N° RG 22/03476 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LQYD
C6
N° Minute :
copie certifiée conforme délivrée
aux avocats le :
Copie Exécutoire délivrée
le :
aux parties (notifiée par LRAR)
aux avocats
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES
ARRET DU MERCREDI 17 JUILLET 2024
APPEL
Jugement au fond, origine tribunal judiciaire de Valence, décision attaquée en date du 14 décembre 2021, enregistrée sous le n° 19/02629 suivant déclarations d'appel des 22 septembre et 25 octobre 2022
APPELANTS :
Mme [H] [C]
née le [Date naissance 12] 1963 à [Localité 24] (43)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 15]
représentée par Me Delphine MSIKA de la SELARL ATHEMIS, avocat au barreau de VALENCE, postulant
et plaidant par Me Ladislas MAZUR CHAMPANHAC, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE
M. [I] [C]
né le [Date naissance 10] 1957 à [Localité 30] (43)
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 14]
représenté par Me Delphine MSIKA de la SELARL ATHEMIS, avocat au barreau de VALENCE, postulant
et plaidant par Me Ladislas MAZUR CHAMPANHAC, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE
INTIMEE et appelante incident
Mme [J] [R]
née le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 21]
de nationalité Française
[Adresse 18]
[Localité 11]
représentée par Me Eric RIVOIRE de la SELAS CABINET FOLLET RIVOIRE COURTOT AVOCATS, avocat au barreau de Valence
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DELIBERE :
Mme Anne BARRUOL, Présidente,
Mme Martine RIVIERE, Conseillère,
M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,
DEBATS :
A l'audience publique du 10 avril 2024,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de MC Ollierou, greffière a entendu les avocats en leurs conclusions et Me Mazur Champanhac en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.
[Y] [C] est décédé le [Date décès 5] 2005 à [Localité 11] (26) laissant pour lui succéder ses deux enfants :
- Mme [H] [C],
- M. [I] [C].
Par acte authentique reçu le 27 juillet 2005 par Maître [B], notaire à [Localité 35], [Y] [C] a légué à sa fille [H] la quotité disponible de ses biens et à [O] [T], sa compagne, les parts qu'il détenait dans les SCI '[Adresse 37]' et '[22]' ainsi que tous ses objets mobiliers et meubles meublants et véhicules.
Mme [H] [C] a renoncé au bénéfice de ces dispositions testamentaires.
Par jugement du 26 mai 2010, le tribunal judiciaire de Valence a :
- donné acte à [O] [T] de ce qu'elle entendait se prévaloir du testament établi le 27 juillet 2005 ;
- déclaré les demandeurs recevables en leurs demandes en inscription de faux mais déclaré cette inscription de faux non fondée ;
- rejeté la demande de nullité du testament et déclaré valable ledit testament ;
- déclaré valables les pactes de tontine figurant dans les statuts des SCI '[Adresse 37]' et '[22]' ;
- sursis à statuer sur les demandes de partage présentées par M. [I] [C] et Mme [H] [C] ;
- ordonné une mesure d'expertise.
Par arrêt du 2 avril 2013, la cour d'appel de Grenoble a confirmé cette décision sauf en ce qu'étaient déclarés valables les pactes de tontine figurant dans les statuts des SCI '[Adresse 37]' et '[22]'. Aux termes de sa décision, la cour d'appel a requalifié les deux clauses d'accroissement figurant dans les statuts en libéralités et complété la mission de l'expert aux fins d'identifier et évaluer les biens ayant appartenu à [Y] [C] et dont Mme [T] a disposé et évaluer les libéralités dont elle a bénéficié et indiquer un éventuel dépassement de la quotité disponible.
[O] [T] est décédée le [Date décès 7] 2013 à [Localité 33].
Par jugement du 5 novembre 2014, le tribunal judiciaire de Valence a dit que les opérations de partage et l'expertise judiciaire se poursuivraient en présence de Mme [J] [R], ayant droit de Mme [T].
Mme [S], venant en remplacement de M. [N], a déposé son rapport d'expertise le 4 décembre 2015.
Elle aboutit aux conclusions suivantes :
- la société civile immobilière [Adresse 37] dispose d'un bien immobilier d'une valeur de 280.000 euros situé à [Localité 11], avec un actif total de 294.225 euros et présente un passif de 177.129,39 euros ;
- la réserve héréditaire est de 39.031,80 euros alors que la somme revenant à [Y] [C] était de 58.547,80 euros dans la société ;
- la société civile immobilière [22] est propriétaire d'un bien sis à [Localité 34] évalué à 330.000 euros, son passif est de 197.599,20 euros, la somme revenant à [Y] [C] étant de 62.592,72 euros, la réserve héréditaire s'établit à 41.728,48 euros ;
- les créances à l'encontre de la succession s'élèvent à 20.584,10 euros ;
- les comptes de la société civile immobilière [29] et de la société à responsabilité limitée [C] [1] sont à parfaire ;
- trois véhicules ont été mentionnés dans la déclaration de succession, l'un (Ford A) vendu 27.000 euros en février 2006, une Citroën Xantia ayant été évaluée à 2.900 euros et une Citroën 2 CVà 850 euros.
Par ordonnance du 5 janvier 2016, le juge de la mise en état a complété la mission de l'expert en lui confiant celle de rechercher les véhicules et navires immatriculés au nom de [Y] [C] ou de sa société [22], notamment sur les départements Haute -Loire, Drôme et Alpes Maritimes. L'expert commis ayant déposé son rapport après les conclusions de saisine du juge mais avant réception de l'ordonnance, aucun nouveau rapport n'a été déposé.
Par ordonnance du 3 mai 2016, le juge de la mise en état a ordonné une expertise aux fins de vérifier si les reconnaissances de dette des 15 novembre 1998 et 22 février 2001 ont bien été remplies et signées par [Y] [C]. L'expert désigné n'ayant pu obtenir les originaux, sa mission n'a pu aboutir.
Par ordonnance du 3 juillet 2018, le juge de la mise en état de Valence a notamment débouté Mme [H] [C] et M. [I] [C] de leur demande tendant à constater la carence de l'expert Mme [S], et la remplacer et compléter la mission du nouvel expert et a renvoyé l'affaire à la mise en état aux fins de conclusions récapitulatives des demandeurs.
Par ordonnance du 9 juillet 2020, le juge de la mise en état de Valence a notamment débouté Mme [H] [C] et M. [I] [C] de leur demande de condamnation de Mme [R] à présenter les originaux des reconnaissances de dette qui auraient été établies par [Y] [C].
Par jugement du 14 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Valence a :
- ordonné le partage de la succession de [Y] [C] ;
- commis Maître [P], notaire à [Localité 30], pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, pour rendre compte au juge commis en cas de difficulté et dresser, dans le délai d'un an suivant sa désignation et dans les conditions prévues par les articles 1368 et suivants du code de procédure civile, un état liquidatif établissant les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots ;
- commis le président de la 1ère chambre civile du tribunal judiciaire de Valence pour surveiller les opérations de partage ;
- dit qu'en cas d'empêchement du magistrat ou du notaire commis, il sera procédé à leur remplacement par le président du tribunal sur simple requête ;
- dit que si un acte de partage est établi, le notaire en informera le juge commis ;
- dit qu'en cas de désaccord entre les copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier devra dresser, et transmettre au juge commis, un procès-verbal de difficultés, auquel seront annexés les dires respectifs des parties, ainsi que son projet d'état liquidatif ;
- dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente, au vu de ce procès-verbal, de saisir le tribunal des points de désaccords subsistants par le dépôt de conclusions récapitulatives ;
- autorisé le notaire désigné à consulter la cellule FICOBA afin d'obtenir les éléments et renseignements sur les comptes ouverts au nom de [Y] [C];
- dit qu'il appartiendra au notaire désigné de procéder au calcul de la quotité disponible, conformément aux dispositions de la présente décision et après avoir inclus dans l'actif de la succession le montant des avoirs bancaires détenus par [Y] [C] ;
- fixé à 95 278,51 euros la valeur des parts sociales de [Y] [C] dans la SCI '[Adresse 37]' ;
- fixé à 56 818,51 euros la valeur des parts sociales de [Y] [C] dans la SCI '[22]' ;
- fixé à 160 535,19 euros la valeur des parts sociales de [Y] [C] dans la SCI '[29]' ;
- fixé à 135 660 euros la valeur des parts sociales de M. [Y] [C] dans la SARL [C] ;
- dit que les véhicules automobiles figureront à l'actif de la succession pour un montant de 28 875 euros ;
- dit qu'il convient d'inclure dans l'actif de la succession les fonds d'un montant de 89 150 euros détenus en l'étude de Maître [P], à la suite de la vente d'un bien immobilier à [Localité 26] ;
- dit que le passif de la succession est constitué des frais d'obsèques d'un montant de 5339,20 euros réglés par Mme [T] ;
- débouté Mme [R] de sa demande tendant à voir inscrire au passif de la succession le montant des reconnaissances de dette des 15 novembre 1998 et 22 février 2001 ;
- débouté les parties de leurs demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté toute prétention plus ample ou contraire des parties ;
- ordonné le partage des dépens entre Mme [H] [C] et M. [I] [C] d'une part et Mme [R], d'autre part ;
- dit qu'ils seront distraits au profit de Maître Rivoire qui en a fait la demande, dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Le 22 septembre 2022, Mme [H] [C] et M. [I] [C] ont interjeté appel de cette décision en ce :
- qui concerne les valeurs retenues pour les parts sociales de l'intégralité des sociétés de [Y] [C] ;
- qu'il convient d'inclure dans l'actif de la succession les fonds d'un montant de 89 150 euros détenus en l'étude de Maître [P], à la suite de la vente d'un bien immobilier à [Localité 26] ;
- que le passif de la succession est constitué des frais d'obsèques d'un montant de 5339,20 euros réglés par Mme [T] ;
- que leurs demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ont été rejetées de même que celle relative aux dépens.
Par ordonnance d'incident du 05/10/2023, une demande en nullité d'expertise a été rejetée de même que celle de désignation d'un nouvel expert, au motif que ces prétentions étaient des défenses au fond et non des exception de procédure, seules de la compétence du conseiller de la mise en état.
Dans leurs conclusions n° 2 du 23/02/2024, les appelants demandent à la cour au principal, de désigner un expert autre que Mme [S] avec les missions fixées par le jugement du 26/05/2010, l'arrêt du 02/04/2013 et l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Valence du 05/01/2016, et à titre subsidiaire de :
- fixer la valeur des parts sociales de [Y] [C] :
* dans la société civile immobilière [Adresse 37] à 121.435,63 euros;
* dans la société civile immobilière [22], à 68.086,85 euros ;
* dans la société civile immobilière du [29], à 41.558,09 euros ;
- fixer l'actif net successoral à 639.426,37 euros, soit :
* 121.435,63 euros (SCI [Adresse 37])
* 68.086,85 euros (SCI [22])
* 28.875 euros (véhicules reconnus par l'intimée)
* 160.000 euros (autres véhicules)
* 41.558,09 euros (SCI [29])
* 135.660 euros (Sarl [C])
* 89.150 euros : actifs détenus par le notaire commis
* 5.339,20 euros : frais d'obsèques
- fixer la quotité disponible à 213.142,12 euros ;
- constater que les legs particuliers s'élèvent à 378.397,48 euros ;
- condamner l'intimée à rapporter à la succession les sommes de :
* 165.255,36 euros au titre de l'excès de quotité disponible
* 41.558,09 euros au titre de la répartition de l'actif de liquidation de la société civile immobilière du [29], détourné par Mme [T] ;
- dire que l'arrêt à intervenir sera transmis aux services fiscaux ;
- condamner Mme [G] au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils exposent en substance que :
- les estimations des biens immobiliers sont obsolètes ;
- celle du [Localité 27] a été effectuée sur pièces ;
- un bateau de plaisance et des voitures de collection ont été omis de l'actif successoral ;
- une nouvelle expertise est donc nécessaire ;
- un bateau Freeman modèle 24 de 1982, comptabilisé au bilan pour 35.670,72 euros a été cédé 7.500 euros ;
- une créance de la société [C] [1] sur la société civile immobilière du [29] a été aussi portée à l'actif de cette dernière, pour 195.588,61 euros.
Dans ses conclusions d'intimée et d'appel incident n° 2, Mme [R] demande à la cour de :
- ne pas commettre Maître [P], notaire au [Localité 30] ;
- fixer la valeur nette de la société civile immobilière [Adresse 37] à 146.344,20 euros et celle des parts du défunt à 73.172,10 euros ;
- fixer la valeur nette de la société civile immobilière [22] à 134.258,95 euros et celle des parts de [Y] [C] à 53.703,58 euros ;
- désigner le notaire commis pour procéder à l'évaluation de la société civile immobilière [29] avec obligation pour [I] [C] de produire les bilans et relevés de compte des années 2006 et 2007, et le procès-verbal d'assemblée générale du 24/04/2004 ;
- dire que le notaire commis devra tenir compte des reconnaissances de dette établies par le défunt au bénéfice de [O] [T] et de Mme [W] et déduire du passif successoral la somme de 20.584,10 euros ;
- condamner les appelants au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que :
- le notaire commis ayant été destinataire de reconnaissances de dette dont il a sans doute égaré les originaux, un autre officier ministériel doit être désigné ;
- des éléments postérieurs au rapport d'expertise doivent être pris en compte (taxes foncières, assurances, etc..) concernant les sociétés civiles immobilières ;
- elle ne détient pas les véhicules dont font état les appelants ;
- il appartiendra au notaire commis de procéder préalablement aux opérations de partage au calcul de la quotité disponible.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la désignation du notaire
Il est fait reproche à Maître [P] d'avoir égaré les originaux de deux reconnaissances de dettes transmis par Maître [B] le 31/05/2006. Or, si Maître [B] a bien transmis des documents à son confrère, il n'est pas démontré qu'il s'agissait d'originaux, Maître [B] indiquant dans un mail du 06/12/2016 adressé à Mme [V] [Z] 'je suppose qu'on lui a transmis les originaux, puisqu'il est fait état des reconnaissances de dettes sans qu'il ne soit fait mention du fait qu'il pourrait s'agir de copie seulement. Pour ma part, je n'en ai que des copies'.
Du reste, s'agissant de documents dactylographiés et non rédigés de manière manuscrite, en dehors des signatures, il était difficile de déterminer si les pièces transmises l'étaient en original ou en copie.
Le grief de l'intimée à l'encontre du notaire commis n'étant pas démontré et aucun élément du dossier ne mettant en cause l'intégrité et l'impartialité de cet officier ministériel, il n'y a pas lieu à changement du notaire commis.
Sur l'actif successoral
Concernant l'actif successoral, les appelants sollicitent au principal une nouvelle expertise.
Il est de principe qu'une telle demande ne peut faire l'objet unique d'une action principale, puisque la mesure sollicitée n'est qu'un moyen d'instruction destiné à éclairer le juge sur une prétention.
Les appelants produisent une estimation du 21/06/2023 de l'agence immobilière [25], faisant état d'une fourchette entre 500.000 et 600.000 euros pour ce type de bien.
Concernant la société civile immobilière [Adresse 37], elle est propriétaire à [Localité 11] d'une maison de 70m² avec trois chambres sise sur un terrain de 1.790 m² avec piscine avec dôme de 8 x 3 mètres, et trois garages. La valeur de ce bien a été estimée par l'expert à 280.000 euros d'après des références de 2014.
Les appelants sollicitent la désignation d'un nouvel expert (page 6 des conclusions d'appelant) au motif que dix années ont passé depuis l'estimation du bien du [Localité 27] et huit années depuis celle de la maison de [Localité 11] et que le marché immobilier a sensiblement évolué dans l'intervalle.
Dès lors, cette demande de nouvelle expertise doit être analysée comme étant en réalité une contestation des valeurs retenues par le premier juge pour évaluer le montant de l'actif, ce qui rend cette prétention recevable.
Aux termes de l'article 829 du code civil, 'en vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant. Cette date est la plus proche possible du partage (..)'.
La date de jouissance divise de l'ensemble de l'actif successoral sera fixée au jour du partage.
Dès lors, la valorisation des sociétés civiles immobilières [Adresse 37] et [22], dont les immeubles dont elles sont propriétaires constituent leur principal actif, est devenue obsolète, huit et dix ans s'étant écoulés depuis la visite de l'expert et l'analyse de ventes de biens similaires. Il y a dès lors lieu d'ordonner une nouvelle expertise.
Enfin, concernant le bateau propriété de la société civile immobilière, il a été vendu le 25/09/2005 au prix de 7.500 euros. Il s'agissait d'un bateau Freeman modèle 24 (soit 7,50 m) de 1982. Ce bien ayant 23 ans d'âge au moment de la cession, le prix de revente correspond au prix du marché,. Certes, il a été inscrit à l'actif de la société au prix de 35.670,72 euros, mais il s'agit de l'application de la règle comptable de l'enregistrement d'un actif à sa valeur d'origine, hors dépréciation et amortissement. Ce poste ne signifie donc pas qu'au moment de la revente du bien, la valeur réelle est celle originelle.
Il n'y a donc pas lieu comme le sollicitent les appelants de retenir la valeur d'origine du bateau.
Sur le passif successoral
* la société civile immobilière [Adresse 37]
Celle-ci est débitrice de l'ensemble des comptes courants dus aux associés, d'un montant global de 35.866,09 euros se décomposant en 11.596,15 euros à Mme [R], par représentation de sa mère et 24.269,94 euros revenant aux héritiers de [Y] [C].
Pour ce qui est des travaux effectués par Mme [T], en qualité de gérante, leur valeur, non contestée par les appelants, s'élève d'après le rapport d'expertise à 58.039,89 euros.
Il résulte de l'article VI.2 'Pouvoirs internes' des statuts que toutes acquisitions de matériel supérieures à 20.000 francs exigent l'accord des associés, toute contravention à cette disposition étant considérée comme un juste motif de révocation. Si le fait pour la gérante de n'avoir pas respecté cette disposition en engageant des dépenses de matériel supérieures à 20.000 francs peut engager sa responsabilité, les actes réalisés ne sont pas pour autant nuls, les statuts ne prévoyant pas cette sanction.
Dès lors, c'est exactement que le premier juge a retenu la somme de 54.406,07 euros au titre du passif résultant des travaux effectués, après déduction des factures d'entretien des espaces verts, puisqu'il n'est pas démontré que les prestations en cause seraient contraires à l'intérêt social, ayant au contraire valorisé l'immeuble (cuisine, salle de bains, travaux piscine, portail, fenêtres en PVC, volets , clôture). Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Toutefois, depuis le dépôt du rapport d'expertise, d'autres dépenses postérieures ont été exposées (taxes foncières, remboursements de prêts par anticipation, travaux etc..). Il sera donné mission à l'expert commis de les recenser et d'établir un projet de compte à ce sujet.
Enfin, pour déterminer si les biens légués dépassent la quotité disponible, la portion réductible de la libéralité doit être calculée au jour du décès, tandis que le montant de l'indemnité de réduction doit être fixée en appliquant la portion réductible à la valeur du bien au jour du partage.
Dès lors, l'expert devra :
- déterminer l'état du bien immobilier au jour du décès de [Y] [C] ainsi que sa valeur à cette époque, car c'est à ce moment-là qu'il faut se situer pour déterminer s'il y a eu ou non atteinte à la quotité disponible du fait des libéralités en faveur de [O] [T] ;
- la valeur du bien au jour de l'expertise, l'actif successoral devant être évalué à la date la plus proche de la jouissance divise, soit en l'occurrence, le partage à intervenir.
* la société civile immobilière [22]
Elle est propriétaire à [Localité 34] (Gard) d'un duplex T3 dans une marina avec jardin, patio et garage composé d'un séjour cuisine au rez-de-chaussée et de deux chambres à l'étage, avec terrasse et plan d'eau de 3 x 12 mètres, pouvant accueillir un bateau.
Les appelants concluent à la nullité de l'expertise pour non-respect du contradictoire et défaut d'accomplissement de la mission, l'expert ne s'étant pas rendu sur place.
Cette demande est irrecevable, comme tardive. Elle est en effet soumise au régime des exceptions de procédure et aurait dû en conséquence être formée avant toute défense au fond, alors que des conclusions au fond ont été déposées devant le premier juge après le dépôt du rapport.
Pour la moralité des débats, il sera relevé en tout état de cause que l'expert a soumis à la discussion des parties, par la communication dans son pré-rapport, d'un avis de valeur de l'agence immobilière [28] du 26/08/2013. Dès lors, il a respecté le principe du contradictoire, et il n'y a pas lieu à prononcer la nullité du rapport d'expertise sur ce point.
Par ailleurs, il relevait de son pouvoir propre d'apprécier si un transport sur les lieux était ou non nécessaire pour estimer la valeur du bien appartenant à la société. Le fait que l'expert ait considéré que les pièces fournies (notamment les plans et un avis de valeur) par les parties lui suffisaient ne peut justifier non plus la nullité de ses opérations.
Enfin, Mme [R] ayant réglé des taxes foncières, des charges, des primes d'assurance, etc, depuis le rapport d'expertise, il sera donné mission à l'expert commis de recenser ces dépenses et d'établir un projet de compte.
Sur les autres biens dépendant de la succession
Au préalable, il sera constaté que chacune des parties a conclu à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a fixé la valeur des parts détenues par [Y] [C] dans le capital de la société [C] [1] à la somme de 135.660 euros.
* la société civile immobilière [29]
Constituée entre [Y] [C] (2510 parts) et [O] [T] (2490 parts) , elle était propriétaire d'une maison et de deux appartements à [Localité 35], vendus le 04/08/2006 au prix de 350.000 euros.
Le Cabinet [32], expert-comptable de la société, atteste le 16/09/2022 que :
- la société civile immobilière a été liquidée le 24/04/2007 ;
- la dette que détenait la société [C] [1] a été soldée 195.588,61 euros le 30/05/2007 ;
- au moment de la liquidation, l'actif net disponible représenté par la trésorerie issue de la vente du bâtiment était de 124.590,58 euros ;
- les héritiers de [O] [T] auraient dû recevoir 62.046,11 euros soit 41.558,09 euros après déduction du compte courant de 14.716,73 euros et ceux de [Y] [C], 62.544,47 euros, soit 41.558,09 euros, après déduction de son compte courant de 20.986,38 euros.
Chacune des parties exposant n'avoir reçu aucune somme à ce titre, il sera donné mission au notaire commis de se faire communiquer les comptes et au besoin les rechercher, de façon à déterminer quel a été le sort de l'actif résiduel de la société et si les comptes courants ont été ou non remboursés, le jugement déféré étant réformé sur ce point.
* les reconnaissances de dette
L'intimée verse aux débats la copie de deux documents dactylographiés, portant les signatures de [Y] [C] et de [O] [T], le premier du 15/11/1998, le second du 22/02/2001aux termes desquels [Y] [C] certifie avoir reçu de [O] [T] les sommes de 60.000 et 40.000 francs.
Ces actes n'ont pas été rédigés de la main de l'emprunteur, et ils ne comportent pas mention de la somme en toutes lettres. Ils ne respectent ainsi pas les dispositions de l'article 1326 ancien du code civil, applicable à l'espèce et ne peuvent constituer une preuve, mais seulement, dans la mesure où ils comportent la signature des parties, un commencement de preuve par écrit.
Les appelants contestent l'authenticité de la signature de [Y] [C]. L'expertise ordonnée le 03/05/2016 n'a pu aboutir, faute de production des originaux devant l'expert. Il appartient donc à la cour de procéder à une vérification d'écritures.
Les signatures portées sur les actes litigieux sont différentes de celle du testament du 27/07/2005, étant observé que [Y] [C] était à l'époque très malade. En revanche, elles sont similaires à celles portées sur d'autres documents :
- au bas des statuts de la société civile immobilière du [29] (pièce appelants n° 19) ;
- au bas de la reconnaissance de dette du 13/03/1991 envers Mme [W],
- au bas d'un acte d'achat d'un véhicule Simca 1000 (pièce n° 38)
- sur la carte grise d'un véhicule de collection Ford du 01/06/1990 (pièce 40)
- au-dessous de la mention 'Bon pour accord' au titre du dépôt vente de divers véhicules du 28/07/2004 (pièce n°36) ;
- sur la télécopie adressée à M. [A], le 19/06/2004 (pièce n° 41).
Toutefois, pour qu'ils puissent être retenus comme preuve, ils doivent être confortés par des éléments extrinsèques, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Notamment, il n'est pas produit de relevés de comptes bancaires confirmant le versement des sommes litigieuses .
L'intimée sera déboutée de ce chef de demande, le jugement déféré étant confirmé de ce chef.
Sur les véhicules
Les parties s'accordent sur l'intégration à l'actif de la succession de véhicules pour la somme de 28.875 euros, les appelants indiquant en revanche que neuf autres véhicules de collection sont manquants et doivent faire partie de l'actif pour 160.000 euros.
Il résulte des pièces versées au dossier que :
- le 28/07/2004, [Y] [C] a mis en dépot vente chez M. [A], à [Localité 31] (69), deux véhicules Mercedes, 6 véhicules Hotchkiss et un véhicule militaire Renault, qui ont été vendus au prix de 7.622 euros ;
- le 19/06/2004, le défunt a échangé 5 véhicules (2 Renault, un Ford V8 1935, une Vespa et une 3 CV) contre une auto 'Le Zèbre' ;
- le camion Ford AA a été vendu en 2002 ;
- le 18/05/1993, [Y] [C] a fait transporter un véhicule Delage auprès de la société [36].
Restent ainsi en litige un camping car de 1992, deux Talbot 1000 Rallye, deux 2 CV et une voiture le Zèbre 1913.
La cour n'étant pas suffisamment informée quant au sort de ces véhicules, une expertise sera ordonnée pour déterminer s'ils étaient bien la propriété du défunt et s'ils ont été ou non cédés par ce dernier, l'intimée déclarant ne pas les avoir en sa possession.
Sur les autres demandes
Dans l'attente des rapports d'expertise, il sera sursis à statuer sur la détermination de l'actif et du passif successoral.
Par ailleurs, compte tenu du sort partagé du litige, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Confirme la décision déférée en ce qu'elle a commis Maître [P], notaire, aux fins de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage ;
Complète sa mission en ce que le notaire se fera communiquer les comptes de la société [C] [1] et au besoin les recherchera, de façon à déterminer quel a été le sort de l'actif résiduel de la société et si les comptes courants ont été ou non remboursés ;
Confirme le jugement en ce que il a :
- ordonné le partage de la succession de [Y] [C] ;
- commis Maître [P], notaire à [Localité 30], pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, pour rendre compte au juge commis en cas de difficulté et dresser, dans le délai d'un an suivant sa désignation et dans les conditions prévues par les articles 1368 et suivants du code de procédure civile, un état liquidatif établissant les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots ;
- commis le président de la 1ère chambre civile du tribunal judiciaire de Valence pour surveiller les opérations de partage ;
- dit qu'en cas d'empêchement du magistrat ou du notaire commis, il sera procédé à leur remplacement par le président du tribunal sur simple requête ;
- dit que si un acte de partage est établi, le notaire en informera le juge commis ;
- dit qu'en cas de désaccord entre les copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier devra dresser, et transmettre au juge commis, un procès-verbal de difficultés, auquel seront annexés les dires respectifs des parties, ainsi que son projet d'état liquidatif ;
- dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente, au vu de ce procès-verbal, de saisir le tribunal des points de désaccords subsistants par le dépôt de conclusions récapitulatives ;
- autorisé le notaire désigné à consulter la cellule FICOBA afin d'obtenir les éléments et renseignements sur les comptes ouverts au nom de [Y] [C];
- dit qu'il appartiendra au notaire désigné de procéder au calcul de la quotité disponible, conformément aux dispositions de la présente décision et après avoir inclus dans l'actif de la succession le montant des avoirs bancaires détenus par [Y] [C] ;
- inscrit au passif de la société civile immobilière [Adresse 37] des travaux de conservation et d'amélioration pour 54.406,07 euros ainsi que des comptes courants d'associés de 35.866,09 euros ;
- fait figurer les véhicules automobiles à l'actif successoral pour 28.875 euros ;
- rejeté la demande d'inscription au passif de la succession de [Y] [C] du montant des reconnaissances de dettes des 15/11/1998 et 22/02/2001 ;
- fixé la valeur des parts détenues par [Y] [C] dans le capital de la société [C] [1] à la somme de 135.660 euros ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare recevable la demande d'expertise ;
Donne mission au notaire commis de se faire communiquer les comptes et au besoin les rechercher, pour déterminer quel a été le sort de l'actif résiduel de la société [C] [1] et si les comptes courants ont été ou non remboursés ;
Réforme le jugement déféré quant à la valeur de l'actif des sociétés civiles immobilières [Adresse 37] et [22] ;
Dit que la valeur du bateau Freeman 24 appartenant à la société civile immobilière [22] vendu le 25/09/2005 doit être retenue pour son prix de vente de 7.500 euros et dit n'y avoir lieu à expertise de ce chef ;
Complète le jugement déféré en ce que la société civile immobilière [Adresse 37] est débitrice envers la succession de [Y] [C] de 24.269,94 euros et envers celle de [O] [T] de 11.596,15 euros au titre de leurs comptes courants ;
Désigne Maître [M] [X], demeurant [Adresse 9], (mail : [Courriel 23]) en qualité d'expert, avec pour mission de :
- recueillir les observations des parties ainsi que tous renseignements utiles à l'accomplissement de sa mission, se faire remettre les pièces du dossier, les actes et titres de propriété ainsi que tous documents utiles, notamment le rapport d'expertise de Mme [S];
- visiter les biens immobiliers sis à [Localité 11] et à [Localité 34], en déterminer leur état et leur valeur au jour du décès de [Y] [C] ;
- donner leur valeur actuelle ;
- déterminer l'actif et le passif de ces deux sociétés ;
- déterminer la valeur des sociétés civiles immobilières [Adresse 37] et [22] ainsi que celle des parts de [Y] [C] et de [O] [T];
Désigne M. [U] [K], demeurant [Adresse 16], avec pour mission de :
- recueillir les observations des parties ainsi que tous renseignements utiles à l'accomplissement de sa mission, se faire remettre les pièces du dossier, les actes, titres de propriété, factures et cartes grises ainsi que tous documents utiles ;
- déterminer si les véhicules suivants :
* camping-car Citroën Jumper 1992 immatriculé [Immatriculation 17] ;
* deux Talbot 1000 Rallye immatriculés [Immatriculation 13] et [Immatriculation 19] ;
* deux Citroën 2 CV immatriculées [Immatriculation 20] et [Immatriculation 3] :
* le Zèbre 1913 immatriculé [Immatriculation 4],
étaient bien la propriété du défunt et s'ils ont été ou non cédés par ce dernier ; dans l'affirmative, dire à quel prix ; donner son avis sur le prix de cession ;
Dit que Maître [P] versera par prélèvement sur les fonds en sa possession de la succession de [Y] [C] les provisions de 8.000 euros au titre de l'expertise confiée à Me [X] et de 4.000 euros au titre de celle confiée à M. [K], dans le délai de deux mois, entre les mains du régisseur de recettes de la cour d'appel de Grenoble ;
Impartit à chacun des experts un délai de huit mois pour accomplir leur mission et dit qu'ils déposeront leurs rapports respectifs au greffe de la cour d'appel de Grenoble ;
Dit que les experts recueilleront les explications des parties et de tout sachant dont l'audition leur paraîtra utile ;
Dit qu'ils se feront communiquer toutes les pièces et documents nécessaires, même détenus par des tiers ;
Dit qu'ils pourront se faire assister, s'ils le jugent utile, de tout sapiteur de leur choix, dans une spécialité autre que la leur ;
Commet le conseiller chargé du contrôle des expertises de la cour d'appel de Grenoble ou son délégataire pour suivre les opérations d'expertise et dit qu'en cas de difficultés, les experts lui en réfèreront immédiatement ;
Dit que les experts établiront si nécessaire un pré-rapport, communiqué aux parties avec un délai imparti pour faire valoir leurs observations, et y répondront ;
Dit que les experts commis devront, conformément à l'article 173 du code de procédure civile, adresser aux parties une copie de leur rapport et faire mention de cet envoi sur l'original du rapport ;
Rappelle qu'en vertu de l'article 280 du code de procédure civile, l'expert doit faire sans délai rapport au juge en cas d'insuffisance manifeste de la provision allouée au vu des diligences faites ou à venir aux fins de voir ordonner la consignation d'une provision complémentaire ;
Dit qu'en cas de refus de sa mission ou d'empêchement légitime, les experts ci-dessus désignés pourront être remplacés par ordonnance rendue sur simple requête par la présidente de la chambre des affaires familiales de la cour d'appel de Grenoble ou son délégataire ;
Sursoit à statuer sur les autres demandes jusqu'au dépôt des rapports d'expertise;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Réserve les dépens ;
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile .
SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, M.C. Ollierou, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La Présidente