C1
N° RG 21/01965
N° Portalis DBVM-V-B7F-K3FX
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL AEGIS
la AARPI INLAW AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 02 MAI 2023
Appel d'une décision (N° RG F 19/00218)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE
en date du 31 mars 2021
suivant déclaration d'appel du 28 avril 2021
APPELANTE :
S.A.S. HUWER HOLDING, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me Eric VACASSOULIS de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE,
INTIMEE :
Madame [L] [J]
née le 05 Janvier 1965 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Martin JANNEAU de l'AARPI INLAW AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Caroline BERNARD, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,
Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère,
Madame Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
Assistées lors des débats de Mme Mériem CASTE-BELKADI, en présence de Mme Elora DOUHERET, Greffière stagiaire,
DÉBATS :
A l'audience publique du 06 mars 2023,
Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère chargée du rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs observations.
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
Exposé du litige':
Le 10 janvier 2015, les sociétés FRANCE INVEST et EXIMIUM ont constitué la société HUWER HOLDING, laquelle est spécialisée dans la détention de participation dans d'autres sociétés, notamment dans le secteur de la conception et de la fabrication de matériels destinés à l'assainissement.
Le 1er juillet 2015, la SAS HUWER HOLDING et la SARL FRANCE INVEST ont conclu un contrat de prestations et d'assistance de [J] INVEST en faveur de HUWER HOLDING.
Mme [J] et M. [V] sont associés de la SARL FRANCE INVEST.
Le 01 janvier 2018, Mme [J] a été embauchée par la SAS HUWER HOLDING aux termes d'un contrat à durée indéterminée, en qualité de directrice commerciale.
Le 11 janvier 2019, M. [Z] [V], a été embauché par la SAS HUWER HOLDING aux termes d'un contrat à durée indéterminée, en qualité de directeur général de la société HUWER SERVICES, une filiale, avec le statut de cadre dirigeant.
Le 18 mars 2019, la SAS HUWER HOLDING a notifié à M. [V] et Mme [J] leur mise à pied conservatoire, et les a convoqués à un entretien préalable à leur licenciement pour faute grave qui s'est tenu le 1er avril 2019.
Le jour même, Mme [J] a fait l'objet d'un arrêt maladie.
Le 04 avril 2019, la SAS HUWER HOLDING leur a notifié leur licenciement pour faute grave.
Mme [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Valence, en date du'18 juin 2019 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du'31 mars 2021, le conseil des prud'hommes de Valence,'a':
' Dit que le licenciement de Mme [J] est pourvu de cause réelle et sérieuse ;
' Condamné la Société HUWER HOLDING à lui payer les sommes suivantes:
' 2265,62 euros (DEUX MILLE DEUX CENT SOIXANTE CINQ EUROS ET SOIXANTE DEUX CENTS) au titre de l'indemnité de licenciement,
' 4 660,61 euros bruts (QUATRE MILLE SIX CENT SOIXANTE EUROS ET SOIXANTE ET UN CENTIMES) au titre du paiement de la mise à pied conservatoire,
' 446,06 euros bruts (QUATRE CENT QUARANTE SIX EUROS ET SIX CENTIMES) au titre des congés payés afférents,
' 29 000,00 euros (VINGT NEUF MILLE EUROS) au titre de l'indemnité de préavis,
' 2 900,00 euros (DEUX MILLE NEUF CENTS EUROS) au titre des congés payés sur préavis,
' 500,00 euros (CINQ CENTS EUROS) au titre d'indemnité pour procédure vexatoire de licenciement,
' 1 000,00 euros (MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile;
' Ordonné la remise des documents sociaux de 'n de contrat recti'és conformément à la décision rendue ;
' Débouté Mme [J] du surplus de ses demandes ;
' Rappelé l'exécution provisoire de droit ;
' Débouté la SAS HUWER HOLDING de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
' Condamné la SAS HUWER HOLDING aux dépens de l'instance.
La décision a été notifiée aux parties et la SAS HUWER HOLDING en a interjeté appel.
Par conclusions notifiées par le RPVA le 26 juillet 2021, la SAS HUWER HOLDING demande à la cour d'appel de':
' Dire l'appel de la SAS HUWER HOLDING recevable et bien fondé,
' Réformer la décision déférée en ce qu'elle a :
' Dit que le licenciement de Mme [J] est pourvu de cause réelle et sérieuse,
' Condamné la Société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] les sommes suivantes :
- 2 265,62 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 4 660,61 euros bruts au titre du paiement de la mise à pied conservatoire,
- 446,06 euros bruts au titre des congés payés afférents,
- 29 000 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,
- 2 900 euros bruts au titre des congés payés sur préavis,
- 500 euros au titre de l'indemnité pour procédure vexatoire de licenciement,
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
' Ordonné la remise des documents sociaux de fin de contrat rectifiés conformément à la décision rendue,
' Débouté la SAS HUWER HOLDING de sa demande au titre de l'article 700 du CPC,
' Condamné la SAS HUWER HOLDING aux entiers dépens de l'instance
' Dire et juger que le licenciement de Mme [J] repose sur une faute grave,
' Débouter Mme [J] de l'intégralité de ses demandes,
' La confirmer en ce qu'elle a débouté Mme [J] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' Condamner à titre reconventionnel Mme [J] à payer à la société HUWER HOLDING à titre de contribution aux frais irrépétibles occasionnés tant pour la première instance que pour l'instance d'appel une somme de 8 000 € en application des dispositions de l'article 700 du CPC et laisser à sa charge tous les dépens tant au titre de la première instance que de l'instance d'appel.
Par conclusions en réponse, notifiées par le RPVA le 22 octobre 2021, Mme [J] demande à la cour d'appel de':
' Infirmer partiellement le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Valence en ce qu'il dit que le licenciement de Mme [J] est pourvu de cause réelle et sérieuse';
' Dire que le licenciement de Mme [J] est dépourvu de cause réelle et sérieuse';
' Débouter la société HUWER HOLDING de l'intégralité de ses demandes ;
' Confirmer la condamnation de la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 2.265,62 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;
' Confirmer la condamnation de la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 29.000 à titre d'indemnité compensatrice de préavis (4 mois) et la somme de 2.900 euros au titre des congés payés afférentes ;
' Condamner la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 29.000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
' Confirmer la condamnation de la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme ' de 4.660,61 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, ainsi que la somme de 466,06 euros au titre des congés payés afférents ;
' Condamner la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 5.000 à titre de dommages et intérêts en raison du caractère brutal et vexatoire du licenciement ;
' Condamner la société HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 5.000 à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de préserver la santé au travail ;
' Ordonner la remise de l'attestation POLE EMPLOI conforme aux mentions de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la sa signification
' Condamner la société HUWER HOLDING aux entiers dépens de la procédure ;
' Condamner la société HUWER HOLDING au paiement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le'07 février 2023 et l'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 06 mars 2023.
La décision a été mise en délibéré au 02 mai 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI':
1- Sur'le bien-fondé du licenciement':
Moyens des parties :
La SAS HUWER HOLDING soutient, au visa de l'article L.1232-1 du code du travail, que le licenciement pour faute grave de Mme [J] est justifié.
Elle expose que :
- M. [V] et Mme [J], sa compagne, ont développé un projet de vente de véhicules d'occasion et de constitution d'un magasin de pièces détachées, directement concurrent à l'activité de la société HUWER et avec du personnel de celle-ci,
- M. [V] et Mme [J] ont commis une action de concurrence déloyale en utilisant les moyens mis à leur disposition par leur employeur : visite de la société [J] INVEST chez CAPPSTAR, concurrent de la société HUWER établi à [Localité 9] en Italie et établissement d'un protocole d'accord de confidentialité entre la société [J] INVEST et M. [I], dirigeant de la société CAPPSTAR, portant sur un accord commercial pour distribuer les produits de cette société,
- M. [V] et Mme [J] étaient présents au Conseil d'administration du Syndicat professionnel FNSA du 29 mars 2018,
- Mme [J] a formulé une proposition de « grasse rémunération » pour la société [J] INVEST dans le cadre de la joint-venture avec la société SHANGHAI ELETRIC.
Elle en conclut que les manquements reprochés constituent une faute grave dans la mesure où Mme [J] est salariée de la société HUWER SERVICES et actionnaire de la société HUWER HOLDING
Elle soutient en outre que les courriers électroniques produits ont été adressés et reçus par la salariée à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail, de sorte que ces courriers, ainsi que le procès-verbal d'huissier, constituent des preuves licites qu'il n'y a pas lieu d'écarter.
En réponse, Mme [J] affirme que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle expose que :
- Le licenciement a été orchestré par les sociétés HUWER HOLDING et EXIMIUM à la suite de la prise de contrôle par cette dernière du Groupe HUWER,
- La société ne rapporte pas la preuve que Mme [J] et M. [V] se seraient rapprochés de M. [R] gérant de la société GSTI, et de M. [B], salarié d'HUWER HOLDING, afin d'entreprendre une affaire de vente de pièces détachées directement concurrente de l'activité de la SAS HUWER HOLDING,
- Mme [J] n'a pas pu rencontrer M. [B] le 12 mars 2019 compte tenu de son emploi du temps,
- Un contrat d'exclusivité a été mis en place par M. [V] lui-même entre la société HUWER HOLDING et la société GSTI, excluant ainsi toute activité concurrente,
- A défaut pour la SAS HUWER HOLDING de démontrer que Mme [J] et M. [V] étaient informés de la possibilité pour HUWER de consulter leur ordinateur, fichiers, messageries en leur absence, les éléments de preuves recueillis à leur encontre doivent être écartés,
- La procédure de sanction est entachée d'irrégularité'puisque le fait de s'être rendu chez CAPPSTAR a été découvert postérieurement à son entretien préalable, de sorte que ce fait aurait dû faire l'objet d'une nouvelle convocation à entretien préalable, et ne saurait s'ajouter aux griefs évoqués dans la lettre de licenciement,
- En tout état de cause, la société CAPPSTAR n'est pas concurrente de la SAS HUWER HOLDING en ce qu'elle ne produit que des véhicules électriques,
- Quand bien même la société CAPPSTAR serait concurrente, ils se sont rendus chez CAPPSTAR, en leur qualité d'actionnaires de la SARL [J] INVEST, pendant la suspension de leur contrat de travail et la période de mise à pied à titre conservatoire,
- La SAS HUWER HOLDING lui reproche dans ses écritures une action de concurrence déloyale, alors que celle-ci n'était pas mentionnée dans la lettre de licenciement, et que la société ne démontre pas la mise en 'uvre par Mme [J] et M. [V] d'un procédé constitutif d'une concurrence déloyale,
- Mme [J] a été invitée à titre personnel par le Président du FNSA,
- Mme [J] et M. [V] n'ont pas proposé de rémunération élevée pour leur société [J] INVEST au titre de son intervention dans le cadre de la joint-venture.
Réponse de la cour':
Selon l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Selon les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié. Cette lettre, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d'en apprécier la réalité et le sérieux.
Il convient de rappeler que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, pendant la durée du préavis. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.
L'employeur n'est pas tenu de procéder à une mise à pied conservatoire avant d'engager la procédure de licenciement pour faute grave.
En application de ces dispositions, il est constant que durant l'exécution de son contrat de travail, le salarié est tenu d'une obligation de loyauté qui lui fait interdiction d'exercer pour une société concurrente de l'employeur ou pour son propre compte une activité concurrente, et ceci même en l'absence de toute clause spécifique dans le contrat de travail, telle une clause de non-concurrence.
Pour autant, pendant l'exécution du contrat de travail, le salarié peut préparer la création d'une entreprise concurrente à condition que cette concurrence ne soit effective qu'après l'expiration du contrat de travail.
Une fois que le contrat de travail est rompu, le salarié a le droit de créer une entreprise ayant la même activité que celle de son ex-employeur, dès lors qu'il n'est pas soumis à une clause de non-concurrence.
En l'espèce, la lettre de licenciement adressée par la SAS HUWER HOLDING à Mme [J] le 04 avril 2019 indique':
«'Madame,
Lors de notre entretien de ce 1er Avril 2019, nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre.
Vous occupez au sein de la société HUWER Holding un poste à temps complet de Directrice
Commerciale depuis le 1er janvier 2018, moyennant un salaire brut mensuel de 7.250 €.
Dans le cadre de vos fonctions, vous étiez chargée des études de marchés, de la communication, de l'organisation des salons et des évènements commerciaux, du management des équipes de vente et du service client de la Société HUWER HOLDING ou ses filiales qui opèrent dans le secteur de la conception, la fabrication, l'entretien et les services des véhicules dédiés à l'assainissement, ainsi que de leurs accessoires ou de leurs pièces détachées.
A ce titre, vous étiez notamment censée représenter les intérêts des sociétés du Groupe HUWER auprès de tous les partenaires du Groupe, tant en France qu'à l'étranger.
Monsieur [A], Responsable des achats du groupe HUWER, ainsi que Monsieur. [T], Directeur Général du groupe HUWER, ont attesté que le 15 mars dernier, ils ont rencontré Monsieur [R], Dirigeant de la Société GSTI, un de nos fournisseurs.
A cette occasion ils ont appris que, quelques jours plus tôt, Monsieur [Z] [V], votre compagnon qui occupe les fonctions de Directeur Général HUWER SERVICES, et qui est votre associé dans la Société [J] INVEST dont vous êtes la gérante, a sollicité Monsieur [R] sur un projet consistant à monter une affaire de vente de pièces détachées directement concurrente de l'activité de la Société HUWER avec du personnel de celle-ci, dont Monsieur [B], qui est Commercial « pièces détachées ».
Monsieur [B], rencontré le jour même, a attesté que le 6 mars dernier, Monsieur [V] l'a contacté pour le recruter dans un projet de vente de pièces détachées afin de concurrencer HUWER.
Il lui a été expliqué que ce projet était déjà un peu abouti avec celui de la vente de véhicule d'occasion, et la constitution d'un magasin de pièces.
Il lui a été demandé s'il souhaitait investir des fonds avec Monsieur [V] et avec vous-même.
Il lui a été demandé son numéro de téléphone personnel pour être joint plus facilement.
Madame [L] [J] a confirmé de vive voix ce projet à Monsieur [B] en lui indiquant qu'il serait recontacté.
Monsieur [B] atteste qu'à l'occasion d'une rencontre à la société HUWER, vous lui avez-vous-même indiquer de vive voix que Monsieur [V] allait le recontacter à ce sujet.
Monsieur [B] n'a pas apprécié que son nom ait pu être utilisé auprès d'un de nos fournisseurs au soutien de votre projet.
Monsieur [B], s'est d'ailleurs dit soulagé comme notre fournisseur, par la révélation de cette affaire, tant lui pesait la forte oppression que constituait pour lui une telle proposition appuyée par sa supérieure hiérarchique ce qui, évidemment, le plaçait en situation délicate pour la dénoncer.
Mais ce n'est pas tout.
Après avoir récupéré l'ordinateur portable et la gestion du compte de messagerie professionnelle qui étaient affectés à Monsieur [V], à la suite de sa mise à pied conservatoire de ce 18 mars, nous avons pris connaissance, ce qui a été constaté par Huissier :
- d'un courriel adressé par Monsieur [V] vers votre messagerie personnelle le 28 février 2019 à 11h38 contenant un projet d'accord de confidentialité à en-tête de la Société [J]-INVEST, destiné à Monsieur [W] [I], dirigeant de la Société italienne CAPPSTAR, un de nos concurrents basé à [Localité 9], portant sur un accord commercial pour distribuer les produits de cette société ou de ses filiales identifiées comme « spécialisées dans la production équipements montés sur des châssis de camions utilisés pour l'aspiration de déchets d'égouts, pour le nettoyage haute pression de conduits et tuyaux »,
Gbf c
- d'un courriel en date du 6 mars 2019 vous confirmant une réservation d'une chambre double par l'Hôtel BEST WESTERN à [Localité 9] pour le mercredi 20 mars 2019,
- d'un courriel du 11 mars 2019 confirmant une réservation d'une chambre par l'Hôtel PARK HOTEL à l'Aéroport de [Localité 10] au nom de Monsieur [D] [E] pour le mercredi 20 mars,
- d'un courriel du 21 mars 2019 vous transmettant la copie du rapport de restitution que Monsieur [V] a signé sur place le même jour, d'un véhicule loué auprès de l'Agence EUROPCAR de l'aéroport de [Localité 10].
Il s'agit d'un faisceau d'éléments qui établissent que vous avez entrepris de déployer, en complicité avec Monsieur [V] et par le biais de la Société [J] INVEST, une autre activité encore, directement concurrente elle aussi, de celle du Groupe HUWER qui vous emploie.
Nous avons aussi appris que vous n'aviez pas hésité, le 29 mars 2019, à vous rendre à [Localité 5] pour siéger au Syndicat professionnel FNSA en compagnie de Monsieur [V] en vous faisant inviter comme « expert », alors que vous y siégiez en seule qualité de délégué désigné par le Groupe HUWER, qui est l'adhérent, et qui ne paye pas ses cotisations pour financer votre publicité personnelle au cours d'une mise à pied conservatoire.
Vous avez ainsi profité des relations commerciales, des connaissances techniques, et des moyens mis à votre disposition par votre employeur dans le cadre de vos fonctions pour déployer des projets concurrents dans le but de servir votre intérêt personnel.
Vous n'avez pas craint d'initier ou de participer à des opérations tendant à déstabiliser les sociétés du Groupe consistant à débaucher son personnel, impliquer ses fournisseurs, et nouer des relations commerciales secrètes avec ses concurrents directs.
L'ensemble de ces man'uvres caractérisent un véritable abus de confiance prémédité, et, à tout le moins, de sévères manquements aux obligations de fidélité et de loyauté dues à votre employeur, d'autant plus renforcées compte tenu des fonctions que vous occupez.
Il est clair que vous n'avez pas renoncé à ce projet puisque vous avez manifestement, au mépris de votre mise à pied et des arrêts de travail pour maladie que vous nous avez transmis, maintenu les actions que vous aviez programmées.
Lors de notre entretien préalable, au cours duquel vous avez eu tout loisir de vous expliquer, vous vous êtes bornée, en substance, à nier ces faits, à critiquer la bonne marche du Groupe dont vous aviez pourtant la direction opérationnelle, avec Monsieur [V], toutes ces dernières années.
Vous avez en outre tenté de faire diversion en regrettant, ce qui est un comble, l'accueil réservé face à la récente proposition de Monsieur [V] concernant le dossier d'expansion de l'activité du Groupe HUWER vers la CHINE, avec un partenaire pourtant présenté par son associé, le Groupe EXIMIUM, qui consistait au premier chef à voir rémunérer grassement votre société FRANT INVEST comme pilote du projet, ce qui n'a pu que nous conforter dans vos intentions de favoriser par priorité, en toute désinvolture, votre intérêt personnel.
Les conséquences immédiates de votre comportement rendent impossibles la poursuite de votre activité au service de l'entreprise même pendant la durée du préavis.
Nous nous voyons donc dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail qui vous lie à notre entreprise.
Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave à effet immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture.
Vous cesserez définitivement de faire partie du personnel de notre entreprise à la première présentation de ce courrier.
Enfin, nous vous sommons de nous restituer, ou de détruire à réception de la présente, ou en tout cas de ne pas conserver, sous quelque forme que ce soit et quelqu'en soit le support, tout document technique, commercial, financier, de quelque nature qu'il soit, relatif à l'activité du Groupe HUWER HOLDING ou de ses filiales auquel vous auriez eu accès dans le cadre de vos fonctions.
Il vous sera remis par correspondance séparée les documents consécutifs à la rupture de votre contrat ».
' Sur le développement d'un projet de vente de véhicules d'occasion et de constitution d'un magasin de pièces détachées directement concurrent à l'activité de la société HUWER, avec du personnel de celle-ci':
La SAS HUWER HOLDING produit trois attestations pour justifier ce grief.
M. [Y] [T], directeur général du groupe Huwer, et monsieur M. [O] [A] responsable achats du groupe Huwer, attestent avoir rencontré M. [R], dirigeant de la société GSTI, fournisseur de la société HUWER SERVICES, le 15 mars 2019, lequel leur a indiqué que':
- Il avait rencontré M. [V] cette même semaine,
- M. [V] voulait monter une affaire de pièces détachées, et tout l'atelier ainsi que les agences étaient au courant,
- M. [V] lui avait déclaré «'qu'il était venu le voir dans le cadre d'une fourniture éventuelle de pièces détachées'»,
- M. [V] lui avait clairement parlé de [N] [B] qui ferait partie prenante du projet,
- Il refuserait de travailler et fournir des pièces à un autre client qu'HUWER si son contrat était confirmé,
- Il était soulagé de les rencontrer car «'entre deux eaux suite aux longues relations et au contrat qu'il avait avec la société HUWER'».
M. [Y] [T] et M.[O] [A] indiquent qu'ils ont ensuite le même jour rencontré M.[B], lequel leur a déclaré que':
- Il avait effectivement été contacté par M. [V], une première fois par téléphone, puis il avait ensuite rencontré Mme [J] et M. [V] ce mardi sur le site de [Localité 8],
- M. [V] et Mme [J] lui ont proposé de démissionner pour participer à une nouvelle affaire de pièces détachées et d'investir dans l'affaire,
- M. [V] et Mme [J] lui ont exprimé leurs intentions d'embaucher d'autres salariés,
- Le sujet était tellement lourd qu'il en avait informé ses collègues au magasin,
- Il avait pris une demi-journée de congés ce vendredi 15 après-midi car il souhaitait absolument éviter Mme [J] et M. [V] qui l'avaient informé de leurs venues sur le site afin discuter du sujet.
M. [B], commercial pièces détachées, salarié de la société Huwer atteste de son côté que': «'Le mercredi 6 mars 19, j'ai été contacté par M. [V], qui se trouvait dans les locaux de l'agence Sud, afin de me recruter pour un projet de ventes de pièces détachées afin de concurrencer «'Huwer'». Ce projet étant déjà un peu abouti avec la vente de véhicules d'occasion et viendrait en plus un magasin de vente de pièces. Il m'a été demandé aussi si je voulais investir des fonds au sein d'une coopérative, avec M. [V] et Mme [J] et d'autres investisseurs (agences). Je n'ai pas répondu à leurs demandes et je leur ai dit que je devais réfléchir. Par la suite il m'a été demandé mon numéro de téléphone personnel afin de me contacter plus facilement. J'ai rencontré Mme [J] par la suite, qui m'a dit que [Z] allait me contacter prochainement. Après la rencontre de M.[T] et M.[A] chez notre fournisseur GSTI, cette affaire a été mise au grand jour et j'ai eu un entretien avec M.[T] où j'ai raconté cette affaire. J'étais sur le fait, un peu coincé car, à l'heure actuelle, Mme [J] est ma supérieure hiérarchique, et que j'ai une crainte vis-à-vis de son statut. Je n'apprécie pas le fait que ces personnes, M. [V] et Mme [J], utilisent mon nom à des fins personnelles afin de construire leur projet.'»
Il convient de noter que s'agissant de M.[T] et M.[A], ils ne font que relayer les propos de M. [R] concernant un projet de créer une affaire de pièces détachées dont lui auraient parlé M. [V] et Mme [J], sans autres précisions.
Les déclarations de M. [B] corroborent en revanche la réalité de ce projet, même s'il n'apporte pas davantage d'éléments sur les circonstances dans lesquelles M. [V] et Mme [J] envisageaient de créer cette affaire de pièces détachées.
En outre, l'attestation de M. [B] est très claire sur le fait que M. [V] et Mme [J] lui ont proposé de démissionner pour participer et investir dans cette affaire.
Mme [J] soutient que ces attestations sont de complaisance afin de les évincer elle et M. [V], compte tenu de leurs désaccords persistants avec la société EXIMIUM.
Elle produit ainsi deux courriers électroniques desquels il ressort que':
* Le 11 décembre 2018 07h50, M. [M], président de la SAS HUWER HOLDING, envoie à plusieurs destinataires de la société EXIMIUM, dont M.[P], président du conseil de surveillance de EXIMIUM, le protocole d'accord signé le 10 décembre 2018, aux termes duquel la société [J] INVEST s'est engagée à ne pas voter contre l'augmentation de capital de la société HUWER HOLDING, en contrepartie de quoi EXIMIUM s'engageait notamment à':
- maintenir le contrat de travail de Mme [J] et fournir un contrat de travail à M. [V] dans le cadre des fonctions de «'Directeur Général Huwer Services'»
- lui rembourser l'intégralité de son compte courant d'associé en cas de :
* Départ forcé (sans accord) à l'initiative d'EXIMIUM ou de HUWER HOLDING de [Z] [V] ou [L] [J] ;
* Cession partielle de HUWER HOLDING.
* M. [P] répond': «'En somme, quoi qu'il arrive, ils récupèrent leurs 500K plus les indemnités de licenciement en remerciement de leur excellent travail. Quel est le montant des indemnités si on les licencie maintenant'' J'ai vraiment l'impression d'être le dindon de cette farce qui dure depuis 3 ans.'»
La SAS HUWER HOLDING n'apporte aucune explication en réponse sur le contenu de ces courriers électroniques, et il sera ainsi noté que la réalité des tensions existants entre d'une part les sociétés EXIMIUM et HUWER HOLDING et d'autre part [Z] [V] et [L] [J], lors de l'augmentation de capital de la société HUWER HOLDING n'est contestée par aucune des parties.
Pour autant, il sera aussi relevé que ces courriers électroniques ont été rédigés avant la signature le 21 décembre 2018 du contrat à durée indéterminée entre la société HUWER HOLDING et M. [V].
Surtout, ces courriers électroniques ne sont pas suffisants pour remettre en cause l'attestation précise et circonstanciée de M.[B], laquelle est en outre corroborée par celles de Messieurs [A] et [T], s'agissant de la proposition de démission qui lui a été faite, afin de s'engager dans un nouveau projet de vente de pièces détachées, et concurrencer HUWER.
Enfin, Mme [J] indique que M. [V] n'a pas proposé à M.[B] de démissionner mais qu'il l'a plutôt incité à rester dans l'entreprise, mais elle n'apporte aucun élément au soutien de cette affirmation.
Par conséquent, il sera retenu que le grief est établi s'agissant de la tentative de captation d'un salarié réalisée par M. [V] et Mme [J], laquelle était de nature à entrainer la confusion ou la désorganisation de l'activité de la SAS HUWER HOLDING, et ce dans le cadre d'un projet d'activité concurrente, sans pour autant que les éléments produits aux débats ne viennent confirmer l'exercice effectif ou le commencement d'exécution de cette activité.
'Sur le déplacement en Italie et l'accord commercial avec un concurrent :
Selon l'article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.
En application de ces dispositions, les courriels adressés et reçus par le salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l'exécution de son travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y accéder hors la présence du salarié.
Ainsi, l'employeur ne peut, sans violer le droit du salarié au respect de l'intimité de sa vie privée qui implique le secret des correspondances, prendre connaissance des messages personnels du salarié qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé.
Selon l'article L. 1332-3 du code du travail, lorsque les faits reprochés au salarié ont rendu indispensable une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiat, aucune sanction définitive relative à ces faits ne peut être prise sans que la procédure prévue à l'article L 1233-2 du code du travail ait été respectée.
Cette procédure prévoit l'audition du salarié dans un entretien au cours duquel l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille ses observations.
En application de ces dispositions, il est constant que l'employeur peut invoquer tous les motifs mentionnés dans la lettre de licenciement, même ceux qui n'auraient pas été évoqués au cours de l'entretien. La circonstance que le grief énoncé dans la lettre de licenciement n'a pas été indiqué au salarié lors de l'entretien préalable caractérise une irrégularité de forme qui n'empêche pas le juge de décider que ce grief peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Au soutien de ce grief, la SAS HUWER HOLDING produit':
- Un procès-verbal de constat d'huissier en date du 26 mars 2019 attestant de la présence dans l'ordinateur de M. [V], restitué lors de sa mise à pied le 18 mars 2019,'de courriers électroniques expédiés ou reçus sur l'adresse «'[Courriel 4]'» et notamment :
- Un courrier électronique du 28 février 2019 à 11h38 expédié par [Courriel 4] à [Courriel 6] contenant une pièce jointe intitulée /NDA CAPPSTAR.docx.
L'ouverture de cette pièce jointe fait apparaitre un document à l'entête [J] INVEST à l'attention de M.[W] [I] à [Localité 9]-Italia.
- Trois courriers électroniques démontrant que M. [V] s'est rendu en Italie':
* Un courriel du 6 mars 2019 expédié par [Courriel 4] à [Courriel 6], contenant le transfert d'un message de confirmation de réservation à l'établissement BEST WESTERN de [Localité 9] pour le 20 mars 2019,
*Un courriel du 11 mars 2019 expédié par Annia Park Hotel [Localité 10] Airport à [Courriel 4] confirmant la réservation d'une chambre d'hôtel à l'aéroport de [Localité 10] au nom de [D] [E] pour le 20 mars 2019,
* Un courriel du 21 mars 2019 adressé à [Courriel 4], transmettant à M. [V] un rapport de restitution de véhicule d'un véhicule loué du 20 au 21 mars 2019, auprès de l'agence de location EUROPCAR de l'aéroport de [Localité 10].
D'une première part, il convient d'observer que les quatre courriers électroniques susvisés proviennent de la boite aux lettres professionnelle HUWER de M. [V], et non d'une boite aux lettres personnelle, de sorte qu'ils sont présumés avoir un caractère professionnel.
C'est donc à tort que Mme [J] soutient que ces courriers électroniques doivent être écartés, au motif qu'ils n'auraient pas été informés avec M. [V] de la possibilité pour la société HUWER de consulter leur ordinateur et leur messagerie professionnelle en leur absence.
En outre, comme l'a justement relevé la SAS HUWER HOLDING, aucun élément de ces courriers électroniques ne met en évidence qu'ils auraient un caractère personnel, et les fichiers ne sont pas non plus identifiés comme étant personnels.
Par conséquent, ces courriels et le procès-verbal constituent des preuves licites, qu'il n'y a pas lieu d'écarter.
D'une deuxième part, il a été rappelé que ce grief doit être examiné, quand bien même il n'a pas été indiqué dans la lettre de licenciement, charge au salarié de demander une éventuelle réparation pour cette irrégularité de forme, ce qu'il ne fait pas en l'espèce.
D'une troisième part, il résulte de ces pièces que le fichier électronique attaché au courriel du 28 février 2019 contient un protocole d'accord de confidentialité entre la société [J] INVEST et Monsieur [I] dirigeant de la société CAPPSTAR, portant sur un accord commercial pour distribuer les produits de cette société ou n'importe laquelle de ses filiales identifiée comme « spécialisée dans la production d'équipements montés sur des châssis de camions utilisés par l'aspiration de déchets d'égout, pour le nettoyage haute pression de conduits et tuyaux et pour le transport de matières dangereuses ».
Mme [J] ne conteste pas s'être rendue avec M. [V] au sein de la société CAPPSTAR à SILEA en Italie, expliquant qu'ils ne sont pas tenus d'une obligation de non-concurrence et qu'ils ont agi en leur qualité d'actionnaires de la société [J] INVEST, pendant la suspension de leur contrat de travail et la période de mise à pied à titre conservatoire.
Or il sera relevé que':
- La SAS HUWER HOLDING démontre que la société CAPPSTAR produit des camions électriques, hybrides et traditionnels, de sorte qu'il s'agit d'une activité concurrente de la SAS HUWER HOLDING,
- Si le voyage à [Localité 9] est intervenu les 20 et 21 mars 2019, soit après la mise à pied conservatoire du 19 mars 2019, le protocole d'accord ainsi que les réservations ont manifestement été réalisées avant.
Mais il sera aussi relevé que':
- Ce protocole d'accord n'est ni daté ni signé,
- La SAS HUWER HOLDING savait depuis 2015 que Mme [J] et M. [V] étaient actionnaires de la société [J] INVEST, dont l'objet social réside, selon le contrat de prestations et d'assistance conclu entre les sociétés [J] INVEST et HUWER HOLDING le 01 juillet 2015, dans «'toute activité de conseils et de prestations de services en matière économique, financière et commerciale, informatique, ressources humaines, gestion, direction générale des entreprises, et plus généralement tout conseil stratégique managérial ou organisationnel, prise et gestion de participations financières'»,
- La SAS HUWER HOLDING ne produit aucune autre pièce établissant la mise en 'uvre de ce protocole d'accord par la société [J] INVEST, durant le temps où les contrats de travail de M. [V] et Mme [J] étaient en cours,
Dès lors, la SAS HUWER HOLDING est défaillante à apporter la preuve, qui lui incombe, de l'effectivité ou du commencement d'exécution d'un quelconque accord entre la société [J] INVEST et la société CAPPSTAR, de nature à révéler un acte fautif constitutif de concurrence déloyale, dès lors qu'il porterait atteinte à l'activité de la SAS HUWER HOLDING, dans le but de favoriser une entreprise directement concurrente.
Enfin, le fait que Mme [J] a refusé dans un premier temps de restituer son ordinateur portable ne suffit pas à en tirer des conséquences s'agissant de l'effectivité de cette activité concurrente.
Ce grief n'est donc pas établi.
' Sur la présence au Conseil d'administration du Syndicat professionnel FNSA du 29 mars 2019 :
La SAS HUWER HOLDING n'apporte aucun élément sur ce point dans ses écritures.
A l'inverse, Mme [J] justifie avoir été invitée à titre personnel, et non en qualité de salariée de la SAS HUWER HOLDING.
Ce grief ne peut donc être retenu.
'Sur la proposition de « grasse rémunération » pour la société [J] INVEST dans le cadre de la joint-venture avec la société SHANGHAI ELETRIC':
La SAS HUWER HOLDING n'apporte aucun élément sur ce point dans ses écritures.
Ce grief ne peut donc être retenu.
Dès lors, il résulte de l'ensemble de ces éléments que seul le premier grief est partiellement établi, soit la tentative de captation d'au moins un salarié réalisée par M. [V] et Mme [J], dans un contexte de projet de création d'activité concurrente de celle de la SAS HUWER HOLDING, ce fait étant de nature à rompre la confiance entre l'employeur et le salarié.
Pour autant, il n'est pas prouvé que le projet d'activité ait dépassé le stade de projet, de sorte que cet acte fautif ne peut suffire à caractériser une faute grave, rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré que le licenciement de Mme [J] n'était pas fondé sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera ainsi confirmé sur ce point.
Par suite, la SAS HUWER HOLDING sera condamnée, par confirmation du jugement entrepris, à payer à Mme [J] les sommes suivantes, étant précisé qu'elle contestait uniquement leur principe, sans en contester le calcul':
* 2265,62 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
* 4660,61 euros bruts au titre du paiement de la mise à pied conservatoire,
* 446,06 euros bruts au titre des congés payés afférents,
* 29.000,00 euros au titre de l'indemnité de préavis,
* 2900,00 euros au titre des congés payés sur préavis.
2- Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire :
Moyens des parties :
Mme [J] expose qu'après une carrière exemplaire au sein de la SAS HUWER HOLDING, elle a très mal vécu le « rendez-vous » du 18 mars 2018 et les conditions particulièrement brutales et vexatoire dans lesquelles est intervenu son licenciement.
Elle rappelle que son employeur lui a notifié, avant même son entretien préalable, une sommation interpellative convertie en sommation de restituer son ordinateur professionnel,
L'employeur ne conclut pas sur ce point'.
Réponse de la cour':
Il est de principe que le salarié licencié peut prétendre à des dommages-intérêts sur le fondement de la responsabilité civile prévue aux articles 1240 et suivants du code civil dans leur version applicable à l'espèce en réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi à la condition de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement de nature brutale ou vexatoire et de justifier de l'existence de ce préjudice, que le licenciement soit ou non fondé sur une cause réelle et sérieuse.
En l'espèce, il résulte des pièces produites que':
- Les sociétés HUWER HOLDING et EXIMIUM ont fixé un rendez-vous le 18 mars 2023 à M. [V] et Mme [J], en leur qualité d'associés de la société [J] INVEST, pour évoquer un projet commun, au terme duquel M.[M] est sorti pour revenir accompagné de M. [P], président du conseil de surveillance d'EXIMIUM, de la directrice des ressources humaines et d'un huissier de justice,
- La SAS HUWER HOLDING ne conteste pas avoir laissé les deux actionnaires réaliser leur présentation, alors que la remise de leur convocation pour un entretien préalable au titre de leur statut de salarié et leur mise à pied était manifestement organisée,
- Il a ensuite été enjoint à M. [V] et Mme [J] de remettre immédiatement tous leurs effets professionnels, sous le'contrôle de l'huissier,
Il sera ainsi relevé le caractère vexatoire de la méthode employée par la SAS HUWER HOLDING à l'égard de ces deux salariés.
La SAS HUWER HOLDING sera donc condamnée à payer une indemnité pour licenciement vexatoire, dont le montant sera évalué, par infirmation du jugement entrepris, à 2 000 euros.
3- Sur'l'obligation de sécurité et l'obligation de préserver la santé au travail :
Moyens des parties :
Mme [J] soutient, au visa de l'article L 4121-2 du code du travail, que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité ainsi que l'obligation de préserver la santé au travail. En effet, elle expose que :
- Elle a très mal vécu le « rendez-vous » du 18 mars 2018 et les conditions brutales et vexatoires de son licenciement,
- Elle a été victime de violence morale, voire physique puisque la directrice des ressources humaines, faisant preuve d'un excès de zèle, a tenté à plusieurs reprises de lui arracher des mains son ordinateur portable,
- Elle a été placée en arrêt maladie le 18 mars 2018 pour dépression.
L'employeur ne conclut pas sur ce point.'
Réponse de la cour':
Il résulte des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, une obligation légale de sécurité qui impose à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs notamment par des actions de prévention des risques. Il appartient au salarié de démontrer le préjudice qu'il invoque, dont les juges du fond apprécient souverainement l'existence. Enfin l'article L. 4121-2 du même code définit les principes généraux de prévention que doit respecter l'employeur pour mettre en 'uvre ces mesures.
En l'espèce, il convient de constater d'une première part que le fondement juridique développé par Mme [J] ne correspond pas à sa demande, laquelle consiste à solliciter la réparation des conditions dans lesquelles son licenciement est intervenu, et des conséquences en résultant sur le plan de sa santé.
D'une seconde part, les moyens de fait développés par Mme [J] au soutien de cette demande sont strictement identiques à ceux exposés au titre de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire.
D'une troisième part, Mme [J] ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui réparé dans le cadre de sa demande en indemnisation pour licenciement vexatoire.
Sa demande sera donc rejetée, par confirmation du jugement entrepris.
4- Sur la remise de l'attestation pôle emploi sous astreinte :
La SAS HUWER HOLDING devra remettre les documents sociaux de fin de contrat rectifiés conformément à la décision rendue.
La demande d'astreinte sera rejetée car elle n'est pas utile à l'exécution dans la présente décision.
5- Sur les demandes accessoires':
Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.
La SAS HUWER HOLDING, partie perdante, sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle devra payer une somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS':
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
DECLARE'la SAS HUWER HOLDING recevable en son appel,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a':
- Dit que le licenciement de Mme [J] est pourvu de cause réelle et sérieuse,
- Condamné la SAS HUWER HOLDING à payer à Mme [J] les sommes suivantes':
* 2265,62 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
* 4660,71 euros bruts au titre du paiement de la mise à pied conservatoire,
* 446,06 euros bruts au titre des congés payés afférents,
* 29.000,00 euros au titre de l'indemnité de préavis,
* 2900,00 euros au titre des congés payés sur préavis,
* 1000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Ordonné la remise des documents sociaux de fin de contrat rectifiés conformément à la décision rendue,
- Débouté Mme [J] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Débouté Mme [J] de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre de la violation de l'obligation de sécurité,
- Débouté la SAS HUWER HOLDING de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la SAS HUWER HOLDING aux dépens de l'instance.
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,
CONDAMNE la SAS HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 2 000 euros pour procédure vexatoire de licenciement,
Y ajoutant,
REJETE la demande d'astreinte,
CONDAMNE la SAS HUWER HOLDING aux dépens d'appel,
CONDAMNE la SAS HUWER HOLDING à payer à Mme [J] la somme de 1 500 € à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
DEBOUTE la SAS HUWER HOLDING de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,