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21/03/2023 | FRANCE | N°21/01040

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 21 mars 2023, 21/01040


N° RG 21/01040 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KYU2

C2

N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée



le :

à :



Me Nicolas WIERZBINSKI



Me Mélanie COZON







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE GRENOBLE



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 21 MARS 2023







Appel d'un Jugement (N° R.G. 11-18-0152)

rendu par le Tribunal de proximité de Montélimar

en date du 15 janvier 2021

suivant déclaration d'appel du 26 février 2021



APPELANTS :



M. [G] [X]

né le 19 juin 1976 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]



Mme [R] [...

N° RG 21/01040 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KYU2

C2

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Nicolas WIERZBINSKI

Me Mélanie COZON

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 21 MARS 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 11-18-0152)

rendu par le Tribunal de proximité de Montélimar

en date du 15 janvier 2021

suivant déclaration d'appel du 26 février 2021

APPELANTS :

M. [G] [X]

né le 19 juin 1976 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Mme [R] [X]

née le 19 août 1980 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentés par Me Nicolas WIERZBINSKI, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

INTIMÉE :

Mme [A] [F]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 9]

représentée et plaidant par Me Mélanie COZON, avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR: LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Mme Catherine Clerc, présidente,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

Mme Véronique Lamoine, conseiller,

Assistées lors des débats de Anne Burel, greffier

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 février 2023, Mme [E], en présence de Mme [O] [L] élève avocate, a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Mme [A] [F] est propriétaire, sur la commune de [Localité 9] (26) lieudit [Adresse 5], de la parcelle cadastrée section D n° [Cadastre 3] voisine de la parcelle cadastrée sur la commune de [Localité 10] (26) lieudit [Adresse 6], section A n° [Cadastre 2] appartenant aux époux [R] et [G] [X].

Les fonds des parties sont séparés par un fossé-ruisseau qui en constitue la limite naturelle.

Prétendant que les travaux de terrassement et de remblaiement effectués en 2016 par les époux [X] ont déplacé le cours du ruisseau, Mme [F] les a fait citer, suivant exploit d'huissier du 20 mars 2018, en bornage de leurs fonds respectifs.

Par jugement du 11 septembre 2018, le tribunal d'instance de Montélimar a ordonné une mesure d'expertise.

L'expert, M. [P] [U], a déposé son rapport le 21 juin 2019.

Suivant jugement du 15 janvier 2021, le tribunal de proximité de Montélimar a :

homologué le rapport d'expertise,

ordonné le bornage des fonds en présence selon l'alignement rectiligne A-B-C-D-E-F-G-H-I-J-K-L-M-N-O-P-Q-R-S figurant au plan en annexe,

désigné M. [U] pour la pose des bornes,

condamné les époux [X] à payer à Mme [F] une indemnité de procédure de 3.043,56€,

partagé les dépens qui comprennent les frais d'expertise par 1/3.

Suivant déclaration du 26 février 2021, M. et Mme [X] ont interjeté appel de cette décision.

Par conclusions récapitulatives du 24 novembre 2021, M. et Mme [X] demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

ordonner toute mesure d'expertise qu'il plaira à la cour sauf à désigner en cas de complément d'expertise ou de nouvelle expertise un autre expert que celui désigné en première instance,

constater que les lieux ont été remis en leur état originel,

dire que la limite séparative entre les propriétés en présence doit être fixée sur le cours d'eau à l'endroit où il se situe actuellement,

débouter Mme [F] de l'ensemble de ses prétentions,

condamner Mme [F] à leur payer une indemnité de procédure de 3.500€ en première instance et la même somme en cause d'appel.

Ils font valoir que :

une procédure administrative s'est déroulée parallèlement à la présente instance dans le cadre de laquelle ils ont été mis en demeure le 28 mai 2018 par la Direction Départementale du Territoire de «'procéder à l'arasement des matériaux en haut de berge de la rive gauche pour ramener le lit majeur du ravin des Parties au niveau altimétrique de la rive droite et repositionner le lit rectifié du ruisseau selon les limites du plan cadastral'»,

Mme [F] s'est saisie de cette procédure pour asseoir ses allégations de déplacement du lit du ruisseau,

toutefois, suite à un contrôle par l'administration, les travaux effectués par eux ont été déclarés conformes avec rétablissement des limites initiales,

la limite entre les parcelles en présence correspond également à celles des communes qui sont différentes entre la leur et celle de Mme [F],

si bornage il y a, les bornes devront être posées sur l'axe du ravin dans sa configuration actuelle déclarée conforme par l'administration,

Mme [F] interdit, à tort, toute discussion sur le rapport d'expertise,

ils ne s'opposent pas à une nouvelle expertise mais sollicitent, en ce cas, la désignation d'un autre expert,

l'expert a retenu une méthode particulièrement floue et imprécise en superposant une photographie aérienne prise par l'IGN le 25 juillet 1980 avec un relevé topographique établi par la SARL Geo-Ventoux en 2016,

s'il y a eu un déplacement du cours d'eau, ce n'est pas nécessairement de leur fait au regard d'un possible déplacement naturel,

si leurs travaux ont modifié la rive du cours d'eau, cela ne signifie pas que celui-ci a été déplacé,

ils ont toujours nié avoir déplacé le cours du ruisseau même s'ils n'ont pas remis en cause l'arrêté préfectoral constatant le déplacement du ravin,

il est impératif de tenir compte des indices matériels, comme la végétation qui est naturelle sur les berges, ce que n'a pas fait l'expert,

l'expert n'a pas recherché s'il existait des traces du cours d'eau initial.

Par uniques conclusions du 21 décembre 2022, Mme [F] demande à la cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, d'ordonner avant dire droit un transport sur les lieux ou un complément d'expertise, de condamner les époux [X] à lui payer des dommages-intérêts de 1.000€ pour procédure abusive, outre une indemnité de procédure de 2.056,36€ à parfaire.

Elle expose que :

c'est à bon droit que le tribunal a balayé les arguments des époux [X] au motif qu'ils ne pouvaient opposer aucun élément sérieux pour contredire le rapport d'expertise,

la proposition de l'expert correspond parfaitement à la réalité des lieux avant travaux conformément au rapport de manquement administratif du 28 mai 2018 par lequel la DDT à enjoint aux époux [X] de repositionner le lit rectifié selon limites du plan cadastral,

l'expert a effectué un travail sérieux et exhaustif,

les époux [X] ont d'ailleurs entrepris l'exécution des travaux en état de faire cesser l'empiètement constaté par l'expert,

les époux [X] avaient accepté de redresser le cours du ruisseau durant la phase de bornage amiable qui n'avait pas pu aboutir,

le contrôle de l'administration se limite à la question de la sécurité publique au titre de la prévention des crues ce qui ne signifie nullement que la situation est entièrement régularisée du point de vue foncier,

les époux [X] ont esquivé le débat technique devant l'expert,

le travail accompli par celui-ci est exempt de reproches,

l'expert n'a jamais dit que la photographie aérienne de 1980 n'était pas superposable avec précision,

au contraire, il indique qu'il est techniquement possible de déterminer par comparaison à quels endroits le tracé du ruisseau a été dévié de son lit originel,

la cour constatera que celui-ci présente un important décroché,

il s'ensuit de la hauteur de la prise de vue qu'une précision au centimètre n'est pas possible,

la photographie est un moyen objectif de remonter le temps,

pour démontrer les traces supposées du lit initial du cours d'eau, les époux [X] se sont contentés de produire des photographies en noir et blanc inexploitables,

il n'est nullement démontré l'existence d'une haute végétation naturelle,

le déplacement naturel du cours d'eau est hors sujet tant il est criant que ce déplacement n'a rien de naturel,

les appelants ont enseveli le lit originel du ruisseau et l'ont reconstitué quelques mètres plus loin ce dont divers témoins attestent,

les époux [X] n'ont jamais contesté devant les autorités administratives avoir déplacé le cours du ruisseau.

La clôture de la procédure est intervenue le 10 janvier 2023.

MOTIFS

1/ sur la fixation de la ligne séparative des fonds

Les propriétés des parties, qui se trouvent sur deux communes distinctes, sont séparées par un petit cours d'eau.

Par application de l'article 215-2 du code de l'environnement, le lit des cours d'eau non domaniaux appartient aux propriétaires des deux rives.

Si les deux rives appartiennent à des propriétaires différents, chacun d'eux a la propriété de la moitié du lit suivant une ligne que l'on suppose tracée au milieu du cours d'eau, sauf titre ou prescription contraire.

En l'espèce, chacune des parties est propriétaires d'une rive.

Il est reproché aux époux [X] d'avoir déplacé le lit du ruisseau à l'occasion de travaux de terrassement réalisés en 2016 et, ainsi, d'avoir modifié les limites des fonds en cause.

L'expert a réalisé un travail sérieux avec une méthode suffisamment précise excluant le recours à une nouvelle mesure d'expertise ou à un déplacement sur les lieux sollicités sans argumentation par Mme [F].

Si les époux [X] contestent ce déplacement, ils se targuent, toutefois de façon contradictoire, qu'à l'occasion de la procédure administrative diligentée en 2018 par la Direction Départementale du Territoire les mettant en demeure de «'procéder à l'arasement des matériaux en haut de berge de la rive gauche pour ramener le lit majeur du ravin des Parties au niveau altimétrique de la rive droite et repositionner le lit rectifié du ruisseau selon les limites du plan cadastral'» ils ont réalisé divers travaux pour rétablir les limites initiales, ce qui revient à reconnaître implicitement qu'ils avaient déplacé les dites limites.

De surcroît, suite à un bornage amiable qui n'a pu aboutir, le géomètre-expert, M. [T] [N], a pu attester que les époux [X] s'étaient engagés à redresser le ravin pour favoriser l'écoulement des eaux.

A cet égard, M. [N] avait relevé un déplacement du cours d'eau avec un empiètement sur une longueur de 12 mètres.

L'expert judiciaire, en superposant un cliché photographique pris le 25 juillet 1980 avec l'état des lieux réalisé en 2016 par la SARL Géo-Ventoux à l'occassion des opérations de bornage amiable a retenu entre les repères O-P-Q-R-S un déplacement non contestable du cours d'eau vers l'Ouest du fait des travaux entrepris par les époux [X].

Il est ainsi démontré un déplacement du lit du cours d'eau imputable aux travaux réalisés par les époux [X] étant observé que ceux-ci, qui viennent désormais critiquer le rapport d'expertise judiciaire, n'ont formulé aucun dire à l'expert.

Concernant l'argumentation des époux [X] sur le défaut de prise en compte par l'expert de la végétation, il est démontré par Mme [F] qu'il n'existe pas de végétation à l'endroit du déplacement du cours d'eau mais uniquement en amont et en aval de celui-ci.

Dès lors, en l'absence de justification du moindre élément sérieux pour contredire le rapport d'expertise, c'est à bon droit que le tribunal a retenu la proposition de l'expert pour fixer la limite séparative entre les fonds, d'une part, de Mme [F] et, d'autre part, des époux [X] selon la limite rectiligne A-B-C-D-E-F-G-H-I-J-K-L-M-N-O-P-Q-R-S telle que ressortant du plan annexé au rapport d'expertise.

Par voie de conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions, précision faite que le partage des dépens de première instance par tiers signifie que les époux [X] en supporteront les deux tiers et Mme [F] le tiers restant.

2/ sur la demande de Mme [F] en dommages-intérêts pour procédure abusive

En l'absence de démonstration de l'abus invoqué par Mme [F] à l'encontre des époux [X], il convient de la débouter de sa demande en dommages-intérêts.

3/ sur les mesures accessoires

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice de Mme [F].

Enfin, M. et Mme [X] supporteront les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de Mme [A] [F] en nouvelle expertise ou en transport sur les lieux,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme [A] [F] de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne M. et Mme [G] [X] à payer à Mme [A] [F] la somme de 2.056,36€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [G] [X] aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 21/01040
Date de la décision : 21/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-21;21.01040 ?
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