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07/02/2023 | FRANCE | N°20/02729

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 07 février 2023, 20/02729


N° RG 20/02729 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRBW



N° Minute :





C1

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



Me David HERPIN



la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY X2



Me Anaïs BOURGIER



















AU NOM D

U PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 07 FEVRIER 2023



Appel d'un Jugement (N° R.G. 14/03105) rendu par le Tribunal judiciaire de VALENCE en date du 09 juillet 2020, suivant déclaration d'appel du 04 Septembre 2020





APPELANTS :



Mme [O] [Y] née [F]

née le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 11] (tunisie)

Agissan...

N° RG 20/02729 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRBW

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à

Me David HERPIN

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY X2

Me Anaïs BOURGIER

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 07 FEVRIER 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 14/03105) rendu par le Tribunal judiciaire de VALENCE en date du 09 juillet 2020, suivant déclaration d'appel du 04 Septembre 2020

APPELANTS :

Mme [O] [Y] née [F]

née le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 11] (tunisie)

Agissant tant en son nom personnel qu'ès qualités de tutrice de son fils [D] [Y] né le [Date naissance 1] 1987

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 13]

M. [T] [Y]

né le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 13]

Représentés par Me David HERPIN, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉES :

S.A. CLINIQUE [12] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 13]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par Me MANTE SAROLI, avocat au barreau de LYON

L'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 15]

[Localité 9]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et Me Samuel FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS

Organisme CPAM DE LA DROME La Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de la DRÔME, dont le siège social est [Adresse 10] [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, ayant pour mandataire de gestion la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du PUY-DE-DÔME, dont le siège social est [Adresse 6] [Localité 8], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 10],

[Localité 4]

Représentée par Me Anaïs BOURGIER, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et Me Nicolas ROGNERUD, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 novembre 2022, Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, en présence de Anne-Laure Pliskine, conseillère, assistés de Caroline Bertolo, greffière, en présence de Catherine Silvan, greffière stagiaire ont entendu seuls les avocats en leurs conclusions et Me Mante Saroli en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 9 février 2009 M. [D] [Y] a été victime d'un accident de la circulation.

Après un séjour aux urgences du centre hospitalier de [Localité 13], il a été transféré le 14 février 2009 au service de chirurgie orthopédique de la Clinique [12].

Le 16 février 2009, il a été victime d'un arrêt cardiaque en salle de réveil après une opération et a été transféré au service de réanimation du centre hospitalier de [Localité 13].

M. [Y] se trouve depuis dans un état végétatif ou pauci-relationnel.

Par courrier du 1er octobre 2010, Mme [O] [Y] a saisi l'Ordre des médecins de la Drôme d'une plainte dirigée contre le docteur [C].

Par décision du 27 octobre 2011, la Chambre disciplinaire de première instance de l'Ordre des médecins de la région Rhône-Alpes n'a pas retenu de faute caractérisée à l'encontre du docteur [C] et il a rejeté en conséquence la plainte de Mme [O] [Y] comme étant non fondée.

Aucun appel n'a été formé à l'encontre de cette décision.

Par acte du 13 février 2013, Mme [O] [Y], agissant tant à titre personnel qu'ès qualités de tutrice de son fils [D] [Y], M. [M] [Y] et M. [T] [Y] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Valence le docteur [C] et la CPAM de la Drôme aux fins d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice.

Par décision du 27 février 2014, le tribunal a jugé que le docteur [C] n'était pas responsable du dommage subi par M. [D] [Y] lors de l'opération du 16 février 2009 et il a débouté en conséquence les consorts [Y] de leurs demandes, fins et prétentions.

Il n'a pas été relevé appel de ce jugement.

Par actes des 22 juillet et 5 août 2014, Mme [O] [Y], agissant tant à titre personnel qu'ès qualités d'administratrice légale de son fils [D] et MM. [M] et [T] [Y], ont fait assigner l'ONIAM et la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme devant le tribunal de grande instance de Valence aux fins notamment de voir ordonner un complément d'expertise et à titre subsidiaire, de voir déclarer la clinique responsable des fautes commises par l'infirmière du bloc opératoire et de la condamner à indemniser le préjudice subi par la victime et ses proches.

Par ordonnance du juge de la mise en état du 12 mars 2015, une expertise médicale a été confiée au docteur [B].

Le rapport d'expertise du docteur [X], désigné en remplacement du docteur [B], a été déposé le 1er octobre 2018.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme a demandé au tribunal de dire que sa créance s'élève à la somme de 5 467 621,66 euros.

Par jugement en date du 9 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Valence a :

- débouté les demandeurs de leur demande de communication des coordonnées de l'infirmière et de contre-expertise ;

- débouté les demandeurs de leur demande d'indemnisation dirigée à l'encontre de la Clinique [12] ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de présenter toutes nouvelles écritures au soutien de la défense de leurs intérêts ;

- sursis à statuer sur le surplus de prétentions des parties ;

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 23 octobre 2020.

Mme [O] [Y] agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D] et M. [T] [Y] ont interjeté appel de la décision par déclaration du 4 septembre 2020, intimant la SA Clinique [12], l'ONIAM et la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 11 février 2021, Mme [O] [Y] agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D] et M. [T] [Y] demandent à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Valence en date du 9 juillet 2020 ;

Statuant à nouveau,

- débouter la SA Clinique [12] de l'ensemble de ses demandes, fins, et prétentions ;

À titre principal,

- enjoindre à la SA Clinique [12] d'avoir à communiquer les coordonnées de l'infirmière présente au bloc opératoire lors de l'intervention pratiquée le 16 février 2009 sur la personne de [D] [Y] entre 18h15 et 18h30, heure de transfert en SSPI ;

- ordonner un complément d'expertise confié à tel médecin expert qu'il plaira de désigner et notamment au Dr [X] afin de procéder à l'audition de l'infirmière présente au bloc et d'obtenir ses explications d'une part quant à l'état de [D] [Y] entre 18h15 et 18h30, heure de transfert en SSPI, et d'autre part des précisions sur l'absence de relevés de paramètres vitaux sur la feuille de surveillance entre 18h15 et 18h30.

À titre subsidiaire,

- dire et juger la SA Clinique [12] responsable des fautes commises par l'infirmière présente au bloc opératoire du fait d'un défaut de surveillance et d'assistance en application des dispositions des articles R. 4311-5 et suivants du code de la santé public et 1241 alinéa 1er du code civil ;

- fixer l'indemnisation du préjudice de M. [D] [Y] à la somme de 7 144 727,20 euros sauf à parfaire somme de laquelle il y aura lieu de déduire la créance de la CPAM de la Drôme pour 5 367 621,66 euros et condamner la SA Clinique [12] au paiement de ladite somme ;

- condamner la SA Clinique [12] à payer Mme [O] [Y] la somme de 50 000 euros ainsi qu'à M. [T] [Y] la somme de 30 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection ;

- condamner la SA Clinique [12] au paiement d'une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SA Clinique [12] aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertises, distraits au profit de la Me David Herpin et recouvrés comme prescrit à l'article 699 du CPC.

Ils exposent les éléments principaux suivants au soutien de leurs écritures :

- ils rappellent les faits, la chronologie, les premiers soins et la procédure ;

- la Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation des Accidents Médicaux, au vu d'un rapport d'expertise du Pr [K] va rendre un avis le 12 janvier 2010 ;

- les préjudices sont considérables ;

- il y a une absence totale de paramètres de surveillance entre 18h15 et 18h30, heure de l'arrivée de M. [Y] en salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI) ;

- la cour tenue de la décision de l'expert de ne pas donner suite à la demande d'audition de l'infirmière ;

- il est ignoré les données et gestes effectués avant l'entrée de M. [D] [Y] à la salle de réveil ;

- cette absence de recueil de données pour cette période démontre manifestement que la SA Clinique [12] n'a pas mis en 'uvre tous les moyens nécessaires pour une prise charge optimale de M. [D] [Y] ;

- cela doit être considéré comme une faute engageant la responsabilité de la SA Clinique [12] ;

- à défaut d'avoir respecté les obligations résultant de son statut, l'infirmière présente au bloc a commis des fautes manifestes engageant la responsabilité de la Clinique [12] en sa qualité de commettant ;

- ils liquident les différents préjudices.

Par conclusions n° 3 notifiée par voie électronique le 1er juin 2022, la SA Clinique [12] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

« - débouté les consorts [Y] de leur demande tendant à :

* enjoindre à la SA Clinique [12] d'avoir à communiquer les coordonnées de l'infirmière présente au bloc opératoire lors de l'intervention pratiquée le 16 septembre 2009 sur la personne de [D] [Y] entre 18h15 et 18h30 heure de transfert en SSPI ;

* ordonner un complément d'expertise confié à tel médecin expert qu'il plaira de désigner et notamment au Dr [X] afin de procéder à l'audition de l'infirmière présente au bloc et d'obtenir ses explications d'une part quant à l'état de [D] [Y] entre 18h15 et 18h30, heure de transfert en SSPI, et d'autre part des précisions sur l'absence de relevés de paramètres vitaux sur la feuille de surveillance entre 18h15 et 18h30 ;

- débouté les consorts [Y] de leur demande tendant à voir engager la responsabilité de la Clinique [12], et à les indemniser de leurs préjudices, en l'absence de toute faute de l'infirmière de bloc » ;

- rejeter en conséquence l'appel de Mme [Y] [O] agissant tant en son nom personnel qu'ès qualités de tutrice de son fils [D] [Y], et de M. [Y] [T] ;

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la SA Clinique [12] ;

- rejeter l'appel incident de la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme, à l'encontre de la SA Clinique [12] ;

- débouter la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SA Clinique [12] ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum Mme [Y] [O] agissant tant en son nom personnel qu'ès qualités de tutrice de son fils [D] [Y], M. [Y] [T] et la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Subsidiairement, et si par extraordinaire la cour devait retenir une éventuelle responsabilité de la Clinique [12],

- limiter le droit à indemnisation des appelants et de la CPAM de la Drôme à l'égard de la Clinique [12] à 5 % en raison de la seule perte de chance d'avoir évité le dommage pouvant lui être imputée ;

- fixer à 53 730,68 euros l'indemnité pouvant être mise à la charge de la Clinique [12] au titre du préjudice de M. [D] [Y] ;

- fixer à 2 500 euros l'indemnité pouvant être mise à la charge de la Clinique [12] au titre du préjudice d'affection de Mme [Y] ;

- fixer à 1 500 euros l'indemnité pouvant être mise à la charge de la Clinique [12] au titre du préjudice d'affection de M. [T] [Y] ;

- débouter les consorts [Y] de toute autre demande plus ample ou contraire ;

- fixer à 146 862 euros le montant de la créance définitive de la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme, pouvant être mis à la charge de la Clinique [12] ;

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme ;

- statuer ce qu'il appartiendra sur les dépens.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle rappelle les faits et la procédure ;

- le Dr [X] a conclu de manière très affirmative au fait que l'état de [D] [Y] est en lien direct et certain avec une hypoxie qui serait survenue entre 18h15 et 18h30 alors que le patient était sous la surveillance du Dr [C] au bloc opératoire puis durant son transfert en SSPI ;

- il a ajouté que cette hypoxie s'est aggravée en anoxie, en Salle de Soins Post Interventionnels (SSPI), alors qu'appelé à plusieurs reprises, le Dr [C] ne s'est déplacé que tardivement ;

- il a donc considéré qu'il existait une prise en charge fautive du Dr [C] dans ces deux temps et a considéré parallèlement que la prise en charge par le personnel soignant était exempte de reproches ;

- l'expert n'avait nul besoin d'entendre l'infirmière présente au bloc opératoire pour conclure à un défaut de prise en charge du Docteur [C] ;

- cela est somme toute normal, puisque l'anesthésiste est responsable du patient tout au long de sa présence au bloc opératoire et notamment dans sa phase de réveil en application des dispositions de l'article D. 6124-97 du code de la santé publique ;

- la demande présentée par les consorts [Y] ne constitue nullement une demande de complément d'expertise ;

- ni le Dr [K] ni le Dr [X] n'ont évoqué ou envisagé, à un moment quelconque, une éventuelle responsabilité de l'infirmière de bloc ayant accompagné le patient aux côtés du Dr [C] en SSPI ;

- la présence d'une infirmière de bloc aux côtés de l'anesthésiste, notamment pendant le transfert du patient du bloc opératoire à la salle de réveil, ne constitue qu'une « aide logistique » pour tout acte que l'anesthésiste serait amené à faire ;

- l'infirmière est placée, durant ce très court temps de trajet (une à deux minutes) sous l'autorité de l'anesthésiste dont elle est le préposé occasionnel ;

- elle ne peut évidemment prendre aucune initiative quelconque à l'égard du patient, sans qu'une instruction ne lui ait été donnée par le médecin anesthésiste présent à ses côtés ;

- les demandes de la CPPAM de la Drôme seront rejetées ;

- les préjudices sont subsidiairement discutés.

Par conclusions notifiée par voie électronique le 22 décembre 2020, l'établissement public ONIAM demande à la cour de :

- recevoir l'ONIAM en ses écritures, les disant bien fondées ;

- donner acte à l'ONIAM qu'il s'en rapporte à la sagesse de la cour sur la demande de complément d'expertise ;

- constater l'absence de demande formulée à l'encontre de l'ONIAM ;

- constater que le dommage n'est pas en lien avec un accident médical indemnisable par la solidarité nationale ;

- dire et juger que l'entier dommage trouve son origine dans un défaut de prise en charge ;

- mettre l'ONIAM purement et simplement hors de cause ;

- condamner tout succombant au versement de la somme de 3 000 euros au profit de l'ONIAM, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens au profit de Me Grimaud, avocat au barreau de Grenoble.

Il expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- il rappelle les faits et la procédure ;

- l'expert a conclu que l'accident médical n'était pas le résultat d'un aléa ;

- l'ONIAM s'en rapporte à la sagesse de la cour sur la demande de complément d'expertise formulée par les consorts [Y] ;

- l'expert a clairement identifié des défauts dans la prise en charge du patient, à l'origine de l'entier dommage et donc de nature à exclure l'intervention de la solidarité nationale sur le fondement des dispositions des articles L1142-1 et suivants du Code de la santé publique ;

- en tout état de cause, en application de l'article 5 du code de procédure civile, et en l'absence de demande dirigée contre l'ONIAM, aucune condamnation ne peut être prononcée à l'encontre de l'Office ;

- dès lors, l'ONIAM sera purement et simplement mis hors de cause.

Par conclusions n° 2 notifiée par voie électronique le 24 mai 2022, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Puy-de-Dôme, agissant au nom et pour le compte de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

« - débouté Mme [O] [Y], agissant tant à titre personnel qu'ès qualités de M. [D] [Y], M. [M] [Y] et M. [T] [Y] de leur demande de communication des coordonnées de l'infirmière de bloc opératoire ayant assisté le Dr [C] le 16 février 2009 et de leur demande de contre-expertise ;

- les a débouté en outre de leur demande d'indemnisation dirigée à l'encontre de la SA Clinique [12] » ;

Statuant à nouveau,

- condamner la SA Clinique [12] à payer à la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme la somme de 2 937 240,01 euros correspondant à sa créance définitive, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2019, date des dernières conclusions déposées devant le tribunal judiciaire de Valence ;

- condamner la SA Clinique [12] à payer à la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

de gestion telle que prévue par l'ordonnance n°96-51 du 24 janvier 1996 ;

- condamner la SA Clinique [12] à payer à la CPAM de la Drôme ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SA Clinique [12] aux entiers dépens.

Elle expose les principaux éléments suivants au soutien de ses écritures :

- elle rappelle les faits et la procédure ;

- elle ne s'oppose pas à la mesure de contre-expertise ;

- le tribunal n'a pas retenu la responsabilité de la Clinique [12], en sa qualité d'employeur de l'infirmière, et ce alors même que celle-ci n'a pas accompli les actes de surveillance post-interventionnelles alors qu'elle a observé l'insuffisance du rythme cardiaque dont a été victime M. [Y] ;

- faute pour elle d'avoir respecté ses obligations déontologiques et professionnelle, l'infirmière présente au bloc a commis des fautes engageant la responsabilité de la Clinique [12] ;

- elle chiffre ses préjudices.

La clôture de l'instruction est intervenue le 5 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la communication des coordonnées de l'infirmière de bloc opératoire et le complément d'expertise visant à l'audition de cette infirmière :

Les appelants sollicitent la communication des coordonnées de l'infirmière de bloc opératoire présente lors du transfert de la victime ([D] [Y]) au SSPI.

Ils précisent que, pour une parfaite compréhension des circonstances de l'accident médical dont a été victime leur fils [D] et permettre le cas échéant d'éclairer la juridiction sur un manquement fautif du docteur [C] et/ou de l'infirmière de bloc opératoire, il est nécessaire que l'expert qui sera désigné puisse procéder à l'audition de cette dernière.

Néanmoins, cette demande de communication a été présentée à la SA Clinique [12] au cours des opérations d'expertise et portée à la connaissance du docteur [X], expert, lequel s'est prononcé dans des termes clairs, même en l'absence de communication sollicitée, sur les causes médicales de l'état de M. [D] [Y], fournissant notamment un avis particulièrement détaillé sur les circonstances de survenue du dommage.

Ce rapport n'a fait l'objet d'aucun dire de la part des consorts [Y] dont la demande a en réalité pour objet d'obtenir non pas un complément d'expertise, mais une contre-expertise.

Or une telle demande n'est pas justifiée dans le présent dossier.

En effet, la responsabilité du docteur [C] a été irrévocablement exclue par le jugement du tribunal de grande instance de Valence en date du 27 février 2014, décision non frappée d'appel.

De plus, le docteur [X] n'a pas retenu de manquement de l'infirmière de bloc opératoire ayant participé au transfert de M. [D] [Y] au SSPI.

Il en est de même du professeur [K] qui a diligenté la première expertise à la demande de la CRCI, du professeur [J] dont l'avis avait été sollicité par les consorts [Y] à la suite du dépôt du pré-rapport du professeur [K] et du docteur [U] qui a également établi une note technique critique à leur demande.

Aucun de ces praticiens n'a évoqué un manquement de l'infirmière.

Aussi, les consorts [Y] ne peuvent qu'être déboutés de leurs demandes de communication des coordonnées de l'infirmière de bloc opératoire ayant assisté le docteur [C] et de leur demande subséquente de contre-expertise visant à l'audition de cette infirmière.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur la responsabilité de la clinique et l'indemnisation des préjudices :

À titre subsidiaire, les consorts [Y] recherchent la responsabilité de la SA Clinique [12] en sa qualité de commettent au visa de l'article 1241 alinéa 1er nouveau du code civil.

Ils indiquent qu'il appartenait à l'infirmière de bloc opératoire, en application de l'article R. 4311-5 du code de la santé publique, de surveiller les cathéters, sondes et drains, et procéder au recueil des observations de toute nature susceptibles de concourir à la connaissance de l'état de [D] [Y] et à l'appréciation des principaux paramètres servant à sa surveillance et, pour le cas ou elle aurait également exercé les fonctions d'infirmière anesthésiste, d'effectuer, conformément à l'article R. 4311-12 du code de la santé publique, les actes de surveillance post-interventionnelle comme de transport.

Ils ajoutent qu'une déficience ou insuffisance du rythme respiratoire ne pouvait donc lui échapper et qu'il lui appartenait en conséquence d'intervenir personnellement pour sauvegarder les intérêts vitaux de M. [Y] ou d'informer le docteur [C].

Ainsi qu'il en a été fait état ci-dessus, aucun manquement n'a été relevé lors des différentes opérations d'expertise à l'encontre de l'infirmière de bloc opératoire qui a participé au transfert.

De même, il n'a été constaté aucune faute des personnels soignants du SSPI, le professeur [K] et le docteur [X] soulignant au contraire le caractère consciencieux et adapté de la surveillance opérée.

Enfin et surtout, le docteur [C], en sa qualité d'anesthésiste, a assuré personnellement le suivi de M. [D] [Y] de la fin de l'intervention chirurgicale jusqu'a son transfert au SSPI.

Aussi, il ne peut être fait grief à l'infirmière de bloc opératoire, qui n'a fait qu'apporter son aide lors du transfert de la victime, de ne pas avoir pris, antérieurement au transfert, une quelconque initiative.

En conséquence, la responsabilité de la SA Clinique [12] ne peut pas être retenue et les consorts [Y] doivent être déboutés de leur demande d'indemnisation dirigée à son encontre.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y], dont l'appel est rejeté, supporteront in solidum les dépens d'appel avec distraction, ceux de première instance étant confirmés.

Pour la même raison, il ne sera pas fait droit à leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la CPAM de la Drôme, ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme, les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. Aucune condamnation ne sera prononcée à son profit tant au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'au titre de l'indemnité forfaitaire, en cause d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'établissement public ONIAM les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Clinique [12] les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 3 500 euros (trois mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Déboute la CPAM de la Drôme, ayant pour mandataire de gestion la CPAM du Puy-de-Dôme de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne in solidum Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] à payer à l'établissement public ONIAM la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne in solidum Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] à payer la SA Clinique [12] la somme de 3 500 euros (trois mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne in solidum Mme [O] [Y], agissant en son nom et ès qualités d'administratrice légale de son fils [D], et M. [T] [Y] aux dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, présidente de la deuxième chambre civile et par la greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/02729
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;20.02729 ?
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