C3
N° RG 21/04402
N° Portalis DBVM-V-B7F-LCSG
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU LUNDI 15 MAI 2023
Appel d'une décision (N° RG 19/00904)
rendue par le Pole social du TJ de GRENOBLE
en date du 06 mai 2021
suivant déclaration d'appel du 15 octobre 2021
APPELANT :
Monsieur [Y] [M]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Antoine ANGOT, avocat au barreau de GRENOBLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009282 du 28/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMEE :
Organisme [6] RHONE-ALPES, dont le N° SIRET est le [N° SIREN/SIRET 4]
Département juridique
[Localité 3]
comparante en la personne de Mme [K] [P] régulièrement munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, Greffier,
DÉBATS :
A l'audience publique du 28 février 2023,
M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs dépôts de conclusions et observations.
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 22 décembre 2014, M. [Y] [M], né le 5 septembre 1953, a déposé une demande de retraite personnelle auprès de la [6] ([6]) Rhône-Alpes, accompagnée d'une demande d'Allocation de Solidarité aux Personnes Agées (ASPA).
Le 3 juillet 2015, la [6] Rhône-Alpes a informé M. [M] de l'octroi de sa pension de vieillesse au taux de 50 % au titre de l'inaptitude au travail à compter du 1er janvier 2015, pension assortie du minimum contributif.
Suivant notification du 22 juillet 2015, M. [M] a obtenu le bénéfice de l'ASPA servie pour son montant entier à compter du 1er janvier 2015 et ramenée à 472,17 euros à compter du 1er février 2015, l'assuré ayant perçu le Revenu de Solidarité Active (RSA) pour une somme totale de 1 808,84 euros sur la période de janvier 2015 à juillet 2015, dans l'attente de la liquidation effective de ses droits à retraite.
Par courriers des 5 et 7 septembre 2015, M. [M] a saisi la commission de recours amiable de la [6] Rhône-Alpes aux fins de voir fixer les détails et montants de ses droits à retraite ainsi que le montant des éventuels indus. Dans le cadre de son recours amiable, l'assuré a contesté les points suivants :
- le reversement à la Caisse d'Allocations Familiales (CAF) de l'Isère de la somme de 1 808,84 euros correspondant au montant du RSA perçu du 1er janvier 2015 au 30 juin 2015,
- les retenues opérées par la [6] Rhône-Alpes sur les prestations en remboursement de la somme de 189,94 euros versée le 9 novembre 2015 au titre de la majoration du minimum contributif,
- la suspension de l'ASPA à compter du 1er juillet 2016 (en l'absence de réponse au questionnaire de ressources, notification du 12 juillet 2016) puis son rétablissement au 1er septembre 2016 dès connaissance des retraites complémentaires versées,
- un trop-perçu notifié au titre de l'ASPA pour la période du 1er février 2015 au 31 août 2016 pour un montant de 1 276,25 euros.
La caisse a indiqué ne pas poursuivre le recouvrement de cette somme.
Le 15 juillet 2019, M. [M] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Grenoble aux fins de contestation de la décision de la commission de recours amiable de la [6] Rhône-Alpes, prise lors de sa séance du 14 mars 2019, rejetant l'ensemble de ses demandes.
Par jugement du 6 mai 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a :
- déclaré irrecevable le recours de M. [M] portant sur les demandes tendant à voir:
- déclarer entaché d'illégalité le rejet implicite du Ministre du travail qui s'est substitué à la confirmation de son exclusion du revenu de remplacement après avis de la commission départementale confirmant son exclusion et sa radiation de la liste des demandeurs d'emploi du 11 décembre 1997,
- reconnaître la responsabilité de l'Etat dans la minoration de sa retraite, rectifier et rétablir ses droits réels à pension retraite,
- condamner l'Etat pour les préjudices causés,
- donné acte à M. [M] de ce qu'il renonce à sa demande portant sur la récupération de l'indu de 189.44 euros au titre de la majoration du minimum contributif,
- débouté M. [M] du surplus de ses demandes,
- condamné M. [M] aux entiers dépens.
Le 15 octobre 2021, M. [M] a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception le 10 juin 2021.
L'appelant avait préalablement déposé une demande d'aide juridictionnelle le 6 juillet 2021 qui lui a été accordée par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 28 septembre 2021 (aide totale).
Les débats ont eu lieu à l'audience du 28 février 2023 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 15 mai 2023.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [Y] [M] selon ses conclusions notifiées par RPVA le 14 avril 2022 reprises à l'audience demande à la cour de :
- infirmer le jugement en date du 6 mai 2021,
Statuant par effet dévolutif d'appel,
- faire droit à l'ensemble de ses demandes présentées en première instance.
Il demande ainsi dans le corps de ses écritures à la cour de :
- déclarer entaché d'illégalité le rejet implicite du Ministre du travail qui s'est substitué à la confirmation de son exclusion du revenu de remplacement après avis de la commission départementale confirmant son exclusion et sa radiation de la liste des demandeurs d'emploi du 11 décembre 1997,
- reconnaitre la responsabilité de l'Etat dans la minoration de sa retraite, rectifier et rétablir ses droits réels à pension retraite,
- condamner l'Etat pour les préjudices causés.
Il fait valoir qu'il avait bien par son courrier du 5 septembre 2015 saisi la commission de recours amiable de ces demandes et qu'il a ensuite saisi la juridiction de première instance sur refus implicite de sorte qu'aucune irrecevabilité ne peut lui être opposée.
Concernant le reversement de la somme de 1 808,84 euros à la CAF, il soutient qu'avant de reverser cette somme à la CAF, la [6] devait l'informer de ce que la CAF était subrogée dans ses droits à l'égard de la caisse de retraite et que ne l'ayant pas fait, il est donc bien fondé à solliciter la condamnation de la [6] à lui rembourser ce montant.
Sur la suspension et le trop-perçu de l'ASPA, Il fait valoir qu'il ressort de la décision de la commission de recours amiable du 15 mars 2019 que le questionnaire sur son revenu, fondant la réévaluation de ses droits, lui a été notifié le 12 juillet 2016. Il estime donc que la [6] n'est donc pas fondée à réviser ses droits avant cette date.
La [6] Rhône-Alpes par ses conclusions d'appel parvenues au greffe le 8 novembre 2022 reprises à l'audience demande à la cour de :
- rejeter l'appel de M. [M],
- confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
- condamner l'appelant aux entiers dépens.
Sur la recevabilité du recours, elle soutient que l'assuré ne fait pas mention, dans ses deux courriers adressés à la commission de recours amiable, des demandes déclarées irrecevables en première instance dès lors que M. [M] sollicite d'une part, la régularisation de plusieurs années litigieuses, la révision de sa retraite et vise d'autre part, la notification de ses droits le 22 juillet 2015.
Elle relève en outre que certains points de contestation relèvent de la juridiction administrative.
Concernant le reversement de la somme de 1 808,84 euros à la CAF, elle fait valoir que conformément aux dispositions de l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles en vertu desquelles l'organisme payeur du RSA est subrogé dans les droits du foyer vis-à-vis de l'organisme en charge de l'instruction de la demande de retraite personnelle, elle a directement reversé à la CAF de l'Isère le montant de 1 808,84 euros servie à l'assuré à titre d'avance puis qu'elle a déduit ce montant du rappel à servir à l'intéressé.
Elle précise avoir adressé le 23 juillet 2015 (pièce 19) un courrier à M. [M] faisant état de ce dispositif législatif de compensation entre organismes de protection sociale.
S'agissant de la révision du droit à I'ASPA, elle indique qu'après réception du questionnaire, le 19 juillet 2016, la situation de M. [M] au regard de ses droits à l'ASPA, a été recalculée depuis le 1er février 2015 au 31 août 2016 et qu'il en est résulté un indu pour un montant de 1 276,25 euros dont elle ne poursuit toutefois pas le recouvrement.
Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
1. À titre liminaire la cour relève que la procédure étant orale, elle n'est régulièrement saisie que des demandes et moyens contenus dans les conclusions déposées par l'appelant devant la présente cour et reprises à l'audience.
2. Le tribunal, considérant que ces demandes n'avaient pas été préalablement soumises à la commission de recours amiable, a déclaré irrecevables les demandes de M. [M] présentées par M. Hadj Ahrmed aux fins de :
- déclarer entaché d'illégalité le rejet implicite du Ministre du travail qui s'est substitué à la confirmation de son exclusion du revenu de remplacement après avis de la commission départementale confirmant son exclusion et sa radiation de la liste des demandeurs d'emploi du 11 décembre 1997,
- reconnaitre la responsabilité de l'Etat dans la minoration de sa retraite, rectifier et rétablir ses droits réels à pension retraite,
- condamner l'Etat pour les préjudices causés.
Dans son courrier de saisine de la [6] du 3 septembre 2015 (cf pièce appelant n° 2) et non du 5 septembre 2015 comme mentionné dans ses conclusions, M. [M] vise une notification de la [6] du 3 juillet 2015, soit la notification de ses droits à retraite liquidés à compter du 1er janvier 2015, pour en déplorer le montant trop faible et conclut son courrier en sollicitant de 'bien vouloir examiner mon dossier et de lui prêter toute l'intention qui s'impose'.
Dès lors que dans sa rédaction applicable au litige, l'article R. 142-18 du code de la sécurité sociale prévoit que le tribunal est saisi après accomplissement le cas échéant de la procédure devant la commission de recours amiable visée à l'article R. 142-1 du même code, le premier juge a donc considéré à bon droit que les demandes précitées étaient irrecevables et elles le sont d'autant plus qu'elles ne peuvent être présentées devant une juridiction judiciaire, n'ayant pas qualité pour reconnaître la responsabilité de l'Etat et le condamner à dommages et intérêts.
Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
3. M. [M] dans l'attente de la liquidation de ses droits à retraite à effet au 1er janvier 2015, a continué de percevoir avant le versement de sa retraite le revenu de solidarité active dont il bénéficiait auparavant de janvier à juin 2015 inclus, pour une somme de 1 808,84 euros qui a été déduite du versement le 22 juillet 2015 par la [6] de sa pension, rétroactivement au 1er janvier 2015.
Dans ses conclusions d'appel (page 3), il ne conteste plus que la caisse d'allocations familiales lui ayant versé cette somme était subrogée dans ses droits envers la [6].
Il oppose seulement que la [6] aurait dû l'en informer préalablement, sans invoquer aucun fondement juridique à ce moyen qui ne pourra donc être accueilli.
La subrogation légale qui s'opère de plein droit n'a en effet pas à être signifiée ou notifiée par le créancier subrogé au créancier subrogeant.
4. Le 17 avril 2016, la [6] a adressé à M. [M] un questionnaire de ressources à retourner avant le 1er juillet 2016. Faute de l'avoir retourné à temps, ses droits à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ont été provisoirement suspendus à compter du 1er juillet 2016.
Il a retourné ce questionnaire le 19 juillet 2016 et la [6] a appris alors qu'il percevait une retraite [5] de 81,38 euros et [7] de 35,48 euros depuis janvier 2015.
Selon notification du 6 septembre 2016 (pièce [6] n°13), ses droits à ASPA ont été recalculés à 683,83 euros par mois désormais et leur versement rétabli à partir du 1er septembre 2016, avec notification d'un trop perçu de 1 276,25 euros pour la période de février 2015 à avril 2016 mais dont la [6] n'entend pas poursuivre le recouvrement (cf ses conclusions page 9).
M. [M] au motif que le questionnaire de ressouces lui a été notifié le 12 juillet 2016, demande d'infirmer le jugement car la [6] n'était selon lui pas fondée à réviser ses droits avant cette date, sans invoquer également de fondement juridique au soutien de ce moyen.
À ce titre, l'article L. 815-11 du code de la sécurité sociale dispose que l'ASPA peut être révisée suspendue ou supprimée à tout moment lorsqu'il est constaté que les ressources de l'allocataire ont varié et que toute demande de remboursement de trop-perçu se prescrit par deux ans à compter de la date du paiement de cette allocation entre les mains du bénéficiaire.
La [6] était donc en droit de suspendre les versements provisoirement au 1er juillet 2016 et de recalculer à la baisse le montant de l'ASPA versée ainsi que de retenir un indu depuis février 2015 soit moins de deux ans.
Le jugement sera donc entièrement confirmé.
L'appelant qui succombe supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement RG n° 19/00904 rendu le 6 mai 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble
Y ajoutant,
Condamne M. [Y] [M] aux dépens d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président