C8
N° RG 19/04537
N° Portalis DBVM-V-B7D-KHOZ
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
La CPAM DE HAUTE-SAVOIE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022
Ch.secu-fiva-cdas
Appel d'une décision (N° RG 18/00370)
rendue par le tribunal de grande instance d'ANNECY
en date du 03 octobre 2019
suivant déclaration d'appel du 06 novembre 2019
APPELANT :
M. [T] [M]
314 route des Villards
74300 MAGLAND
comparant en personne, assisté de M. [C] [I], défenseur syndical régulièrement muni d'un pouvoir
INTIMEES :
La CPAM de Haute-Savoie, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
Service Contentieux
2 rue Robert Schuman
74984 ANNECY CEDEX 9
comparante en la personne de Mme [O] [V], régulièrement munie d'un pouvoir
La S.E.L.A.R.L. MJ ALPES, en qualités de liquidateur judiciaire de la SARL COMPTOIR SAVOISIEN DE CHAUFFAGE CSC, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
20 boulevard du Lycée
74000 ANNECY
non comparante, ni représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Magali DURAND-MULIN, conseillère faisant fonction de présidente,
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère,
Mme Gaëlle BARDOSSE, conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 avril 2022
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistée de M. Fabien OEUVRAY, greffier, et en présence de Mme Kristina YANCHEVA, greffière, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 14 juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la cour.
L'arrêt a été rendu le 14 juin 2022.
M. [T] [M] a été employé à compter du 1er avril 2010 d'abord en qualité de voyageur-représentant-placier puis, à compter d'août 2014 en tant que cadre responsable du site de Bonneville de la SARL COMPTOIR SAVOISIEN DU CHAUFFAGE.
Il a été placé en arrêt maladie du 24 septembre 2015 au 05 février 2016, date à laquelle le médecin-conseil de la CPAM de Haute-Savoie l'a déclaré apte à la reprise de son activité professionnelle.
Après expertise médicale puis judiciaire, le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Annecy a fixé au 13 juin 2017 la date à laquelle M. [M] pouvait reprendre une activité professionnelle quelconque et l'a renvoyé devant la caisse pour liquidation de ses droits.
Par courrier daté du 15 février 2018, reçu le 20 février 2018, M. [M] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de Haute-Savoie pour voir statuer sur 'l'existence à son bénéfice d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et d'une faute inexcusable du fait d'harcèlement moral commis par son ex-employeur '.
Il exposait avoir été victime d'un harcèlement moral hiérarchique depuis septembre 2015 ainsi que d'une modification imposée de son contrat de travail, à la suite desquels son état de santé s'était rapidement dégradé et une dépression s'était révélée fin janvier 2016.
Cette demande n'a pas été instruite par la caisse et lui a été retournée le 07 mars 2018.
Le 04 mai 2018, M. [M] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Annecy d'un recours à l'encontre de la décision implicite de refus de sa demande.
Par jugement du 03 octobre 2019, le tribunal, après mise en cause de la SARL COMPTOIR SAVOISIEN DU CHAUFFAGE, a déclaré ce recours irrecevable et condamné M. [M] aux dépens.
Le 06 novembre 2019, M. [M] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 17 octobre 2019 et au terme de ses dernières écritures du 06 avril 2022, reprises oralement à l'audience, il demande à la cour:
- de déclarer son appel recevable,
- de le dire bien fondé et de reconnaître la faute inexcusable de son employeur,
- de réformer le jugement,
- de condamner la CPAM de Haute-Savoie à lui verser les sommes suivantes :
58 230 € au titre de son préjudice économique,
50 000 € au titre de son préjudice moral,
et de dire que la CPAM récupérera ces sommes auprès du mandataire liquidateur de la SARL CSC en vertu de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale,
- de condamner la CPAM et la SARL CSC à lui verser la somme de 7 000 € au titre de l'article 700 du CPC.
Au terme de ses conclusions, déposées le 19 janvier 2022, reprises oralement à l'audience, la CPAM de Haute-Savoie demande à la cour :
- de confirmer le jugement,
- de constater que les demandes de l'appelant visent à voir reconnaître une faute inexcusable de l'employeur,
- de constater qu'en l'absence de toute maladie professionnelle précédemment constatée et à défaut d'action engagée par M. [M] à l'encontre de son employeur une telle demande est irrecevable,
- de rejeter, en conséquence, l'ensemble des demandes de M. [M].
La SARL LJ ALPES, mandataire liquidateur de la SARL CSC, convoquée par LRAR le 22 novembre 2021 (AR signé le 25/11/2021) n'a pas comparu.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE
En application des articles L.452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle a droit à une indemnisation complémentaire lorsque l'accident ou la maladie est imputable à une faute inexcusable de l'employeur.
M. [M] excipe d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle survenus ou apparus entre septembre 2015 et janvier 2016, en relation avec une faute inexcusable de son employeur à type de harcèlement moral. Il soutient que le délai de deux ans dont il disposait pour demander la reconnaissance de sa maladie professionnelle a commencé à courir le 26 août 2019 date d'un certificat médical du Dr [H], psychiatre, certifiant 'l'avoir suivi en consultation de février 2016 à juillet 2017 pour un premier épisode dépressif réactionnel à des conditions de travail délétères, pathologie pouvant donc être qualifiée comme maladie professionnelle' et a été interrompu par son appel.
Mais selon l'article L.431-2 du code de la sécurité sociale, les droits de la victime aux prestations et indemnités prévues en cas de prise en charge d'un accident du travail ou de reconnaissance d'une maladie professionnelle se prescrivent par deux ans à compter du jour de l'accident, de la date de 1ère constatation de la maladie professionnelle ou de la date de cessation du paiement de l'indemnité journalière.
En l'espèce, le point de départ de ce délai peut être fixé au 07 décembre 2015, date de l'établissement par le médecin du travail à l'attention de M. [M] d'un certificat médical mentionnant 'reprise du poste peu envisageable du fait du traitement ( + difficultés relationnelles avec son employeur ) ; pas d'inaptitude possible sauf si AT reconnu par la CPAM.'
A cette date M. [M] était déjà en arrêt de travail depuis le 24 septembre 2015 et il a lui-même précisé dans sa première demande à la CPAM du 15 février 2018 solliciter 'la reconnaissance d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle (...)d'octobre 2015 au 13 juin 2017'.
A la date de cette demande ses droits aux prestations et indemnités prévues en cas de prise en charge d'un accident du travail ou de reconnaissance d'une maladie professionnelle étaient donc prescrits et la caisse était donc en droit comme l'a jugé le tribunal de ne pas instruire celle-ci.
Faute d'avoir interrompu le délai de prescription de la demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle ou de déclaration d'un accident du travail, cette demande n'a pas non plus interrompu le délai de prescription de la demande de reconnaissance d'une faute inexcusable
Le jugement sera en conséquence confirmé et l'appelant débouté de toutes ses demandes.
M. [M] devra supporter les dépens de l'instance en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement.
Confirme le jugement
Y ajoutant
Déboute M. [T] [M] de toutes ses autres demandes.
Condamne M. [T] [M] aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, conseillère faisant fonction de présidente et par Mme Kristina YANCHEVA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffièreLa conseillère