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04/07/2023 | FRANCE | N°21/03778

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 04 juillet 2023, 21/03778


N° RG 21/03778 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LARR



N° Minute :





C1

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



la SELARL CABINET LAURENT FAVET



la SELARL EUROPA AVOCATS















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE G

RENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 04 JUILLET 2023



Appel d'un Jugement (N° R.G. 21/00126) rendu par le tribunal judiciaire de GAP en date du 27 juillet 2021, suivant déclaration d'appel du 30 Août 2021





APPELANTE :



Mme [E] [V]

née le 30 Décembre 1956 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]



représentée pa...

N° RG 21/03778 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LARR

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL CABINET LAURENT FAVET

la SELARL EUROPA AVOCATS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 04 JUILLET 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 21/00126) rendu par le tribunal judiciaire de GAP en date du 27 juillet 2021, suivant déclaration d'appel du 30 Août 2021

APPELANTE :

Mme [E] [V]

née le 30 Décembre 1956 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée par Me Laurent FAVET de la SELARL CABINET LAURENT FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par Me Frédéric BERGANT, Avocat au Barreau de MARSEILLE.

INTIM ÉE :

S.A. BANQUE POSTALE ASSURANCES IARD représentée par ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Sylvain REBOUL de la SELARL EUROPA AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substitué et plaidant par Me Elena LOPEZ, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 2 mai 2023, Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, assisté de Caroline Bertolo, greffière, en présence de Sorenza Loizance, greffière stagiaire, a entendu seul les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [E] [V] est propriétaire occupante d'une maison située [Adresse 4], Commune de [Localité 1] (05), assurée auprès de la société Banque Postale Assurances dans le cadre d'une police multirisques habitation depuis le 19 juillet 2012.

Le 30 décembre 2016 elle a effectué une déclaration de sinistre en raison de l'apparition de nombreuses fissures au cours de l'été précédent.

L'assureur a mandaté le Cabinet POLYEXPERT qui a établi un premier rapport le 28 février 2017, concluant qu'il n'était pas possible d'affirmer que les désordres étaient la conséquence de phénomènes naturels.

L'assureur lui a opposé en tout état de cause un refus de garantie en l'absence d'arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Cet arrêté ayant finalement été pris le 25 juillet 2017 en raison de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols survenus durent la période du 1er juillet au 30 septembre 2016 sur le territoire de la commune de [Localité 1], Mme [V] a réitéré sa demande le 14 septembre 2017.

Le Cabinet POLYEXPER a établi le 25 septembre 2017 un rapport complémentaire concluant cette fois que les dommages s'étaient produits antérieurement la période considérée.

L'expert indiquait en effet que des fissures étaient apparues dés 2010 et avaient donné lieu à l'époque à un arrêté municipal de péril.

L'assureur a donc opposé un nouveau refus de prise en charge.

En désaccord avec cette décision, Mme [V] a obtenu du juge des référés l'organisation d'une expertise judiciaire suivant ordonnance rendue le 20 novembre 2013.

L'expert [U] a rendu son rapport définitif le 11 septembre 2020, concluant que la maison était atteinte de désordres sévères occasionnés par la dessiccation exceptionnelle du sol consécutive à la sécheresse de l'été 2016.

Il considère en revanche que « les désordres antérieurs sont très minoritaires et leur contribution à l'endommagement de l'immeuble est négligeable ».

Il chiffrait le montant des réparations à la somme de 435 720 euros TTC.

Au vu de ce rapport, Mme [V] a fait assigner la Banque Postale Assurances IARD à comparaître à jour fixe devant le tribunal judiciaire de Gap.

Par jugement contradictoire en date du 27 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Gap a :

- débouté Mme [E] [V] des fins de son action ;

- condamné Mme [E] [V] aux entiers dépens, comportant ceux du référé-expertise ;

- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu a exécution provisoire.

Par déclaration en date du 30 août 2021, Mme [E] [V] a interjeté appel de la décision.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 8 février 2023, Mme [E] [V] demande à la cour de :

- réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Statuant de nouveau,

- juger que Mme [E] [V] est recevable et bien fondée en ses prétentions en ce que les désordres déclarés par Mme [E] [V] le 16 août 2016 à son assureur la Banque Postale Assurances IARD, sont en lien direct avec l'état de catastrophe naturelle reconnu par arrêté de M. le ministre de l'intérieur du 25 juillet 2017 s'agissant des mouvements de terrains différentiels consécutifs à la sécheresse des sols du 1er juillet 2016 au 30 septembre 2016 sur la commune de [Localité 1] (05) ;

- juger que la Banque Postale Assurances IARD doit mobiliser ses garanties d'assurance ;

En conséquence,

- débouter la Banque Postale Assurances IARD de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la Banque Postale Assurances IARD à verser une indemnité équivalente à 439 320 euros outre intérêts au taux légal courant à compter du 16 août 2016, date de la déclaration de sinistre ;

- juger que l'indemnité allouée sera à indexer sur l'indice BT01 ;

- condamner la Banque Postale Assurances IARD à payer à Mme [E] [V] une indemnité de 5 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

condamner la Banque Postale Assurances IARD à payer à Mme [E] [V] une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Favet.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle rappelle les faits et la procédure ;

- elle soutient que les désordres subis par l'immeuble en 2010 n'étaient pas imputables à la sécheresse mais à des dégâts des eaux en sous-sol auxquels il a été remédié conformément aux recommandations de la société Sol Concept, conduisent le maire de la commune a lever l'arrêté de péril ;

- en revanche, les désordres apparus 2016 sont la conséquence des phénomènes reconnus comme catastrophe naturelle de sorte qu'elle est en droit de prétendre à la garantie intégrale de son assureur en application de l'article L. 125-1 du code des assurances ;

- elle réclame en conséquence paiement de la somme principale de 439 320 euros, outre intérêts au taux légal ;

- elle invoque une résistance abusive ;

- les premiers juges ont d'une part, considéré à tort que les sinistres de 2010 et de 2016 procédaient des mêmes causes techniques, invalidant ainsi intégralement les conclusions de l'expert judiciaire [U] et d'autre part, considéré à tort que Mme [V] devait réaliser les travaux de reprise en sous-'uvre dans l'hypothèse de nouveaux mouvements significatifs, ce qu'elle se serait fautivement abstenue de faire ;

- à aucun moment le BE Sol Concept n'a préconisé une reprise en sous-'uvre de l'ouvrage ni conclu à la nécessaire reprise des fondations ;

- le sinistre survenu en 2010, affectant essentiellement les extensions récentes de l'ouvrage, était imputable à des venues d'eau périphériques (réseaux fuyards, drain agricole inefficace) mal maîtrisées au sein d'un sol argileux sensible aux phénomènes de retrait-gonflement ;

- à l'inverse, le sinistre déclaré en 2016 procède de causes géotechniques différentes, à savoir, non pas un apport d'eau sous l'ouvrage, mais une dessiccation des sols argileux en profondeur, à l'origine de mouvements de sols ;

- contrairement à ce que les premiers juges ont considéré, les deux sinistres survenus en 2010 et 2016 ne sauraient être confondus et le second ne saurait être considéré comme la suite logique et prévisible du premier du fait d'un prétendu défaut d'entretien ou de réparation de l'ouvrage ;

- elle réfute les éléments de défense de l'assureur.

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 21 février 2023, la SA Banque Postales Assurances IARD demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

En conséquence,

- débouter Mme [V] de l'intégralité de ses demandes dirigées à l'encontre de la Banque Postale Assurances IARD ;

Y ajoutant,

- condamner Mme [V] à payer à la Banque Postale Assurances IARD la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens ;

Subsidiairement,

- juger que le montant de l'indemnisation, éventuellement fixé, sera :

* limité à la valeur vénale du seul bien assuré,

* réduit à proportion d'au moins 20 % en considération de l'antériorité des désordres,

* réduit en proportion du taux de prime, conformément à l'art L. 113-9 du code des assurances,

* réduit du montant de la franchise de 1 520 euros ;

- juger que l'indemnisation se fera par règlement des factures de travaux aux entreprises ;

- débouter Mme [V] du surplus de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire,

- ramener la demande de Mme [V] au titre de l'article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions dans la limite maximale de 1 500 euros.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle rappelle les faits et la procédure ;

- elle oppose la nullité du contrat sur le fondement de l'article L. 121-15 du code des assurances, au motif que l'immeuble avait déjà péri ou ne pouvait plus être exposé au risque ;

- elle évoque le rapport de M. [K] et l'étude géologique de Sol Concept concluant à nécessité d'une reprise en sous-oeuvre des fondations ;

- elle invoque aussi une exclusion de garantie en application des conditions générales du contrat en raison d'un défaut d'entretien ou de réparation imputable à l'assurée, faisant valoir que les travaux préconisés en 2010 n'ont pas été réalisés ;

- dès lors, la sécheresse de 2016 ne revêt pas un caractère déterminant au sans de l'article L. 125-1 du code des assurances ;

- dès 2010, la question d'une reprise en sous-'uvre a été évoquée par le rapport de M. [K] est qualifiée d'absolue nécessité ;

- le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [U] déposé en 2020 préconise la même solution de reprise structurelle du bâtiment que Sol Concept en 2010 à l'aide de micropieux ;

- elle demande subsidiairement une diminution de l'indemnisation sollicitée ;

- elle fait remarquer une on-conformité du nombre de pièces habitables déclarées ;

- la franchise doit être déduite ;

- le règlement se fera sur présentation de factures.

La clôture de l'instruction est intervenue le 22 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En l'espèce, les principaux éléments pris en compte par le premier juge pour débouter Mme [V] de ses demandes sont les suivants :

- en 2009, Mme [V] avait effectué une première déclaration de sinistre auprès de son précédent assureur (AVIVA) en raison de l'apparition de fissures importantes sur les murs de sa maison ;

- l'état de catastrophe naturelle n'avait pas été reconnu à l'époque ;

- néanmoins, le maire de la commune de [Localité 1] avait sollicité auprès du juge des référés du tribunal administratif la désignation d'un expert afin de se prononcer sur l'état de l'immeuble, dans le cadre de l'exercice de ses pouvoirs de police des édifices menaçant ruine ;

- l'expert M. [S] [K] avait établi un rapport le 15 mars 2010, dans lequel il notait que la maison présentait des signes probants de délabrement ;

- il précisait que les fondations périphériques n'étaient pas adaptées à la nature du sous-sol ou exécutées à une profondeur insuffisante ;

- il existait un phénomène généralisé de fissuration en raison d'un tassement de la construction ;

- ainsi, il considérait qu'il existait un péril grave et imminent justifiant l'évacuation de l'immeuble ;

- il préconisait le renforcement de l'assise de l'immeuble ;

- un arrêté municipal avait ensuite été pris le 24 mars 2010, frappant l'immeuble d'une interdiction d'occupation et ordonnant la réalisation des travaux prescrits par l'expert ;

- toutefois, sur la base d'une étude géotechnique réalisée par la société Sol Concept courant juin 2010, Mme [V] a uniquement procédé à des travaux de réfection des drains, de remplacement de la conduite des eaux usées et de création d'une conduite d'évacuation des eaux pluviales ;

- un nouvel arrêté pris le 12 avril 2011 levait l'interdiction d'habiter ;

- force est de constater que, contrairement à l'opinion émise par l'expert [U], les nouveaux désordres apparus en 2016 constituent une aggravation du sinistre précédent ;

- en effet, ces désordres procèdent pour une très large part du défaut de réalisation des travaux de renforcement des fondations qui avaient été préconisés à l'époque et dont Mme [V] connaissait la nécessité ;

- l'étude de la société Sol Concept, dont la teneur est largement dénaturée par l'appelante, listait parmi les causes possibles des désordres observés, le défaut de portance du sol en partie aval, des tassements différentiels dus à une épaisseur variable des terrains argileux compressibles sous- fondation, et une sensibilité forte à très forte des argiles du site au gonflement-retrait ;

- Sol Concept recommandait a minima une surveillance de l'immeuble par la pose de témoins (ce qui n'a pas été fait) ;

- en cas de nouveaux mouvements significatifs, Sol Concept préconisait la reprise en sous-oeuvre des fondations par l'implantation de micro-pieux ;

- or, ce sont précisément les mêmes travaux qui sont préconisés dans le rapport de M. [U] ;

- en conséquence, l'assureur est en droit d'opposer une exclusion de garantie en application des conditions générales du contrat en raison d'un défaut d'entretien ou de réparation incombant à l'assurée et connu de cette dernière.

S'agissant donc du rejet des demandes de Mme [V], en l'absence de nouveaux moyens et de nouvelles preuves présentés par les parties, c'est par des motifs pertinents au vu des justificatifs qui lui étaient soumis, que le tribunal s'est livré à une exacte analyse des faits et à une juste application des règles de droit.

La cour, adoptant cette motivation, confirmera le rejet des demandes de Mme [V].

Le jugement sera confirmé par adoption de motifs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Mme [E] [V], dont l'appel est rejeté, supportera les dépens d'appel avec distraction, ceux de première instance étant confirmés.

Pour la même raison, il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Banque Postale Assurances IARD les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. Mme [E] [V] sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [E] [V] à payer à la SA La Banque Postale Assurances IARD la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamne Mme [E] [V] aux dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, présidente de la deuxième chambre civile et par la greffière, Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/03778
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;21.03778 ?
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