C3
N° RG 22/00250
N° Portalis DBVM-V-B7G-LGER
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL ALTER AVOCAT
la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER
la CPAM DE L'ISÈRE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU JEUDI 29 JUIN 2023
Appel d'une décision (N° RG 19/00042)
rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 30 novembre 2021
suivant déclaration d'appel du 13 janvier 2022
APPELANT :
Monsieur [A] [U]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Pierre JANOT de la SELARL ALTER AVOCAT, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEES :
S.A.S.U. [13], prise en son établissement situé [Adresse 6]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Sabine LEYRAUD de la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER, avocat au barreau de Grenoble, substituée par Me Charlotte DESCHEEMAKER, avocat au barreau de Grenoble
Organisme CPAM DE L'ISÈRE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 12]
[Localité 2]
comparante en la personne de M. [P] [V], régulièrement muni d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, Greffier,
DÉBATS :
A l'audience publique du 25 avril 2023,
M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs dépôts de conclusions et observations,
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [A] [U] a été embauché le 1er juillet 1996 en qualité de technicien d'entretien par la société [11] aux droits de laquelle vient la société [13].
Le 10 octobre 2017, une déclaration d'accident du travail a été établie par l'employeur concernant des faits déclarés survenus le 16 mai 2017 dans les circonstances suivantes : 'le salarié assistait à une réunion paritaire dans le cadre de ses fonctions syndicales. Le salarié déclare avoir eu une altercation verbale avec l'un de ses collègues au cours de cette réunion.
Nature des lésions : choc psychologique'.
Une lettre de réserves a également été rédigée par la société [13].
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de l'Isère a réceptionné un certificat médical initial daté du 27 juin 2017 mentionnant une date d'accident du travail au 16 mai 2017 et les lésions suivantes :
« Réaction face à une situation éprouvante. Etat d'anxiété majeur, avec insomnie majeure, avec irritabilité et retentissement sur la vie personnelle et familiale, par ailleurs manque de concentration, difficulté à l'élaboration de pensée abstraite / nécessité d'un traitement médicamenteux anxiolytique et sédatif depuis le 5 juillet puis d'un traitement antidépresseurs depuis le 2 août 2017 / rendez-vous pris avec spécialiste pour suivi psychologique. RECTIFICATIF DE LA DATE DE DÉBUT D'ACCIDENT - Etabli le 03/10/2017 ».
Le 11 janvier 2018, la CPAM de l'Isère a notifié son refus de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, les faits déclarés survenus le 16 mai 2017 au motif que « compte tenu des investigations menées et des éléments en notre possession, la matérialité ne peut être retenue en l'espèce, la constatation médicale apparaît tardivement par rapport au fait accidentel invoqué. En effet, le certificat médical initial est daté du 27 juin 2017 pour la survenance d'un fait accidentel du 16 mai 2017 intervenant donc plus d'un mois après ».
Le 12 janvier 2019, M. [U] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Grenoble aux fins de contestation de la décision de la commission de recours amiable qui lui a été notifiée le 13 novembre 2018 confirmant le refus de prise en charge.
La société [13] est intervenue volontairement à l'instance au motif de la saisine par M. [U] du conseil des prud'hommes pour discrimination syndicale et non respect de l'obligation de sécurité.
Par jugement du 30 novembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a :
- déclaré le recours de M. [U] recevable mais mal fondé,
- débouté M. [U] de son recours,
- dit que c'est à bon droit que la caisse primaire de l'Isère a refusé la prise en charge de l'accident déclaré par M. [U] qui serait survenu le 16 mai 2017,
- déclaré le jugement commun et opposable à la société [13],
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné aux dépens.
Le 13 janvier 2022, M. [U] a interjeté appel de cette décision, notifiée le 16 décembre 2021.
Les débats ont eu lieu à l'audience du 25 avril 2023 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 29 juin 2023.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [A] [U], selon ses conclusions d'appel, notifiées par RPVA le 7 avril 2023, reprises à l'audience, demande à la cour de :
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire - pôle social rendu le 30 novembre 2021 en toutes ses dispositions,
En conséquence :
- juger que son accident du travail du 16 mai 2017 fait suite à un fait accidentel,
- juger que son accident du travail du 16 mai 2017 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,
- condamner la CPAM de l'Isère à régulariser ses droits suite à la reconnaissance de cet accident du travail,
- condamner la CPAM de l'Isère à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- condamner la CPAM de l'Isère aux entiers dépens.
Sur la demande de reconnaissance implicite, il soutient que le simple fait de lui avoir notifié le 11 janvier 2018 le refus de prise en charge, après le délai légal de 30 jours après réception de la déclaration d'accident du travail, suffit à faire droit à sa reconnaissance d'accident du travail. Il affirme que la caisse primaire devait statuer avant le 6 novembre 2017 ou au plus tard avant le 11 novembre, dès lors que la déclaration d'accident du travail lui a été envoyée par Internet le 6 octobre 2017, puis en lettre recommandée avec avis de réception. Il indique en outre avoir remis, le 9 octobre 2017 lors d'un rendez-vous au guichet, l'ensemble des documents (déclaration et certificat médical initial rectificatif) à la CPAM de l'Isère comme en atteste son message (pièce n°11).
A titre subsidiaire au fond sur les circonstances de l'accident du travail, il fait valoir que le fait accidentel du 16 mai 2017, au temps et au lieu de travail, est établi par des éléments objectifs, à savoir les témoignages des personnes présentes et les PV de réunion / déclarations. Il expose que, subissant depuis plusieurs années des attaques et des moqueries de la part de représentants d'autres organisations syndicales sans aucune mesure prise par son employeur, il a été victime ce 16 mai 2017 d'une provocation et d'une incitation à la violence, justifiant quelques temps après son arrêt en raison d'un état d'anxiété généré par cette situation éprouvante. Il considère enfin que le seul fait qu'il ait consulté tardivement son médecin traitant est sans effet sur la réalité de la survenance de l'évènement.
La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, selon ses conclusions d'appel, parvenues au greffe le 14 avril 2023, reprises à l'audience, demande à la cour de :
- confirmer le jugement du 30 novembre 2021 du pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble,
En conséquence,
- juger que c'est à bon droit qu'elle a refusé de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, le fait déclaré être survenu le 16 mai 2017.
Concernant le délai complémentaire d'instruction, elle répond que le délai d'un mois imparti pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident a débuté le 20 octobre 2017, date de réception du certificat médical initial, tandis que la déclaration d'accident du travail a été réceptionnée le 11 octobre 2017. Elle ajoute que M. [U] a été informé du recours à ce délai complémentaire par courrier du 16 novembre 2017 dont il a accusé réception dans un message sur son compte AMELI du 23 novembre 2017.
Sur le bien fondé de sa décision de refus de prise en charge, en l'absence de matérialité établie, elle estime que les éléments recueillis au cours de I'enquête administrative n'ont pas permis d'identifier I'existence d'un évènement soudain à la date du 16 mai 2017 dont résulterait le syndrome anxio-dépressif.
Elle relève que la déclaration d'accident du travail, transmise par la société [13], datée du 10 octobre 2017, est assortie d'une lettre de réserves motivées et que le certificat médical initial établi le 27 juin 2017, soit 42 jours après la survenance des faits, ne permet pas, en raison de sa tardiveté, de rattacher les lésions décrites avec un évènement bien antérieur, qui a pu laisser place à l'émergence d'autres événements. Elle note une hésitation puisque lors de l'établissement du premier certificat médical initial, ce ne sont pas les faits du 16 mai 2017 qui sont visés mais la journée du 27 juin 2017 au cours de laquelle s'est tenue une autre réunion.
Enfin, elle considère que les éléments du dossier mettent en lumière un contexte professionnel dégradé antérieur et postérieur au 16 mai 2017, incompatible avec la notion d'accident qui doit avoir son origine dans un fait précis et identifiable.
La SASU [13] (intervenante volontaire), au terme de ses conclusions d'intimée n° 2, notifiées par RPVA le 12 avril 2023, reprises à l'audience, demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble le 30 novembre 2021 et notifié aux parties le 16 décembre 2021 en ce qu'il a :
- débouté M. [U] de sa demande de reconnaissance implicite du caractère professionnel des faits du 16 mai 2017,
- débouté M. [U] de sa demande de reconnaissance de l'accident du travail.
Statuant à nouveau,
- constater la tardiveté de la déclaration d'accident du travail par M. [U] et l'absence de matérialité d'un accident prétendument survenu le 15 ou le 16 mai 2017,
- confirmer la décision de refus de prise en charge de ce prétendu accident au titre de la législation professionnelle, décision rendue par la CPAM de l'Isère le 18 janvier 2018,
- débouter M. [U] de l'intégralité de ses demandes,
Si par exceptionnel, la Cour devait retenir une reconnaissance implicite du caractère professionnel des faits du 16 mai 2017, la décision de prise en charge lui serait déclarée inopposable en application de la dualité des rapports Caisse/Employeur - Caisse/Assuré,
- condamner M. [U] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle soutient que d'une part, la tardiveté de la déclaration de l'accident du travail fait échec à la présomption d'imputabilité et que d'autre part, la matérialité de l'accident n'est pas établie. Elle fait valoir qu'il ressort des éléments produits :
- une altercation aurait eu lieu le 15 ou le 16 mai 2017 lors d'une réunion paritaire intersyndicale,
- aucune déclaration d'accident du travail n'a été faite le jour même ou le lendemain,
- aucun certificat médical initial n'a été établi par le médecin traitant de M. [U] jusqu'au 27 juin 2017,
- le 27 juin 2017, un certificat médical initial, dont il n'est pas prouvé qu'il ait été porté à la connaissance de l'employeur, fait état d'un accident du travail du 27 juin 2017 (et non du 16 mai 2017).
- le 27 juin 2017, soit la même date, un certificat médical initial rectificatif est établi par le médecin traitant de M. [U] faisant état d'une date d'accident fixée au 16 mai 2017,
- elle n'a été destinataire d'une demande de déclaration d'accident du travail de M. [U] que par mail du 2 octobre 2017.
Sur la demande de reconnaissance implicite de M. [U], elle relève que le délai de 30 jours commençait à courir à compter de la réception par la caisse primaire du certificat médical initial rectifié en date du 20 octobre 2017, de sorte que le délai de 30 jours expirait le 20 novembre 2017 et qu'en conséquence, en lui notifiant un délai complémentaire d'instruction le 16 novembre 2017, le principe du contradictoire a été respecté.
Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions, il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
1. Dans sa rédaction antérieure au 1er décembre 2019, applicable au litige, l'article R 441-10 du code de la sécurité sociale dispose :
'La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.
Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l'article L. 432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle.
Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu'.
Et l'article R 441-14, dans cette même rédaction, antérieure au 1er décembre 2019, dispose que :
'Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu (....)'.
Le litige dont est saisi la cour porte sur la déclaration d'un accident du travail survenu le 16 mai 2017 et non celle d'un accident survenu le 27 juin 2017 ayant donné lieu à un refus de prise en charge du 18 septembre 2017 (n° dossier 170627699) faute d'événement précis survenu ce jour-là ayant été le premier jour d'arrêt de travail de l'assuré, refus qui n'a pas été contesté dans le cadre d'une instance distincte.
En vertu de l'article R 441-10 précité du code de la sécurité sociale, le délai d'instruction de trente jours dont disposait la caisse, sanctionné par une prise en charge implicite, courait à partir de la plus tardive des dates de réception du dossier complet constitué de la déclaration et du certificat médical initial.
Selon le document versé aux débats (pièce caisse n° 2), la déclaration, par la SASU [13], de l'accident du 16 mai 2017, connu d'elle le 2 octobre 2017, est datée du 10 octobre 2017 et a été reçue par la caisse le lendemain, 11 octobre 2017, d'après une copie d'écran de son logiciel de gestion interne.
Le certificat médical initial visant un accident, survenu le 16 mai 2017, est censé avoir été établi le 27 juin 2017 selon la date dactylographiée qu'il comporte, mais l'a été en réalité le 3 octobre selon une autre mention manuscrite surajoutée sur celui-ci ('établi le 03/10/2017").
M. [U] soutient que ce certificat médical initial était joint à la déclaration d'accident du travail télé transmise par l'employeur le 6 octobre selon lui, à tout le moins qu'il accompagnait la lettre de réserves du 11 octobre 2017 de la SASU [13] visant ce certificat et qu'en tout état de cause, lui-même est venu le remettre en mains propres au guichet de la caisse primaire d'assurance maladie le 9 octobre 2017.
Il en déduit donc que le délai d'instruction de trente jours dont disposait la caisse a débuté au plus tard le 11 octobre.
Pour sa part, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère admet n'avoir reçu ce certificat médical initial que le 20 octobre, qu'elle retient comme date de départ du délai d'instruction.
M. [U], sollicitant la prise en charge à son bénéfice d'un accident du travail, il lui incombe de rapporter les éléments nécessaires au succès de sa prétention, qu'il s'agisse de la matérialité de cet accident du travail ou du dépassement des délais d'instruction pour en obtenir sa prise en charge implicite.
En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la SASU [13] aurait procédé à une télé déclartion d'accident du travail le 6 octobre puisqu'après s'être rendu à la caisse le lundi 9 octobre 2017, M. [U] écrivait par courriel lui-même ce même 9 octobre à la responsable sécurité de la SASU [13], auteur de la déclaration, datée du 10 octobre : 'Mais après consultation du dossier avec l'agent de la CPAM, je faisais le constat qu'elle n'est pas en possession de la nouvelle déclaration d'accident en date du 16 mai 2017, que ce soit celle effectuée avec un document en ligne comme vous vous y êtes engagé à le faire mercredi dernier, le 4 octobre, ou bien envoyé en lettre recommandée avec demande d'avis de réception à la CPAM'.
Hormis ses affirmations, aucun élément ne vient donc corroborer la réception par la caisse en même temps que la déclaration d'accident du travail du certificat médical initial depuis le 11 octobre 2017 puisque selon le logiciel interne de la caisse, il est porté à cette date une mention 'demander C.M initial' qui a donné lieu à l'envoi simultané le même jour d'un courrier à M. [U] pour le lui réclamer (pièce appelant n°17), tandis que la date d'ouverture de l'enquête administrative du 20 octobre correspond bien et logiquement à celle de réception du certificat médical initial mentionnée dans ce logiciel.
En conséquence, il n'est pas établi par les pièces du dossier que le certificat médical initial aurait été reçu par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Isère avant le 20 octobre 2017.
Par ailleurs, pour l'instruction de sa demande, M. [U] ne conteste pas avoir échangé avec la caisse par messages à partir de son compte AMELI dont il a versé aux débats la copie de certains (pièces n°s 11-1 à 11-3, 16/2, 18/1, 18/2, 21) et avoir ainsi accepté les conditions de ce service.
En conséquence, la caisse est fondée à se prévaloir de la notification d'un délai complémentaire d'instruction de deux mois par message, envoyé le 16 novembre 2017 dont M. [U] a accusé réception le 23 (sa pièce n° 18).
Enfin, la décision de refus de prise en charge de la caisse a été notifiée moins de deux mois après, le 11 janvier 2018.
Le jugement devra donc être confirmé en ce qu'il a débouté M. [U] de sa demande de reconnaissance implicite d'un accident du travail survenu le 16 mai 2017.
2. Aux termes de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
La preuve en incombe à l'assuré qui doit établir un fait soudain isolé ou une succession de faits dont il est résulté une lésion imputable à ce ou ces événements.
M. [U] demande la prise en charge d'un accident survenu le 16 mai 2017 correspondant à une réunion paritaire intersyndicale en présence d'un représentant de la direction tenue ce jour là, lors de laquelle il aurait été de nouveau dénigré comme déjà par le passé par d'autres représentants syndicaux, le suspectant en substance de collusion avec la SASU [13] et de ne pas suffisamment soutenir les salariés.
En premier lieu, tant la date exacte de cette réunion que son déroulé sont sujets à caution en l'état des éléments de contradiction apportés par la SASU [13] ou recueillis lors de l'enquête par la caisse.
M. [U] soutient qu'au cours de cette réunion ayant pour thème l'exercice du droit syndical qui regroupait neuf autres représentants syndicaux, il a eu une altercation avec M. [J] [H]., représentant du syndicat [9], qui s'est adressé à lui en tenant des propos insultants, humiliants, vexatoires et dégradants, sans réaction de sa direction.
Selon lui, il s'est levé pour se rapprocher de M. [H]. dans le but de lui signifier d'arrêter de tenir ce genre de propos à son endroit et ce dernier l'aurait de nouveau provoqué en lui disant 'vas-y frappe-moi'. Il a déposé plainte le 30 août 2017 pour ces propos ainsi que pour un passage désobligeant figurant dans le journal de la [10] du 21 juin 2017 qu'il estimait le viser sans le nommer ('un délégué [7] surnommé le coucou..').
M. [S] [H]., autre délégué du même syndicat que l'appelant ([7]), a attesté 'être témoin de l'agression verbale et de l'incitation à la violence initiée par M. [J] [H]., adhérent [9], à l'encontre de M. [A] [U], délégué syndical [7] lors de la paritaire du 16 mai 2017 en présence du responsable des relations sociales de [13] et d'autres représentants syndicaux.
Le responsable des relations sociales n'ayant pas réagi pour stopper cette agression qui n'avait pas sa place dans cette réunion paritaire, [A] [U] s'est adressé directement à [J] [H]. lui demandant d'arrêter définitivement ce genre de comportement'.
M. [U] a également recueilli le témoignage de deux autres participants.
- M. [D] [Y], délégué, [7] qui a déclaré : 'être témoin de l'agression verbale et d'incitation à la violence initiée par M. [J] [H].., à l'encontre de M. [A] [U], délégué syndical [7]. Cette agression s'est produite en fin de matinée du mardi 17 juin 2017 en fin de paritaire. Alors que M. [A] [U] s'adressait au responsable des relations sociales de [13], M. [J] [H].. intervient et provoque M. [A] [U], provocation contenant des propos insultants et vexatoires à son encontre. Le responsable des relations sociales n'intervenant pas pour mettre fin à cette provocation, M. [A] [U] s'est déplacé pour s'adresser directement à M. [J] [H]. pour lui demander de mettre un terme à ces provocations récurrentes. C'est alors que M. [J] [H].. incite à la violence M. [A] [U]. Notre collègue [7] [S] [H].. demande alors à M. L. [U] de garder son calme et d'aller se rasseoir. A aucun moment le responsable des relations sociales est intervenu alors que la situation était particulièrement tendue et que l'attitude de M. [N] [H].. était déplacée et violente'.
- M. [J] [C], délégué [7] dans des termes et graphisme quasiment identiques indique également avoir été 'témoin de l'agression verbale et d'incitation à la violence initiée par M. [J] [H].., à l'encontre de M. [A] [U], délégué syndical [7]. Cette agression s'est produite en fin de matinée du mardi 17 juin 2017 en fin de paritaire vers 11h30. M. [A] [U] échangeait avec le responsable des relations sociales pour obtenir des comptes-rendus officiels des précédentes paritaires suite aux annonces que celui-ci venait de faire. C'est alors que M. [J] [H].. intervient et provoque M. [A] [U], provocation contenant des propos vexatoires, humiliants et insultants à son encontre. Le responsable des relations sociales ne réagit pas pour stopper cette provocation. M. [A] [U] s'est alors déplacé pour s'adresser directement et en face de M. [J] [H]. pour lui demander de mettre définitivement un terme à ces provocations récurrentes. C'est alors que M. [J] [H].. incite à la violence M. [A] [U]. Celui-ci garde son calme puis est allé se rasseoir. A aucun moment le responsable des relations sociales est intervenu pour mettre un terme à cette altercation particulièrement violente'.
En sens contraire, la section syndicale [8] a établi le 19 mai 2017 une déclaration à propos du comportement intolérable de M. [U] qui, lors de la paritaire du 15 mai (ndr et non du 16), aurait violemment pris à partie M. [J] [H].., se levant de sa place pour venir le provoquer et voulant le faire sortir de la réunion pour lui 'casser la g... dehors', déclaration reprise dans le procès verbal du 19 mai 2017 du comité d'entreprise dans ces termes :
'Lors de la réunion paritaire du 15 mai 2017, regroupant les organisations syndicales [10], [7], [8] et un représentant de la Direction, M. [A] [U] représentant la [7], qui était particulièrement énervé depuis le début de la séance, a violemment pris à partie M. [J] [H].., représentant de la [8], le menaçant verbalement et physiquement, se levant de sa place pour venir le provoquer et voulant le faire sortir de la réunion pour lui 'casser la g...' dehors. La [8] considère qu'un comportement aussi déplacé de la part de l'un des représentants de la [7] est tout simplement intolérable et donne une bien triste image du dialogue syndical.
N'ayant pas reçu d'excuses à ce jour, M. [J] [H].. décidera des suites à donner (...)'.
M. [K] [L]..., responsable des relations sociales et participant à cette réunion, a répondu à l'appelant qu'aucun compte rendu de la paritaire du 16 mai n'avait été établi.
Ce dernier, désormais en retraite, a ensuite établi une attestation dans les termes suivants :
'..... En début de réunion a été abordée la question du temps nécessaire aux membres du bureau du comité d'entreprise pour réaliser certaines tâches ou remplir certaines fonctions notamment celle de trésorier. Dans la discussion [N] [H]... a indiqué qu'il fallait rajouter des heures au quota légal d'heures de délégation car le trésorier passait parfois beaucoup de temps à étudier des dossiers de demandes de prises en charges de certaines prestations assurées par le CE comme par exemple les aides aux vacances. Il a précisé, sans citer de nom, que certains salariés envoyaient au CE des dossiers incompréhensibles dans lesquels il manquait les pièces justificatives. En entendant cela, M. [U], qui était assis à environ 6 à 8 mètres de M. [Z], s'est levé en se dirigeant vers lui. Ce dernier lui a alors dit une seule phrase qui en substance signifiait : Oui viens me frapper et comme cela tu auras matière à faire travailler l'avocat de la [7]. M. [U] a alors fait 1/2 tour et il s'est rassis sans aucun commentaire. Cet 'incident' ayant duré moins de dix secondes, je n'ai pas jugé utile d'intervenir. La réunion s'est d'ailleurs poursuivie tout à fait normalement sans que personne ne demande de suspension, aucune des deux personnes citées ni aucun des autres participants ne me paraissant particulièrement troublé par ce que je qualifie de 'non événement'.
La SASU [13] a versé aux débats l'attestation d'un autre participant à cette réunion à présent aussi retraité, M. [T] [C]. déclarant :
'Lors d'une réunion paritaire le 15 mai 2017 subitement M. [A] [U] s'est levé en colère et s'est dirigé très excité vers M. [J] [H].. avec des propos assez violents. Sa réaction faisait suite à des explications données en séance par le trésorier du comité d'entreprise des difficultés qu'engendre l'attente des salariés de fournir leur demande de remboursement de frais en une seule fois. M. [H].. expliquait la charge importante de travail sur une période courte. M. [U] s'est sans doute senti concerné et a réagi fortement aux explications. Il a quitté la séance fort énervé. L'ensemble des présents ont été surpris et une incompréhension générale de cette réaction'.
D'autre part, les lésions décrites dans le certificat médical initial du 27 juin 2017, établi concomittamment à une prescription d'arrêt de travail, plus d'un mois après les faits supposés, ont d'abord été rattachées par le médecin les ayant consignées à un accident qui serait survenu le 27 juin 2017 ayant fait l'objet d'un précédent refus de prise en charge, faute d'événement précis survenu sur jour marquant le point de départ de l'arrêt de travail de M. [U], et ce n'est que le 3 octobre 2017, par un certificat rectificatif, qu'un lien a été fait par le médecin traitant de l'appelant avec l'accident remontant au 16 mai 2017 dont il est demandé la prise en charge dans les termes suivants :
'Réaction face à une situation éprouvante. Rectificatif pour précisions : état d'anxiété majeur, avec insomnie majeure, avec irritabilité et retentissement sur la vie personnelle et familiale, par ailleurs manque de concentration, difficulté à l'élaboration de pensée abstraite, nécessité d'un traitement médicamenteux anxiolytique et sédatif depuis le 5 juillet puis d'un traitement antidépresseurs depuis le 2 août 2017 / rendez-vous pris avec spécialiste pour suivi psychologique'.
En conséquence, il ressort de ces éléments que :
- la survenance d'un fait précis dont M. [U] a pu être victime le 15 ou le 16 mai 2017 n'est pas certaine, en l'état des contradictions n'ayant pu être levées par des pièces suffisamment probantes versées aux débats quant à l'auteur de l'altercation ayant eu lieu ce jour entre l'appelant et M. [J] [H].. ;
- en tout état de cause, aucune lésion physique ou psychique ayant pu en découler n'a été constatée immédiatement, mais ne l'a été que le 27 juin au mieux, soit plus d'un mois après, avec un lien fait par le médecin ayant constaté ces lésions avec un possible accident du travail survenu le 16 mai que plusieurs mois après encore, le 3 octobre 2017.
Dans ces conditions, la présomption d'imputabilité de l'article L 411-11 précité du code de la sécurité sociale n'a pas vocation à s'appliquer et l'appelant échoue à rapporter la preuve qui lui incombait d'un fait accidentel survenu le 16 mai, en relation de causalité avec les lésions décrites au certificat médical initial établi bien après.
Le jugement déféré sera donc entièrement confirmé, notamment en ce qu'il a déclaré que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a refusé à bon droit la prise en charge de l'accident déclaré par M. [A] [U] qui serait survenu le 16 mai 2017.
3. L'appelant succombant supportera les dépens et n'est donc pas fondé à solliciter la condamnation de la caisse à lui verser une indemnité par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il ne parait pas inéquitable de laisser à la SASU [13], intervenue volontairement dans une instance opposant uniquement l'assuré à sa caisse primaire d'assurance maladie, la charge de ses frais irrépétibles d'instance.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant contradictoirement et publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement RG n° 19/00042 rendu le 30 novembre 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble.
Y ajoutant,
Condamne M. [A] [U] aux dépens d'appel.
Déboute M. [A] [U] et la SASU [13] de leurs demandes par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Kristina Yancheva, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président