C9
N° RG 19/05117
N° Portalis DBVM-V-B7D-KJEI
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Alexia NICOLAU
la SELARL FTN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 16 JUIN 2022
Appel d'une décision (N° RG 18/01290)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Grenoble
en date du 25 novembre 2019
suivant déclaration d'appel du 20 décembre 2019
APPELANTE :
Madame [M] [B]
née le 28 juin 1958 à Grenoble (38000)
de nationalité Française
6 route Napoléon
38220 LAFFREY
représentée par Me Alexia NICOLAU, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Marine BROGUET, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEES :
S.E.L.A.R.L. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
16 rue Général Mangin
38100 GRENOBLE
Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
86 avenue d'Aix-les-Bains ' BP 37
Acropole
74602 SEYNOD
représentées par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Alexandre FRANCE, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Blandine FRESSARD, Présidente,
M. Frédéric BLANC, Conseiller,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 avril 2022,
Monsieur BLANC, Conseiller, chargé du rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs observations.
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
EXPOSE DU LITIGE :
Mme [M] [B] a été embauchée par la société AUTO ECOLE LA MURE en qualité de secrétaire, échelon 6, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (70 heures par mois), à compter du 25 février 2013.
Cette société est dirigée par M. [C] [G], le mari de la nièce de Mme [M] [B].
Le contrat à durée déterminée a été conclu pour accroissement temporaire d'activité avec un terme fixé au 25 août 2013. Le contrat s'est poursuivi au-delà du terme initialement prévu dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Ce contrat relève de la convention collective des services de l'automobile.
Le 10 octobre 2016, la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE a été créée et Mme [M] [B] en a été nommée présidente, étant également, par ailleurs, actionnaire minoritaire.
Le même jour, un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (70 heures par semaine) a été signé entre la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE et Mme [M] [B], celle-ci étant embauchée en qualité de secrétaire.
La société AUTO ECOLE LA MURE a été placée en redressement judiciaire le 9 mai 2017, converti en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 11 juillet 2017, Maître [F] [T] étant désigné mandataire liquidateur.
A compter de septembre 2017, la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE a fait l'objet d'une fermeture administrative en raison d'un problème d'agrément pour l'exercice de son activité, et ce jusqu'en mars 2018.
Le 1er novembre 2017, M. [C] [G] a remplacé Mme [M] [B] dans ses fonctions de présidente de la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
La SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE a été placée en redressement judiciaire par jugement du 27 mars 2018, converti en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 12 juin 2018, Maître [W] [N] étant désigné mandataire liquidateur.
Ce dernier a procédé au licenciement pour motif économique de Mme [M] [B] le 25 juin 2018.
Le 25 juillet 2018, Maître [N] a indiqué à Mme [M] [B] qu'en raison de son mandat de présidente de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE, sa qualité de salariée ne pouvait être retenue.
Mme [M] [B] a alors saisi, le 11 décembre 2018, le conseil de prud'hommes de Grenoble afin d'obtenir l'inscription, à son profit, de certaines sommes sur l'état des créances de la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
Suivant jugement en date du 25 novembre 2019, le conseil de prud'hommes de Grenoble a :
DIT que Mme [M] [B] n'était pas liée par un contrat de travail à la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE,
DEBOUTE Mme [M] [B] de l'ensemble de ses demandes,
LAISSE à chacune des parties la charge de ses dépens d'instance.
La décision rendue a été notifiée par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 26 novembre 2019 par le CGEA d'Annecy et Maitre [W] [N] et le 27 novembre 2019 par Mme [M] [B].
Appel de la décision a été interjeté par'Mme [M] [B] par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction le 20 décembre 2019.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 juillet 2020, Mme [M] [B] sollicite de la cour de':
INFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble du 25 novembre 2019 en ce qu'il a:
- « DIT que Mme [M] [B] n'est pas liée par un contrat de travail à la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE ;
- DEBOUTE Mme [B] de l'ensemble de ses demandes ;
- LAISSE à chacune des parties la charge de ses dépens d'instance. »
En conséquence
DIRE ET JUGER que le contrat de travail de Mme [B] au sein de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE correspondait à un emploi effectif, présentant un caractère réel et sérieux ;
DIRE ET JUGER que le contrat de travail qui liait Mme [B] à la société AUTO ECOLE LA MURE a été transféré de facto à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE le 10 octobre 2016 (date du CDI avec la seconde société) ;
DIRE ET JUGER que les sociétés AUTO ECOLE LA MURE et AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE n'ont pas rémunéré Mme [B] pour la totalité de la durée du travail prévue par ses contrats de travail ;
DIRE ET JUGER que les sociétés AUTO ECOLE LA MURE et AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE n'ont pas respecté le salaire minimum conventionnel ;
DIRE ET JUGER que les sociétés AUTO ECOLE LA MURE et AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE n'ont pas versés à Mme [B] les majorations de salaire relatives aux heures complémentaires accomplies ;
DIRE ET JUGER que la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE s'est illicitement abstenue de verser à Mme [B] ses salaires pour les mois de novembre 2017 à mars 2018 ;
DIRE ET JUGER que, pour la période d'avril 2015 à octobre 2017, les sociétés AUTO ECOLE LA MURE et AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE ont demandé à Mme [B] d'accomplir 963,30 heures complémentaires au-delà de la limite conventionnelle ;
DIRE ET JUGER que la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE s'est illicitement abstenue de verser à Mme [B] l'indemnité de rupture conventionnelle prévue par l'article L. 1237-13 du Code du travail ;
DIRE ET JUGER que la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE s'est illicitement abstenue de délivrer à Mme [B] ses bulletins de paie des mois de janvier et février 2018 ;
Par conséquent,
ORDONNER à Maître [N] d'inscrire sur le relevé des créances de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE les sommes suivantes au bénéfice de Mme [B] :
- 5 179,13 € bruts à titre de rappel de salaire pour la période d'avril 2015 à octobre 2017, outre 517,91 € bruts au titre des congés payés afférents ;
- 3 730,30 € bruts à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2017 à mars 2018, outre 373,03 € bruts au titre des congés payés afférents ;
- 3 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour dépassement du quota légal et conventionnel relatif à l'accomplissement d'heures complémentaires ;
-3 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;
-1 364 € nets à titre d'indemnité légale de rupture ;
-Délivrance des bulletins de salaire de janvier 2018 et février 2018 ;
-2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
DIRE ET JUGER que le CGEA d'ANNECY devra garantir le paiement des créances au titre de l'Assurance de Garantie des Salaires
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 février 2021, Maitre [V] [U], venant en remplacement de Maître [W] [N] selon ordonnance rendue par le Tribunal de Commerce de Grenoble le 09 décembre 2020, sollicite de la cour de':
Donner acte à la SELARL [U] prise en la personne de Maître [V] [U] de son intervention volontaire à la présente procédure en remplacement de Maître [W] [N].
Mettre Maître [W] [N] purement et simplement hors de cause.
Confirmer le jugement rendu par le conseil de Prud'hommes de Grenoble le 25 novembre 2019 dans toutes ses dispositions.
Par conséquent,
Débouter Mme [B] de l'intégralité de ses demandes.
A titre subsidiaire,
Constater l'irrecevabilité des demandes de rappels de salaires et congés payés afférents dirigées contre la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE pour la période antérieure au 10 octobre 2016;
Débouter, par conséquent, Mme [B] de ses demandes au titre de cette période ce qui représente les sommes de 4.482,76 € à titre de rappel de salaire outre 448,28 € au titre des congés payés afférents.
Débouter Mme [B] de sa demande de dommages et intérêts pour dépassement du quota légal et conventionnel relatif à l'accomplissement d'heures complémentaires, le préjudice prétendument subi à ce titre étant imputable à son précédant employeur et en aucun cas à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
Débouter Mme [B] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail faute de préjudice démontré.
Débouter Mme [B] de sa demande à titre d'indemnité de rupture conventionnelle, aucune rupture conventionnelle n'ayant été homologuée par la DIRECCTE.
En tout état de cause, dire et juger qu'en vertu des articles L.622-21 et suivants du Code de Commerce, seul un principe de fixation de créance peut être arrêté à l'encontre d'une entreprise soumise à procédure collective, aucune condamnation directe à l'encontre de cette entreprise ou de son liquidateur ne pouvant être prononcée.
Statuer ce que de droit quant aux dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 février 2022, L'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'ANNECY sollicite de la cour de':
Donner acte à l'AGS de ce qu'elle fait expressément assomption de cause avec la SELARL [U] -prise en la personne de Maître [V] [U]-, ès-qualité, en ce que celle-ci conclut -par des motifs pertinents- à la confirmation intégrale du jugement rendu par le conseil de Prud'hommes de Grenoble le 25 novembre 2019 et, par conséquent, au débouté de Mme [B] de l'intégralité de ses demandes.
Confirmer le jugement rendu par le conseil de Prud'hommes de Grenoble le 25 novembre 2019 dans toutes ses dispositions
Débouter Mme [B] de l'intégralité de ses demandes.
En tout état de cause,
Débouter la salariée de sa demande de condamnation à l'encontre de l'AGS, la décision à intervenir pouvant seulement lui être déclarée opposable (Cass. Soc. 26 janvier 2000 n° 494 P / Cass. Soc. 18 mars 2008 n° 554 FD), celle-ci étant attraite en la cause sur le fondement de l'article L.625-1 du Code de Commerce.
Débouter la salariée de toutes demandes de prise en charge par l'AGS de créances salariales qui excèderaient le plafond applicable en application des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du Code du Travail, en l'espèce le plafond 06, lequel inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposée par la Loi ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du Code Général des Impôts.
Débouter la salariée de toute demande directe à l'encontre de l'AGS, l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pouvant s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire (Art. L. 3253-20 du Code du Travail), les intérêts légaux étant arrêtés au jour du jugement déclaratif (Art. L.621-48 du Code de Commerce).
Débouter la salariée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, cette créance ne constituant pas une créance découlant du contrat de travail et, partant, se situe hors le champ de garantie de l'AGS ce conformément aux dispositions de l'article L.3253-6 du Code du Travail.
Débouter la salariée de sa demande de condamnation de l'AGS aux dépens
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mars 2022.
EXPOSE DES MOTIFS :
Sur le transfert du contrat de travail de la société AUTO ECOLE LA MURE à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE :
Mme [B] soutient que son contrat de travail conclu avec la société AUTO ECOLE LA MURE initialement en contrat à durée déterminée à temps partiel à compter du 25 février 2013 puis à durée indéterminée ensuite, a été transféré au 10 octobre 2016 à la société LA MURE AUTO ECOLE.
Or, elle développe des moyens inopérants et/ou infondés ne permettant pas de conclure à l'existence certaine d'un transfert de plein droit par application de l'article L 1224-1 du code du travail, supposant le transfert d'une entité économique autonome et ce, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, ou, le cas échéant, conventionnel par accords des trois parties concernées.
Elle indique, tout d'abord, qu'elle n'avait aucun intérêt à créer une société identique à celle dont M. [G] était détenteur de parts et dans laquelle elle était salariée alors que l'existence ou non d'un affectio sociétatis du salarié dans l'entreprise supposée cessionnaire n'est pas une condition du transfert légal de plein droit ni une condition opérante pour un transfert conventionnel, ledit moyen se rattachant en réalité à la question par ailleurs développée de l'exercice allégué comme non effectif par Mme [B] de son mandat social dans la société nouvellement créée dont elle ne détenait qu'une seule part s'agissant de l'existence ou non d'un lien de subordination, condition indispensable à la reconnaissance d'un contrat de travail.
Il est également sans portée que le mandat social détenu par Mme [B] ait pu l'être à titre gratuit alors qu'il n'y a aucune exigence que ces fonctions soient rémunérées.
Le fait que les missions de secrétariat aient pu être les mêmes au sein des deux sociétés, que celles-ci avaient la même activité et qu'elles occupaient les mêmes locaux ne permet pas, au cas d'espèce, de conclure à l'existence avérée du transfert d'une entité économique autonome dès lors que Mme [B], qui se prévaut en filigrane d'une fraude à la loi au titre du transfert de plein droit de son contrat, a pour autant été directement partie prenante à l'élaboration des statuts de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE en date 10 octobre 2016, dont il ressort que les seuls apports sont en numéraires, à hauteur de 99 euros pour M. [G] et de 1 euro pour Mme [B], sans la moindre évocation de l'apport concomitant d'un fonds de commerce et qu'elle s'est elle-même consentie un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 10 octobre 2016, en qualité de présidente de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE, dont la dénomination sociale est LA MURE AUTO ECOLE, qui stipule un engagement à la date du 10 octobre 2016.
Il n'est pas allégué, et encore moins établi, qu'un acte de cession partielle ou totale d'actifs ou de location du fonds de commerce entre la société AUTO ECOLE LA MURE et AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE serait intervenu après la création de cette dernière et avant la procédure collective initiée contre la première.
Il est d'ailleurs significatif de relever que Mme [B] se prévaut, dans le dispositif de ses conclusions, non pas d'un transfert de plein droit ou conventionnel mais de facto.
La cour d'appel observe, au demeurant, que Mme [B], supposée avoir été transférée de la société AUTO ECOLE LA MURE à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE à la date du 10 octobre 2016, selon ses dires, a continué à être payée, d'après le bulletin de paie de novembre 2016, par la société AUTO ECOLE LA MURE le mois suivant et n'a perçu une rémunération de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE qu'en décembre 2016.
Le moyen selon lequel aucune rupture du contrat de travail avec la société AUTO ECOLE LA MURE n'est intervenue est sans portée dès lors qu'il ne s'en déduit pas ipso facto que les conditions du transfert de plein droit sont remplies et ce d'autant plus, qu'il a été vu précédemment qu'il y a un chevauchement entre les deux relations de travail pendant au moins un mois.
L'attestation de M. [G] en date du 13 avril 2018, soit à un moment où il était redevenu président de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE mais après que celle-ci a été placée en redressement judiciaire par jugement en date du 27 mars 2018, dans le contexte d'une rupture conventionnelle du 31 mars 2018, qui n'a pour autant fait l'objet d'aucun enregistrement auprès de la Dirrecte en suite de l'interrogation, par courriel, de ce service le 10 janvier 2019, par l'AGS, ne saurait prouver l'existence d'un transfert du contrat de travail de la société AUTO ECOLE LA MURE à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE au seul motif qu'il est évoqué, de même d'ailleurs que sur l'attestation Pôle Emploi, une période d'emploi à compter du 2 février 2013 puisqu'une reprise d'ancienneté est parfaitement possible par ailleurs, quoique ne figurant pas dans le contrat de travail allégué.
Il est, en effet, indispensable de caractériser l'existence du transfert d'une entité économique autonome qui fait défaut, en l'espèce, puisqu'il n'est produit aucun élément relatif à la procédure collective suivie contre la société AUTO ECOLE LA MURE, s'agissant des actifs qui pouvaient rester dans cette société, de ses salariés, le mandataire liquidateur de la société n'ayant pas été attrait dans la présente instance, la cour d'appel observant de surcroit que le tribunal de commerce de Grenoble n'a pas prononcé immédiatement une la liquidation judiciaire de la société mais d'abord un redressement le 9 mai 2017 qui n'a été converti en liquidation judiciaire que par jugement du 11 juillet 2017 ; ce qui suppose une poursuite possible d'activité pendant 2 mois.
En outre, il ne saurait être retenu l'existence d'un transfert conventionnel puisque le document qualifié de contrat de travail du 10 octobre 2016, signé par Mme [B] en sa double qualité de présidente et de salariée, n'est pas ratifié, par ailleurs, par la société AUTO ECOLE LA MURE comme valant transfert du contrat de travail.
Il s'ensuit qu'il convient de confirmer le jugement entrepris, sauf à préciser que Mme [B] n'est pas déboutée mais déclarée irrecevable en ses prétentions au principal antérieures au 10 octobre 2016, mal dirigées, et qu'il est dit qu'il n'y a pas eu de transfert du contrat de travail de la société AUTO ECOLE LA MURE à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
Sur l'existence d'un contrat de travail avec la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE:
D'une première part, quelle que soit la forme de la structure sociale, le cumul d'un contrat de travail avec un mandat social suppose que le contrat de travail corresponde à un emploi réel exercé en son sein et que cet emploi réponde aux conditions du salariat, c'est-à-dire qu'il existe un lien de subordination juridique entre l'intéressé et l'entreprise.
Les dirigeants, personnes physiques, tout comme le président (également personne physique) d'une société à action simplifiée ont la possibilité de cumuler leur mandat social avec un contrat de travail.
Dès lors que l'article L 227-1 du code de commerce exclut expressément l'application à une société par actions simplifiée de l'article L 225-22 du code de commerce, il n'existe en principe aucune interdiction légale au cumul d'un mandat de président de la société et de salarié.
Néanmoins, les conditions générales de cumul imposées par les règles du droit du travail doivent être respectées par les intéressés, c'est-à-dire l'effectivité du contrat de travail, le lien de subordination, la dualité des fonctions et des rémunérations (et le maintien de la liberté de révocation du dirigeant). En outre, l'exigence d'un état de subordination a pour conséquence d'interdire à l'associé majoritaire de la SAS, ou unique d'une SAS unipersonnelle, de conclure un contrat de travail.
Lorsque le cumul ne répond pas à l'une des conditions requises, le contrat de travail se trouve, en l'absence de convention contraire ou de novation, suspendu pendant le temps de l'exercice du mandat et reprend ses effets à l'issue du mandat.
Par ailleurs, un contrat de travail conclu irrégulièrement pendant l'exercice d'un mandat social peut reprendre ses effets à l'issue du mandat social si, à l'issue du mandat social, les parties réitèrent leur volonté en ce sens.
D'une seconde part, sauf en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail d'en rapporter la preuve.
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
En l'espèce, le document dénommé «'contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel'» en date du 10 octobre 2016, dont Mme [B] se prévaut expressément et à la suite duquel des bulletins de paie de secrétaire ont été dressés à son bénéfice à compter de décembre 2016, ne saurait avoir la moindre valeur juridique et probante dès lors qu'il a été signé par Mme [B], seule, en sa double qualité de présidente de la société employeur et de salariée et qu'il ne respecte aucunement le régime juridique des conventions réglementées passées par les dirigeants d'une société par actions simplifiées, rappelées à l'article 25 des statuts de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
Il s'ensuit qu'il est considéré qu'il n'y a pas, en l'espèce, de contrat de travail apparent entre la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE et Mme [B] de sorte que cette dernière doit justifier en particulier de l'existence d'un lien de subordination à l'égard de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE.
Cette preuve fait défaut en l'espèce, puisque Mme [B], quoique associée très minoritaire de la société par actions simplifiées, n'en était pas moins présidente du 10 octobre 2016 jusqu'au 1er novembre 2017 avec, d'après l'article 19, les pouvoirs les plus étendus.
Elle n'établit pas par les seules attestations de Mme [B], sa propre fille et de M. [Y], qu'elle était en réalité, en qualité de secrétaire, sous la subordination juridique de M. [G] puisque la première attestation, devant être prise avec précaution eu égard au lien unissant le témoin et la partie, n'évoque que l'exécution de missions de secrétaire, sans faire état de consignes ou d'ordres qui auraient été donnés par M. [G] et que s'agissant du second témoin, la date à laquelle il s'est rendu à l'auto-école et où il a rencontré M. [G], qu'il qualifie de responsable n'est pas précisée, de sorte qu'il ne peut être exclu que cela soit lorsque Mme [B] travaillait pour le compte de la société AUTO ECOLE LA MURE et qu'au demeurant, le témoin ne caractérise pas pour autant avoir personnellement constaté des consignes données par M. [G] à Mme [B].
Les SMS adressés par Mme [B] à M.[G], à partir de mai 2018, ont pour l'essentiel comme objet des réclamations de la première au second au sujet des indemnités de fin de contrat, ses déclarations dans le message du 26 juillet 2018 selon lesquelles M.[G] lui aurait assuré que ses fonctions de présidente de la société n'auraient aucune incidence sur elle de sorte qu'elle a accepté de les assumer ne pouvant en aucun cas établir de manière certaine que M.[G] aurait exercé en ses lieux et place non seulement la direction de la société mais encore aurait eu à son égard un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction dans le cadre d'un lien de subordination caractérisant l'existence d'un contrat de travail.
Par ailleurs, il n'est pas suffisamment établi que postérieurement à la cessation par Mme [B] de ses fonctions de présidente, le 1er novembre 2017, la société et cette dernière auraient réitéré leur volonté d'exécuter un contrat de travail irrégulièrement conclu auparavant, dès lors que si Mme [B] produit une attestation de M.[G] du 13 avril 2018, attestant que Mme [B] a travaillé pour la société en qualité de secrétaire du 2 février 2013 au 31 mars 2018 et une attestation pôle emploi du 24 avril 2018 faisant état d'une rupture conventionnelle, en définitive non adressée à la DIRRECTE, en date du 31 mars 2018, il apparaît que ce dernier document fait état d'un dernier jour travaillé de Mme [B] pour le compte de la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE au 31 octobre 2017, soit au moment de la cessation de ses fonctions de présidente et que les bulletins de salaire produits par la salariée, postérieurement à cette date, sont tous à 0 euro et que Mme [B] a perçu l'allocation de retour à l'emploi dès novembre 2017, confirmant l'absence de prestation de travail.
Il s'ensuit qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Mme [M] [B] n'était pas liée par un contrat de travail à la SAS AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes au principal.
Sur les demandes accessoires :
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnité de procédure.
Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner Mme [B], partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf s'agissant des dépens de première instance et sauf à préciser que Mme [B] n'est pas déboutée mais déclarée irrecevable en ses prétentions au principal antérieures au 10 octobre 2016 mal dirigées et qu'il est dit qu'il n'y a pas eu de transfert du contrat de travail de la société AUTO ECOLE LA MURE à la société AUTO FORMATION LA MURE VIZILLE
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,
CONDAMNE Mme [M] [B] aux dépens de première instance et d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente