La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/11/2022 | FRANCE | N°19/04841

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 22 novembre 2022, 19/04841


N° RG 19/04841 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KILQ



N° Minute :





C3

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



Me Nathalie CROUZET



Me Ratiba RAHACHE



SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC



SELARL L. LIGAS-RAYMOND - JB PETIT



SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHA

MBERY















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 22 NOVEMBRE 2022



Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/01439) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE en date du 10 octobre 2019, suivant déclaration d'appel du 03 Décembre 2019





APPELANTE :



SCI LAZIALE pr...

N° RG 19/04841 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KILQ

N° Minute :

C3

Copie exécutoire délivrée

le :

à

Me Nathalie CROUZET

Me Ratiba RAHACHE

SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

SELARL L. LIGAS-RAYMOND - JB PETIT

SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 22 NOVEMBRE 2022

Appel d'un Jugement (N° R.G. 13/01439) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE en date du 10 octobre 2019, suivant déclaration d'appel du 03 Décembre 2019

APPELANTE :

SCI LAZIALE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 13]

[Adresse 13]

Représentée par Me Nathalie CROUZET, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par Maître Etienne TETE, avocat au Barreau de Lyon

INTIMÉES :

Mme [V] [D] épouse [W]

née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 15]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Ratiba RAHACHE, avocat au barreau de GRENOBLE

SA GENERALI ASSURANCE IARD Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège et venant aux droits de la Sté CONTINENT ASSURANCES

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et Me Sébastien THEVENET, avocat au barreau de LYON

SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Laurence LIGAS de la SELARL L. LIGAS-RAYMOND - JB PETIT, avocat au barreau de GRENOBLE

[Localité 10] Représentée par son Maire en exercice, domicilié en cette qualité à l'Hotel de Ville de ladite commune

[Adresse 9]

[Adresse 9]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et Me Philippe PETIT, avocat au barreau de LYON, plaidant par Me BASTARD-ROSSET, avocat au barreau d'ANNECY

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

M.Laurent Grava, conseiller

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 19 Septembre 2022 Anne-Laure Pliskine, conseillère en présence de Laurent Grava, conseiller, assistée de Caroline Bertolo, greffière, ont entendu seuls les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCI Laziale, assurée auprès de la compagnie Generali, est propriétaire de la parcelle cadastrée [Cadastre 11] à [Localité 10], au [Adresse 3], sur laquelle il y avait un immeuble.

Madame [V] [D] épouse [W], assurée auprès de la compagnie Axa France IARD, est propriétaire de l'immeuble sis [Adresse 4], cadastré section [Cadastre 8].

 

Des pluies importantes sont intervenues durant la nuit du 26 au 27 novembre 2012, et le mur à l'angle sud-est du bâtiment de la SCI Laziale jouxtant le bâtiment du [Adresse 4] s'est effondré.

 

Le maire de [Localité 10] a engagé une procédure dite de « péril imminent ».

Dans le cadre de cette procédure, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a nommé un expert par ordonnance du 28 novembre 2012.

Le rapport d'expertise a été déposé le 29 novembre 2012.

 

Le maire de Pont-de-Chéruy a pris un arrêté de péril imminent en date du 30 novembre 2012 mettant en demeure la SCI Laziale de procéder à la destruction du bâtiment lui appartenant, sis [Adresse 3], avant le 15 décembre 2012. 

 

La [Localité 10] a fait démolir l'immeuble de la SCI Laziale par l'entreprise Dechanoz SAS. Les travaux de démolition ont été achevés le 6 décembre 2012.

 

Par courrier du 27 mars 2013, la société Generali a refusé sa garantie, indiquant à la SCI Laziale que  l'effondrement de l'immeuble sis [Adresse 3], ne résultait pas d'une cause accidentelle.

 

Par actes d'huissier des 1er et 8 octobre 2013, la SCI Laziale a assigné devant le tribunal de grande instance de Vienne la société Generali assurances IARD, Madame [V] [W] et la [Localité 10].

Par acte d'huissier du 14 novembre 2013, la société Generali a appelé en cause la compagnie Axa assurances, en sa qualité d'assureur de l'immeuble appartenant à Madame [W].

 

Les procédures ont fait l'objet d'une jonction.

 

Par jugement du 10 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Vienne a :

Concernant les demandes formées contre la société Generali assurances IARD,

-déclaré sans objet la demande de communication des conditions générales et particulières de la police d'assurance n° AD776236 dès lors que la SCI Laziale et la société Generali sont en accord sur le fait que la police applicable entre elles est la police d'assurance n° 319.069B50, dont la SCI Laziale verse aux débats les conditions particulières et générales ;

-dit que la SCI Laziale, alors qu'elle avait connaissance des infiltrations d'eau touchant le bien assuré, n'a pas pris dans un délai raisonnable les mesures nécessaires pour en limiter l'importance et ainsi sauvegarder le bien garanti ;

-dit que ce faisant, la SCI Laziale a fait perdre au contrat d'assurance la liant à la société Generali assurances IARD, son caractère aléatoire, et qu'en conséquence la société Generali assurances IARD est fondée à refuser sa garantie.

En conséquence

-débouté les parties, dont la SCI Laziale, de leurs demandes formées à l'encontre de la société Generali assurances IARD ;

-dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 au profit de la société Generali assurances IARD.

Concernant la [Localité 10],

Vu l'absence de préjudice pour les parties lié à la destruction du bien situé [Adresse 3],

-débouté les parties de leurs demandes présentées à l'encontre de la [Localité 10] ;

-dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la [Localité 10] ;

Concernant la responsabilité et la prise en charge du sinistre subi par le bien immobilier [Adresse 3] ;

-dit que la société Axa France IARD ne justifie pas de la nécessité d'attraire la SCI Baryer à la cause et qu'il n'y a donc pas lieu de débouter la SCI Laziale et la société Generali assurances IARD de leurs demandes sur ce fondement ;

-dit que le fait générateur à l'origine du sinistre subi par l'immeuble du [Adresse 3] est l'écoulement des eaux provenant de l'immeuble du [Adresse 4] appartenant à Madame [V] [W] cumulé avec les précipitations intenses subies dans la nuit du 26 au 27 novembre 2012 ;

-dit qu'il n'y a pas lieu de retenir une responsabilité du fait personnel de Madame [V] [W].

Vu la responsabilité du fait des choses retenue à l'encontre de Madame [V] [W],

-dit Madame [V] [W] responsable du sinistre subi par la SCI Laziale affectant son bien immobilier situé [Adresse 3] et ayant abouti à sa destruction ;

Vu le défaut de diligences de la SCI Laziale pour mettre un terme aux infiltrations d'eau apparentes sur son bien en provenance de l'immeuble du [Adresse 4], infiltrations existantes depuis un temps certain ;

-dit que la SCI Laziale a commis une faute de nature à réduire son droit à indemnisation.

En conséquence

-dit que les conséquences du sinistre subi par la SCI Laziale du fait de l'effondrement puis de la destruction nécessaire de son bien immobilier [Adresse 3] sont prises en charge à 70 % par Madame [V] [W] et à 30 % par SCI Laziale ;

-dit que Madame [V] [W] doit être relevée et garantie par la société Axa France IARD de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires qui seront mises à sa charge au titre des contrats souscrits auprès de cette compagnie.

Concernant le préjudice,

Vu le projet engagé de la SCI Laziale de vendre son bien immobilier à la date du sinistre,

-débouté la SCI Laziale de sa demande à titre d'indemnisation de la perte de jouissance de l'immeuble sis [Adresse 3].

Avant dire droit,

-ordonné une mesure d'expertise ;

-rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la société Generali et la [Localité 10] ;

-ordonné l'exécution provisoire ;

-réservé les autres demandes des parties ;

-dit que l'affaire sera rappelée à la diligence du greffe à la mise en état après le dépôt du rapport d'expertise pour conclusions du demandeur.

 

Par déclaration en date du 3 décembre 2019, la SCI Laziale a interjeté appel du jugement en ce qu'il a:

-dit que la SCI Laziale, alors qu'elle avait connaissance des infiltrations d'eau touchant le bien assuré, n'a pas pris dans un délai raisonnable les mesures nécessaires pour en limiter l'importance et ainsi sauvegarder le bien garanti ;

-dit que ce faisant, la SCI Laziale a fait perdre au contrat d'assurance la liant à la société Generali assurances IARD, son caractère aléatoire, et qu'en conséquence la société Generali assurances IARD est fondée à refuser sa garantie ;

-débouté les parties, dont la SCI Laziale, de leurs demandes formées à l'encontre de la société Generali assurances IARD ;

(')

-débouté les parties de leurs demandes présentées à l'encontre de la [Localité 10] ;

-dit que la SCI Laziale a commis une faute de nature à réduire son droit à indemnisation.

En conséquence

-dit que les conséquences du sinistre subi par la SCI Laziale du fait de l'effondrement puis de la destruction nécessaire de son bien immobilier [Adresse 3] sont prises en charge à 70 % par Madame [V] [W] et à 30 % par SCI Laziale ;

(')

-débouté la SCI Laziale de sa demande à titre d'indemnisation de la perte de jouissance de l'immeuble sis [Adresse 3] ;

 

Dans ses conclusions notifiées le 17 mai 2022, la SCI Laziale demande à la cour de:

-dire que les présentes conclusions sont recevables ;

-confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Vienne en ce qu'il a  dit que « la société Axa France IARD ne justifie pas de la nécessité d'attraire la SCI Baryer à la cause et qu'il n'y a donc pas lieu de débouter la SCI Laziale et la société Generali assurances IARD de leurs demandes sur ce fondement ; »

-confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Vienne en ce qu'il n'est pas contraire aux demandes de la SCI Laziale, ci-dessous énumérées ;

-infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Vienne en ce qu'il est contraire aux demandes de la SCI Laziale notamment en tant qu'il a dit premièrement  que la SCI Laziale, alors qu'elle avait connaissance des infiltrations d'eau touchant le bien assuré, n'a pas pris dans un délai raisonnable les mesures nécessaires pour en limiter l'importance et ainsi sauvegarder le bien garanti ; deuxièmement dit que ce faisant la SCI Laziale a fait perdre au contrat d'assurances la liant à la société Generali assurances IARD, son caractère aléatoire, et qu'en conséquence la société Generali assurances IARD est fondée à refuser sa garantie ; troisièmement débouté les parties, dont la SCI Laziale, de leurs demandes formées à l'encontre de la société Generali assurances IARD ; quatrièmement débouté les  parties de leurs demandes présentées à l'encontre de la [Localité 10]; cinquièmement dit que la SCI Laziale a commis une faute de nature à réduire son droit à  indemnisation ; sixièmement dit que les conséquences du sinistre subi par la SCI Laziale du fait de l'effondrement puis de la destruction  nécessaire de son bien immobilier [Adresse 3] sont prises en charges à 70 % par Madame [V] [W] et à 30 % par SCI Laziale ; et septième et dernièrement débouté la SCI Laziale de sa demande à titre d'indemnisation de la perte de jouissance de l'immeuble sis [Adresse 3] ;

-dire que la garantie de la société Generali assurances IARD est acquise à la SCI Laziale à raison des dommages subis par l'immeuble sis [Adresse 3] ;

-condamner la société Generali assurances IARD à payer à la SCI Laziale, la somme de 335 000 euros, TVA en sus le cas échéant, sommes à parfaire en fonction de l'expertise, à titre d'indemnisation de l'effondrement et de la démolition de l'immeuble sis [Adresse 3] ;

-condamner la société Generali assurances IARD à payer à la SCI Laziale, la somme de 73 950 euros, somme à parfaire en fonction de l'expertise à titre d'indemnisation de la perte de jouissance de l'immeuble sis [Adresse 3] (période comprise du 1er décembre 2012 au 29 février 2020, soit 87 mois).

A titre subsidiaire et complémentaire :

-condamner solidairement Madame [D] épouse [W], Axa France IARD et  la [Localité 10] à payer à la SCI Laziale la somme de 335 000 euros, TVA en sus le cas échéant, sommes à parfaire en fonction de l'expertise, à titre d'indemnisation de l'effondrement et de la démolition de l'immeuble sis [Adresse 3] ;

-condamner solidairement Madame [D] épouse [W], Axa France IARD et la [Localité 10] à payer à la SCI Laziale la somme de 73 950 euros, sommes à parfaire en fonction de l'expertise, à titre d'indemnisation de la perte de jouissance de l'immeuble sis [Adresse 3].

Dans toutes les circonstances

-dire que les sommes réclamées porteront intérêts à partir de la date de l'assignation et capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle ;

-condamner la partie perdante, Generali assurances IARD, Madame [D], Axa France IARD et la [Localité 10], au profit de la SCI Laziale, au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner la partie perdante Generali assurances IARD, Axa France IARD, Madame [D] et la [Localité 10], au profit de la SCI Laziale aux entiers dépens.

 

Au soutien de ses demandes, la SCI Laziale fait valoir que le défaut d'entretien, voire le défaut de diligence pour faire cesser un défaut d'entretien à un tiers, ne rend pas nul le contrat, car l'aléa existe à la date de la signature, et n'établit pas la faute intentionnelle de réaliser le préjudice.

Elle ajoute qu'une limitation de garantie n'est opposable à l'assuré que pour autant qu'elle a été portée à sa connaissance au moment de son adhésion à la police ou, à défaut, antérieurement à la réalisation du sinistre pour lui être opposable, qu'en l'espèce, faute de définition de la notion d'accident, l'exclusion des fuites non accidentelles n'est ni formelle ni limitée, qu'elle ne peut donc pas recevoir d'application.

Elle réfute avoir indiqué que les fuites « perduraient depuis une dizaine d'années » et souligne que l'orage était exceptionnel et que si les murs en pisé peuvent être fragilisés par l'humidité ou l'excès de sécheresse, il est impossible de déterminer à quel moment le niveau d'humidité est excessif et quel est le temps qui reste avant de prendre des mesures de précaution, qu'au demeurant, les expertises n'ont pas établi un état dégradé préalable du mur.

Elle s'oppose à la mise hors de cause de la [Localité 10] au motif que la procédure prévue à l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ne permet au maire que de prescrire des mesures provisoires, lesquelles excluent la démolition.

Elle allègue que surabondamment, à la lecture du rapport d'expertise de M.[U], il apparaît que la destruction de l'immeuble appartenant à la SCI Laziale n'était pas nécessaire pour faire cesser l'imminence du péril, mais pour maintenir la circulation sur la [Adresse 12] -[Adresse 14]t, et affirme que le défaut d'entretien par la commune de son propre immeuble, au [Adresse 2] s'avère le deuxième élément étranger à la solidité de l'immeuble de l'assurée pris en compte pour prétendre que la démolition était inéluctable.

Elle conteste également toute faute de nature à réduire son droit à indemnisation et fait valoir son préjudice de jouissance du fait de l'indisponibilité de son bien pendant plusieurs années.

 

Dans ses conclusions notifiées le 16 mars 2021, la société Generali demande à la cour de:

A titre principal

-confirmer la décision dont appel :

-dire et juger que l'article 3 paragraphe 4 des conditions générales du contrat d'assurance liant Generali assurances IARD à la SCI Laziale est une clause instituant les conditions de la garantie et non une clause d'exclusion de garantie,

-dire et juger alors que le régime s'appliquant aux clauses d'exclusions de garantie n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce ;

-dire et juger que la SCI Laziale, alors qu'elle avait connaissance du sinistre touchant le bien assuré, n'a pas pris immédiatement les mesures nécessaires pour en limiter l'importance et ainsi sauvegardé le bien garanti ;

-dire et juger que ce faisant la SCI Laziale a fait perdre au contrat d'assurances la liant à la concluante, son caractère aléatoire, et qu'en conséquence Generali assurances est parfaitement fondée à refuser sa garantie ;

-dire et juger qu'en tout état de cause, et pour les mêmes raisons, la SCI Laziale a manqué à ses obligations contractuelles telles que résultant des dispositions de l'article 14 paragraphe deuxièmement et de l'article 14 alinéa 10 de son contrat d'assurance ;

-dire et juger que la garantie de Generali assurances IARD n'a pas vocation à s'appliquer ;

-débouter la SCI Laziale ou toute autre partie de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées contre Generali assurances IARD ;

-dire et juger que la Compagnie Generali assurances IARD peut, en exécution des dispositions contractuelles précitées réclamer à la SCI Laziale une indemnité proportionnelle au préjudice que ce manquement peut lui causer ;

-le cas échéant, condamner la SCI Laziale à verser à Generali assurances une somme équivalente à celle qui serait mise à sa charge au bénéfice de la SCI Laziale, en ce qu'elle représenterait alors le préjudice que le manquement de son assuré lui a causé.

A titre subsidiaire

-confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a retenu la responsabilité de Madame [W] en sa qualité de gardien de l'immeuble dont le comportement anormal a été l'instrument du dommage subi par la SCI Laziale ;

-dire et juger que la [Localité 10], en faisant détruire l'immeuble de la SCI Laziale sans respecter les délais légaux, et alors que d'autres solutions alternatives s'offraient à elle, a commis une faute, directement à l'origine du préjudice subi par la SCI Laziale ;

-réformer la décision dont appel ;

-dire et juger Generali assurances IARD subrogé dans les droits de son assurée la SCI Laziale ;

-condamner en conséquence solidairement, Madame [W] et sa compagnie d'assurances Axa assurances, la [Localité 10], à relever et garantir Generali assurances, le cas échéant subrogée dans les droits de son assurée, de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre ;

-condamner la SCI Laziale, Madame [W] et Axa assurances in solidum, à verser à la concluante la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner les mêmes aux entiers dépens de la présente instance.

A titre infiniment subsidiaire et en tout état de cause ;

-débouter la SCI Laziale de sa demande de prise en charge de pertes de loyers, faute pour elle de démontrer la perte de chance subie, de relouer son bien immobilier jusqu'alors inoccupé ;

-débouter la SCI Laziale de sa demande de prise en charge de pertes de loyers, faute pour elle de démontrer le bénéfice net qu'elle retirait du versement des loyers, déduction faite des charges et des impôts ;

-débouter la SCI Laziale de sa demande de prise en charge de la valeur du terrain sur lequel se trouvait son immeuble, puisqu'elle en a conservé la propriété.

A défaut,

-confirmer le jugement du 10 octobre 2019 en ce qu'il a débouté la SCI Laziale de sa demande indemnitaire au titre du préjudice de jouissance et de sa demande d'indemnisation de son préjudice suite à l'effondrement du mur et de la démolition de l'immeuble évalué à 335.000 euros et ordonné une mesure d'expertise aux fins d'évaluer le préjudice de la SCI Laziale correspondant à la valeur à laquelle l'immeuble (désormais détruit) pourrait être actuellement vendu suivant son état antérieur à la date du sinistre soit le 27 novembre 2012 (prix du marché immobilier) dont il conviendra de déduire le prix du terrain, dont la SCI Laziale reste propriétaire et qu'elle reste en capacité de vendre à un prix actuel

-dire qu'il appartiendra notamment à l'expert désigné de déterminer le bénéfice restant à la SCI Laziale sur les loyers versés, déduction faite des charges réglées et des impôts payés ;

-dire et juger que la [Localité 10] sera le cas échéant, condamnée à relever et garantir Generali assurances IARD de toute condamnation qui aurait pour objet la démolition du bâtiment de la SCI Laziale;

-réduire à de plus justes proportions les sommes réclamées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuer ce que de droit s'agissant des dépens.

 

La société Generali énonce que par un courrier du 23 novembre 2012, c'est-à-dire à une date antérieure à la survenance du sinistre, la SCI Laziale avait alerté Madame [W] sur le mauvais état des descentes de chéneaux de son immeuble en lui rappelant qu'elles engendraient des désordres sur sa façade.

S'agissant de la clause litigieuse, elle fait valoir que la notion d'accident résulte, non d'une clause d'exclusion de garantie comme le soutient la SCI Laziale, mais d'une clause reprenant les conditions de la garantie comme l'a rappelé à juste titre le tribunal.

Elle réfute tout caractère accidentel du sinistre puisque dans son courrier précité du 23 novembre 2012, la SCI Laziale énonçait avoir signalé à plusieurs reprises à Mme [W] la nécessité de procéder à des travaux.

Subsidiairement, elle se fonde sur les conclusions des rapport d'expertise qui indique que l'origine de l'effondrement du mur de l'immeuble de la SCI Laziale est à rechercher dans l'écoulement des eaux pluviales provenant de la toiture du numéro 19, c'est-à-dire de l'immeuble appartenant à Madame [W].

Elle déclare que ces installations d'écoulement des eaux pluviales, si elles avaient été régulièrement entretenues par leur propriétaire, auraient dû empêcher des écoulements d'eau sur le bâtiment de la SCI Laziale et in fine son effondrement.

A titre infiniment subsidiaire, elle énonce que d'une part le maire n'a pas attendu la fin du délai prévu à l'arrêté de péril avant de procéder à la destruction du bâtiment et d'autre part, le maire n'a pas  envisagé  la  réalisation des travaux de confortement qui auraient pu l'être, et éviter ainsi une destruction portant atteinte aux intérêts des parties, la destruction de l'immeuble appartenant à la SCI Laziale n'étant selon elle pas nécessaire pour faire cesser le péril imminent.

Elle conteste le montant des sommes sollicitées au titre des préjudices dès lors que la SCI Laziale a conservé la propriété du terrain. De même, elle estime que le préjudice résultant d'une perte de loyers n'est pas démontré.

 

Dans ses conclusions notifiées le 15 juin 2021, la société Axa demande à la cour de:

Vu les dispositions des articles 1134 (ancien), 1241 et 1353 du code civil

Vu les dispositions des articles 9 et 144 du code de procédure civile

Vu les dispositions des articles 1382 et 1384 alinéa 1 du code civil

-infirmer le jugement du 10 octobre 2019 en ce que le tribunal a dit :

- Qu'il n'y avait pas lieu de voir appeler dans la cause la SCI Baryer

- Qu'il a été fait droit aux demandes de la SCI Laziale à l'encontre de la société Axa France et de son assuré, Madame [W],

- Qu'il a été dit que la garantie de la société Axa France était due à l'égard de Madame [W],

- Qu'il a été mis hors de cause la [Localité 10].

Y faisant droit et statuant de nouveau.

A titre principal

-débouter le demandeur à la procédure principale et le demandeur à l'appel en garantie de leurs demandes formées à l'encontre de la société Axa Assurances, faute d'avoir appelé dans la procédure la SCI Baryer représentée par Madame [V] [W], copropriétaire de l'immeuble sis [Adresse 4] ;

-débouter le demandeur à la procédure principale et le demandeur à l'appel en garantie de leurs demandes formées à l'encontre de la société Axa Assurances, la responsabilité de Madame [W] dans la survenance des dommages subis par la SCI Laziale n'étant pas démontrée ;

A titre subsidiaire

-débouter le demandeur à la procédure principale, le demandeur à l'appel en garantie et Madame [W] de leurs demandes formées à l'encontre de la société Axa Assurances, les garanties du contrat d'assurances Multirisque immeuble souscrit par Madame [W] n'étant pas mobilisables, les dommages ne revêtant pas les caractéristiques d'un dommage accidentel.

En tout état de cause

-débouter le demandeur à la procédure principale de l'ensemble de ses demandes et prétentions, faute de démontrer la réalité de ses préjudices ;

-débouter le demandeur à la procédure principale dans sa demande d'expertise en vue d'évaluer le coût de reconstruction de l'immeuble sinistré ;

-condamner la SCI Laziale au règlement d'une somme de 2.500 euros en faveur de la société Axa France IARD, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner le demandeur à la procédure principale aux entiers dépens de la procédure, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Gaëlle Chavrier du Cabinet AGIS, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire si la Cour estimait que les demandes de la SCI Laziale sont fondées;

-confirmer le jugement du 10 octobre 2019 en ce qu'il a :

- Débouté la SCI Laziale de sa demande indemnitaire au titre du préjudice de jouissance et de sa demande d'indemnisation de son préjudice suite à l'effondrement du mur et de la démolition de l'immeuble évalué à 335.000 euros.

- Ordonné une mesure d'expertise aux fins d'évaluer le préjudice de la SCI Laziale correspondant à la valeur à laquelle l'immeuble  (désormais détruit) pourrait être actuellement vendu suivant son état antérieur à la date du sinistre soit le 27 novembre 2012 (prix du marché immobilier) dont il conviendra de déduire le prix du terrain, dont la SCI Laziale reste propriétaire et qu'elle reste en capacité de vendre à un prix actuel.

-condamner la [Localité 10] à relever et garantir la société Axa France IARD de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au titre des préjudices liés à la  démolition de l'immeuble appartenant à la SCI Laziale y compris toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

 

La société Axa conclut en premier lieu à l'absence de responsabilité de Mme [W] et à la nécessaire mise en cause de la SCP Baryer car l'immeuble situé au [Adresse 4], est la propriété de Madame [V] [W], en son 1er étage, et de la SCI Baryer représentée par Madame [V] [W], en son rez-de-chaussée.

Elle énonce que c'est le bâtiment communal désaffecté sis [Adresse 2] qui menaçait ruine au moment de l'effondrement partiel du bâtiment de la SCI Laziale au n° 17 en l'angle sud-est du bâtiment, et non le bâtiment n° 19, l'expert n'ayant constaté aucun dommage sur ce dernier dans le cadre de la procédure de péril imminent.

Elle affirme que le rapport d'expertise de Monsieur [U], s'inscrivant dans le cadre d'une mission bien spécifique, ne permet pas de tirer une quelconque conclusion quant à la relation causale entre les prétendues défectuosités du système d'écoulement du bâtiment n°19 et la survenue de l'effondrement du mur.

Elle déclare qu'en tout état de cause, s'agissant ensuite du fait anormal des descentes d'eaux pluviales du bâtiment n°19, l'expert ne s'est pas prononcé sur le caractère conforme ou non de l'installation de l'immeuble appartenant à Madame [W] et à la SCI Baryer.

Elle rappelle que le mur litigieux était en pisé, particulièrement perméable à l'humidité.

Elle allègue qu'il n'est pas démontré que le courrier qui aurait été envoyé le 23 novembre 2012 a effectivement été adressé à Madame [W], l'adresse mentionnée ne correspondant pas à celle du bâtiment n°19 appartenant à Madame [W] et à la SCI Baryer.

Elle excipe de la faute de la SCI Laziale compte tenu de l'état d'entretien déplorable dans lequel se trouvait le bâtiment, le locataire ayant dû réaliser des travaux de confortement sur le mur qui s'effondrera partiellement le 27 novembre 2012.

Elle rappelle que de jurisprudence constante, il appartient à la victime d'apporter la preuve du fait anormal de la chose et d'un lien de causalité entre ce dernier et le dommage allégué, et qu'il  appartenait tout au contraire à la SCI Laziale de solliciter de toute urgence, en tant que de besoin au moyen d'une procédure de référé d'heure à heure compte-tenu de l'imminence de la démolition décidée par la commune, une mesure de référé-expertise.

A titre subsidiaire, elle réfute tout caractère accidentel du sinistre, au motif que le fait générateur du dommage remonte nécessairement à dix années avant la survenance du sinistre en date du 27 novembre 2012, ce qui revient à considérer que le processus de dégradation du mur du bâtiment appartenant à la SCI Laziale a débuté durant l'année 2002, soit environ de dix ans avant la souscription par Madame [W] du contrat d'assurance à effet du 24 janvier 2012 auprès de la société Axa France IARD.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande à être garantie par la [Localité 10], qui a procédé à tort à la destruction de l'immeuble de la SCI Laziale.

 

Dans ses conclusions notifiées le 1er février 2022, la [Localité 10] demande à la cour de:

-déclarer recevable mais non fondé l'appel interjeté par la SCI Laziale à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Vienne en date du 10 octobre 2019.

A titre principal

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le fait générateur du sinistre subi par l'immeuble de la SCI Laziale est l'écoulement des eaux provenant de l'immeuble appartenant à Madame [W] cumulé avec les précipitations intenses subies dans la nuit du 26 au 27 novembre 2012  ;

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'ensemble  des parties de leurs demandes formées à l'encontre de la [Localité 10].

A titre subsidiaire

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la SCI Laziale devait être indemnisée du prix de son immeuble dans l'état dans lequel il était au jour du sinistre mais au prix qui serait le sien à la date de la décision, dont il conviendra de déduire le prix du terrain dont la SCI Laziale reste propriétaire ;

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI Laziale de sa demande indemnitaire relative à une perte de jouissance.

En tout état de cause

-débouter la SCI Laziale de sa demande d'indemnité judiciaire formée en cause d'appel ;

-condamner la SCI Laziale à payer à la [Localité 10] la somme de 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

-condamner la SCI Laziale aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SELARL Lexavoué Grenoble, sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

 

[Localité 10] conclut à la confirmation du jugement en ce que celui-ci a retenu que le fait générateur du sinistre subi par l'immeuble de la SCI Laziale est l'écoulement des eaux provenant de l'immeuble appartenant à Madame [W] cumulé avec les précipitations intenses subies dans la nuit du 26 au 27 novembre 2012, et aucunement la démolition dudit immeuble qui n'est que la conséquence de l'effondrement du bien propriété de l'appelante, qu'au demeurant, la déclaration à l'assurance porte sur l'effondrement du mur et non la démolition de l'immeuble.

Elle ajoute que la démolition des bâtiments en cause, dont celui appartenant à la SCI Laziale,était la seule mesure de nature à mettre fin au péril, compte tenu de l'exceptionnelle gravité du risque existant pour la sécurité publique et de la situation géographique des bâtiments, l'immeuble en  cause étant situé en centre ville, en bordure de la [Adresse 12], qui constitue l'axe principal traversant la commune de Pont-de-Chéruy et qui supporte un fort trafic de véhicules lourds.

Elle allègue que la démolition était inéluctable, qu'en outre, la SCI Laziale avait donné son accord pour faire procéder à cette démolition, ainsi qu'en atteste le fait qu'elle ne s'est pas plainte à la commune de cette démolition, avant d'avoir obtenu le rejet de la prise en charge par son assureur.

Elle s'oppose à toute demande en garantie dès ors qu'elle n'est pas responsable de l'effondrement du mur.

Subsidiairement, s'agissant du quantum des préjudices, elle fait état de la qualité de professionnel du bâtiment et de l'immobilier de la SCI Laziale, du défaut d'entretien de son immeuble ayant contribué aux désordres, de la connaissance antérieure des dégradations, et de l'absence de prise de mesures de nature à remédier à celles-ci.

Elle souligne que la SCI Laziale ne produit aucune estimation de la valeur actuelle de son terrain, alors que la charge de la preuve de son préjudice lui incombe, et que la période d'inoccupation des locaux était sensiblement de 18 mois avant la date du prétendu compromis de vente signé, ce qui démontre bien que ladite inoccupation est de la seule volonté de l'appelante, et aucunement la résultante du sinistre ayant affecté l'immeuble.

 

Mme [W] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

La clôture a été prononcée le 18 mai 2022.

 

MOTIFS

Sur la mise en cause de la la SCI Baryer

Le premier juge a exactement indiqué que la production du seul contrat d'assurances souscrit par la SCI Baryer ne vaut pas titre de propriété, Mme [W] ayant communiqué l'acte notarié d'achat de l'immeuble.

En cause d'appel, la société Axa ne produit pas d'éléments supplémentaires, sa demande sera rejetée, le jugement sera confirmé.

 

Sur le fond

Le rapport établi par le cabinet Cunningham Lindsey indique: 'L'origine de l'effondrement partiel de cet angle de mur en pisé depuis le haut du bâtiment, est la conséquence de pénétrations d'eau importantes suite à des pluies diluviennes, ayant engendré la liquéfaction et perte de cohésion du pisé qui s'est ensuite en partie effondré dans la rue.

Au cours de l'intervention des services de secours, il est apparu que le diagnostic fait sur le bâtiment de la commune, mitoyen à celui de l'assuré, a nécessité des mesures de confortement, des fissurations ayant été observées sur les différents murs également constitués de pisé avec décollement des enduits.

Il est à noter également que nous avons constaté l'effondrement partiel de la toiture sur la partie Nord Ouest du bâtiment de la commune, plus ancien et n'étant pas la conséquence du présent évènement.

Compte tenu de la dangerosité du site, nous avons procédé à une visite rapide du bâtiment de l'assuré et avons pu constater le bon état général bien que non occupé. Nous avons à l'angle sinistré  relevé des traces de dégât des eaux uniquement dans la partie au 1er étage correspondant à l'angle sinistré.

Selon nos premières constatations, l'origine de l'effondrement partiel du mur de façade du bâtiment de l'assuré est la conséquence d'une fuite sur une descente EP a priori implantée sur et desservant l'immeuble mitoyen de Madame [W].

La fuite a engendré la liquéfaction et la chute du mur en pisé'.

 

Quant à l'expert désigné par le juge administratif, il a indiqué:

'Le mur effondré est détérioré par les eaux pluviales provenant de la toiture du n° 19, cette détérioration se poursuivant sur deux mètres à l'intérieur du bâtiment et jusqu'au porche d'entrée du n° 17. Le risque d'effondrement constaté a le caractère d'un péril imminent.

b) Pas de désordres constatés dans le bâtiment au n° 19, mais le bâtiment du n° 15 est délabré, les crépis côté ouest se détachent par plaques épaisses et comportent de larges fentes côtés sud-ouest, et la toiture est effondrée.

c) Les murs des n°15 et 17 menacent à tout moment de s'effondrer sur la voie publique contiguë [Adresse 12] - [Adresse 14] et sur le terrain d'une copropriété d'habitation à l'ouest cadastrée [Cadastre 7]".

 

Selon l'article L.113-1 du code des assurances, les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré.

Selon l'ancien article 1964 du code civil, le contrat aléatoire est une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain.

 

C'est en application des conditions générales et particulières de sa police d'assurances que la société Generali France IARD a opposé un refus de garantie à la SCI Laziale en faisant valoir les dispositions de l'article 3 paragraphe 4 de cette police.

Cet article définit la garantie dégâts des eaux, comme :

« les pertes et détériorations occasionnées par :

-les fuites d'eau accidentelles ou les débordements provenant des conduits non souterrains et de tous appareils à effet d'eau et de chauffage ».

(Voir conditions générales page 2)

La garantie « dégâts des eaux » a par nature, pour objet de garantir un évènement accidentel, c'est-à-dire qui ne pouvait être prévu.

Sur l'existence d'un aléa

Le dommage consiste en l'effondrement du mur et non en l'existence d'infiltrations.

S'il ressort des débats que la SCI Laziale avait conscience de ces infiltrations et de leur ancienneté, ainsi qu'en atteste le courrier du 23 novembre 2012, peu important qu'il ait ou non été reçu par Mme [W], aucun élément ne permet d'établir qu'elle savait que l'effondrement du mur était inéluctable, étant observé que ce dernier est intervenu après un orage particulièrement violent.

La seule circonstance que le fait dommageable soit antérieur à la prise d'effet de la garantie ne suffit pas à exclure sa mise en 'uvre. Il convient encore d'établir que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie (Civ. 2e, 26 mars 2015, n° 14-14.661).

Les arrêts sur lesquels se fonde la société Generali sont sans rapport avec la présente instance puisqu'ils se réfèrent à des hypothèses où un précédent sinistre s'était déjà produit, qui permettait d'attester de l'absence d'entretien du bien, particulièrement vétuste. En l'espèce, le rapport établi par Cunningham&Lindsey faisait état du bon état général du bien et surtout, les infiltrations provenaient du bâtiment voisin et n'étaient pas liées au mauvais état du bâtiment de la SCI Laziale.

La preuve n'est pas non plus rapportée de l'existence d'une faute intentionnelle de l'assuré, qui n'a pas souhaité la réalisation du dommage.

Enfin, la société Generali se fonde sur l'article 14 de ses conditions générales, mais cet article se réfère au comportement de l'assuré postérieurement au sinistre, et il n'est pas démontré que celui-ci ait failli tant dans son obligation d'information de l'assureur, que dans l'obligation de prendre toutes mesures nécessaires pour sauvegarder le bien garanti, dès lors que l'expert M.[U] a conclu à la nécessité de démolir le bien dans de très brefs délais.

En conséquence, la garantie de la société Generali devait s'appliquer, le jugement sera infirmé.

 

Sur l'origine du dommage

Selon l'ancien article 1384 alinéa 1 du code civil, applicable lors des faits, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Ainsi que l'a justement rappelé le premier juge, même si les deux rapports d'expertise ne sont pas contradictoires envers toutes les parties, et qu'ils ne présentent pas les caractéristiques d'un rapport d'expertise judiciaire, en tout état de cause, rien n'empêche de les verser aux débats et de les soumettre à la discussion des parties, étant précisé que la décision ne peut se fonder sur un seul rapport de ce type, mais doit être étayée par d'autres éléments.

Axa conteste la teneur de ces rapports mais n'a pas non plus sollicité d'expertise judiciaire alors qu'elle avait toute latitude pour le faire si elle estimait que lesdits rapports étaient insuffisants pour démontrer l'origine du dommage.

Les deux rapports d'expertise versés aux débats concluent à une seule et même origine de l'effondrement du mur, à savoir les infiltrations provenant de l'immeuble appartenant à Mme [W]. Il incombait à cette dernière d'entretenir ses descentes d'eaux pluviales, qu'elle soit ou non informée par un tiers.

Quand bien même le bâtiment de Mme [W] ne subissait aucun dommage, cela n'empêche pas le fait que ce sont les eaux pluviales émanant de sa propre toiture qui sont responsables du sinistre, en ayant conduit à fragiliser le mur.

S'agissant du caractère accidentel du sinistre, la société Axa conclut de manière quelque peu contradictoire d'une part en page 17 de ses conclusions au fait que l'effondrement a pu être déclenché par les pluies diluviennes constatées dans la nuit du 26 au 27 novembre 2012 et en page 25 à des apports anormaux d'eaux imputables à des défauts d'étanchéité qui ne sauraient être qualifiés d'aléatoires.

Toutefois, et comme l'a rappelé le premier juge, il n'est pas établi que Mme [W] connaissait l'ampleur des infiltrations et en outre, c'est suite à un phénomène pluvieux intense que le mur déjà gorgé d'eau s'est effondré. Il existe donc bien un caractère accidentel, qui justifie de retenir la garantie de la société Axa.

Il n'y a en revanche pas lieu de condamner la société Axa à relever et garantir Mme [W] de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires qui seront mises à sa charge, puisqu'il s'agit de son assureur, que la condamnation est prononcée in solidum, et qu'il incombe ensuite à l'assureur de prendre en charge les sommes en application du contrat d'assurance.

 

Sur la faute de la SCI Laziale

L'effondrement du mur suppose que ce dernier était déjà fortement fragilisé par les infiltrations, ce dont la SCI Laziale avait connaissance. Son inertie a contribué à aggraver le dommage quand bien même elle n'en était pas à l'origine.

Sa responsabilité sera retenue à hauteur de 15%.

 

Sur la responsabilité de la [Localité 10]

Même si la [Localité 10] ne pouvait pas juridiquement faire procéder à la démolition de l'immeuble sur le fondement du péril imminent, en tout état de cause, cette faute n'est pas en lien avec le préjudice subi par la SCI Laziale, puisque le rapport d'expertise avait conclu à la nécessité de procéder à la démolition du bâtiment suite à l'effondrement du mur.

C'est donc à juste titre que le premier juge a mis hors de cause la [Localité 10], le jugement sera confirmé.

 

Sur le préjudice matériel

Seule la mesure d'expertise, ordonnée en première instance, sera de nature à estimer le montant réel du préjudice, la SCI Laziale ne communiquant aucune pièce de nature à permettre une estimation même sommaire du bien compte tenu des irrégularités entourant le compromis de vente, mises en exergue par le premier juge.

La demande relative aux intérêts est sans objet.

 

Sur le préjudice de jouissance

La SCI Laziale ne rapporte pas la preuve qu'elle souhaitait mettre le bien en location, ne démontrant pas avoir effectué une quelconque démarche en ce sens suite au départ de ses derniers locataires, le jugement sera confirmé.

 

Sur le préjudice allégué par la société Generali

La société Generali ne démontre pas subir le préjudice causé qu'elle allègue suite à un manquement de son assuré, elle sera déboutée de sa demande.

 

Mme [W] et son assureur Axa qui succombent principalement à l'instance seront condamnés aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a:

Concernant les demandes formées contre la société Generali assurances IARD,

-déclaré sans objet la demande de communication des conditions générales et particulières de la police d'assurance n° AD776236 dès lors que la SCI Laziale et la société Generali sont en accord sur le fait que la police applicable entre elles est la police d'assurance n° 319.069B50, dont la SCI Laziale verse aux débats les conditions particulières et générales ;

-dit que la SCI Laziale, alors qu'elle avait connaissance des infiltrations d'eau touchant le bien assuré, n'a pas pris dans un délai raisonnable les mesures nécessaires pour en limiter l'importance et ainsi sauvegarder le bien garanti ;

-dit que ce faisant, la SCI Laziale a fait perdre au contrat d'assurance la liant à la société Generali assurances IARD, son caractère aléatoire, et qu'en conséquence la société Generali assurances IARD est fondée à refuser sa garantie ;

En conséquence

-débouté les parties, dont la SCI Laziale, de leurs demandes formées à l'encontre de la société Generali assurances IARD ;

-dit que les conséquences du sinistre subi par la SCI Laziale du fait de l'effondrement puis de la destruction nécessaire de son bien immobilier [Adresse 3] sont prises en charge à 70 % par Madame [V] [W] et à 30 % par SCI Laziale ;

-dit que Madame [V] [W] doit être relevée et garantie par la société Axa France IARD de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires qui seront mises à sa charge au titre des contrats souscrits auprès de cette compagnie ;

et statuant de nouveau ;

Dit que la société Generali doit sa garantie ;

Dit que les conséquences du sinistre subi par la SCI Laziale du fait de l'effondrement puis de la destruction nécessaire de son bien immobilier [Adresse 3] sont prises en charge à 85 % par Madame [V] [W] et à 15 % par SCI la Laziale ;

Condamne in solidum Madame [W] et sa compagnie d'assurances Axa assurances, à relever et garantir Generali assurances, le cas échéant subrogée dans les droits de son assurée, de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre, à hauteur de 85% de celle-ci ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne in solidum la société Generali, Mme [W] et la société Axa à verser la somme de  2 000 euros à la SCI Laziale en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Mme [W] et son assureur Axa aux dépens d'appel.

 

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/04841
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;19.04841 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award