N° RG 22/04113 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LSWG
C6
N° Minute :
copie certifiée conforme délivrée
aux avocats le :
Copie Exécutoire délivrée
le :
aux parties (notifiée par LRAR)
aux avocats
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES
ARRET DU MERCREDI 17 JUILLET 2024
APPEL
Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Valence, décision attaquée en date du 12 octobre 2022, enregistrée sous le n° 20/00056 suivant déclaration d'appel du 17 novembre 2022
APPELANTE et intimée incidente
Mme [V] [T] [B] [O]
née le [Date naissance 4] 1967 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant
et plaidant par Me Alban BARLET, avocat au barreau de LYON
INTIME et appelant incident
M. [U] [M] [H] [J]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 8] (92)
de nationalité Française
[Adresse 10]
[Localité 3]
représenté par Me Jean POLLARD de la SELARL CABINET JP, avocat au barreau de Valence
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DELIBERE :
Mme Anne BARRUOL, Présidente,
Mme Martine RIVIERE, Conseillère,
M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,
DEBATS :
A l'audience publique du 10 avril 2024,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de MC Ollierou, greffière a entendu les avocats en leurs conclusions et Me Barlet en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.
Le 12/07/2005, Mme [O] et M. [J] ont acquis au prix de 385.000 euros une maison sise à [Localité 9], à concurrence de 65% pour Mme [O] et de 35% pour M. [J].
Le 11/05/2007, ils ont conclu un pacte civil de solidarité.
Le 06/07/2010, ils ont revendu le bien au prix de 578.000 euros.
Le 19/11/2010, ils ont acquis par moitié chacun une propriété sise à [Localité 3] comprenant trois bâtiments à rénover sur un terrain de 1 ha 80a 20 ca, au prix de 300.000 euros payé comptant.
Ce bâtiment rénové dispose de 42 lits pour des gîtes, exploités 300 jours par an.
Le 17/07/2013, le pacte civil de solidarité a été dissout.
Par acte du 02/05/2017, Mme [O] a assigné M. [J] devant le tribunal de grande instance de Valence aux fins de liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
Par ordonnance du 09/10/2018, le juge de la mise en état a confié une expertise à Mme [S].
Dans son rapport du 17/12/2019, l'expert aboutit aux conclusions suivantes :
- le bâtiment principal 'la Chartreuse' est une ancienne bâtisse en pierre en partie rénovée sur 3 niveaux d'environ 200 m² chacun, le premier comportant un appartement occupé par la mère de l'intimé et un restaurant, les deux autres des chambres et espaces à usage de gîte ;
- le bâtiment 'Grand Gîte et Petit Gîte), de 320 m² par niveau , a un sous-sol à usage de garage, sellerie, atelier, buanderie, sanitaires, le rez de chaussée comportant une salle de repas, un coin séjour, 4 dortoirs, le 1er niveau étant en travaux ; enfin, se trouve un duplex indépendant ;
- ces deux bâtiments sont chauffés par une chaudière bois commune ;
- une maison en bois de 113 m², avec isolation par bardage bois et laine de verre, comporte 3 chambres, un grand séjour et un séjour avec cuisine, deux salles de bains et deux WC ;
- en comparant ce bien avec d'autres, sa valeur est de 460.000 euros ;
- le bien a été financé par la vente du pavillon sis à [Localité 9] (94) acquis 385.000 euros en indivision entre Mme [O] (65%) et M. [J] (35%) et revendu au prix de 578.000 euros alors que des travaux avaient été effectués par M. [J];
- d'importants travaux ont été réalisés de 2010 à 2014 pour un montant de 292.707 euros ;
- l'indemnité d'occupation concernant l'appartement occupé par la mère de l'intimé peut être fixée à 400 euros par mois, celle relative à celui occupé par M. [J] à 800 euros ; quant à celle relative à la partie gîte, son montant annuel est de 6.320 euros ;
- de 2013 à 2017, le chiffre d'affaire des gîtes est de 225.472 euros.
Par jugement du 12/10/2022, le tribunal judiciaire de Valence a principalement :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. [J] et Mme [O] ;
- commis Maître [I], notaire à [Localité 13] aux fins d'y procéder ;
- concernant le bien de [Localité 9], dit que M. [J] a une créance à l'encontre de Mme [O] de 85.590,12 euros au titre du financement du bien et de 35.280 euros pour son apport en industrie, Mme [O] étant déboutée de sa demande de créance de 70.000 euros ;
- concernant le bien de [Localité 3], fixé à 460.000 euros sa valeur, constaté que M. [J] ne formule pas de demande d'attribution préférentielle et ordonné sa vente aux enchères publiques sur une mise à prix de 368.000 euros ;
- fixé la créance de Mme [O] sur M. [J] au titre du financement à 69.000 euros et à 85.000 euros au titre des travaux ;
- constaté que le montant des travaux financés par M. [J] a été retenu par l'expert à hauteur de 200.612,50 euros ;
- dit que la plus-value apportée par les travaux est de 160.000 euros ;
- débouté M. [J] de sa demande de 175.000 euros au titre de son apport en industrie ;
- dit que M. [J] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation de :
* 800 euros par mois à compter du 01/06/2013 concernant la partie du bien indivis occupée à titre personnel, soit 82.400 euros ,du 01/06/2013 au 31/12/2021, outre 800 euros par mois à compter de cette date, et dit que ce montant devra figurer à l'actif de l'indivision ;
* 53.690 euros pour la période 2013-2020 inclus, concernant la partie exploitée au titre des gîtes, outre une indemnité d'occupation annuelle de 20% du chiffre d'affaires annuel avec abattement de 20% pour occupation précaire et dit que ce montant devra figurer à l'actif de l'indivision ;
- dit qu'à cet effet, M. [J] devra communiquer au notaire commis le montant de son chiffre d'affaires annuel à compter du 01/01/2021 et qu'à défaut, sera retenue une indemnité d'occupation annuelle calculée sur la base du chiffre d'affaires 2020, soit 8.946 euros par an à compter du 01/01/2021 ;
- constaté qu'aucune demande d'indemnité d'occupation n'est formulée à l'encontre de Mme [X] [J] ;
- dit que Mme [O] détient une créance sur l'indivision de 1.747 euros pour la taxe foncière 2012 ;
- dit que M. [J] détient une créance sur l'indivision au titre des taxes foncières 2014 à 2020 de 12.645 euros à parfaire pour la période postérieure sur justificatifs;
- dit que M. [J] a réglé les cotisations d'assurance habitation à hauteur de 16.744,32 euros de 2013 à 2021 inclus, à parfaire pour la période postérieure sur justificatifs, la fraction correspondant aux garanties couvrant les dommages subis personnellement par le titulaire du contrat et sa responsabilité civile devant être déduite ;
- dit qu'il appartiendra au notaire commis de procéder à cette distinction, à charge pour M. [J] de fournir les contrats d'assurance correspondants ou une attestation de son assurance la précisant et dit qu'à défaut, seule une quote-part forfaitaire de 20% desdites cotisations sera retenue au titre de la part incombant à l'indivision et ouvrant droit à créance ;
- dit que Mme [O] a une créance personnelle à l'encontre de M. [J] au titre d'un prêt à hauteur de 15.000 euros outre intérêts au taux légal à compter du 02/05/2017 et en tant que de besoin, l'a condamné au paiement de cette somme ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit de Me Serpegini, avocate.
Par déclaration du 17/11/2022, Mme [O] a relevé appel de cette décision.
Par conclusions d'appel récapitulatives du 07/08/2023, elle demande à la cour de:
- avant toute défense au fond, juger recevable et bien fondée la fin de non recevoir tendant à voir déclarer irrecevable la demande de M. [J] d'attribution préférentielle du bien de [Localité 3], comme constituant une demande nouvelle en cause d'appel ;
- fixer sa créance envers l'indivision à 145.887 euros au titre du financement du bien de [Localité 9] ;
- dire qu'au jour de la vente de ce bien, M. [J] n'avait financé que 9,76% de l'acquisition et que la contribution de Mme [O] dans l'acquisition était supérieure de 25,24% de ses droits;
- fixer la créance de Mme [O] envers l'indivision à 145.887 euros au titre du financement de ce bien ;
- dire que M. [J] ne bénéficie d'aucune créance pour sa part sur l'indivision au titre des travaux réalisés sur ce bien et débouter M. [J] de sa demande ;
- fixer la créance de Mme [O] sur l'indivision à hauteur de 70.000 euros pour les travaux financés par elle ;
- fixer la créance de Mme [O] envers l'indivision à 85.000 euros au titre des travaux à [Localité 3] ;
- juger que M. [J] ne peut solliciter de créance au titre des travaux qu'il a exposés de son propre chef, sans concertation et accord préalable de Mme [O] et qui n'ont généré aucune plus-value dans l'intérêt de l'indivision au-delà de la somme de 75.000 euros dès lors que la plus-value totale des travaux a été chiffrée par l'expert à 160.000 euros et le débouter de sa demande;
- juger que toute dépense prétendument exposée par M. [J] au delà de 5.000 euros l'a été au mépris de l'intérêt de l'indivision dès lors que l'expert chiffre la plus value des travaux à 160.000 euros et que M. [J] se doit en équité d'assumer et de supporter seul lesdites dépenses ;
- condamner M. [J] au paiement de 5.000 euros au titre des frais visés à l'article 700 du code de procédure civile exposés en première instance et de 4.000 euros pour ceux exposés en cause d'appel et le condamner aux dépens, avec distraction au propfit de la Selarl Dauphin et Mihljovic.
Dans ses conclusions d'intimé n° 2, M. [J] demande à la cour de :
- déclarer recevable sa demande d'attribution préférentielle du bien de [Localité 3], en ce qu'elle constitue une conséquence ou un accessoire à la demande principale d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des biens issus de l'indivision ;
- fixer sa créance au titre de son apport en industrie pour les travaux à [Localité 9] à 35.280 euros ;
- dire qu'il se verra attribuer le bien de [Localité 3] sur la base du prix de vente de 460.000 euros;
- fixer sa créance au titre de son apport en industrie pour les travaux réalisés à [Localité 3] à 175.000 euros ;
- débouter Mme [O] de ses demandes et la condamner au paiement de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes au titre du bien de [Localité 9]
* le financement de l'acquisition
Le prix de la maison est de 385.000 euros en principal outre 40.300 de droits d'enregistrement, frais d'acte et commission d'agence. L'acquisition a été financée par un apport de Mme [O] de 205.300 euros (150.000 euros donnés par ses parents et fonds personnels de 55.300 euros), le solde de 220.000 euros l'étant par un prêt de 220.000 euros au taux de 2,84% souscrit solidairement auprès de la [7] remboursable en 240 mensualités de 1290,57 euros.
Les parties s'accordent pour dire que le remboursement du prêt devait se faire de manière inégale entre les partenaires, M. [J] réglant 900 euros par mois et Mme [O] 391 euros, de façon à ce que, au terme du crédit, M. [J] ait remboursé 35% du prix d'acquisition et Mme [O] 65%.
L'intimé expose dans ses conclusions qu'il a remboursé le prêt à hauteur de 41.900 euros (43 échéances de 900 euros, trois de 600 euros et deux de 700 euros), ce qui n'est pas contesté par Mme [O] (conclusions pages 15 et 16), elle-même s'acquittant de la somme de 18.674 euros.
Le coût total du crédit (capital de 220.000 €+ assurances de 21.120 €+ garantie de 2.200 € + intérêts de 68.616 €) est de 403.872 euros. Dès lors, la part du montant d'une échéance remboursant le capital est de 55%, les 45 % restant étant affectés au remboursement des intérêts, assurance et frais.
En conséquence, M. [J] a contribué au paiement de l'acquisition à hauteur de (41.900 € x 55%) soit 23.045 euros et Mme [O] à hauteur de (18.674 € x 55%) soit 10.270 euros outre son apport de 205.300 euros soit 215.570 euros au total.
* l'apport en industrie de M. [J]
Aux termes de l'article 815-12 §2 du code civil, l'indivisiaire 'a droit à la rémunération de son activité dans les conditions fixées à l'amiable ou, à défaut, par décision de justice'.
Il résulte des pièces versées aux débats (attestations de l'agence d'architecte [6], de M. [C] et de Mme veuve [J] et photographies de chantier) que :
- les parties ont confié à la société [6] la mission de conception et de maîtrise d'oeuvre de la surélévation et l'extension de leur maison, pour une superficie de 63 m² ;
- un constructeur a réalisé un chaînage béton de reprise en tête de mur, une structure bois avec charpente et isolation, escalier et plancher en bois massif ;
- M. [J] a déposé la couverture et la charpente existantes, et réalisé les enduits, la plâtrerie, les fluides, les carrelages, faïences et peintures, ces travaux ayant été réalisés en 2006.
Ces attestations et photographies sont concordantes, et aucun élément du dossier ne démontre que les dires de l'architecte sont de pure complaisance, le seul fait que l'architecte soit un ami d'enfance de M. [J] étant insuffisant. Du reste, la réalité des travaux n'est pas contestée d'autant qu'ils ont permis de réaliser une plus-value importante.
La cour considère que ces travaux ont nécessité 1.000 heures de travail, qui ouvrent droit à une indemnité au bénéfice de M. [J]. Toutefois, son indemnisation ne peut se calculer d'après le coût de l'intervention d'une entreprise. En effet, M. [J] n'avait à supporter ni frais généraux ni primes d'assurance responsabilité civile professionnelle et garantie décennale, ni taxes, ni charges sociales. Dans ces conditions, la cour trouve dans le dossier les éléments suffisants pour fixer l'indemnité due par l'indivision à la somme de 12.000 euros, le jugement déféré étant réformé de ce chef.
* le financement des travaux par Mme [O]
Mme [O] expose avoir affecté une indemnité de licenciement de 70.000 euros au financement des travaux.
Elle produit un tableau (pièce n° 40) non utilement contesté par l'intimé, ainsi que des relevés de son compte bancaire qui font apparaître les paiements suivants :
- 2.406 euros le 02/08/2005
- 5.646 euros le 18/01/2006
- 6.160 euros le 01/03/2006
- 16.684 euros le 08/03/2006
- 22.244 euros le 20/04/2006, soit un total de 53.140 euros.
L'appelante déclare que ces versements ont permis de régler l'architecte, le maçon et le charpentier. Si la copie des chèques correspondants n'est pas produite, les éléments du dossier montrent que le financement de ces travaux n'a pu être fait que par Mme [O].
En effet, selon l'attestation de l'architecte [6] (pièce intimé n° 19), le maître d'ouvrage (M. [J] en l'occurrence) a réalisé la réhabilitation de l'existant et la partie second oeuvre de la surélévation tandis que les autres travaux (escalier, maçonnerie, structure bois), ont été confiés à des entreprises. Or, M. [J] ne déclare pas les avoir financés lui-même, tandis que les versements opérés par Mme [O] correspondent bien au coût des travaux réalisés par les entreprises.
Dès lors, Mme [O] justifie d'une créance de 53.140 euros sur l'indivision.
* les créances des parties
Aux termes de l'article 815-13 du code civil, 'lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés'.
Le profit subsistant est égal à la différence entre le prix de revente de 578.000 euros et le montant de l'achat de 425.000 euros, soit un solde de 153.000 euros.
Mme [O], étant titulaire de 65% du bien indivis, justifie ainsi d'un droit à une créance de 259.350 euros, tandis que M. [J], titulaire de 35%, doit recevoir 139.650 euros.
Toutefois, le montant des créances de chacun des indivisaires doit ainsi être déterminé d'après le profit subsistant, dans la proportion dans laquelle leurs deniers ont contribué à la conservation du bien indivis.
La participation de Mme [O] est de (205.300 € + 10.270 € + 53.140 €) soit 268.710 euros tandis que celle de M. [J] est de (23.045 € + 12.000 €) soit 35.045 euros, pour un total de 303.755 euros.
Ainsi, Mme [O] a effectué 88% des apports et M. [J] 12%, représentant des créances sur l'indivision de 351.120 euros pour Mme [O], et de 47.880 euros pour M. [J].
Le notaire a réparti le prix de vente de 578.000 euros entre Mme [O], par un versement de 65% de ce montant, conformément à l'acte, soit 375.700 euros (outre celle de 1.059,22 euros, payée par l'acquéreur au titre du remboursement de la taxe foncière au prorata). M. [J] percevant les 35% du prix, soit 202.300 euros. Toutefois, M. [J] a reversé à Mme [O] la somme de 179.000 euros, laquelle l'a reversée à la [7] au titre du règlement du solde du prêt.
En définitive, M. [J] a reçu la somme de (202.300 € - 179.000 €) soit 23.300 euros. Il justifie donc d'une créance sur Mme [O] de (47.880€ - 23.300 €) soit 24.580 euros, le jugement déféré étant réformé de ce chef.
Sur les demandes au titre du bien de [Localité 3]
* l'attribution préférentielle
En vertu de l'article 515-6 du code civil, un partenaire d'un pacte civil de solidarité peut demander le bénéfice de l'attribution préférentielle.
En matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse. Est donc recevable, en application de l'alinéa 2 de l'article 910-4 du code de procédure civile, la demande d'attribution préférentielle formée par l'intimé après le dépôt des premières conclusions d'appel.
La propriété de [Localité 3] comprend le logement de l'intimé ainsi que des gîtes qui sont exploités commercialement par M. [J]. Dès lors, les conditions de l'article 831-2 du code civil sont remplies et il sera fait droit à la demande de M. [J], la valeur du bien retenue étant celle de 460.000 euros fixée par le premier juge, le jugement étant réformé en ce qu'il a ordonné la vente sur licitation du bien.
* les travaux de rénovation
Il résulte du rapport d'expertise, des photographies versées aux débats et des attestations produites par les deux parties que l'ensemble immobilier acquis a fait l'objet d'une importante rénovation entre 2010 et 2014, les bâtiments n'étant pas habitables lors de l'acquisition. L'expert a chiffré la plus value théorique apportée par ces travaux à 300.000 euros, considérant que le bien avait été acquis à un prix surévalué (300.000 euros pour une valeur réelle de 160.000 euros).
Les bâtiments sont désormais à usage d'habitation, la majeure partie de leur surface étant à usage de gîte. Les travaux réalisés par M. [J] ayant contribué à l'amélioration du bien, devront être pris en compte, pour la totalité de leur montant.
C'est exactement que le premier juge, retenant en cela les conclusions expertales non critiquées utilement par les parties, a fixé le montant des travaux financés par l'appelante à 85.000 euros et ceux par l'intimé à 200.612,50 euros.
M. [J] se verra débouté de sa demande d'indemnisation de son apport en industrie. En effet, les sommes qu'il a investies correspondent non seulement à des travaux réalisés par des entreprises ou des achats de matériaux, mais à la prise en charge de sa vie quotidienne. Il n'avait pas de revenus durant la période d'activité et il a ainsi pu vivre grâce aux fonds apportés dans le cadre de l'opération de rénovation.
La somme de 200.612,50 euros comprend ainsi déjà le temps passé pour les travaux, étant observé que M. [J] n'exerçant pas d' activité de professionnel du bâtiment, ne peut voir les heures passées aux travaux facturées comme le ferait une entreprise, n'ayant ni charges ni frais généraux à supporter.
Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
Compte tenu du sort partagé du litige, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civilepour les frais irrépétibles exposés, en première instance comme en appel.
Enfin, les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.
Aucune distraction des dépens ne sera autorisée, en l'absence de partie condamnée à leur paiement, condition fixée par l'article 699 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Réforme le jugement déféré en ce qu'il a été jugé que :
- M. [J] a une créance à l'encontre de Mme [O] au titre du financement du bien de [Localité 9] (94) de 82.590,12 euros ;
- M. [J] a été débouté de sa demande de créance au titre de son apport en industrie pour les travaux réalisés sur ce bien ;
- Mme [O] a été déboutée de sa demande de créance au titre des travaux de renovation et d'amélioration de ce bien ;
- la vente aux enchères publiques sur mise à prix de 368.000 euros de l'ensemble immobilier sis à [Localité 3], lieudit [Localité 12], a été ordonnée ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Concernant le bien de [Localité 9],
Dit que M. [J] a contribué au paiement de l'acquisition à hauteur de 23.045 euros et Mme [O] à hauteur de 10.270 euros outre son apport de 205.300 euros soit 215.570 euros au total ;
Fixe l'indemnité due par l'indivision à la somme de 12.000 euros au titre des travaux réalisés par M. [J] ;
Dit que Mme [O] justifie d'une créance de 53.140 euros sur l'indivision au titre du financement de travaux d'amélioration ;
Dit en conséquence que M. [J] est titulaire d'une créance sur Mme [O] de 24.580 euros ;
Dit que le bien de [Localité 3] (26) est attribué préférentiellement au prix de 460.000 euros le bien de [Localité 3] à M. [J] ;
Renvoie les parties devant le notaire commis pour l'établissement de l'acte de partage ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile tant pour les frais exposés en première instance qu'en cause d'appel ;
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage ;
Dit n'y avoir lieu à distraction des dépens ;
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile .
SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, M.C. Ollierou, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La Présidente