C 2
N° RG 22/00190
N° Portalis DBVM-V-B7G-LF6G
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET
la SELARL A PRIM
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 07 MARS 2024
Appel d'une décision (N° RG 21/00063)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU
en date du 09 décembre 2021
suivant déclaration d'appel du 10 janvier 2022
APPELANTE :
Madame [C] [HJ]
née le 25 Août 1993 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEE :
E.U.R.L. ADRIACO, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Sandrine MOUSSY substituée par Me ESCALIER Sandrine, de la SELARL A PRIM, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,
M. Jean-Yves POURRET, Conseiller,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 novembre 2023,
Jean-Yves POURRET, conseiller chargé du rapport et Frédéric BLANC, conseiller faisant fonction de président, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 07 mars 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 07 mars 2024.
EXPOSÉ DU LITIGE
Les sociétés Adriaor et Adriaco, dont la gérante est Mme [VU], exploitent des établissements de restauration rapide sous l'enseigne Mac Donald's, situés respectivement à [Localité 8] et à [Localité 5].
La convention collective applicable est la convention collective nationale de la restauration rapide du 18 mars 1988.
Mme [C] [HJ] a été embauchée le 16 décembre 2011 en qualité d'équipière polyvalente par la société Adriaor suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel.
À compter du 1er juin 2014, Mme [HJ] est classée niveau 1 échelon 2 de la convention collective applicable.
À compter du 1er septembre 2014, Mme [HJ] travaille à temps plein.
À compter du 1er novembre 2014, le contrat de travail de Mme [HJ] est transféré au sein de la société Adriaco.
Mme [HJ] a bénéficié d'un arrêt de travail à compter du 10 février 2015 pendant un mois suite à une altercation avec une cliente sur son lieu de travail.
Du 25 janvier 2016 au 30 janvier 2016, Mme [HJ] a été temporairement détachée sur le restaurant de [Localité 8].
Par courrier en date du 12 avril 2016, Mme [HJ] a présenté sa démission à son employeur et a exécuté son préavis de 30 jours.
Le 20 juillet 2016, Mme [C] [HJ] a saisi le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu d'une demande de requalification de sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul en raison du harcèlement moral subi.
La société Adriaco s'est opposée aux prétentions adverses.
Par jugement en date du 9 décembre 2021, le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu a :
DIT ET JUGÉ que Mme [HJ] n'a fait l'objet d'aucun harcèlement moral ;
DIT ET JUGÉ que la société Adriaco n'a commis aucun manquement dans l'exécution du contrat de travail de Mme [HJ] ;
DIT ET JUGÉ que la démission de Mme [HJ] est sans équivoque ;
En conséquence, DÉBOUTE Mme [HJ] de l'ensemble de ses demandes ;
CONDAMNE Mme [HJ] à verser à la société Adriaco la somme de 100 euros au titre de la procédure abusive ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [HJ] aux entiers dépens.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés les 14 décembre 2021.
Par déclaration en date du 10 janvier 2022, Mme [HJ] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 octobre 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [HJ] demande à la cour d'appel de :
REFORMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
JUGER que Mme [HJ] a été victime d'agissements de harcèlement moral discriminatoire,
JUGER que la société Adriaco a violé ses obligations de prévention et de sécurité,
JUGER que la société Adriaco a commis des manquements suffisamment graves de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail,
REQUALIFIER la démission de Mme [HJ] en date du 12 avril 2016 en prise d'acte produisant les effets d'un licenciement nul à titre principal, et d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,
En conséquence,
CONDAMNER la société Adriaco à verser à Mme [HJ] les sommes suivantes :
15 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail,
15 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral sur le fondement de l'article L.1152-4 du code du travail,
28 338,43 euros brut à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires,
2 833,84 euros brut au titre des congés payés afférents,
251,92 euros net à titre de remboursement de frais de déplacement,
18 000 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul à titre principal, et subsidiairement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNER la société Adriaco à verser à Mme [HJ] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER la même aux entiers dépens ;
DEBOUTER la société Adriaco de l'intégralité de ses demandes.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 juillet 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Adriaco demande à la cour d'appel de :
DIRE ET JUGER régulier mais mal fondé l'appel engagé par Mme [C] [HJ] à l'encontre du jugement du Conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu du 9 décembre 2021 ;
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a dit et jugé que Mme [C] [HJ] n'a pas été victime de harcèlement moral de la part de la société Adriaco ;
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a dit et jugé que la société Adriaco a loyalement exécuté le contrat de travail et n'a pas manqué à son obligation de sécurité ;
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] [HJ] de toutes demandes de dommages et intérêts au titre de l'exécution de son contrat de travail ;
CONFIRMER le jugement en ce qu'il a dit et jugé que la démission de Mme [C] [HJ] est sans équivoque ;
CONFIRMER en conséquence le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] [HJ] de sa demande de requalification de sa démission en une prise d'acte de la rupture s'analysant en un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ;
CONFIRMER également le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] [HJ] de ses demandes en lien avec la rupture de son contrat de travail ;
Et statuant à nouveau,
ACCUEILLIR son appel incident ;
INFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté la société Adriaco de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de Mme [C] [HJ] ;
CONDAMNER conséquence Mme [C] [HJ] à payer à la société Adriaco la somme totale nette de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNER également Mme [C] [HJ] à payer à la société Adriaco la somme totale nette de 3 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNER Mme [C] [HJ] aux éventuels dépens de première instance et d'appel.
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2023.
L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 29 novembre 2023 ; la décision a été mise en délibéré le 7 mars 2024.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur la demande au titre des heures complémentaires/supplémentaires :
Il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l'opposition à l'exécution de celle-ci de l'employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires à raison de l'accord tacite de l'employeur.
Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l'employeur de la réalisation d'heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l'absence d'opposition de l'employeur à la réalisation de ces heures.
En l'espèce, selon l'avenant au contrat de travail du 1er août 2013, Mme [HJ] a travaillé à temps partiel à hauteur de 129,9 heures, temps de travail renouvelé par avenants en date du 1er février 2014 et du 1er juin 2014.
Par ailleurs, il ressort de l'avenant au contrat de travail conclu le 1er septembre 2014 et de la convention de transfert du contrat de travail à la société Adriaco à compter du 1er novembre 2014 que Mme [HJ] a un horaire mensuel de 151,67 heures.
Ainsi, entre le mois d'août 2013 et le 31 août 2014, Mme [HJ] a exercé ses fonctions à temps partiel et sollicite des heures complémentaires sur cette période, puis, à compter du 1er septembre 2014, elle a travaillé à temps plein et revendique donc des heures supplémentaires effectuées jusqu'au mois de février 2016.
En premier lieu, à l'appui de ses prétentions, Mme [HJ] produit des calendriers pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016 et des tableaux chiffrant les heures revendiquées.
Il ressort de ces calendriers que la salariée a noté, entre le mois d'août 2013 et le mois de février 2016, les repos hebdomadaires, les congés payés ainsi que l'indication « +4h », « +6h » ou « +10h » pour les jours travaillés, représentant selon les conclusions de la salariée les heures complémentaires revendiquées entre le 12 avril 2013 et le 31 août 2014 et les heures supplémentaires alléguées à compter du 1er septembre 2014.
Les tableaux versés aux débats précisent, par semaine entre le 1er août 2013 et le 28 février 2016, le nombre d'heures complémentaires et supplémentaires sollicitées en fonction de la majoration à appliquer et chiffrent ainsi le rappel de salaire sur lesdites heures revendiquées par semaine et par année.
Contrairement à ce que l'employeur soutient dans ses écritures (page 16 des conclusions), les annotations de la salariée, explicitant par jour le nombre total d'heures supplémentaires effectuées selon elle, sont suffisantes pour lui permettre d'y répondre utilement quand bien même il n'est pas mentionné les horaires d'arrivée, de départ et de pause pour chaque journée, d'autant qu'il lui appartient d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées.
La circonstance que des calendriers similaires comportant les mêmes annotations soient produits par d'autres salariés dans des affaires analogues actuellement pendantes devant la présente cour n'entache pas la valeur probante desdits calendriers, dès lors que toutes les salariées ont travaillé pour au moins l'une des deux sociétés gérées par Mme [VU] et qu'elles avaient donc des réunions communes et des abréviations identiques.
De la même manière, le tableau indiquant le nombre d'heures complémentaires et supplémentaires revendiquées avec la majoration appropriée, quand bien même il constituerait « une simple reconstitution théorique des heures qu'elle aurait prétendument réalisées sur la période litigieuse » (page 17 des conclusions de l'employeur), suffit à l'employeur pour répondre utilement aux demandes de Mme [HJ] dès lors que la salariée a indiqué le nombre d'heures complémentaires et supplémentaires revendiquées pour chaque semaine et qu'il appartient à l'employeur d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées.
En deuxième lieu, Mme [HJ] produit les attestations de Mmes [AO], [CC], [PH] et [W], anciennes salariées de l'établissement de [Localité 5], qui, bien que certaines de leurs observations demeurent générales et non datées, sont suffisamment précises et concordantes quant au contexte dans lequel les heures complémentaires et supplémentaires revendiquées auraient été effectuées.
Mme [K] [AO] précise que Mme [HJ] « était toujours présente du matin au soir » et que « [C] avait, comme tous les managers, beaucoup de feuilles à remplir avant chaque début de shift. Ce qui prend en moyenne 1 heure avant pointage ou après pour le shift du matin. Mme [VU] l'obligeait à ne pointer qu'aux heures planifiées. Il est très fréquent aussi qu'en fin de journée les tâches ne soient pas terminées. [C] avait l'obligation de dépointer à l'heure et de finir son travail ensuite. Le contrôle des fermetures est quant à lui toujours effectué après dépointage. Les équipiers doivent quant à eux attendre dans le restaurant et ont interdiction de sortir tant que le manager n'a pas terminé. Toutes ces heures supplémentaires n'apparaissent nulle part et ne sont donc pas rémunérées. »
Mme [I] [W] indique qu'« en cas d'heures supplémentaires dans le mois, changement de contrat par des avenants à signer sur place et non-expliquées et datés du début de mois et donnés pas avant le milieu de mois afin d'éviter tout paiement d'heures sup. »
Mme [G] [CC] mentionne que « [C] faisait les fermetures et ouvertures toute seule alors qu'elle n'était que responsable de zone, elle n'avait pas le diplôme de manager mais en avait toutes les responsabilités. Voyant notre collègue constamment sous pression, de plus en plus fatigué et mal au travail, nous faisons en sorte de rester le plus longtemps possible, parfois en dehors des heures pointées pour l'aider à fermer le restaurant. [C] a fait tout un week-end ouverture-fermeture car un des managers avait eu un accident et ils ont délaissé [C] toute seule, faisant des journées de 12h, alors que c'était complètement interdit. »
Mme [PH] atteste avoir « constaté que [C] avait des horaires de manager, elle travaillait de 9h à 17h et revenait le soir. Moi-même j'ai parfois eu des horaires similaires de 10h par jour en étant en contrat étudiant le week-end ».
Ces quatre salariées indiquent ainsi que Mme [HJ] était régulièrement présente à l'ouverture et à la fermeture du restaurant afin, notamment, de remplir une feuille de route ou effectuer l'inventaire et qu'elle travaillait en dehors des heures pointées, la gérante l'obligeant, ainsi que les autres salariés, à pointer uniquement les heures planifiées.
En troisième lieu, ces éléments sont corroborés par les attestations de Mmes [E] [B], [EN] [EY], [EN] [HO] et [TN] [Y] et M. [KF] qui, nonobstant le fait qu'ils sont salariés en litige avec la société dans d'autres procédures actuellement pendantes devant la présente cour, demeurent suffisamment probantes, en ce qu'elles apportent des faits suffisamment précis, même non datés, ayant perduré au cours de la relation de travail.
En outre, le courrier anonyme produit par l'employeur quant au fait qu'un « complot » aurait été organisé contre la gérante de la société n'a aucune valeur probante en l'absence de preuve d'authenticité, telle qu'une date ou un courrier d'envoi, de sorte que cet élément de fait n'est pas établi et ne permet donc pas d'écarter lesdites attestations sur le seul fait qu'elles proviennent de salariés en litige avec la société.
Ainsi, Mme [E] [B] indique que Mme [HJ] « devait fermer le restaurant le soir seule et sans diplômes avec à sa charge le personnel. »
Mme [EN] [EY] précise que « [C] était responsable de zone mais avait les responsabilités d'un manager, elle faisait les fermetures seules, nous équipiers on restait avec elle pour l'aider » et ajoute que « Souvent ces journées de travail étaient plus de 7h / jours, elle disait qu'elle était fatiguée » et que « [C] devait faire des inventaires en 1h pour le rush du soir, le contrôle fermeture devait être effectué hors pointage (hors temps de travail). [C] faisait ses inventaires 1h avant de pointer ».
Mme [EN] [HO] atteste que « comme tous les managers, [C] était très sollicitée pour remplacer du personnel manquant en dehors de ses heures de pointage. Toutes ces heures effectuées étaient notées dans un cahier afin d'éviter toutes anomalies sociales avec ses pointages et ainsi même les jours fériés ou elle devait être en congés hebdomadaires. [C] était contrainte d'assister aux réunions faites en dehors de son horaire planifié et devait ainsi enchaîner ses heures de travail à la fin de la réunion. De plus, pour répondre aux exigences de Mme [VU], un tour de contrôle du restaurant devait être effectué en dehors des heures du temps de travail en ouverture comme en fermeture. Des inventaires devaient être faits avant l'heure de travail. Les consignes de Mme [VU] étaient de ne pointer qu'aux heures planifiées. Toutes les heures supplémentaires effectuées se faisaient donc hors du décompte de temps de travail. [C] devait être présente de longues heures pour faire du ménage lorsqu'une visite officielle était annoncée. Des répétitions de fabrication et service étaient effectuées midi et soir, quinze jours avant la visite et ce chaque jour de la semaine. Mme [VU] a toujours dit, je cite : « mes managers sont en astreinte 24h/24h et ce 365 jours par an » ».
M. [MW] [KF] comfirme que Mme [HJ] « occupait le poste de responsable de zone alors que Mme [VU] me l'avait présentée en tant que manager, elle avait donc toutes les responsabilités d'un manager tel que la fermeture du restaurant. »
Mme [TN] [Y] énonce que « Le 3 novembre 2014 a eu lieu l'inauguration du McDonald's de [Localité 5]. La veille, nous avions eu une réunion avec toute l'équipe de gestion afin de faire le point. Ce jour-là, [C] était en congé hebdomadaire puis avait un repas de famille. Malgré cela, elle a été sollicitée pour venir. Elle n'a donc pas eu le choix de venir au restaurant. Lorsqu'elle est arrivée au restaurant, [C] s'est faite « lynchée » par Mme [VU] avec des réflexions atroces dont une qui m'a marquée qui était : « À part McDonald's tu n'as pas de famille, c'est nous ta famille. » J'ai vu [C] se décomposer et fondre en larmes suite à de tels propos. Mme [VU] répétait souvent ouvertement que [C] était immature alors que sans diplôme, [C] ouvrait et fermait seule le restaurant ce qui n'est pas légal car pour faire cela il faut être diplômé (TBM1, TBM2). »
L'attestation de Mme [PS] [N] n'a toutefois pas de valeur probante en raison du lien familial avec Mme [HJ].
Mme [HJ] verse également aux débats les feuilles de route du manager du matin et du soir qui, bien que vierges, viennent corroborer les attestations précédemment citées sur le temps nécessaire pour les remplir compte tenu des nombres d'éléments à renseigner et du degré de précision attendu.
Ainsi, il ressort de ces différentes attestations que Mme [HJ] était régulièrement amenée à effectuer l'ouverture et la fermeture de l'établissement sans pointer les heures réalisées.
Dès lors, il résulte de l'ensemble des énonciations précédentes que Mme [HJ] présente un décompte suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre utilement et de justifier des horaires effectivement réalisés.
En réponse, d'une première part, l'employeur soutient dans ses écritures que « lorsque Mme [HJ] occupait le poste d'équipière polyvalente, elle était soumise à un système de badgeuse » et que « lorsque la demanderesse est devenue manager, elle n'utilisait plus la badgeuse, mais remplissait manuellement des fiches sur lesquelles elle mentionnait ses horaires de travail et sur lesquelles elle apposait ensuite sa signature » (page 20 des conclusions).
Toutefois, outre que la salariée a été promue responsable de zone à compter du 1er septembre 2014 et qu'aucun élément n'est versé au débat quant au fait qu'elle aurait été promue manager, la cour constate que l'employeur produit des relevés issus d'une badgeuse pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016 et que les seuls pointages opérés de manière manuscrite sur une feuille distincte portent du 18 octobre 2015 au 23 janvier 2016, la salariée ayant badgé au début du mois d'octobre 2015 et à compter du 25 janvier 2016.
La cour constate également que deux pointages ont été indiqués de manière manuscrite sur une feuille à part et ont été rajoutés par écrit sur la fiche de pointage en janvier 2015.
Il s'ensuit que l'employeur ne verse pas aux débats l'intégralité des fiches horaires qu'aurait remplies la salariée de manière manuscrite à compter du 1er septembre 2014, date à laquelle la salariée a été promue responsable de zone.
De plus, l'employeur n'apporte aucune justification à l'absence de production des fiches issues du système de badgeuse du 18 octobre 2015 au 23 janvier 2016, alors qu'il apparaît sur les fiches de pointage que d'autres salariés ont pointé électroniquement après le 20 octobre 2015 et dès le 1er janvier 2016.
Ainsi, en l'absence d'explications ou de la production d'éléments pertinents par l'employeur sur ce point, un premier doute apparaît sur la fiabilité des fiches produites par l'employeur quant aux horaires qu'aurait effectués la salariée selon lui.
D'une deuxième part, la société Adriaco soutient, par la production des fiches horaires précédemment indiquées et des bulletins de salaire que les heures complémentaires et supplémentaires effectivement réalisées sur la période litigieuse ont été comptabilisées et payées (page 15 des écritures).
Toutefois, la comparaison des bulletins de salaires avec les fiches de pointage met en évidence diverses incohérences.
En effet, par exemple, le bulletin de salaire du mois de novembre 2013 fait apparaître une majoration jours fériés pour le 1er et le 11 novembre. Or, sur la fiche de pointage, seul le 1er novembre est pointé, le 11 novembre n'apparaissant pas.
De la même manière, le bulletin de salaire d'avril 2015 fait apparaître une majoration pour jour férié le 6 avril, alors que la fiche de pointage ne fait pas apparaître d'heures travaillées le 6 avril.
La fiche de pointage du mois de mai 2015, mal imprimée, fait ressortir un pointage le 20 mai de 13h à 16h et de 18h à 22h avec l'inscription manuscrite « erreur carte ' », alors que le bulletin de salaire mentionne que Mme [HJ] était en congés payés du 18 au 31 mai 2015 avec une journée de solidarité, celle-ci ayant été fixée au 25 mai 2015.
Ainsi, un doute certain demeure sur la fiabilité des fiches de pointage en ce que l'intégralité des heures effectuées par la salariée n'y apparaissent pas dès 2013 jusqu'en 2015.
D'une troisième part, il ressort d'un échange de SMS entre Mme [HJ] et Mme [VU], produit par l'employeur, que le 26 novembre 2015, alors qu'il s'agit d'un jour de repos hebdomadaire de la salariée, la gérante de la société lui a demandé de venir à une réunion ce jour-là et a annulé la réunion en raison de l'absence de la salariée.
Ainsi, cet échange de SMS vient mettre en lumière le fait que, comme l'ont souligné plusieurs personnes dans leurs attestations, les salariés, dont Mme [HJ], étaient régulièrement amenés à effectuer des heures non pointées.
Ce même constat ressort également de l'enquête menée par les services de police puisque, lors des différentes auditions, plusieurs salariés déclarent devoir venir travailler en dehors des heures prévues sans pointer les heures effectuées. Le procès-verbal de synthèse fait également état que « dans les documents du dossier Prudhomme qui nous sont remis par Mme [MR], il apparaît que de nombreuses fois la directrice leurs demandaient de façon récurrentes par messages SMS ou appel de venir travailler sur des créneaux différents sans pour autant modifier le planning informatique, on peut également voir de nombreux changements effectués sur un planning papier et donc non enregistré, ce qui justifie le fait que les personnes faisant les attestations ne sont pas sur les planning officiel. »
Ce contexte est également confirmé par les SMS entre Mme [VU] et Mme [Y], produit par Mme [HJ] afin d'établir « le caractère parfaitement erroné des pointages versés aux débats par la société Adriaco » selon ses conclusions (page 28 des écritures).
Bien que les SMS ne concernent pas Mme [HJ] et ont donc une faible valeur probante quant à sa situation individuelle, le fait que certains des SMS produits permettent de constater que Mme [Y] était appelée à venir travailler en dehors de ses heures pointées sans que ses heures supplémentaires n'apparaissent sur le relevé de pointage vient corroborer le fait que les salariés étaient amenés à effectuer des heures non pointées.
D'une quatrième part, l'employeur produit les attestations de Mme [D] [L] et de Messieurs [MW] [T], [NB] [U] et [ET] [V] décrivant leur journée type en tant que managers au sein de la société Adriaor ou de la société Adriaco, occupant, selon les conclusions de l'employeur, des fonctions similaires à celles de Mme [HJ], responsable de zone (page 21 des écritures de l'employeur)
Selon ses quatre attestations, les salariés arrivent dès 8h pour effectuer les ouvertures, compte tenu des éléments sécuritaires, des livraisons et de l'accueil de différents équipiers entre 8h et 11h pour l'ouverture du restaurant au public et quittent le restaurant entre 23h-00h pour la fermeture.
Toutefois, en l'absence de production des fiches horaires qu'auraient remplies de manière manuscrite la salariée selon l'employeur, il résulte des fiches issues du système de badgeuse que le matin, Mme [HJ] arrivait à 9h30 et que le soir, elle partait soit à 22h soit à 23h.
Or, compte tenu des attestations produites par la salariée affirmant qu'elle faisait régulièrement l'ouverture ou la fermeture du restaurant, les horaires comptabilisés par la badgeuse ne correspondent donc pas aux horaires mentionnés dans les quatre attestations des managers, dont les fonctions étaient similaires à celles de Mme [HJ] selon l'employeur.
Au surplus, alors que la société mentionne que chaque salarié « se voyait communiquer ses plannings hebdomadaires de travail et avait l'obligation de pointer ses horaires journaliers lors de sa prise de poste et de son départ ainsi que pour chaque pause », la cour constate qu'aucun planning n'est versé aux débats rendant impossible la comparaison entre les plannings transmis à Mme [HJ] avec les horaires pointés et les heures supplémentaires revendiquées.
En conclusion, il résulte de l'ensemble de ces éléments que les fiches de pointage produites par l'employeur manquent de valeur probante pour déterminer les heures effectivement réalisées par la salariée, compte tenu des incohérences et contradictions précédemment relevées et du contexte relatif à l'absence de pointages de certaines heures travaillées au moment de l'ouverture ou de la fermeture du restaurant.
Finalement, il importe peu que la salariée ne se soit pas plainte pendant la relation de travail auprès de sa hiérarchie ou de la médecine du travail du défaut de paiement de ses heures de travail, d'autant qu'il ressort de certaines attestations produites par la salariée qu'elle ne devait badger que les heures planifiées et ne badgeait donc pas les heures supplémentaires effectuées.
De même, il importe peu qu'elle n'ait pas contesté son solde de tout compte, étant observé qu'il ne mentionne pas le paiement d'heures complémentaires ou supplémentaires.
Ainsi, alors que Mme [HJ] présente un décompte suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies entre août 2013 et février 2016, la société Adriaco ne justifient pas des horaires de travail effectivement réalisés par la salariée.
Pour autant, comme le met en avant l'employeur, des contradictions apparaissent entre les calendriers produits par la salariée et les fiches de pointage produits par l'employeur. Par exemple, pour le lundi 16 novembre 2015, la salariée indique en repos hebdomadaire sur le calendrier alors que la fiche de pointage, manuscrite et signée par Mme [HJ], précise pour le même jour « 16h30-19h30 et 20h-23h ».
Il s'ensuit que, compte tenu des incohérences soulevées par l'employeur quant aux calendriers, produits par la société, relatifs aux heures supplémentaires revendiquées, il convient de considérer que l'intégralité des heures complémentaires et supplémentaires revendiquées par la salariée n'est pas due.
Toutefois, en prenant en compte les heures effectuées suffisamment établies lors des ouvertures et des fermetures du restaurant en tant que responsable de zone, les incohérences des fiches recensant les horaires pointés produits par l'employeur et celles des calendriers et du tableau versés par la salariée, la cour retient que les heures complémentaires/supplémentaires effectuées par la salariée s'élèvent à la somme de 18 000 euros entre le mois d'août 2013 et le mois de février 2016.
Par conséquent, il convient de condamner la société Adriaco à payer à Mme [C] [HJ] la somme de 18 000 euros brut au titre du rappel de salaire pour heures complémentaires et supplémentaires entre août 2013 et février 2016, outre 1 800 euros brut de congés payés afférents.
Le jugement est donc infirmé à ce titre.
Sur la demande au titre des frais de déplacements :
Les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC.
Conformément à l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Il est de principe qu'il appartient au salarié d'établir qu'il a exposé des frais pour l'exercice de son activité professionnel, et une fois que cela a été fait, c'est à l'employeur de justifier qu'il s'est acquitté du paiement.
En l'espèce, Mme [HJ] soutient avoir eu « l'ordre de venir récupérer des équipiers du restaurant de [Localité 8] pour les amener avec elle à [Localité 7], puis les ramener pour finir de faire la fermeture du restaurant » et que « ces frais de déplacement ne sont absolument pas indemnisés » (pages 28-29 de ses écritures).
Elle produit l'attestation de Mme [K] [AO] qui précise que « [C] a dû partir à plusieurs reprises en formation au McDonald's de [Localité 7]. Elle avait l'ordre de Mme [VU] de venir récupérer des équipiers au restaurant de St Etienne de St Geoirs pour les amener avec elle à [Localité 7] puis de les ramener après la formation pour finir à faire la fermeture du restaurant. »
Elle verse également aux débats l'attestation de Mme [HO] qui indique que « [C] était tenue de se déplacer entre les restaurants avec son véhicule personnel et emmenait du personnel en formation au restaurant de [Localité 7]. Aucune compensation financière ne lui a été versée et elle devait effectuer ses heures planifiées à ses retours. ».
La salariée produit finalement un tableau récapitulant les frais de déplacement non pris en compte entre le 8 et le 31 octobre 2014 et deux cartes indiquant le voyage effectué.
Toutefois, comme l'employeur le fait valoir dans ses écritures (page 23 des conclusions), la salariée ne produit aucun justificatif de ses dépenses, le tableau n'étant donc corroboré par aucune pièce pertinente.
Au surplus, elle ne produit aucune attestation rédigée par les personnes qu'elle aurait véhiculées entre les deux restaurants et les attestations précédemment citées ne datent pas les déplacements, de sorte qu'elle n'établit pas suffisamment avoir transporté avec son propre véhicule des collaborateurs entre deux restaurants McDonald's.
Par conséquent, compte tenu des énonciations précédentes, il convient de débouter Mme [HJ] de sa demande de remboursement de frais de déplacement, le jugement étant ainsi confirmé de ce chef.
Sur les demandes au titre du harcèlement moral et de la prévention du harcèlement moral :
L'article L.1152-1 du code du travail énonce qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L.1152-2 du même code dispose qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
L'article 1152-4 du code du travail précise que l'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
Sont considérés comme harcèlement moral notamment des pratiques persécutrices, des attitudes et/ou des propos dégradants, des pratiques punitives, notamment des sanctions disciplinaires injustifiées, des retraits de fonction, des humiliations et des attributions de tâches sans rapport avec le poste.
La définition du harcèlement moral a été affinée en y incluant certaines méthodes de gestion en ce que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en 'uvre par un supérieur hiérarchique lorsqu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Le harcèlement moral est sanctionné même en l'absence de tout élément intentionnel.
Le harcèlement peut émaner de l'employeur lui-même ou d'un autre salarié de l'entreprise.
Il n'est, en outre, pas nécessaire que le préjudice se réalise. Il suffit pour le juge de constater la possibilité d'une dégradation de la situation du salarié.
À ce titre, il doit être pris en compte non seulement les avis du médecin du travail mais également ceux du médecin traitant du salarié.
L'article L 1154-1 du code du travail dans sa rédaction postérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 est relatif à la charge de la preuve du harcèlement moral :
En cas de litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
La seule obligation du salarié est d'établir la matérialité d'éléments de faits précis et concordants, à charge pour le juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble et non considérés isolément, permettent de supposer l'existence d'un harcèlement, le juge ne pouvant se fonder uniquement sur l'état de santé du salarié mais devant pour autant le prendre en considération.
En l'espèce, Mme [HJ] ne matérialise pas les éléments de faits suivants :
(1) En premier lieu, la cour rappelle que Mme [HJ] a été déboutée de sa demande au titre des frais de déplacement.
(2) En deuxième lieu, Mme [HJ] produit un document relatif, selon elle, au client mystère et à la façon de les détecter et de les servir, qui manque toutefois de valeur probante en ce qu'aucun élément concret ne permet de rattacher ce document à la Société Adriaco et qu'il n'est pas daté, de sorte qu'elle n'établit pas que les salariés devaient identifier la présence d'un client mystère afin de le traiter correctement en vue d'avoir une bonne appréciation.
(3) En troisième lieu, s'agissant du manquement à l'obligation de sécurité, la salariée verse aux débats l'attestation de Mme [PS] [R] relative à un incident survenu en septembre 2016 au cours duquel elle a glissé devant le grill et dans laquelle elle indique « par réflexe je pose le bras droit sur le grill pour me rattraper, j'avais une marque formée sur la peau à l'emplacement de la brûlure », photo de la blessure produite à l'appui.
Toutefois, il ressort de ladite attestation que Mme [R] « trouve inadmissible l'utilisation de cette photo prise une semaine après cette brûlure sans peau, pour prétendre que le nettoyage de grill est réalisé sans gants » et que « j'ai jugé moi-même que cette blessure n'entrait pas dans le cadre d'un accident de travail et était de ma seule responsabilité. Les soins pratiqués par moi-même ont été bénéfiques puisque je n'ai aucune séquelle. Je ne peux laisser dire n'importe quoi sur l'entreprise McDonalds de [Localité 5]. Sachez que cette entreprise est en adéquation avec ma déontologie concernant la qualité, la sécurité et l'environnement. »
Et Mme [HJ] ne produit aucun élément permettant d'établir que Mme [R] serait sous « l'emprise de Mme [VU] » et que son attestation serait de complaisance en faveur de cette dernière.
Dès lors, cet élément de fait propre à Mme [R] n'est pas suffisamment établi et ne permet donc pas de démontrer un manquement à l'obligation de sécurité de la part de la société Adriaco.
(4) En quatrième lieu, le seul fait que l'employeur ait porté plainte pour faux témoignages à l'égard des salariés ayant saisi la juridiction prud'homale ne suffit pas à caractériser une hostilité de sa part, quand bien même la plainte a été classée sans suite par le Procureur, dès lors qu'il n'a fait qu'exercer l'un de ses droits et qu'il justifie son dépôt de plainte en raison des témoignages croisés entre les salariés qu'il considère erronés.
(5) En cinquième lieu, le jugement du conseil de prud'hommes dans l'affaire opposant Mme [HO] à la société Adriaor et reconnaissant l'existence d'un harcèlement moral est sans portée probatoire dès lors que la situation individuelle de Mme [HO] est distincte de celle de Mme [HJ] et ce d'autant que l'employeur a fait appel de cette décision qui n'a dès lors pas de caractère définitif.
(6) En sixième lieu, l'attestation de Mme [PS] [N] n'a pas de valeur probante en raison du lien familial avec Mme [HJ].
En revanche, Mme [HJ] objective les éléments de faits développés ci-après.
(1) D'une première part, elle fait valoir dans ses conclusions que la société Adriaco ne justifie d'aucune politique de prévention des risques en matière de harcèlement moral en mettant en avant les points suivants :
Les documents uniques visent simplement le risque d'agression, le harcèlement moral et le harcèlement sexuel sans aucune précision ;
Les moyens de prévention visent uniquement les risques terroristes, de braquage et de violences ;
Aucune action d'information et de formation n'a été dispensée à la salariée.
(2) D'une deuxième part, la cour rappelle avoir accueilli la demande de la salariée au titre des heures complémentaires/supplémentaires non rémunérées à hauteur de 18 000 euros entre août 2013 et février 2016.
(3) D'une troisième part, la salariée produit une série d'attestations relatives aux conditions d'hygiène au sein de l'établissement, en particulier quant au fait que les salariés n'avaient pas assez d'équipements individuels de protection à disposition.
Mme [I] [W], ancienne salariée de la société, indique « Conditions d'hygiène très limites : une tenue par équipier, un gant de nettoyage pour tous, chiffons de nettoyage usés par la saleté et réutilisés, nourriture transportée dans une voiture entre les deux restaurants. Avant chaque audit, tout était astiqué à la brosse à dent pour rattraper ce qui n'était pas fait au quotidien. »
M. [BN] [P], ancien salarié de la société entre le 20 octobre 2014 et le 31 mars 2015, énonce que « Ce harcèlement se traduisait ['] ainsi qu'une pression qui conduisait à des fautes d'hygiène et de sécurité alimentaire (steak haché périmé servi au client pour limiter les pertes). Concernant l'hygiène du personnel, une seule tenue était mise à disposition des salariés quelque soit leur nombre de jour de travail dans la semaine et quelque soit les tâches qu'ils ont à effectuer (nettoyage des toilettes, travail en cuisine, nettoyage de la terrasse ou des bouches d'aérations juste au-dessus des lignes de cuisines). De plus, le nettoyage du grill se faisait avec une tenue spécifique pour la protection des salariés. Cependant la tenue composée d'un casque de protection, de gants de protection et d'un tablier était la même pour tout le personnel. »
Mme [K] [AO], ancienne salariée de la société, explique que « En cas de visite de la médecine du travail, inspection des fraudes et tout autre organisme, [C] et nous-même avions reçu l'ordre de Mme [VU] de ne répondre à aucune question et de respecter les procédures qu'elle nous avait faites inscrire sur une feuille dans notre classeur « et que « les conditions de sécurité sont loin d'être réunies au sein des deux restaurants de Mme [VU]. Les formations sont bâclées voire quasi nulles (2 vidéos visionnées au lieu des 4, intégration en plein rush') pas de gants à disposition ou pas suffisamment afin de faire des économies comme nous le répétait souvent Mme [VU] ».
Mme [AO] déclare également que « Le but de Mme [VU] est simplement de faire du chiffre d'affaires au détriment de la santé de ses employés, de leur bien-être mais aussi celui de l'hygiène ou de la formation. Mme [VU] se soucie de la propreté seulement en cas de contrôle, annoncé à l'avance, ainsi qu'en présence du client mystère. »
(4) D'une quatrième part, Mme [HJ] produit plusieurs attestations quant à l'existence, selon elle, de pressions, brimades et dénigrements de la part de la gérante, Mme [VU].
Mme [EN] [HO] atteste que « Mme [VU] avait une grande emprise psychologique sur [C]. Elle lui dictait sa conduite et se permettait de la juger sur ses fréquentations lui disant je cite « Dis moi avec qui tu traînes et je te dirais qui tu es. On ne mélange pas les torchons et les serviettes. J'ai signé une clause chez McDonald's dans laquelle je me suis engagée à être la meilleure mère de famille. Je me dois donc de te dire ce qui ne vas pas chez toi. »
Elle donne l'exemple suivant : « Le lundi 3 novembre 2014, Mme [VU] a effectué une réunion avec les responsables afin de leur faire part de son mécontentement face à la visite de la veille. En effet, sa communication et son organisation n'étant pas claires, personne ne savait ce qu'il avait à faire mais a pu essuyer les paroles dénigrantes et agressives de Mme [VU] ! Je cite : « Vous n'êtes pas capable de recevoir votre personne chez vous, alors qu'ils vont bosser pour vous. Vous vous fichez vraiment de moi. » [C] avait entendu alors : « Tu étais où toi hier, alors que tes collègues étaient là ' » Elle a alors justifié son absence en indiquant qu'elle avait eu un repas de famille. Mme [VU] lui a alors dit : « Tu as préféré faire un repas de famille au lieu d'être avec ta vraie famille, celle de McDonald's. Tu sais que c'est moi qui te permets de manger tous les mois ». [C] s'est alors mise à pleurer. Mme [VU] a ajouté : « Ça ne sert à rien de pleurer. Tu avais qu'à réfléchir avant. J'ai un restaurant à ouvrir, je n'ai pas de temps à perdre avec les pleurnicheuses ». [C] a souvent ravalé ses larmes. »
Elle ajoute un autre exemple : « Un soir, alors qu'elle était au poste de production, elle s'était trompée et avait fabriqué trop de Royal Bacon. Mme [VU] lui a mis sur son plateau repas à la fin de son service trois royal bacon lui disant, je cite : « Tu n'as pas le droit de manger autre chose que ces Royal Bacon. J'espère que tu vas après les avoir mangés prendre conscience de ton erreur et ne jamais l'oublier. Sur ce, Bon appétit. »
Mme [K] [AO] atteste que « Mme [VU] s'en prenait régulièrement à elle (Mme [HJ]). Elle rabaissait devant tout le monde : « Mais tu es bête ou quoi ' « Tu as quoi dans la tête ' » » et ajoute « [C] était sous l'emprise de Mme [VU], elle en était devenue son esclave' ».
Mme [E] [B] indique que « Plusieurs fois, j'ai vu Mme [VU] lui tenir des propos désobligeant, dégradant et dévalorisant à son égard, lui dire qu'elle ne faisait rien correctement alors qu'elle n'avait fait que suivre les règles de l'entreprise mais ça ne convenait jamais à Mme [VU]. J'ai aussi vu Mme [O] [VU] l'appeler « ma chérie » et cinq minutes après la traiter d'incapable. »
Mme [X] [MR] confirme que « [C] était totalement manipulée par Mme [VU], elle était capable de l'insulter de « con » ou « débile », puis de lui dire un quart d'heure après « ma chérie » ».
Mme [EN] [EY] déclare que « M. [F] [M] (directeur) l'a traitée de débile car elle lui posait une question, avec des propos dégradants (je n'ai pas compris la question, veuillez m'expliquer' il lui a répondu : toi et les équipiers ce soir vous me cassez les couilles » ».
Elle souligne également que « M. [F] [M] était constamment sur elle, il fallait faire ceci-cela, il lui reprochait que son travail n'était pas fait correctement puis devant les équipiers il l'a traitée de « débile, qu'elle ne servait à rien dans ce restaurant ».
Mme [TN] [Y] atteste que « Le 3 novembre 2014 a eu lieu l'inauguration du McDonald's de [Localité 5]. La veille, nous avions eu une réunion avec toute l'équipe de gestion afin de faire le point. Ce jour-là, [C] était en congé hebdomadaire puis avait un repas de famille. Malgré cela, elle a été sollicitée pour venir. Elle n'a donc pas eu le choix de venir au restaurant. Lorsqu'elle est arrivée au restaurant, [C] s'est faite « lynchée » par Mme [VU] avec des réflexions atroces dont une qui m'a marquée qui était : « À part McDonald's tu n'as pas de famille, c'est nous ta famille. » J'ai vu [C] se décomposer et fondre en larmes suite à de tels propos. Mme [VU] répétait souvent ouvertement que [C] était immature alors que sans diplôme, [C] ouvrait et fermait seule le restaurant ce qui n'est pas légal car pour faire cela il faut être diplômé (TBM1, TBM2). »
Elle ajoute que Mme [HJ] a été « rétrogradée et est passée au poste de responsable de zone. C'est à ce moment-là que j'ai vu [C] perdre motivation. Elle me disait souvent qu'au bout de 5 ans dans l'entreprise elle voulait démissionner car elle ne cautionnait plus les cris répétitif et méchant de Mme [VU] [O] ».
M. [MW] [KF] énonce, de manière générale, qu'il a « assisté à plusieurs conflits entre Mme [VU] et Mlle [HJ] au sujet du respect des procédures de sécurité alimentaire » et que « c'était un sujet de conflits entre Mlle [HJ] et Mme [VU], cette dernière après plusieurs altercations exerçait une forte pression sur Mlle [HJ] ».
Mme [G] [CC] indique que « Mme [VU] criait à plusieurs reprises sur Mme [HJ] en lui demandant d'aller plus vite, qu'elle n'était pas payée à ne rien faire et qu'il fallait qu'elle arrête de jouer à la débile. Pour Mme [O] [VU] et [M] [F], nous étions, je cite, que « des handicapés », qu'elle se demandait pourquoi elle avait engagé des « COTOREP » » et ajoute que Mme [HJ] « a démissionné dû à la fatigue émotionnelle et le surmenage qui s'étaient accumulés toutes ces années. ».
Mme [J] [PH] relate que « [C] devait nous former en plus de son travail de manager. Quand Mme [VU] est arrivée, elle s'est mise à nous hurler dessus car nous étions en retard. [C] lui a répondu que c'était normal vu que nous étions en formation. Par la suite, elle a pris en charge ma formation, elle hurlait quoi faire. »
Elle ajoute que « tout au long de la période où j'ai travaillé au Macdo, j'ai pu constater à plusieurs reprises des humiliations devant les équipiers et les clients. J'ai démissionné en janvier à cause des conditions de travail, du manque de respect de Mme [VU] ».
Mme [I] [W] indique que « Nous ne sommes que « des chiens à éduquer » selon les dires de Mme [VU]. Nous étions traités avec grand mépris par trois des managers ».
M. [BX] [H] précise que « à chaque fois qu'il y avait des bêtises de faites, des éclats de rires, [C] était engueulée et accusée d'être un trouble fait. »
M. [BN] [P], bien qu'il ne cite pas Mme [HJ] affaiblissant la valeur probante de son attestation, décrit la situation globale au sein du restaurant : « Durant ma période de travail dans cette société, nous subissions du harcèlement moral de la part de nos supérieurs hiérarchiques (managers et directrice de la société), ce harcèlement se traduisait par un vocabulaire injurieux et non approprié à des relations de travail ainsi qu'une pression qui conduisait à des fautes d'hygiène et de sécurité alimentaire. »
(5) D'une cinquième part, s'agissant de l'absence de prévention et de prise en compte de l'agression dont a été victime la salariée, il ressort de la plainte de Mme [HJ] en date du 27 janvier 2015, des deux certificats médicaux en date des 26 janvier et 10 février 2015, ainsi que des attestations de Mmes [HO], [MR] et [EY], que Mme [HJ] a été victime d'une agression verbale et physique par une cliente le 24 janvier 2015.
La salariée soutient qu'aucune mesure n'avait été prise pour éviter un tel accident (page 21 de ses conclusions).
En outre, Mme [EY] indique que « Mme [O] [VU] a dit [à Mme [HJ]] que ce n'était pas grave, même avec les caméras » et Mme [HO] atteste que Mme [VU] aurait dit « J'ai regardé les vidéos. La cliente ne l'a même pas touchée. C'est du cinéma. »
(6) D'une sixième part, Mme [HJ] soutient que Mme [VU] s'immisce régulièrement dans sa vie privée, en particulier dans le cadre de sa relation avec une autre salariée.
L'employeur soutient que la salariée est dans l'incapacité de prouver que la société Adriaco avait connaissance des détails de sa vie privée, en particulier de sa relation avec une autre salariée, Mme [E] [B].
Il ressort toutefois des différentes attestations produites par la salariée que cette dernière ne cachait pas sa relation avec une autre salariée et que la gérante de l'établissement en avait connaissance.
Ainsi, Mme [EY] indique dans son attestation que « Mme [VU] a appris que [Mme [HJ]] était en couple avec une personne qui travaille au Macdo, [O] [VU] a muté [C] à [Localité 8] ».
Mme [Y] déclare que « Mme [VU] ne voulait pas qu'une responsable du McDonald's fréquente les équipiers en dehors du restaurant. Mme [VU] disait donc à tous les responsables dont moi-même qu'elle ne supportait pas que Mme [HJ] fréquente des subordonnés. Elle s'occupait toujours de sa vie privée ! »
Mme [CC] énonce que « [C] a été par la suite « punie » à [Localité 8] car Mme [VU] a su qu'elle était en couple avec une personne qui travaillait avec elle dans le même restaurant ([Localité 5]) ».
M. [BX] [H] écrit dans son attestation que « J'ai travaillé avec [C] au McDonald's de [Localité 8] elle m'a dit qu'on l'avait envoyé ici pour être recadré !! Mais lorsqu'elle m'a dit qu'elle était en couple avec une collègue et que Mme [VU] était au courant, j'ai su qu'elle avait été envoyé ici pour la séparé de sa copine, car moi-même en couple avec une collègue, celle-ci a été envoyée sur le restaurant de [Localité 5] car Mme [VU] ne veut pas de couples dans son entreprise ».
Mme [E] [B], bien que son attestation possède une faible valeur probante quant à l'immixtion dans la privée en ce qu'elle est la conjointe de Mme [HJ], corrobore les éléments précédents en ce qu'elle déclare : « Après que Mme [HJ] [C] et moi-même nous nous sommes mises en couple, elle a été transférée sur le restaurant de [Localité 8] car Mme [O] [VU] n'aime pas avoir un couple dans son entreprise elle les sépare immédiatement. Elle nous a fait des plannings avec des horaires contraires afin qu'on ne puisse jamais se voir en dehors ou au travail puisque quand je partais travailler elle restait à la maison et inversement car j'étais du matin et elle du soir. Notre vie privée en était donc atteinte car nous ne travaillions plus dans la même entreprise ni avec les mêmes horaires »
Bien que Mme [HJ] ne produise pas les plannings pertinents, elle précise dans ses conclusions que « la société Adriaco indique qu'au contraire, de mi-septembre à mi-novembre, les horaires de Mme [HJ] lui permettaient d'achever sa journée de travail plus tôt, vers 16h30/17h. Concernant Mme [B], elle précise qu'elle travaillait globalement de 9h à 13h et de 18h30 à 21h30. Au-delà des pointages produits par la société Adriaco ['], avec de tels horaires, cette organisation ne pouvait pas leur permettre de disposer de soirées personnelles en commun » (page 21 des conclusions de la salariée).
Finalement, comme l'indique Mme [HJ] dans ses conclusions, le contrat de travail prévoit que la salariée « pourra être affectée de manière temporaire à un autre restaurant de la même enseigne. Compte tenu de la nature de ses fonctions, l'employé prend l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail dans les restaurants dépendants de la Direction Régionale Sud-Est McDonald's France ».
Or, un salarié ne peut accepter par avance un changement d'employeur et la clause de mobilité par laquelle le salarié lié par un contrat de travail à une société s'engage à accepter toute mutation dans une autre société, alors même que cette société appartiendrait au même groupe, est nulle (Cass. Soc, 14 décembre 2022, 21-18.633).
Bien que Mme [HJ] ne sollicite pas expressément la nullité de la clause de mobilité de son contrat de travail au sein de son dispositif, il convient de considérer que la mutation de Mme [HJ] à compter de janvier 2016 intervient dans un contexte impliquant une relation avec une autre employée.
(7) D'une septième part, Mme [HJ] produit une série d'attestations quant à l'absence d'adaptation et de formation à son poste, en particulier quant à ses fonctions de manager.
Mme [X] [MR] précise « On m'a présenté [Mme [HJ]] comme Responsable de zone mais j'ai vite été surprise de voir qu'elle faisait le travail d'un équipier polyvalent le plus souvent puisque lorsque Mme [VU] avait besoin d'elle, [C] prenait son vrai poste ou même le poste de manager pour remplacer des absences (comme le jour de son agression par exemple) alors qu'elle ne possède pas les diplômes pour ce genre de travail. »
Mme [TN] [Y] indique que « Mme [VU] répétait souvent ouvertement que [C] était immature alors que sans diplôme, [C] ouvrée et fermait seule le restaurant ce qui n'est pas légal car pour faire cela il faut être diplômé (TBM1, TBM2). »
M. [KF] affirme que Mme [HJ] « occupait le poste de responsable de zone alors que Mme [VU] me l'avait présenté en tant que manager, elle avait donc toutes les responsabilités d'un manager tel que la fermeture du restaurant ».
De la même manière, Mme [EN] [EY] indique que Mme [HJ] « était responsable de zone mais avait les responsabilités d'un manager, elle faisait les fermetures seule, nous équipiers on restait avec elle pour l'aider ».
Mme [G] [CC] confirme que « [C] faisait les fermetures et ouvertures toute seule alors qu'elle n'était que responsable de zone, elle n'avait pas le diplôme de manager, mais en avait toutes les responsabilités. »
Pris dans leur ensemble, ces éléments de fait sont de nature à présumer l'existence d'un harcèlement moral en ce qu'ils reflètent des conditions de travail dégradées et une atteinte portée aux droits du salarié.
En réponse, l'employeur apporte certains éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
Ainsi, l'employeur produit un courrier de Mme [E] [B], compagne de Mme [HJ], daté du 17 juillet 2015, par lequel elle sollicite « de retrouver ses anciens horaires (9h30-13h, 18h30-20h30) afin de pouvoir continuer à exercer mon activité professionnelle de photographe en plus du Macdo. »
En outre, il ressort des fiches de pointage et d'un tableau récapitulatif des heures travaillées des deux salariées que les salariées travaillaient régulièrement aux mêmes horaires entre juillet 2015 et jusqu'en mars 2016.
Bien que la cour constate qu'elles avaient des jours de repos différents, aucun élément produit par les parties ne permet de constater que les salariées auraient sollicité des jours de repos communs, ni que l'employeur aurait refusé de les leur accorder.
L'employeur produit également des avenants de détachement temporaire des 25 janvier, 28 février et 1er mai 2016, signés par la salariée, par lesquels « Conformément à l'article 11 de la Convention collective nationale de la restauration rapide, [HJ] [C] donne son accord pour travailler temporairement dans le Restaurant McDonald's Adriaor SARL, [Adresse 3] dans le cadre du remplacement » d'un autre salarié en arrêt maladie.
La cour constate qu'aucune référence n'est faite au sein des avenants à la clause de mobilité du contrat de travail de Mme [HJ], de sorte qu'il convient de considérer qu'elle a librement consenti au détachement temporaire et que la société n'a donc commis aucune immixtion dans sa vie privée à ce titre.
Il s'ensuit que l'employeur apporte des éléments objectifs suffisants étrangers à tout harcèlement quant au fait que Mme [HJ] a été détachée temporairement dans un autre établissement.
En revanche, il n'apporte pas les justifications étrangères à tout harcèlement moral concernant les autres faits matérialisés par la salariée en ce que :
(1) D'une première part, concernant l'obligation de prévention du harcèlement moral, il ressort des documents uniques d'évaluation des risques professionnels pour les années 2014 et 2015, produits par l'employeur, que le harcèlement moral et le harcèlement sexuel sont uniquement prévu dans le cadre du « Risque d'agression » et qu'aucun moyen de prévention existant n'est relatif au harcèlement mais uniquement au risque d'agression ou de braquage.
En outre, les fiches de formation complétées par la salariée et les annexes au contrat de travail, produites par l'employeur, ne mentionnent pas le harcèlement moral et aucun élément concret n'est produit concernant le contenu des vidéos sur les formations obligatoires.
Ainsi, l'employeur n'apporte aucun élément pertinent permettant d'établir la mise en 'uvre de mesures concrètes quant à son obligation de prévention du harcèlement moral auprès de ses salariés et auxquelles Mme [HJ] aurait participé.
Ce manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral autorisant la salariée à solliciter une indemnisation autonome, ne caractérise pas en soi les faits de harcèlement moral mais est de nature à les avoir favorisés.
(2) D'une deuxième part, s'agissant des manquements de la société à son obligation de sécurité en matière d'hygiène des salariés, l'employeur produit un procès-verbal d'huissier de justice concernant l'hygiène et la sécurité sur l'établissement de [Localité 5] datant du 22 février 2017, qui manque toutefois de pertinence en ce qu'il est postérieur au départ de Mme [HJ] de la société dont le courrier de rupture est daté du 12 avril 2016.
Il verse ensuite aux débats les attestations de deux managers, de la responsable de formation, de la gestionnaire administrative et de la directrice des ressources humaines de la société qui précisent que les normes d'hygiène et de sécurité sont identiques sur les deux établissements gérés par Mme [VU] via les sociétés Adriaco et Adriaor.
Il produit également des photos des équipements spécifiques utilisés par les salariés, les consignes correspondant à différentes procédures affichées au sein des locaux, ainsi que les factures relatives au réapprovisionnement des équipements de protection individuelle pour les années 2014, 2015 et 2016 et les factures relatives au carrelage antidérapant installé au sein du restaurant.
Il verse aux débats les attestations de formation en tant que référent hygiène et sécurité alimentaire de trois salariés de la société.
La société Adriaco produit également les comptes-rendus de la Brand Standard Visit du 13 octobre 2015 et du 8 juin 2016 qui précisent que « l'ensemble du restaurant est parfaitement propre » et que « les équipements sont très bien entretenus ».
Il convient toutefois de considérer que ces audits ont une faible valeur probante quant à l'hygiène et la sécurité des salariés, dès lors qu'ils sont prévus et annoncés à l'avance à la société.
De la même manière, les comptes-rendus de suivi du client mystère et les résultats de l'application « mcdoetmoi » manquent de pertinence en ce qu'ils ne mentionnent pas la question de l'hygiène en cuisine et de celle des salariés, mais uniquement du drive, de la salle de restauration et des toilettes.
L'employeur produit des photos relatives, selon lui, à la formation « lavage des mains », mais qui manquent de valeur probante en ce qu'elles ne sont pas datées et que les seules factures relatives à ces formations ne permettent pas d'en établir le contenu.
L'employeur ne produit aucun autre élément pertinent quant au fait que les salariés ont à leur disposition une seule paire de gant de nettoyage qu'ils doivent partager et donc qu'ils n'ont pas leurs propres EPI.
Ainsi, quand bien même l'employeur établit suffisamment la propreté générale du restaurant, il n'apporte aucun élément objectif suffisant étranger à tout harcèlement quant à l'hygiène, la sécurité de ses salariés et leurs équipements de protection individuelle.
(3) D'une troisième part, la cour rappelle que la société Adriaco a été condamnée à payer à Mme [HJ] la somme de 18 000 euros au titre des heures complémentaires et supplémentaires effectuées, les fiches de pointages produites par l'employeur n'étant pas suffisamment probantes pour contrôler efficacement les heures effectuées par la salariée en raison des incohérences constatées avec les bulletins de salaire et les attestations produites par les parties.
(4) D'une quatrième part, s'agissant des brimades et propos dégradants et humiliants, contrairement à ce qu'avance l'employeur, il importe peu que la salariée ne se soit « jamais plainte d'un harcèlement moral ni même d'une quelconque difficulté pendant l'intégralité de sa relation contractuelle » (page 37 des écritures), ni qu'elle n'ait pas informé le médecin du travail ou son médecin traitant des faits allégués (page 39 des écritures).
Par ailleurs, l'employeur produit les attestations, difficilement lisibles, d'une équipière polyvalente, d'un manager et de la directrice des ressources humaines de la société, qui manquent toutefois de pertinence en ce qu'ils n'attestent pas des déplacements de la gérante, mais uniquement du fait qu'ils avaient régulièrement des réunions hebdomadaires avec elle concernant la gestion de l'entreprise.
Il verse également aux débats l'attestation de Mme [O] [PM], gestionnaire administrative, qui indique qu'elle travaille « en relation directe avec Mme [VU] » et que cette dernière a régulièrement « des réunions à [Localité 6] ou même dans d'autres pays ».
Toutefois, les absences occasionnelles de Mme [VU] ne permettent pas, en soi, d'écarter les faits allégués quant aux remarques désobligeantes et dégradantes à l'encontre de Mme [HJ].
En outre, la société produit des SMS échangés entre Mme [HJ] et Mme [VU] et un courrier de remerciement.
Outre que les SMS soit difficilement lisibles, le fait que Mme [HJ] ait souhaité « Joyeux Noël à tous » le 24 décembre 2015 et « Bonne année [O] » le 1er janvier 2016 ne permet pas de déceler la teneur des relations entre la salariée et sa supérieure hiérarchique, d'autant que la majorité des autres SMS concerne la gestion des services de l'établissement.
La cour constate toutefois un échange de SMS le 26 novembre 2015 au sein duquel Mme [HJ] indique ne pas pouvoir venir l'après-midi car elle a rendez-vous chez le médecin et en conséquence, Mme [O], après avoir demandé à Mme [HJ] de trouver une solution car elle « bloque 11 personnes », annule une réunion en raison de son absence.
Or, selon la fiche des horaires pointées, Mme [HJ] ne travaillait pas le 26 novembre 2015 car il s'agissait d'un jour de repos hebdomadaire, de sorte qu'il ressort de ces éléments que la gérante de l'établissement a demandé à sa salariée de venir lors de son jour de repos et lui a reproché son absence en annulant la réunion.
Concernant le courrier de remerciement, non daté et adressé à « [O] », quand bien même la salariée exprime ce qu'elle a pu apprendre au cours de la relation de travail, elle fait également mention « des moments difficiles ».
De plus, la seule existence de ce courrier de remerciement ne remet pas en cause l'existence des brimades et pressions alléguées par la salariée, d'autant qu'il ressort des attestations produites par celle-ci qu'elle était « manipulée » par Mme [VU].
D'autre part, la société fait valoir que les attestations produites par la salariée sont mensongères. Toutefois, elle prend seulement l'exemple d'une attestation de Mme [HJ], produite dans une autre affaire, et les conclusions d'un autre salarié dans une autre affaire pendante devant la présente cour, de sorte que ces éléments manquent de pertinence.
Et le courrier anonyme produit par l'employeur quant au fait qu'un « complot » se serait organisé contre la gérante de la société n'a aucune valeur probante en l'absence de preuve d'authenticité, telle qu'une date ou un courrier d'envoi, de sorte qu'il ne permet pas d'écarter les attestations produites par Mme [HJ] en considérant le fait qu'elles proviennent de salariés en litige avec la société.
Finalement, l'employeur produit une série d'attestations de salariés de la société Adriaco ayant travaillé sur la même période que Mme [HJ], manquant toutes de pertinence ou de valeur probante :
MM. [YV] et [TI] mentionnent uniquement Mme [EY], une autre salariée ;
Mmes [YP] et [Z] et M. [U] attestent dans des termes similaires ne jamais avoir entendu Mme [VU] dire « Ferme ta gueule » à un autre salarié ;
MM. [S] et M. [V] attestent simplement ne jamais avoir entendu Mme [VU] insulter ou manquer de respect à un autre collaborateur.
Ainsi, ces attestations demeurent insuffisantes en ce qu'aucune ne mentionne Mme [HJ]. Elles ne permettent donc pas d'écarter les brimades et propos dégradants allégués à l'encontre de celle-ci.
De la même manière, les courriers de remerciement et les lettres de démission, produits par l'employeur, ne permettent pas d'écarter l'existence de brimades à l'encontre de Mme [HJ], quand bien même les salariés remercient Mme [VU], en ce qu'ils mentionnent simplement l'ambiance générale et ne précisent aucun élément quant à Mme [HJ].
Ainsi, il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'employeur n'apporte aucun élément objectif étranger à tout harcèlement quant à l'existence de brimades et de propos dégradants et humiliants à l'encontre de Mme [C] [HJ].
(5) D'une cinquième part, concernant l'agression dont a été victime Mme [HJ] le 24 janvier 2015, l'employeur produit des SMS échangés entre Mme [HJ] et Mme [VU] datés du 25 janvier 2015.
Bien que manquant de lisibilité, il ressort de cet échange de SMS que Mme [HJ] a demandé « ce qu'il en était pour le souci hier soir » et que Mme [VU] a répondu « j'attend le n voiture. [A] va voir les gendarmes demain matin », Mme [HJ] la renseignant ensuite sur la plaque d'immatriculation.
Cependant, l'employeur ne produit aucun autre élément quant aux suites données par la société Adriaco postérieurement à cette agression auprès de la gendarmerie.
Et il ne soulève aucun moyen quant au fait qu'il n'a pas reconnu l'agression comme un accident du travail en effectuant les démarches pertinentes.
Dès lors, l'employeur n'établit pas avoir respecté son obligation de sécurité concernant cette agression et n'apporte donc aucun élément objectif étranger quant à la minimisation de l'agression par la gérante de la société.
(6) D'une sixième part, concernant l'absence de formation et d'adaptation aux fonctions de la salariée, l'employeur produit la fiche de poste « Responsable de Zone » avec l'inscription « BENE / sept 2014 », sans toutefois que cette fiche de poste ne soit signée par Mme [HJ].
La fiche de poste mentionne notamment comme mission : « Fait réaliser les travaux d'ouverture et de fermeture ».
La société verse aux débats les avenants de détachement temporaire concernent le 11 juillet 2014 et du 20 au 24 octobre 2014 « dans le cadre de la formation nouvelle cuisine ».
Toutefois, aucun élément n'est produit par l'employeur quant au contenu de ladite formation.
Et aucun autre élément ne permet d'établir que l'employeur a permis à la salariée d'effectuer des formations concernant l'ouverture et la fermeture du restaurant en tant que responsable de zone à compter de 2014.
Ainsi, l'employeur n'apporte aucun élément objectif étranger à tout harcèlement concernant l'absence d'adaptation et de formation de Mme [HJ] à son poste.
(7) D'une septième part, l'employeur soutient que la salariée ne fait pas état d'une dégradation de son état de santé, celle-ci ne produisant aucune attestation et aucun certificat médical à ce titre et les arrêts de travail de Mme [HJ] au cours de la relation de travail ayant pour objet l'agression dont elle a été victime ou pour des causes inconnues et non expliquées par la salariée.
Toutefois, il n'est pas nécessaire pour caractériser des agissements de harcèlement moral qu'il y a nécessairement eu une dégradation corrélative de l'état de santé de la salariée mais uniquement que les conditions de travail dégradées constituent un tel risque.
Or, il ressort des éléments précédents que Mme [HJ] a subi une dégradation de ses conditions de travail au point que sa santé puisse objectivement être mise en péril.
Dès lors, il résulte de l'ensemble des énonciations précédentes que l'employeur n'apporte pas les justifications étrangères suffisantes à tout harcèlement qu'il convient, par infirmation du jugement entrepris, de déclarer que Mme [HJ] a été victime d'un harcèlement moral par la société Adriaco.
En conséquence, compte tenu des faits subis par la victime et de la durée du harcèlement, il convient de condamner la société Adriaco à verser à Mme [HJ] la somme de 10 000 euros au titre du harcèlement moral.
En outre, en application de l'article L. 1152-4 du code du travail, il convient de condamner la société Adriaco à verser à Mme [HJ] la somme de 2 000 euros au titre de l'obligation de prévention du harcèlement moral.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ces chefs.
Sur la demande au titre de la rupture du contrat de travail :
D'une première part, la démission émise sans réserve peut être assimilée à une prise d'acte. Tel est le cas lorsqu'elle est remise en cause ultérieurement par le salarié, en raison de manquements qu'il impute à son employeur, le juge doit analyser cette démission en une prise d'acte si des circonstances antérieures ou contemporaines à la rupture la rendent équivoque. S'agissant de la contemporanéité du litige entre le salarié et l'employeur à la démission sans réserve, rendant celle-ci équivoque, s'analyse comme toute contestation émise par le salarié dans les jours, les semaines et, jusqu'à tout le moins, quelques mois après la démission.
Plus précisément, lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet ultérieurement en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.
D'une seconde part, la prise d'acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu'il reproche à son employeur.
Elle n'est soumise à aucun formalisme en particulier mais doit être adressée directement à l'employeur.
Elle met de manière immédiate un terme au contrat de travail.
Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais ils doivent de surcroît être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.
A défaut, la prise d'acte est requalifiée en démission.
Pour évaluer si les griefs du salarié sont fondés et justifient que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement, les juges doivent prendre en compte la totalité des reproches formulés par le salarié et ne peuvent pas en laisser de côté : l'appréciation doit être globale et non manquement par manquement.
Par ailleurs, il peut être tenu compte dans l'appréciation de la gravité des manquements de l'employeur d'une éventuelle régularisation de ceux-ci avant la prise d'acte.
En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l'employeur, c'est au salarié, et à lui seul, qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur. S'il n'est pas en mesure de le faire, s'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission.
Lorsque la prise d'acte est justifiée, elle produit les effets selon le cas d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul de sorte que le salarié peut obtenir l'indemnisation du préjudice à raison de la rupture injustifiée, une indemnité compensatrice de préavis ainsi que l'indemnité de licenciement, qui est toutefois calculée sans tenir compte du préavis non exécuté dès lors que la prise d'acte produit un effet immédiat.
Par ailleurs, le salarié n'est pas fondé à obtenir une indemnité à raison de l'irrégularité de la procédure de licenciement.
En l'espèce, d'une première part, si la démission de Mme [HJ], selon courrier en date du 12 avril 2016, n'est pas motivée, il résulte des énonciations précédentes, d'une part, que Mme [HJ] a été antérieurement victime d'un harcèlement moral mais également que l'employeur ne l'a pas rémunérée au titre des heures complémentaires et supplémentaires effectuées, et d'autre part, que la salariée a saisi le conseil des prud'hommes moins de trois mois après la fin de son préavis en alléguant ces manquements antérieurs de l'employeur pour solliciter la requalification de sa démission en prise d'acte.
La démission est par conséquent équivoque.
D'une seconde part, ces manquements suffisamment graves rendaient impossible la poursuite du contrat de travail.
La démission de Mme [HJ] du 12 avril 2016 doit en conséquence s'analyser en une prise d'acte.
En conséquence, en application de l'article L. 1152-3 du code du travail, il convient de requalifier la prise d'acte en licenciement nul, le jugement entrepris étant infirmé à ce titre.
Sur les prétentions afférentes à la rupture :
Premièrement, Mme [HJ] développe une demande au titre des indemnités de rupture dans le cadre de ses écritures (page 45 des conclusions) sans toutefois les solliciter expressément dans le dispositif de ses conclusions.
Dès lors, la cour n'est pas saisie de demandes au titre de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de préavis.
Secondement, au visa des articles L. 1235-3-1 et L. 1235-3-2 du code du travail, il y a lieu de condamner la société Adriaco à payer à Mme [HJ] la somme de 10 000 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, étant observé que Mme [HJ] percevait un salaire mensuel à hauteur de 1 661,77 euros, qu'elle avait une ancienneté de plus de quatre ans et qu'elle s'abstient de justifier de sa situation ultérieure à l'égard de l'emploi.
Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.
Sur la demande de la société au titre de la procédure abusive :
Aux termes des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile, en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamnée à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui lui seraient réclamés.
L'article 1240 du code civil permet également de sanctionner une partie ayant sciemment introduit une action en justice de manière abusive.
Mme [HJ] ayant obtenu gain de cause sur une partie au moins de ses prétentions, la société Adriaco ne rapporte pas la preuve d'une faute de cette dernière dans l'exercice de son droit d'agir en justice.
Infirmant le jugement déféré, elle est déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les demandes accessoires :
La société Adriaco, partie perdante à l'instance au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être tenue d'en supporter les entiers dépens.
Il serait par ailleurs inéquitable, au regard des circonstances de l'espèce comme des situations économiques des parties, de laisser à la charge de Mme [HJ] l'intégralité des sommes qu'elle a été contrainte d'exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu'il convient de condamner la société Adriaco à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence, la demande indemnitaire de la société au titre des frais irrépétibles qu'elle a engagé est rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :
Débouté Mme [HJ] de sa demande au titre des frais de déplacement ;
Débouté la société Adriaco de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
DIT que Mme [C] [HJ] a été victime d'un harcèlement moral ;
REQUALIFIE la démission par courrier du 12 avril 2016 de Mme [C] [HJ] en prise d'acte produisant les effets d'un licenciement nul ;
CONDAMNE la société Adriaco à payer à Mme [HJ] les sommes suivantes :
18 000 euros (dix-huit mille euros) brut au titre du rappel de salaire pour heures supplémentaires entre le mois d'août 2013 et le mois de février 2016, outre 1 800 euros (mille huit cents euros) brut de congés payés afférents ;
10 000 euros (dix mille euros) net à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
2 000 euros (deux mille euros) net à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral ;
10 000 euros (dix mille euros) brut au titre des dommages et intérêts pour licenciement nul ;
DÉBOUTE Mme [HJ] du surplus de ses prétentions au principal ;
DÉBOUTE la société Adriaco de sa demande au titre de la procédure abusive ;
CONDAMNE la société Adriaco à payer à Mme [C] [HJ] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE la société Adriaco de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Adriaco aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière Le Président