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09/05/2023 | FRANCE | N°16/01931

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 09 mai 2023, 16/01931


N° RG 16/01931 - N° Portalis DBVM-V-B7A-IO3M



N° Minute :





C3

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



la SELARL ROUANET



Me Myriam ROZIER



SELARL ROBICHON & ASSOCIES













AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR

D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 09 MAI 2023



Appel d'un Jugement (N° R.G. 07/00709) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP en date du 14 décembre 2015, suivant déclaration d'appel du 22 Avril 2016





APPELANTS :



M. [P] [M]

né le 01 Janvier 1944 à [Localité 10] (Italie)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité ...

N° RG 16/01931 - N° Portalis DBVM-V-B7A-IO3M

N° Minute :

C3

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL ROUANET

Me Myriam ROZIER

SELARL ROBICHON & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 09 MAI 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 07/00709) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP en date du 14 décembre 2015, suivant déclaration d'appel du 22 Avril 2016

APPELANTS :

M. [P] [M]

né le 01 Janvier 1944 à [Localité 10] (Italie)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 8]

Mme [H] [S]

née le 01 Avril 1942 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentés par Me Yann ROUANET de la SELARL ROUANET, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

INTIM ÉS :

M. [B] [K]

né le 27 Juillet 1960 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Myriam ROZIER, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

Compagnie d'assurances MAAF, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Jean ROBICHON de la SELARL ROBICHON & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me BERTHIER, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 février 2023, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, en présence de Laurent Grava, conseiller, assistés de Caroline Bertolo, greffière, ont entendu seuls les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat en date du 27 mai 2006, les époux [M] ont chargé M. [B] [K] de réaliser des travaux de rénovation de leur maison, sise à [Localité 9], [Adresse 7], pour un montant de 26.000 euros.

Suite à un litige, un accord transactionnel est intervenu entre les parties.

Par acte d'huissier du 21 mai 2007, les époux [M] ont saisi le juge des référés de Gap, aux fins d'expertise.

Par ordonnance du 27 juin 2007, une mesure d'expertise a été ordonnée.

Parallèlement, par exploit signifié le 2 juillet 2007, les époux [M] ont saisi le tribunal de grande instance de Gap, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, en réparation de leur préjudice.

L'expert a déposé son rapport définitif le 20 décembre 2012.

Par jugement du 14 février 2015, le tribunal de grande instance de Gap a:

-rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise réalisé par Monsieur [C] [Y] aux termes d'une ordonnance de référé du 27 juin 2007,

-déclaré M. [B] [K] responsable du préjudice subi par M.[P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] au titre de la garantie de parfait achèvement à hauteur de 13.420,00 euros,

-condamné M. [B] [K] à payer à M. [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] la somme de 13.420,00 euros au titre de la garantie de parfait achèvement,

- Rejeté toutes les autres demandes,

- Condamné M. [B] [K] à payer à M. [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] la somme de 1.800,00 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile,

-rejeté la demande de la compagnie MAAF assurances présentée sur ce même fondement,

-condamné M. [B] [K] aux dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise dont distraction au profit de Me Arnaud dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 26 avril 2016, les époux [M] ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs conclusions notifiées le 16 décembre 2021, les époux [M] demandent à la cour de:

Vu l'article 1792-6 du code civil,

Vu les articles 1130, 1217 et 1231-1 du code civil,

Vu le rapport d'expertise établi par M. [Y],

Vu les pièces versées aux débats,

-dire et juger les époux [M] recevables et fondés en leur appel

-infirmer en conséquence le jugement dont appel, et statuant à nouveau

-constater la pleine et entière responsabilité de M. [K] dans l'existence des désordres affectant le chalet des époux [M] et le préjudice global subi par ces derniers,

Au principal

-dire et juger que la reprise des désordres constatés relève de la garantie de parfait achèvement de l'entrepreneur,

-condamner solidairement M. [K] et son assureur, la compagnie MAAF assurances, à payer aux époux [M] les sommes de :

' 120.703 euros TTC, réévalué à 150.877 euros TTC, à titre principal au titre de la reprise des malfaçons

' 6.655 euros TTC, réévalué à 8.316 euros TTC, à titre principal au titre de l'étude et du suivi de la reprise de certaines malfaçons

Vu l'article 1382 du code civil devenu le nouvel article 1240 du code civil,

-constater que les manquements de M. [K] ont causé des préjudices annexes aux époux [M], qu'il convient d'indemniser,

-condamner solidairement M. [K] et son assureur, la compagnie MAAF assurances, à payer aux époux [M] les sommes de :

' 6.930 euros TTC, réévalué à 8.662 euros TTC, au titre des préjudices complémentaires relatifs à la reconstruction du muret.

A titre subsidiaire

-dire et juger que les désordres non pris en compte au titre de la garantie de parfait achèvement relèvent d'une non-conformité au titre des désordres intermédiaires relevant de la garantie légale contractuelle ;

-condamner solidairement M. [K] et son assureur, la compagnie MAAF assurances, à payer aux époux [M] les sommes de :

' 120.703 euros TTC, réévalué à 150.877 euros TTC, à titre principal au titre de la reprise des malfaçons

' 6.655 euros TTC, réévalué à 8.316 euros TTC, à titre principal au titre de l'étude et du suivi de la reprise de certaines malfaçons.

Dans tous les cas

-condamner solidairement M. [K] et son assureur, la compagnie MAAF assurances, à payer aux époux [M] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise.

Au soutien de leurs demandes, les époux [M] contestent le fait que la transaction intervenue le 30 octobre 2006 ait mis un terme à toute contestation ultérieure puisque cet accord précisait explicitement que « M. [K] [serait] tenu des garanties habituelles des constructeurs ».

Ils énoncent que la garantie de parfait achèvement s'étend à tous les désordres et non pas seulement à ceux susceptibles de relever de la garantie décennale.

Ils déclarent que la responsabilité de M.[K] est totale, ainsi qu'en atteste le rapport d'expertise, et font état de leurs préjudices en lien avec les différents désordres relevés.

Dans ses conclusions notifiées le 20 septembre 2022, M. [K] demande à la cour de:

Recevant les présentes écritures et les déclarant bien fondées

Sur l'appel incident de M. [K]

Le déclarer recevable et bien fondé,

-réformer le jugement du tribunal de grande instance de Gap du 14 décembre 2015 en ce qu'il a refusé d'annuler le rapport d'expertise et statuant à nouveau annuler ce rapport d'expertise par application des articles 6.1. de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et 114 du code de procédure civile.

-dire que le rapport d'expertise ne peut être retenu même dans ses éléments,

-débouter les époux [M] de l'intégralité de leurs demandes.

Subsidiairement :

Sur l'appel incident de M. [K],

Le déclarer recevable et bien fondé

-constater le caractère apparent à réception de l'ensemble des désordres et malfaçons dont les époux [M] sollicitent la réparation,

-constater qu'en vertu de l'article 2052 du code civil et en application du protocole d'accord conclu le 30 octobre 2006, les époux [M] ne sont pas fondés à solliciter l'achèvement et la finition des travaux tels qu'arrêtés par M. [K] au 30 octobre 2006,

-dire et juger que l'ensemble des malfaçons et préjudices, tous apparents, étaient nécessairement objets de la transaction et que les époux [M] ont renoncé à toute action à leur sujet,

Réformant la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré M. [B] [K] responsable du préjudice subi par [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] au titre de la garantie de parfait achèvement à hauteur de 13.420,00 euros et condamné aux dépens dont les frais d'expertise.

-mettre à néant la décision intervenue et débouter M. et Mme [M] de l'ensemble de leurs demandes, les condamner aux dépens de première instance et d'appel, y compris ceux de référé,

-débouter les époux [M] de leur réclamation d'une somme de 5 000 euros payée avant l'accord du 30 décembre 2006.

Très subsidiairement

Sur l'appel incident de M. [K],

-le déclarer recevable et bien fondé,

-réformer le jugement du tribunal de grande instance de GAP en ce qu'il l'a déclaré seul responsable des malfaçons retenues par la Cour, et statuant à nouveau dire que les époux [M] supporteront à hauteur d'au moins 50 pour cent la responsabilité pécuniaire des malfaçons et des préjudices annexes , visés dans leurs conclusions devant la cour ,en raison des fautes de leur mandataire [E] (erreurs de conception, défaut de conduite et de surveillance du chantier ayant participé aux dommages), ce par application des articles 1382,1492-4-1,1992 du code civil,

-fixer à la somme totale de 13 420 euros le montant des préjudices dans le cadre de la garantie de parfait achèvement invoquée par les époux [M],

-dire n'y a voir lieu à fixer un préjudice locatif, non établi, sans lien avec les préjudices indemnisés entrant dans le cadre de la garantie d'achèvement et qui aurait constitué en la perte d'une chance évaluée définitivement par l'arrêt à venir, et n'aurait pu prendre en compte la période 2010-2011 du fait de la suspension de ses opérations par l'expert .

-débouter les époux [M] de toute autre demande donc celles n'ayant pas été soumises à l'expert et qui sont contestés par M. [K],

-statuer ce que de droit sur la demande des époux [M] envers la compagnie MAAF,

-dire que compte tenu du partage de responsabilité et du montant des condamnations au regard des demandes, M. et Mme [M] supporteront 80% des dépens y compris les frais d'expertise.

M.[K] conclut en premier lieu à l'annulation du rapport d'expertise, soulignant que l'expert n'a procédé à aucune diligence pendant près de deux années, entre février 2010 et février 2012, qu'il est en outre sorti de son rôle technique pour donner un avis juridique, par exemple sur la portée de la transaction, ce qui a démontré sa partialité, et viole l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, notamment les principes de délai raisonnable et d'impartialité.

Il énonce que hormis le rapport d'expertise, il n'existe aucun autre élément utile aux fins de juger de la responsabilité de malfaçons qui ne sont pas techniquement décrites et qualifiées (aspect de l'immeuble, atteinte à la destination etc), et de fixer un coût des réparations qui ne sont pas contradictoirement établies.

Subsidiairement, il soulève l'irrecevabilité de la demande en raison de la transaction qui est intervenue. Il fait notamment valoir que le principe de la transaction était par essence de couvrir tous les désordres et malfaçons apparents à la date de sa conclusion, excluant que sa responsabilité puisse être recherchée concernant ceux-ci, à quel que titre que ce soit.

Concernant d'éventuels malfaçons et préjudices non objets de la transaction, il sollicite un partage de responsabilité compte tenu de l'implication de M.[E], en charge des plans, dans les désordres.

Il conteste l'évaluation des préjudices allégués par les époux [M] en rappelant le montant initial de son intervention.

Dans ses conclusions notifiées le 4 avril 2022, la MAAF demande à la cour de:

Vu l'accord transactionnel conclu entre les époux [M] et M. [K] le 30 octobre 2006

Vu le procès-verbal de réception avec réserves établi le 23 novembre 2006,

Vu le rapport d'expertise de M. [Y],

A titre principal,

-confirmer en tout point le jugement du 14 décembre 2015 ;

A titre subsidiaire,

-constater le caractère apparent à réception de l'ensemble des désordres et malfaçons dont les époux [M] sollicitent la réparation,

-constater que ces désordres et malfaçons, au titre desquels les époux [M] sollicitent la condamnation de M. [K] sur le fondement de sa garantie de parfait achèvement, sont strictement exclus de la garantie de responsabilité civile décennale de la MAAF,

-constater de façon surabondante qu'en vertu de l'article 2052 du Code civil et en application du protocole d'accord conclu le 30 octobre 2006, les époux [M] ne sont pas fondés à solliciter l'achèvement et la finition des travaux tels qu'arrêtés par M. [K] au 30 octobre 2006,

-dire et juger que ces désordres et malfaçons sont également exclus de l'assiette de la garantie responsabilité civile professionnelle de la MAAF,

-dire et juger qu'aucune des garanties de la MAAF ne couvre les désordres, malfaçons et non finitions dénoncés par les époux [M],

-dire et juger qu'aucun des préjudices matériels invoqués ne relevant des garanties de la MAAF, les époux [M] ne sont pas fondés à solliciter la condamnation de la MAAF, in solidum avec M. [K], à les indemniser de préjudices immatériels consécutifs par eux allégués, dont la réalité et le quantum ne sont au demeurant nullement justifiés.

En conséquence,

-débouter les époux [M] de leurs demandes dirigées à l'encontre de la MAAF,

-débouter M. [K] de toute demande qu'il dirigerait à l'encontre de la MAAF,

-dire et juger la MAAF hors de cause.

En tout état de cause,

-ramener les demandes des époux [M] à de plus justes proportions ;

-condamner les époux [M], ou qui mieux le devra, à verser à la MAAF la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner les époux [M], ou qui mieux le devra, aux entiers dépens, en ce inclus ceux d'expertise, dont distraction au profit de la SELARL Cabinet J. Robichon sur son affirmation de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

La MAAF énonce qu'en cause d'appel, les époux [M] ne formulent aucune critique sur la non garantie de la MAAF retenue par le tribunal.

Subsidiairement, elle conclut à l'inapplicabilité de ses garanties, puisque tous les points litigieux dont la reprise est sollicitée dans le cadre de la présente instance par les consorts [M] étaient apparents à réception, alors que la MAAF n'intervient qu'au titre de la garantie décennale.

Elle conteste en tout état de cause les préjudices allégués.

La clôture a été prononcée le 1erfévrier 2023.

MOTIFS

Sur la demande d'annulation du rapport d'expertise

Selon l'article 175 du code de procédure civile, la nullité des décisions et actes d'exécution relatifs aux mesures d'instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure.

M.[K] soulève la nullité de l'expertise sur différents points:

-la durée de la procédure,

-la partialité de l'expert,

-l'absence de réponse aux questions posées par le tribunal.

Sur la durée

L'expertise a été ordonnée selon ordonnance du 27 juin 2007. Le rapport final a été déposé le 11 octobre 2012.

Les premières observations formulées par l'expert datent du 20 mars 2008, suivis de pré-conclusions le 20 septembre 2008, puis d'observations le 7 novembre 2008. Il a ensuite adressé un courrier aux parties le 2 mars 2009.

Par ordonnance du 26 février 2010, les opérations d'expertise ont été étendues à la SARL [E], et par courrier du 12 avril 2011, le juge chargé des expertises a adressé un courrier à l'expert pour lui demander ses explications sur le retard pris dans le dépôt du rapport.

Pour autant, force est de constater que ce courrier du juge faisait suite à un courrier du Conseil des époux [M] en date du 4 avril 2011 et non de celui de M.[K], qui ne démontre pas avoir effectué de quelconques démarches aux fins d'obtenir ledit rapport.

M.[K] affirme que le retard pris par l'expert a eu des conséquences car cela l'empêche de gérer correctement son patrimoine, une hypothèque ayant été prise par les époux [M] sur son bien, mais il ne rapporte pas la preuve de ce qu'il allègue et ne démontre pas que la durée de l'expertise a eu des conséquences préjudiciables pour lui.

Sur la partialité de l'expert

M.[K] énonce que l'expert s'est montré partial en faisant appel à M.[E] alors que ce dernier était partie prenante dans le litige. Toutefois, l'expert a été capable de critiquer les travaux effectués par M.[E], en soulevant par exemple le fait que ses plans étaient essentiellement des croquis à main levée avec des ouvrages manquant de détails d'exécution.

Il a certes fait appel à ce dernier, mais en justifie dans son courrier du 2 mars 2009, en rappelant que l'intéressé, bien que sachant dans cette affaire, lui paraissait le plus apte à analyser les problèmes de structure et proposer les solutions techniques les plus adaptées. M.[K] ne démontre pas que ce recours à M.[E] a donné lieu à des observations ou bien à une saisine du juge chargé du suivi des expertises et en tout état de cause, ne démontre pas en quoi ce recours caractérise une quelconque partialité de l'expert.

Le fait d'aller au-delà de sa mission, par exemple en donnant son avis sur la portée de la transaction, ne caractérise pas non plus un défaut d'impartialité.

Sur les réponses aux questions posées par le tribunal

M.[K] allègue que l'expert n'a pas répondu aux questions posées par le tribunal, mais ne précise pas lesquelles et la lecture du rapport d'expertise ne permet pas non plus de le savoir.

Il résulte de ce qui précède qu'aucun motif ne justifie d'annuler l'expertise, le jugement sera confirmé.

Sur la transaction

Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

Ce contrat doit être rédigé par écrit.

Selon l'article 2052, la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet.

En l'espèce les époux [M] et M.[K] ont signé le 30 octobre 2006 une transaction rédigée comme suit:

'M. et Mme [P] [M] et M.[B] [K] conviennent de mettre fin à la date de ce jour au marché des travaux qui les liait, par la transaction suivante: M.[B] [K] arrête définitivement les travaux et met fin au chantier ce jour, et reconnaît que Mme et M.[P] [M] lui ont payé la totalité des travaux qu'il a réalisés à ce jour* et leur donne quittance définitive et pour solde de tous comptes; M.[B] [K] restera tenu des garanties habituelles des constructeurs'

*(les travaux en sus compensant les travaux en moins par rapport au devis du 27/5/2006)

Contrairement à ce qu'allègue M.[K], la transaction portait sur la réalisation des travaux puisque le litige portait sur le paiement de travaux et leur coût.

En aucun cas la transaction ne saurait porter sur d'éventuelles malfaçons et la phrase 'M.[B] [K] restera tenu des garanties habituelles des constructeurs ' doit être comprise comme obligeant M.[K] à être tenu à la réparation de malfaçons tant apparentes que non apparentes à réception.

En conséquence, du fait de la transaction, les époux [M] ne peuvent prétendre au remboursement de frais concernant des non-finitions, mais ils doivent être indemnisés pour les dommages résultant de malfaçons.

Il convient dès lors de distinguer dans les désordres allégués ce qui relève d'un défaut de finition de ce qui relève d'une réelle malfaçon.

Au titre des désordres, l'expert a relevé, tout en notant que la liste n'était pas limitative :

1 / Désaffleurements : les coffrages des rives de dalles ont été coffrés par des planches mal positionnées ou mal fixées: par conséquent, le béton déborde à l'extérieur, gênant la mise en place du bardage en bois ou la réalisation des enduits de façade. Ce défaut est général sur les trois faces de la construction.

2 / Dimensions fantaisistes des ouvertures, ni verticales, ni horizontales, c'est notamment le cas d'une petite ouverture en façade nord.

3 / Pignon ouest : défaut de verticalité de l'ordre de 9 cm, non aligné sur la façade du niveau inférieur. Ce mur présente un risque d'instabilité ayant obligé le charpentier à placer des poteaux en bois pour soutenir provisoirement la charpente.

4 / Défaut de verticalité d'autres ouvrages comme certaines parties du mur de refend en rez-de-chaussée, et plus particulièrement le trumeau contre la façade ouest.

5 / Nombreuses armatures à béton apparentes ou enrobage insuffisant : poteaux extérieurs, linteaux et poutres intérieurs, tirant noyé dans le plancher supérieur, rive de dalles. La présence de ces armatures apparentes nécessitera le piquage du béton ou le traitement à l'aide d'un produit de passivation.

6 / L'ancienne charpente près du faîtage est mal coupée et apparente. Il sera nécessaire de casser la maçonnerie autour afin de dégager cette pièce de bois et de l'évacuer.

7 / En rez-de chaussée, la liaison poteau-poutre est mal réalisée, la poutre ne repose pas correctement sur le poteau, l'expert indiquant que c'est l'un des points particuliers les plus importants qui ont été analysés par le laboratoire Ginger CEBTP.

8 / Au rez-de-chaussée, la dalle n'est pas de niveau, présentant un défaut d'horizontalité et de planimétrie de 6 cm.

9 / le remplacement de la dalle pleine par un plancher hourdis partiel au 1er étage de l'appentis : la trémie dans la zone intérieure n''a pas les dimensions demandées.

10 / Au rez-de-chaussée, le poteau sud d'appui de la ferme de la toiture n'aurait pas été fait au bon endroit, l'expert précisant qu'il ne peut pas se prononcer au vu des pièces qui lui ont été communiquées.

11 / les hourdis en plafond du rez-de-chaussée sont irréguliers, leur sous-face n'étant pas dans le même plan, ce qui nécessitera un traitement particulier par exemple par faux plafond vissé.

12 / Au sous-sol, la partie haute du voile béton de confortement intérieur ouest de la pièce voûtée et les encadrements de l'ouverture ne sont pas finis, et des calfeutrements divers ne sont pas réalisés.

13 / Le sabot de l'appui nord de la ferme de toiture n'a pas été scellé sur le poteau prévu à cet effet mais sur le mur, l'expert précisant que ce point est sans conséquence.

14 / Le pignon ouest au-dessus de l'appentis du1er étage n'est pas vertical. Le défaut n'est pas très important et ne nécessite pas de réparation, pouvant aisément être repris par le doublage isolant.

15 / il y a un défaut de scellement des solives (qui se trouvent sous la dalle de l'appentis et sortent de la façade) qui soutiennent la partie sud en porte-à-faux. Ce défaut pourra être repris lors de la réalisation des enduits extérieurs de façade.

L'expert relève le manque de professionnalisme de l'entrepreneur, notant que les plans d'exécution, quoique succincts ' n'indiquant notamment pas les dispositions réglementaires concernant la prévention du risque sismique- et manquant de cotes, étaient toutefois suffisamment explicites pour définir la structure de l'ouvrage.

La description des désordres montre qu'à l'exception du point 12/ qui porte sur des non-finitions, le reste provient de malfaçons, auxquelles M.[K] se devait de remédier.

Les époux [M] fondent leur demande sur l'article 1792-6 du code civil. Selon cet article, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenue pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.

Les délais nécessaires à l'exécution des travaux de réparation sont fixés d'un commun accord par le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur concerné.

En l'absence d'un tel accord ou en cas d'inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.

L'exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d'un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.

La garantie ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage.

Cet article indique expressément que la garantie de parfait achèvement concerne les dommages signalés par le maître d'ouvrage. En l'espèce, il ne peut s'agir que des réserves figurant dans le procès-verbal de réception ou signalées à M.[K] peu de temps après cette réception mais non des dommages relevés ultérieurement par l'expert.

Subsidiairement, les époux [M] se fondent sur la responsabilité contractuelle de droit commun, qui peut concerner tant les désordres faisant l'objet de la garantie de parfait achèvement que les désordres non apparents à réception.

Les points 1, 3, 4 , 5, 8, 9 et 14 figurent dans les réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception, peu important que M.[K] ait refusé de signer ce dernier. Il lui incombait de reprendre ces travaux au titre de la garantie de parfait achèvement.

Les points 2, 6 et 15 étaient apparents à réception, même pour un profane, sachant que les époux [M] étaient accompagné de M.[E], professionnel de la construction. En l'absence de réserves, ou d'observations ultérieures de la part des époux [M], ces vices sont purgés.

Les conséquences de la mauvaise liaison entre le poteau et la poutre (point 7) ne pouvaient apparaître dans toute leur ampleur lors de la réception, or au vu des constatations de l'expert, c'est la solidité du bâtiment qui est en jeu, la garantie décennale s'applique.

Le point 11 constitue un dommage non apparent à réception, mais qui n'entraîne pas d'impropriété à destination de l'immeuble et ne joue pas sur sa solidité, il s'agit d'un dommage intermédiaire.

Le point 10 ne peut être qualifié de désordre, tout comme le point 13, même si ce dernier n'est pas conforme aux dispositions contractuelles.

Il résulte de ce qui précède que M.[K] devait faire jouer la garantie de parfait achèvement pour les points 1, 3, 4 , 5, 8, 9 et 14.

Les points 7 et 11 qui résultent selon l'expert d'une faute imputable à M.[K], doivent être pris en charge sur le fondement de la responsabilité de droit commun, aucune demande n'étant formée sur un fondement décennal. M.[K] ne rapporte pas la preuve d'une quelconque faute des époux [M] qui justifierait un partage de responsabilité, cette demande est rejetée.

Sur les préjudices

L'expert a retenu le devis présenté l'entreprise Olive travaux, à hauteur de 59 580 euros HT, le reste du devis se rapportant à des travaux de finition.

Ce devis sera retenu en totalité.

Il convient toutefois de prendre également en compte certains des postes figurant dans le devis complémentaire du 15 mars 2013, à savoir le point 7 du devis (faux plafond), pour un montant de 8 400 euros et le traitement des armatures apparentes (point 5), à hauteur de 600 euros, les autres travaux n'étant pas justifiés.

Il n'y a pas lieu de prévoir des frais de maîtrise d'oeuvre, alors que les époux [M] avaient fait le choix de ne pas recourir initialement à une telle prestation.

Les travaux relatifs aux muret résultent de non-finition et sont à ce titre couverts par la transaction.

Le montant total des travaux s'élève à 68 580 euros HT, soit 73 380,60 euros TTC (avec une TVA à 7%).

Contrairement à ce qu'allègue la MAAF, l'attestation d'assurance de responsabilité civile mentionne que le contrat garantit tant les dommages survenus avant réception des travaux, ce qui est le cas par définition des désordres faisant l'objet de réserves, que les dommages survenus après réception, ce qui couvre les dommages intermédiaires.

Aucune demande au titre du préjudice locatif n'est formée en cause d'appel, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M.[K] à cet égard.

M.[K] et la MAAF qui succombent à l'instance seront condamnés aux dépens qui incluront les frais d'expertise judiciaire.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

-déclaré M. [B] [K] responsable du préjudice subi par [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] au titre de la garantie de parfait achèvement à hauteur de 13.420,00 euros,

-condamné M. [B] [K] à payer à M. [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] la somme de 13.420,00 euros au titre de la garantie de parfait achèvement,

-rejeté toutes les autres demandes,

-condamné M. [B] [K] à payer à M. [P] [M] et Mme [X] [S] épouse [M] la somme de 1.800,00 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile,

-condamné M. [B] [K] aux dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise dont distraction au profit de Me Arnaud dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;

et statuant de nouveau ;

Condamne in solidum M.[K] et son assureur la MAAF à payer aux époux [M] la somme de 73380, 60 euros TTC en réparation de leurs préjudices ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne in solidum M.[K] et son assureur la MAAF à payer aux époux [M] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure ;

Condamne in solidum M.[K] et son assureur la MAAF aux dépens qui incluront les frais d'expertise judiciaire.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16/01931
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;16.01931 ?
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