N° RG 19/02237 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KATH
N° Minute :
C3
Copie exécutoire délivrée
le :
à
Me Sophie GEYNET-BOURGEON
la SELARL CDMF AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022
Appel d'un Jugement (N° R.G. 15/05224) rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grenoble en date du 11 février 2019, suivant déclaration d'appel du 23 Mai 2019
APPELANTE :
Mme [E] [J]
née le 11 novembre 1972 à La Tronche
de nationalité Française
3, Rue Paul Didier
93700 DRANCY
Représentée par Me Sophie GEYNET-BOURGEON, avocat au barreau de GRENOBLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/003208 du 07/05/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMÉE :
SA AVANSSUR DIRECT ASSURANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
163-167 Avenue Georges Clémenceau
92742 NANTERRE CEDEX
Représentée par Me Denis DREYFUS de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Emmanuèle Cardona, présidente
Laurent Grava, conseiller,
Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère
DÉBATS :
A l'audience publique du 05 avril 2022, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, assistée de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seule les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
Madame [E] [J] a acquis le 12 avril 2012 un véhicule de la marque SAAB modèle 9-5 immatriculé CB-892-XQ assuré auprès de la société Avanssur Direct assurance. Le 28 octobre 2012, lors de fortes chutes de neige, Madame [J] a découvert son véhicule écrasé sous un arbre déraciné.
Suivant assignation en référé délivrée le 30 décembre 2013 elle a sollicité l'instauration d'une expertise.
Par ordonnance du 5 février 2014, une mesure d'expertise a été ordonnée.
Par acte du 19 novembre 2015, Mme [J] a fait assigner la compagnie Avanssur devant le tribunal de grande instance de Grenoble en réparation de ses préjudices.
Par jugement du 11 février 2019, le tribunal de grande instance de Grenoble a :
-condamné la SA Avanssur Direct assurance à payer à Mme [E] [J] les sommes suivantes au titre de ses obligations contractuelles suite au sinistre du 28 octobre 2012 :
*préjudice de jouissance : 1.392 euros,
*assurance : 471,73 euros,
Avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2018, date de l'assignation
-rejeté les demandes au titre des frais de garage et de dommages-intérêts de Mme [E] [J] ;
-condamné la SA Avanssur Direct assurance à payer à Mme [E] [J] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, sous réserve de sa renonciation de Me [D] à la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle ;
-condamné la SA Avanssur Direct assurance aux dépens, avec distraction au profit de Me Geynet Bourgeon.
Par déclaration en date du 23 mai 2019, Mme [J] a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :
-omis de reprendre la condamnation de la SA Avanssur à payer la somme de 6 962, 16 euros au titre des frais de travaux de remise en état,
-condamné la SA Avanssur Direct assurance à payer à Mme [E] [J] les sommes suivantes au titre de ses obligations contractuelles suite au sinistre du 28 octobre 2012 :
*préjudice de jouissance : 1.392 euros,
*assurance : 471,73 euros,
Avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2018, date de l'assignation
-rejeté les demandes au titre des frais de garage et de dommages-intérêts de Mme [E] [J] ;
-condamné la SA Avanssur Direct assurance à payer à Mme [E] [J] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, sous réserve de sa renonciation de Me [D] à la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle ;
Dans ses conclusions notifiées le 24 mars 2021, Mme [J] demande à la cour de :
-réformer le jugement entrepris,
-en ce qu'il a omis de statuer sur la demande en réparation du préjudice matériel soit 6.962,16 euros de frais de frais de travaux de remise en état ;
-en ce qu'il a limité le préjudice de jouissance à 1 382 euros ;
-en ce qu'il a rejeté la demande des frais de garage ;
-en ce qu'il a limité la demande de remboursement de prime d'assurance ;
-en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts
En conséquence,
-condamner la société Avanssur à verser 6 962,16 euros au titre des travaux de remise en état du véhicule avec intérêts de droit à compter de l'aveu judiciaire dans le « prendre acte » de la société Avanssur dans ses conclusions notifiées le 7 juin 2016 devant le tribunal de grande instance de Grenoble, et sous astreinte de 50 euros par jour de retard,
-condamner la société Avanssur à verser à Madame [J] 5 760 euros en réparation du préjudice de jouissance ;
-condamner la société Avanssur à verser 2 380 euros au titre des frais de garage;
-condamner la société Avanssur à verser à Madame [J] 1 755 euros au titre des frais d'assurance ;
-condamner la société Avanssur à verser à Madame [J] la somme de 600 euros au titre des frais d'expertise amiable ;
-condamner la société Avanssur à verser à Madame [J] 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de bonne foi ;
-condamner, la société Avanssur en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique, à payer 6.000 euros à Me [D] en cause d'appel sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.
-condamner la société Avanssur aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise, dont distraction au profit de Me Geynet-Bourgeon, sur son affirmation de droit, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Mme [J] se fonde notamment sur le rapport amiable qu'elle a fait établir et souligne que l'expert a préconisé la réalisation de plusieurs contrôles approfondis, et notamment un contrôle chassimétrique et un passage au banc de contrôle de suspensions, afin de déterminer l'étendue des dommages causés par la chute de l'arbre au véhicule.
Elle indique que la batterie jugée non conforme par l'expert judiciaire a été mise en place par le dépanneur afin de transporter son véhicule sur le lieu de la mission d'expertise, puisque le véhicule était entreposé dans un box au sous-sol d'un immeuble, sous-sol dans lequel la remorque ne pouvait pas entrer pour l'emmener jusqu'au garage, qu'il n'y a pas de défaut d'entretien.
Elle souligne que la société Avanssur a indiqué ne pas s'opposer à l'allocation de la somme de 6 962,16 euros TTC mais n'avoir rien versé, faute de condamnation en ce sens.
Elle fait état de ses autres préjudices financiers et de jouissance.
Dans ses conclusions notifiées le 3 octobre 2019, la société Avanssur demande à la cour de :
-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [J] de ses demandes au titre des frais de garage et de « dommages-intérêts »,
-confirmer encore le jugement en ce qu'il a accordé 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-infirmer le jugement pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
-dire et juger satisfactoire la somme de 6.962,16 euros en réparation du préjudice matériel de Mme [J] supporté consécutivement à la chute d'un arbre sur son véhicule en avril 2012,
-débouter Mme [J] pour le surplus de ses demandes.
-statuer ce que de droit sur les dépens.
La compagnie Avanssur énonce qu'elle a toujours accepté de prendre en charge en totalité les travaux de remise en état du véhicule, en lien avec le sinistre et déclare que certains des défauts du véhicule n'étaient pas imputables à l'accident mais relevaient d'un défaut d'entretien.
Elle réfute en conséquence devoir une somme quelconque au titre du préjudice de jouissance.
Elle s'oppose également aux demandes au titre des frais de location de garage en l'absence de document justificatif probant.
La clôture a été prononcée le 2 mars 2022.
MOTIFS
Sur la demande en réparation du préjudice matériel
La somme de 6.962,16 euros n'est pas contestée et Mme [J] aurait pu saisir le tribunal d'une requête en omission de statuer, ce qui lui aurait permis d'obtenir satisfaction beaucoup plus rapidement.
En tout état de cause, la société Avanssur sera condamnée à verser cette somme à Mme [J], avec intérêts à compter du le 7 juin 2016, Mme [J] n'ayant pas sollicité le report à la date de l'assignation. Compte tenu de l'ancienneté du litige et afin d'assurer l'effectivité de la décision, une astreinte de 50 euros par jour de retard sera prononcée, débutant un mois après la signification de la décision et pour une durée de trois mois.
Sur le préjudice de jouissance
Mme [J] verse aux débats un courrier en date du 8 janvier 2013, réceptionné par la société Avanssur le 11 janvier 2013 dans lequel elle demande où faire réparer son véhicule, le garage initialement choisi ayant refusé de procéder à ladite réparation. Elle n'a reçu aucune réponse.
L'expert auquel elle a fait appel a précisé qu'une vérification sommaire de l'alignement des roues laissait constater un espace de 2 doigts entre l'arrière de la roue avant gauche et le bas de caisse et 3 doigts entre l'arrière de la roue avant droite et le bas de caisse, indiquant que le réparateur avait déclaré que le contrôle de géométrie était satisfaisant mais avait refusé de communiquer les documents y afférant. Ce document avait toutefois été communiqué à Mme [J] par courriel le 23 novembre 2012.
L'expert a convoqué la société Avanssur par courrier recommandé reçu le 30 janvier 2013 mais celle-ci ne s'est pas déplacée pour l'expertise amiable et en l'absence de toutes les parties, un rapport de carence a été rendu, l'expert précisant que seule la voie judiciaire était possible.
Il a fallu attendre encore plusieurs mois pour que le rapport d'expertise judiciaire soit rendu.
En conséquence, si Mme [J] est pour partie responsable du retard pris dans le contrôle de la suspension, elle justifie néanmoins d'un préjudice de jouissance en partie du fait de l'inertie de la société Avanssur qui a fait le choix de ne pas se rendre à l'expertise amiable, ce qui a retardé d'autant la possibilité de faire réparer ce véhicule.
Elle sera indemnisée pour la période allant du 11 janvier 2013, date à laquelle la société Avanssur avait reçu son courrier demandant les modalités de prise en charge jusqu'au 28 juin 2015, soit 898 jours et la somme de 5 388 euros, le jugement sera infirmé.
Sur la location d'un box
Mme [J] communique une attestation non accompagnée d'une pièce d'identité. Si la personne propriétaire a pu établir une attestation, elle pouvait tout autant, nonobstant d'éventuels problèmes de santé, établir une quittance de loyer ce qui n'est pas le cas.
Quant à la pièce 14, il s'agit d'un courrier de l'assureur qui fait simplement état d'un remboursement de la somme de 847,73 euros mais qui ne permet nullement de savoir à quel sinistre cette somme est imputable faute d'autres éléments.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande sur ce point.
Sur la demande de remboursement de la prime d'assurance
Compte tenu des motifs rappelés ci-dessus en ce qui concerne le préjudice de jouissance, Mme [J] est légitime à solliciter le remboursement de ses primes d'assurances entre le 11 janvier 2013 et le 28 juin 2015, soit 29 mois et 17 jours, soit 129x61=1769+34,57=1 803,57 euros. Mme [J] ne sollicitant que la somme de 1 755 euros, et la cour ne pouvant statuer ultra petita, il sera fait droit à sa demande.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de bonne foi
Il résulte de la procédure que la société Avanssur, a minima depuis ses conclusions du 7 juin 2016, soit il y a près de 6 ans ne s'opposait pas au règlement de la somme de 6 962, 16 euros au titre des travaux de remise en état.
Quand bien même les autres postes de préjudice étaient contestés, elle avait toute latitude pour verser cette somme, ce qu'elle n'a pas fait.
Ce manquement à l'obligation de bonne foi sera réparé par l'allocation de dommages-intérêts, à hauteur de 1 000 euros.
Les frais d'expertse amiable font partie des frais irrépétibles.
La société Avanssur qui succombe principalement à l'instance sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :
-condamné la SA Avanssur Direct assurance à payer à Mme [E] [J] les sommes suivantes au titre de ses obligations contractuelles suite au sinistre du 28 octobre 2012 :
*préjudice de jouissance : 1.392 euros,
*assurance : 471,73 euros,
Avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2018, date de l'assignation
-rejeté les demandes de dommages-intérêts de Mme [E] [J] ;
et statuant de nouveau ;
Condamne la SA Avanssur à payer à Mme [E] [J] les sommes suivantes au titre de ses obligations contractuelles suite au sinistre du 28 octobre 2012 :
*préjudice matériel : 6 962, 16 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard, débutant un mois après la signification de la décision et pour une durée de trois mois.
*préjudice de jouissance : 5 388 euros,
*assurance : 1 755 euros,
Confirme le jugement déféré pour le surplus ;
Condamne la SA Avanssur à payer à Mme [E] [J] la somme de 1 000 euros à titre de dommages intérêts pour manquement à l'obligation de bonne foi ;
Condamne la SA Avanssur à payer à Mme [E] [J] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;
Condamne la SA Avanssur aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERELA PRESIDENTE