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02/05/2023 | FRANCE | N°21/01901

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 02 mai 2023, 21/01901


N° RG 21/01901 - N° Portalis DBVM-V-B7F-K254



N° Minute :





C3

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC



la SCP PIERROT ET NEEL















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRE

NOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 02 MAI 2023



Appel d'un Jugement (N° R.G. 19/02057) rendu par le tribunal juidiciaire de GRENOBLE en date du 11 mars 2021, suivant déclaration d'appel du 23 Avril 2021





APPELANTE :



Mme [Z] [R]

née le 29 Septembre 1938 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]



représentée par...

N° RG 21/01901 - N° Portalis DBVM-V-B7F-K254

N° Minute :

C3

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

la SCP PIERROT ET NEEL

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 02 MAI 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 19/02057) rendu par le tribunal juidiciaire de GRENOBLE en date du 11 mars 2021, suivant déclaration d'appel du 23 Avril 2021

APPELANTE :

Mme [Z] [R]

née le 29 Septembre 1938 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, et Me FESSLET, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIM ÉE :

Mme [T] [J] épouse [F]

née le 22 Janvier 1951 à [Localité 5] (01)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Cyril PIERROT de la SCP PIERROT ET NEEL, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente

M. Lionel Bruno, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 21 février 2023, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, assistée de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seule les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [T] [F] est propriétaire d'une maison d'habitation sise [Adresse 4] (38).

Madame [Z] [R] est propriétaire d'une maison d'habitation sise [Adresse 3].

Fin 2013, des infiltrations d'eau ont été constatées dans la maison de Madame [T] [F].

Madame [T] [F] a fait assigner Madame [Z] [R] devant le juge des référés afin de solliciter l'instauration d'une mesure d'expertise judiciaire sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et de déterminer l'origine de ces infiltrations d'eau.

L'expert a déposé son rapport le 25 janvier 2019.

Par acte d'huissier en date du 16 mai 2019, Madame [T] [F] a fait assigner Madame [Z] [R], au fond, devant le tribunal de grande instance de Grenoble, aux fins notamment de contraindre cette dernière à laisser accéder à sa propriété pour permettre la réalisation des travaux.

Par jugement du 11 mars 2021, le tribunal judiciaire de Grenoble a :

- autorisé Madame [T] [F] à procéder aux travaux préconisés par l'expert judiciaire (travaux à la charge financière de Madame [T] [F]) et à intervenir par conséquent sur la propriété de Madame [Z] [R] en la prévenant de la date de réalisation des travaux au minimum 15 jours avant le début des travaux,

- condamné Madame [Z] [R] à laisser entreprendre lesdits travaux sur sa propriété sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à compter de la première demande formulée par Madame [D] [F], ladite astreinte étant liquidée par le juge de l'exécution,

- condamné Madame [Z] [R] à payer à Madame [T] [F] la somme de 12 000.00 euros à titre de dommages-intérêts, outre 2 000.00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et dépens, comprenant notamment le remboursement des frais d'expertise judiciaire,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration d'appel en date du 23 avril 2021, Madame [Z] [R] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions notifiées le 26 septembre 2022, Mme [R] demande à la cour de:

-déclarer Madame [Z] [R] recevable en son appel

-le déclarer fondé

-réformer le jugement entrepris

Vu les articles 544 et 640 du code civil ;

-débouter Madame [T] [J] épouse [F] de toutes ses demandes, fins et conclusions y compris son appel incident

-la condamner à payer à Madame [Z] [R] la somme de 10 000 euros pour procédure abusive et injustifiée.

-la condamner à payer à Madame [Z] [R] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

-la condamner aux entiers dépens et frais d'expertise.

Au soutien de ses demandes, Mme [R] énonce que l'expert a très clairement écarté toute venue d'eau en provenance des canalisations de sa parcelle, qu'il a en outre noté que « l'eau remonte dans les murs par capillarité. L'enduit extérieur, mis en 'uvre récemment, diminue la capacité du mur ancien à évacuer l'humidité, que la ventilation est existante mais insuffisante par rapport aux apports d'eau pour sécher les murs et la cave ».

Elle s'oppose aux préconisations de l'expert quant aux travaux à réaliser, qui aboutiraient selon elle à créer une servitude, contraire aux dispositions de l'article 544 du code civil. Elle réfute tout abus de propriété dès lors qu'elle n'est pas responsable de l'humidité survenue dans la maison [F].

Dans ses conclusions notifiées le 23 juillet 2021, Mme [F] demande à la cour de:

Vu les articles 544 et 1240 du code civil,

Vu le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [G] [S] du 25 janvier 2019,

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Grenoble le 11 mars 2021,

Sur l'appel principal de Mme [Z] [R],

-confirmer le jugement déféré en ce que, homologuant les conclusions définitives de Monsieur [G] [S] issues de son rapport d'expertise judiciaire du 25 janvier 2019, il a :

- déclaré recevable et bien fondée l'action engagée par Madame [T] [F],

- autorisé Madame [T] [F] à procéder aux travaux préconisés par l'expert judiciaire (travaux à la charge financière de Madame [T] [F]) et à intervenir par conséquent sur la propriété de Madame [Z] [R] en la prévenant de la date de réalisation des travaux au minimum 15 jours avant le début des travaux,

- condamné Madame [Z] [R] à laisser entreprendre lesdits travaux sur sa propriété sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à compter de la première demande formulée par Madame [D] [F], ladite astreinte étant liquidée par le juge de l'exécution,

-débouter Madame [Z] [R] de l'intégralité de ses demandes.

Sur l'appel incident de Mme [T] [F],

-réformer le jugement déféré en ce qui concerne le montant des dommages intérêts alloués et de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Madame [Z] [R] à payer Madame [T] [F] une somme de 54 891.54 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ce préjudice économique (perte de loyer de 1 016.51 euros / mois X 54 mois, provisoirement arrêtée à la date de rédaction des présentes conclusions),

-condamner Madame [Z] [R] à payer à Madame [T] [F] une somme de 5 000.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance, outre dépens de la procédure de référé, de la procédure de première instance (au fond) et de la présente procédure, lesquels comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [G] [S], accès à la somme de 6 604,20 euros, avec distraction, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile,

-condamner Madame [Z] [R] à payer à Madame [T] [F] une somme de 5 000.00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

-condamner Madame [Z] [R] aux entiers dépens de la procédure de référé et de la présente procédure, lesquels comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [G] [S], accès à la somme de 6 604,20 euros, avec distraction, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

Mme [F] énonce que l'expert retient comme cause exclusive des infiltrations l'imprégnation des pieds de fondations et des murs de sa maison, par la « nappe de versant » lorsque le niveau de la nappe phréatique est haut, et ce, en raison de l'absence de drain périphérique à l'arrière du mur amont de la maison et qu'il écarte tout autre cause possible (et notamment celles invoquées par Madame [Z] [R]) en pages 29, 32 et 33 de son rapport.

Elle souligne que seuls ces travaux préconisés par l'expert sont de nature à stopper les infiltrations et ainsi remédier aux désordres affectant sa maison, excluant tout autre procédé qui pourrait être réalisé à partir de la propriété de cette dernière.

Elle fait état de ses préjudices financiers conséquents, la maison étant inhabitable et donc impossible à louer, et fait valoir que les travaux n'entraînent qu'une gêne temporaire pour l'appelante et aucune servitude.

La clôture a été prononcée le 28 septembre 2022.

MOTIFS

Aux termes de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Selon l'article 637 de ce même code, une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire.

Selon l'expert, la canalisation d'évacuation des eaux pluviales de la parcelle de Mme [R] et le petit regard collectant aussi une partie des eaux de toiture de la maison de Mme [F], ne sont pas responsables de la forte humidité affectant le bâtiment.

L'expert n'a pas non plus constaté de dégradation notable des regards de collecte des eaux de chenaux et des canalisation d'évacuation, ni de fuites sur les réseaux d'eau potable ou les canalisations d'eaux usées.

En revanche, l'expert a relevé qu'il n'existait pas de drainage périphérique aux fondations conforme aux règles de l'art. Le puits à la pelle mécanique a permis de constater qu'il n'existait pas d'étanchéité de type goudronnée ou delta MS sur le parement du mur enterré, ni de graves drainantes, tous ces éléments expliquant une telle humidité dans les murs de fondations du côté amont de la maison.

Le crépi extérieur a certes aggravé l'humidité, mais pas à l'échelle de l'humidité constatée dans la maison.

Compte tenu de ce qui précède, l'expert a préconisé la réalisation d'un drainage périphérique aux fondations, fonctionnant comme une tranchée de rabattement avec évacuation à l'extérieur de la parcelle. Il a précisé que ces travaux nécessitaient d'avoir accès à la parcelle de Mme [R] pour travailler au pied du mur amont de la maison de Mme [F].

Mme [R] affirme que la réalisation des travaux préconisés par l'expert conduirait à mettre en place une servitude, alors que tel n'est manifestement pas le cas, puisque l'accès à la parcelle est uniquement destiné à permettre lesdits travaux.

En revanche, alors que ces travaux apparaissent indispensables, le fait pour Mme [R] de les empêcher en refusant l'accès à sa parcelle constitue un trouble anormal du voisinage, et ce quand bien même elle n'est pas responsable de l'humidité affectant le bien de Mme [F], ce qui n'est au demeurant pas contesté.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a condamné Mme [R] à laisser entreprendre les travaux, sous astreinte, afin d'assurer l'effectivité de la décision, le jugement sera confirmé.

Sur la demande de dommages-intérêts

Le premier juge a relevé à juste titre que Mme [R] n'est pas responsable des pertes de loyer depuis 2016, puisque l'origine de l'humidité était inconnue, mais que sa responsabilité peut être retenue à partir du moment où elle a refusé de laisser les artisans pénétrer sur sa parcelle pour effectuer les travaux, étant souligné qu'il s'agit d'une simple perte de chance de ne pas avoir pu louer le bien.

Au vu du loyer prévisible et compte tenu du fait qe les demandes ont été formulées à compter de mars 2019, soit depuis 4 ans, Mme [R] sera condamnée à verser la somme de 25 000 euros, le jugement sera infirmé.

Mme [R] qui succombe principalement à l'instance sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [Z] [R] à payer à Mme [T] [F] la somme de 12 000.00 euros à titre de dommages-intérêts ;

et statuant de nouveau ;

Condamne Mme [Z] [R] à payer à Mme [T] [F] la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Condamne Madame [Z] [R] à payer à Mme [T] [F] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Mme [R] aux dépens d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01901
Date de la décision : 02/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-02;21.01901 ?
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