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09/05/2023 | FRANCE | N°21/01245

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 09 mai 2023, 21/01245


C4



N° RG 21/01245



N° Portalis DBVM-V-B7F-KZDF



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL FAYOL ET ASSOCIES



Me Anaïs FAURE

AU NOM DU PEUPLE FR

ANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 09 MAI 2023





Appel d'une décision (N° RG F20/00003)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MONTELIMAR

en date du 16 février 2021

suivant déclaration d'appel du 11 mars 2021





APPELANTE :



SA NOUGAT CHABERT ET [U], prise en la personne de son représentant légal en exercice do...

C4

N° RG 21/01245

N° Portalis DBVM-V-B7F-KZDF

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL FAYOL ET ASSOCIES

Me Anaïs FAURE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 09 MAI 2023

Appel d'une décision (N° RG F20/00003)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MONTELIMAR

en date du 16 février 2021

suivant déclaration d'appel du 11 mars 2021

APPELANTE :

SA NOUGAT CHABERT ET [U], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Elodie BORONAD de la SELARL FAYOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de VALENCE,

INTIMEE :

Madame [M] [N]

née le 13 novembre 1966 à [Localité 4] (76)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Anaïs FAURE, avocat au barreau de VALENCE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère,

Madame Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 mars 2023,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, et Mme Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistées de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 09 mai 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 09 mai 2023.

Exposé du litige :

Mme [N] a été engagée par la SA NOUGAT CHABERT & [U] le 28 septembre 2004 en qualité de gestionnaire point de vente.

Mme [N] a été victime d'un accident du travail le 16 octobre 2018 en manipulant des palettes à l'origine d'une blessure au pied gauche.

Mme [N] a été convoquée à un entretien préalable qui s'est tenu le 14 juin 2019 puis licenciée pour cause réelle et sérieuse par courrier du 19 juin 2019.

Mme [N] a saisi le Conseil de prud'hommes de Montélimar, en date du 6 janvier 2020 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes à la rupture de la relation de travail, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement de départage du 16 février 2021, le Conseil de prud'hommes de Montélimar a :

- Jugé que le licenciement de Mme [N] est sans cause réelle et sérieuse,

- Fixé à la somme de 1 940,29 euros bruts la moyenne des salaires de Mme [N],

- Condamné la SA NOUGAT CHABERT & [U] à payer à Mme [N] à titre de dommages et intérêts, la somme de 25 223,73 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la date de mise à disposition du jugement,

- Condamné la SA NOUGAT CHABERT & [U] à payer à Mme [N] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SA NOUGAT CHABERT & [U] aux entiers dépens de l'instance,

La décision a été notifiée aux parties et la SA NOUGAT CHABERT & [U] en a interjeté appel.

Par conclusions du 18 octobre 2022, la SA NOUGAT CHABERT & [U] demande à la cour d'appel de :

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de prud'hommes de Montélimar en date du 16 février 2021,

- En conséquence, rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Mme [N],

- Y ajoutant, la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- La condamner aux entiers dépens.

Par conclusions du 11 octobre 2022, Mme [N] demande à la cour d'appel de :

- Dire l'appel interjeté par la SA NOUGAT CHABERT & [U] recevable mais particulièrement mal fondé,

- Confirmer intégralement le jugement rendu par la formation de départage du Conseil de prud'hommes de Montélimar le 16 février 2021,

- Condamner la société CHABERT & [U] à lui verser la somme de 3 000 euros d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la présente procédure d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 novembre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI :

Sur le bien-fondé du licenciement :

Moyens des parties,

La SA NOUGAT CHABERT & [U] fait valoir que :

S'il est vrai que le règlement intérieur applicable à l'époque des faits obligeait les personnes travaillant dans les zones de production de porter des chaussures de sécurité et que la note de service du 17 septembre 2018 le rendait obligatoire dans tous les ateliers l'espace logistique, ce n'est pas pour autant que le port de chaussures de sécurité n'avait pas été rendu obligatoire dans d'autres zones ou en d'autres circonstances,

Le fait que cette obligation ne figure pas dans le règlement intérieur ne signifie pas pour autant que tout est permis et que les salariés n'ont pas reçu d'autres consignes,

L'employeur n'a pas à dresser dans le règlement intérieur la liste exhaustive de toutes les prescriptions particulières qui pourraient s'appliquer en matière de sécurité dans l'entreprise,

L'employeur indique que la coordinatrice sécurité de l'entreprise avait précisé par mail du 6 décembre 2018, qu'en lien avec l'accident de Mme [N] et en raison des différents risques identifiés lors de la manutention dans l'ensemble des magasins, la direction avait pris la décision d'équiper le personnel des magasins de chaussures de sécurité et que l'obligation du port de ses chaussures serait active à la réception des EPI pour tous les travaux de manutention,

Etait concerné par cette obligation le personnel des magasins, y compris ceux qui n'effectuaient pas de travaux de manutention,

Mme [N] était amenée à effectuer des travaux de manutention puisque la fiche emploi des gestionnaires de vente qui lui a été remise le 4 janvier 2013 les mentionne,

Enfin les restrictions du médecin du travail depuis le 15 mai 2019 ne l'empêchent pas d'effectuer des travaux de manutention à condition de ne pas porter des charges pesant plus de 10 kg,

Mme [N] qui avait déjà été victime d'un accident de même nature, ne pouvait ignorer qu'elle pouvait se faire tomber une lourde charge sur le pied que ce soit par elle ou par son voisin qui manipule le produit et avoir reçu des consignes précises en la matière,

Mme [N] ne justifie pas par ailleurs la prescription médicale de port de nu-pieds en plein hiver lors de ses activités professionnelles en zone de manutention.

Mme [N] conteste pour sa part qu'elle avait l'obligation de porter des chaussures de sécurité et fait valoir que :

Son poste ne requérait pas de tâches de manutention,

Elle avait des restrictions médicales auxquelles elle se conformait,

Le jour des faits, un autre salarié de la société travaillait toute la journée en binôme avec elle et avait réceptionné la livraison et opéré seul la manutention des palettes ;

A l'arrivée du chauffeur, elle avait simplement passé la porte du magasin pour le saluer,

Elle n'avait pas l'obligation en sa qualité de gestionnaire de vente, travaillant en magasin et non dans l'usine de production, de porter des chaussures de sécurité en dehors de travaux de manutention et elle n'a donc commis aucune faute,

Aucune consigne orale de sécurité n'a été donnée à ce sujet et n'est démontrée par l'employeur,

Elle fait également valoir que la fiche d'analyse accident établie par la société à la suite de son accident du 16 octobre 2018 mentionnait elle-même dans son arbre des causes, que le personnel des magasins était libre de porter tout type de chaussures,

Le fait de porter des chaussures non fermées n'a jamais été interdit,

Si le règlement intérieur a étendu l'obligation de porter des chaussures de sécurité lors des travaux de manutention, peu important que le personnel travaille dans l'usine ou au sein des magasins, il ne lui a pas été reproché de ne pas porter des chaussures de sécurité lors d'une manutention mais de ne pas porter des chaussures de sécurité « en se tenant dans l'environnement des mouvements de produits ».

Sur ce,

Selon les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié.

Cette lettre, qui fixe les limites du litige, ce qui interdit à l'employeur d'invoquer de nouveaux griefs et au juge d'examiner d'autres griefs non évoqués dans cette lettre, doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables permettant au juge d'en apprécier la réalité et le sérieux.

 

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Selon l'article L. 1235-2 du même code, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d'Etat.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.

A défaut pour le salarié d'avoir formé auprès de l'employeur une demande en application de l'alinéa premier, l'irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.

En l'espèce, il ressort du courrier de licenciement de Mme [N] en date du 19 juin 2009 qu'il lui est reproché, le 4 juin 2019, alors qu'une livraison de marchandises était en cours dans sa boutique, de s'être mise en danger en se tenant dans l'environnement des mouvements de produits (palettes, cartons, haillon) en portant des sandales ouvertes et non des chaussures de sécurité malgré les consignes qui lui avaient été données et les EPI (Equipements de Protection Individuels) qui lui avaient été confiés.

La cour d'appel relève à titre liminaire qu'aucune des parties, et notamment l'employeur, n'apporte de précisions sur les circonstances précises dans lesquelles il a été constaté que la salariée ne portait pas de chaussures de sécurité le 4 juin 2019, sur la tâche à laquelle la salariée était occupée lorsque ce constat a été fait, la salariée se limitant, pour sa part, à alléguer qu'un autre salarié, travaillant en binôme, était affecté à la réception de la livraison, et manutentionnait seul les palettes, et qu'elle a simplement passé la porte du magasin pour saluer le chauffeur.

Il n'est cependant pas contesté par la SA NOUGAT CHABERT & [U] que la salariée n'était pas en train d'effectuer des opérations de manutention au moment où il a été constaté qu'elle ne portait pas de chaussures de sécurité, ni qu'elle se trouvait dans la boutique et non dans une zone de production, le fait reproché à la salariée portant ainsi sur sa présence en boutique à proximité d'une opération de livraison de marchandises, soit, selon les termes de la lettre de licenciement susvisée, « dans l'environnement des mouvements de palettes ».

Dès lors, il est sans pertinence, pour les besoins de l'espèce, de déterminer s'il relevait des fonctions de la salariée d'effectuer des tâches de manutention, comme le soutient l'employeur, ou si celles-ci étaient en contradiction avec les prescriptions de la médecine du travail, comme le soutient la salariée, le débat portant uniquement sur le point de savoir si tous les salariés travaillant en boutique, y compris ceux n'effectuant pas de tâches de livraison et de manutention, étaient tenus de porter des chaussures de sécurité lorsque des opérations de livraison et de manutention de palettes étaient en cours en boutique, les salariés en boutique étant alors susceptibles de se trouver « dans l'environnement des mouvements de palettes ».

La SA NOUGAT CHABERT & [U] reconnaît que l'obligation de porter des chaussures de sécurité dans les boutiques et dans les circonstances de l'espèce ne ressort ni du règlement intérieur applicable à l'époque des faits, dont l'annexe 2 ne rend obligatoire le port de chaussures de sécurité que pour les personnes travaillant dans les « zones de production », ni de la note de service du 17 septembre 2018, qui en rend le port obligatoire dans « tous les ateliers et l'espace logistique, y compris sur les allées piétonnes matérialisées en bleues ».

Pour démontrer qu'il existait au sein de l'entreprise au moment des faits une obligation de porter des chaussures de sécurité dans « l'environnement des mouvements de palettes » en boutique, c'est-à-dire lors des opérations de manutention en boutique, et que la salariée était informée de l'existence de cette obligation, la SA NOUGAT CHABERT & [U] verse aux débats :

Un courriel du 6 décembre 2019 de la coordinatrice de sécurité de l'entreprise, Mme [B], adressé à Mme [O] et à M. [O], personnels administratifs, dans lequel celle-ci indique qu'« en lien avec l'accident de [M] [N] (du mois d'octobre 2018) et en raison des différents risques identifiés lors de la manutention dans l'ensemble des magasins Nougat Chabert et [U], la Direction a pris la décision d'équiper le personnel des magasins de chaussures de sécurité. L'obligation du port sera effective à réception des EPI pour tous les travaux de manutention. Je vous laisse le soin de recueillir les pointures auprès de vos collaborateurs avant de me faire le retour. Attention, la date limite pour les retours est fixée le 21 décembre prochain »,

Une attestation du 6 mars 2020 de Mme [B], dans laquelle celle-ci indique que « lors de la visite S&ST du 05/02/2019 dans les magasins de la [Adresse 2], (elle a) fait remarquer à Madame [M] [N] qu'elle était chaussée de nu-pieds dans un environnement de travail où l'activité comporte des risques liés à la manutention. (Elle) lui a rappelé qu'elle avait fait l'objet d'un accident en octobre 2018 sur cette même pratique »,

Une attestation du 29 mai 2020, responsable marketing et vente directe, dans laquelle celle-ci indique que « la responsable sécurité (lui) a indiqué (') dans l'hiver 2019 que les nouvelles chaussures de sécurité étaient disponibles pour (son) équipe » et qu'elle en a « profité pour faire la tournée des 5 boutiques pour remettre lesdites chaussures et transmettre de nouveau oralement les consignes de sécurité dans le cadre de la livraison de marchandises : « il est obligatoire de porter ses chaussures de sécurité au moment de la livraison et du dépotage des palettes » ».

Ces éléments sont insuffisants pour retenir qu'il avait été institué une obligation de porter des chaussures de sécurité pour tous les salariés travaillant en boutique lorsqu'une opération de livraison et de manutention était en cours, même dans l'hypothèse où les salariés ne seraient pas affectés à la réalisation de cette opération de livraison et de manutention.

En effet, il ne peut être valablement soutenu que le courriel susvisé du 6 décembre 2019 ait institué une obligation de port des chaussures de sécurité pour tous les salariés travaillant en boutique, peu important qu'ils soient en train d'effectuer des opérations de manutention ou non, Mme [B] mentionnant une obligation de port des chaussures de sécurité pour le personnel des boutiques « pour tous les travaux de manutention ».

Ainsi, le fait que la direction ait pris la décision d'équiper l'ensemble des salariés travaillant en boutique de chaussures de sécurité n'implique pas l'obligation de port de ces chaussures en toutes circonstances, mais dans la seule hypothèse où le personnel réalise des travaux de manutention, le port n'étant pas obligatoire lorsqu'il effectue d'autres tâches en magasin.

Par ailleurs, il doit être constaté que la SA NOUGAT CHABERT & [U] ne démontre pas que cette obligation, énoncée ici dans un courriel à destination de deux membres du personnel administratif, et conditionnée à la réception des chaussures de sécurité, aurait été portée à la connaissance de l'ensemble des salariés concernés, y compris Mme [N], l'attestation susvisée de Mme [G], qui ne fait pas mention de la salariée et n'indique pas à quelle date précise elle se serait déplacée dans le magasin de cette dernière, ne constitue pas un élément suffisamment probant, faute d'être corroborée par d'autres éléments précis et concordants (attestations d'autres salariés présents lors de sa visite par exemple).

En outre, la SA NOUGAT CHABERT & [U] ne démontre pas que les chaussures de sécurité auraient été réceptionnées et qu'une paire aurait effectivement été remise à la salariée, l'attestation de Mme [G] étant insuffisante, faute pour l'employeur de verser un élément objectif venant corroborer son allégation (document établissant la remise en main propre des chaussures de sécurité portant la signature de la salariée).

La SA NOUGAT CHABERT & [U] ne peut exciper de ce que la salariée aurait été victime d'un accident du travail en octobre 2018 lors de travaux de manutention (déplacement de palettes) pour établir la faute de la salariée, alors qu'il n'est pas contesté par l'employeur que Mme [N] n'était pas, le 4 juin 2019, en train d'effectuer des travaux de manutention, et qu'il échoue par ailleurs à établir qu'il aurait édicté une règle obligeant tous les salariés des boutiques à porter des chaussures de sécurité lorsqu'une opération de manutention et de livraison serait en cours, y compris ceux ne prenant pas part à cette opération

Il n'y a pas lieu d'étudier les documents postérieurs à la date du 4 juin 2019 produits par l'employeur, dès lors que ceux-ci ne peuvent avoir pour effet d'établir l'existence d'une règle relative à la sécurité en vigueur au moment des faits reprochés à la salariée.

Eu égard à l'ensemble de ces constatations, la cour d'appel retient que l'employeur échoue à établir l'existence d'un comportement fautif imputable à la salariée justifiant son licenciement pour une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

Mme [N], qui avait à la date de son licenciement 14 ans d'ancienneté, peut ainsi prétendre à une indemnité comprise entre trois et douze mois de salaire mensuel brut.

Eu égard à l'âge de la salariée au moment de son licenciement (53 ans), à son ancienneté, à la rémunération qu'elle percevait alors, et à sa situation professionnelle, dont elle justifie par la production de ses avis d'imposition, desquels il ressort une diminution de ses revenus annuels depuis son licenciement, ainsi que par des relevés de situation de Pôle emploi, démontrant qu'elle perçoit l'Allocation de Retour à l'Emploi, le préjudice résultant de la rupture abusive de la relation de travail sera justement réparé par la condamnation de la SA NOUGAT CHABERT & [U] à lui verser la somme de 23 283,48 euros, par réformation du jugement entrepris sur le quantum de la condamnation.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris, excepté en ce qu'il a condamné la SA NOUGAT CHABERT & [U] à verser à Mme [N] la somme de 25 223,73 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la SA NOUGAT CHABERT & [U] à payer à Mme [N] la somme de 23 283,48 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

ORDONNE à la SA NOUGAT CHABERT & [U] le remboursement des allocations chômages perçues par Mme [N] du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de six mois, en vertu des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, les organismes intéressés n'étant pas intervenus à l'audience et n'ayant pas fait connaître le montant des indemnités versés,

DIT qu'une copie de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi à la diligence du greffe de la présente juridiction,

CONDAMNE la SA NOUGAT CHABERT & [U] à payer à Mme [N] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE la SA NOUGAT CHABERT & [U] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 21/01245
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;21.01245 ?
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