantage la preuve d'un refus abusif par Madame [V] d'un rendez-vous alors que l'employeur ne répond pas au moyen pertinent développé par la salariée selon lequel les conditions météorologiques étaient inhabituelles ce-jour là et ne verse aux débats aucun élément sur les interventions du cabinet à cette date, en particulier les rendez-vous pris et honorés, de nature à établir qu'un infirmier était effectivement disponible pour répondre à la demande de cette patiente.

S'agissant des négligences dans l'exécution des missions (impayés, dossiers non traités, erreurs d'encaissement), les pièces produites par l'employeur manquent significativement de valeur probante en ce qu'elles ne permettent pas de mettre en lumière un ou des manquements volontaires de Madame [V] qui seraient survenus après le 19 octobre 2017 et qui lui soient imputables, alors que deux secrétaires se succèdent pour partie sur le poste.

Par ailleurs, aucune pièce, si ce n'est les affirmations de l'employeur, ne vient corroborer que Madame [V] passait des appels personnels et se rendait sur les réseaux sociaux pendant ses heures de travail.

Enfin, concernant le fait que Madame [V] aurait refusé fautivement de programmer, le samedi matin 16 décembre 2017, une prise de sang urgente pour Madame [A], l'employeur ne répond pas, là encore, aux moyens pertinents développés par la salariée, selon lesquels l'urgence de l'acte ne figure pas sur la prescription médicale, que la décompensation cardiaque alléguée ne résulte, en définitive, que des seules déclarations du témoin et qu'il est pour le moins invraisemblable que le médecin de SOS médecin ne se soit pas assuré, eu égard au risque avancé de décès par l'employeur en cas de décompensation cardiaque, d'une prise en charge immédiate dès la visite du 15 décembre 2017 de la patiente, le cas échéant dans un cadre hopsitalier.

Dès lors que Madame [V] avait donné un rendez-vous à cette patiente le lundi, sans qu'il soit nécessaire d'entrer davantage dans le détail de l'argumentation des parties, notamment sur la disponibilité d'autres laboratoires ou sur les prises de sang effectuées par l'infirmier du cabinet [D] les samedis matins, qui sont d'ailleurs manifestement peu courantes au vu du tableau produit en pièce n°24, la preuve d'une faute, eu égard à l'absence de démonstration d'une urgence médicale avérée, n'est pas suffisamment rapportée.

Tout au plus, il est établi que Madame [V] a omis d'informer Monsieur [D], infirmier de la structure, du rendez-vous fixé le lundi. Ce manquement unique, qui plus est dans des circonstances révélant la persistance d'une mésentente entre les deux secrétaires, au vu des SMS échangés entre Madame [N] et Monsieur [D] à ce sujet, supposées se relayer en partie sur le poste, dont l'employeur était avisé, et qui ne justifie pas avoir pris les mesures nécessaires pour mettre fin au conflit, le cas échéant en adaptant l'organisation du cabinet, ne saurait à lui seul justifier un licenciement, a fortiori pour faute grave, eu égard à l'ancienneté de la salariée, alors que les conditions du rappel à l'ordre du 19 octobre 2017 dont se prévaut expressément l'employeur, contesté par la salariée, ne sont pas suffisamment éclaircies puisque le compte-rendu unilatéral de cet entretien n'a été établi que 3 mois après et surtout, ainsi qu'il a été vu précédemment, au retour de l'arrêt maladie de la salariée, étant rappelé que les avertissements précédents dataient de plus de 3 ans avant l'engagement par l'employeur de la procédure de licenciement disciplinaire, quoique l'employeur ne fournisse pas même les éléments permettant de dater l'envoi du courrier anti-daté au 14 novembre 2014.

Dans ces conditions, infirmant le jugement entrepris, il convient de déclarer nul le licenciement notifié par la SCM ALPES SOINS à Madame [J] [V] le 9 février 2018 dès lors qu'il procède en tout ou partie d'une discrimination prohibée à raison de l'état de santé.

Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail :

Dès lors que le licenciement pour faute grave est nul, Madame [V] a droit à une indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés afférents, à l'indemnité de licenciement et au rappel de salaire sur mise à pied conservatoire.

L'employeur fait à juste titre remarquer que les premiers juges, tout en rejetant la demande au titre de la prime d'ancienneté par application d'une convention collective que Madame [V] n'est pas fondée à revendiquer, ont retenu un salaire majoré erroné.

Dans ces conditions, l'indemnité de licenciement s'établit à 9028,19 euros nets selon les conclusions concordantes des parties à ce titre, sous la réserve de la non-majoration de 20 % revendiquée à tort par la salariée.

L'indemnité compensatrice de préavis s'établit à 2495,16 euros bruts, outre 249,51 euros au titre des congés payés afférents, d'après le bulletin de paye de janvier 2018, Madame [V] se prévalant d'un salaire de 1347,49 euros dont elle n'explique pas le montant.

Le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire avec un licenciement au 9 février 2018 est de 1096,24 euros bruts, outre 109,62 euros bruts au titre des congés payés afférents tels que proposés par l'employeur.

Au visa des articles L 1235-2-1 et L 1235-3-1 du code du travail, au jour de son licenciement nul, Madame [V] avait plus de 22 ans d'ancienneté, étant précisé qu'il a été retenu que le seul grief établi à l'encontre de la salariée ne pouvait justifier le licenciement indépendamment de la nullité prononcée, de sorte qu'il n'a pas à être pris en compte dans l'appréciation du préjudice de la salariée.

Elle avait un salaire de l'ordre de 1247,58 euros bruts.

Il apparaît que Madame [V] a retrouvé un emploi en CDI en qualité de secrétaire médicale à compter du 3 juillet 2018.

La perte de droits à la retraite ne ressort pas de manière évidente des éléments produits par la salariée.

Il lui est, au vu de ces éléments et notamment de son ancienneté importante, alloué la somme de 24000 euros au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le surplus de la demande est rejetée.

Il convient d'ordonner à la SCM ALPES SOINS de remettre à Madame [J] [V] un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation PÔLE EMPLOI ainsi qu'un bulletin de paie, conformes au présent arrêt, sans qu'il ne soit en l'état nécessaire d'assortir cette obligation de faire d'une astreinte.

Sur la demande au titre des circonstances vexatoires au licenciement :

Au visa de l'article 954 du code de procédure civile, il apparaît que dans le dispositif qui seul lie la cour, Madame [J] [V] ne formule de demande indemnitaire de ce chef au titre d'un préjudice moral qu'à raison de circonstances vexatoires alors qu'elle développe de manière non distincte des moyens, dans les motifs de ses conclusions, à la fois à raison d'une exécution fautive alléguée par l'employeur du contrat de travail et des circonstances de la rupture, si bien que la cour considère qu'elle n'est saisie utilement que de prétentions au titre des circonstances de la rupture du contrat de travail et non de son exécution.

Alors que le licenciement est déclaré nul et que Madame [V] bénéficie, à ce titre, d'une indemnisation, y compris dans sa dimension morale, à raison de la perte injustifiée de l'emploi, cette dernière ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que ce licenciement aurait été entouré de circonstances vexatoires lui ayant causé un préjudice distinct puisque, si l'employeur ne rapporte pas la preuve suffisante des fautes qu'il lui reproche à l'exception d'un seul grief jugé non suffisant pour légitimer le licenciement, Madame [V] ne prouve pas pour autant que l'employeur aurait fait preuve de mauvaise foi en se prévalant de manquements qu'il savait mensongers ou imaginaires.

Le jugement entrepris est dès lors confirmé en ce qu'il a débouté Madame [V] de sa demande de ce chef.

Sur le remboursement des indemnités PÔLE EMPLOI :

Au visa de l'article L 1235-4 du code du travail, dans sa version applicable au litige, dès lors que le licenciement est déclaré nul à raison d'une discrimination prohibée visée par cette disposition, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SCM ALPES SOINS à rembourser les indemnités chômage à PÔLE EMPLOI, dans la limite de 6 mois de salaire.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à Madame [J] [V] une indemnité de procédure de 1200 euros et de lui accorder une indemnité complémentaire de 1500 euros en cause d'appel.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il y a lieu de condamner la SCM ALPES SOINS, partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- condamné la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [J] [V] la somme de 1 200€ (mille deux cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté Madame [J] [V] de ses prétentions au titre du rappel de prime d'ancienneté et de sa demande indemnitaire au titre des circonstances vexatoires du licenciement

- débouté la SCM ALPES SOINS de sa demande reconventionnelle

- ordonné à la SCM ALPES SOINS, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Madame [J] [V], dans la limite de six mois de salaire

- dit qu'une expédition certifiée conforme du présent jugement sera adressée par le greffe du conseil à POLE EMPLOI,

- condamné la SCM ALPES SOINS aux dépens.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [J] [V] les sommes suivantes :

- 9 028,19 euros (neuf mille vingt-huit euros et dix-neuf centimes) à titre d'indemnité de licenciement

- 2 495,16 euros (deux mille quatre cent quatre-vingt-quinze euros et seize centimes) bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 249,51 euros (deux cent quarante-neuf euros et cinquante-et-un centimes) bruts au titre des congés payés afférents

- 1 096,24 euros (mille quatre-vingt-seize euros et vingt-quatre centimes) bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire

- 109,62 euros (cent neuf euros et soixante-deux centimes) bruts au titre des congés payés afférents

- 24 000 euros (vingt-quatre mille euros) de dommages et intérêts pour licenciement nul

DEBOUTE Madame [J] [V] du surplus de ses prétentions financières au principal

ORDONNE à la SCM ALPES SOINS de remettre à Madame [J] [V] un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation PÔLE EMPLOI ainsi qu'un bulletin de paie, conformes au présent arrêt

DIT qu'une expédition du présent arrêt sera transmise à PÔLE EMPLOI à la diligence du greffe

CONDAMNE la SCM ALPES SOINS à payer à Madame [J] [V] une indemnité complémentaire de procédure de 1500 euros

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SCM ALPES SOINS aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 20/01271
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.01271 ?
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