RG N : 07/00445
AFFAIRE :
Marie-Louise X... épouse Y...C/Bernard Z...
AMDB/MLM
Autres demandes relatives à un bail rural
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 12 NOVEMBRE 2007
A l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES, le douze novembre deux mille sept a été rendu l'arrêt dont la teneur suit ;
ENTRE :
Marie-Louise X... épouse Y..., demeurant ...
APPELANTE d'un jugement rendu le 27 février 2007 par le tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE
Représentée par Maître Philippe CLARISSOU, avocat au barreau de TULLE
ET :
Bernard Z..., demeurant ...
INTIME au principal, appelant incident
Représenté par Maître Eric DIAS, avocat substituant Maître Martine GOUT, avocats au barreau de TULLE
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A l'audience publique du 08 octobre 2007, la Cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, et de Madame Anne-Marie DUBILLOT-BAILLY, Conseillers, assistés de Madame Geneviève BOYER, Greffier, Maître Philippe CLARISSOU et Eric DIAS, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie
Puis, Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 12 novembre 2007;
A l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.
LA COUR
Par requête du 19 octobre 2005, Monsieur Bernard Z... a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE pour faire constater qu'il est fermier sur une parcelle appartenant à Monsieur Paul Y..., apparaissant au plan cadastral rénové de la commune d'AFFIEUX, section A 365 devenues aujourd'hui numéro 788, constater que le 17 juin 2005, sans information préalable et en dehors de toute procédure régulière de reprise ou de congé, les consorts Y... ont entrepris des travaux de terrassement sur la parcelle précitée, détruisant en totalité la prairie qu'ils louent. Il a sollicité la condamnation des consorts Y... à cesser toute atteinte à la jouissance paisible due au preneur et à remettre la parcelle en état sous astreinte définitive de 500 € par jour de retard. Monsieur Z... a réclamé en outre les sommes de 6 000 € à titre de dommages-intérêts et de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur Paul Y... a demandé au tribunal de mettre hors de cause. Son épouse née Louise X... est intervenue volontairement en sa qualité de seule propriétaire de la parcelle litigieuse, a conclu au débouté de Monsieur Z... et a réclamé la somme de 1 200 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement du 27 février 2007, le tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE a mis hors de cause Monsieur Paul Y..., constaté l'intervention volontaire de Madame Marie -Louise Y... en tant que propriétaire unique des parcelles litigieuses, dit que le bail rural, a ordonné sous astreinte à Monsieur Bernard Z... d'entretenir les parcelles louées, à Madame Y... de remettre en état la parcelle 1019 et condamné celle-ci à payer à Monsieur Z... la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts.
Par déclaration du 29 mars 2007, Marie-Louise X... épouse Y... a relevé appel de ce jugement, dont elle sollicite l'infirmation. Elle demande à la Cour à titre principal de débouter Monsieur Z... de l'ensemble de ses prétentions et de dire qu'il n'existe pas de bail rural.
A titre subsidiaire, Madame Y... demande à la cour de prononcer la résiliation du bail pour défaut d'entretien des parcelles, de condamner Monsieur Z... à les remettre en état, ainsi qu'à lui verser les sommes de 5 000 € au titre des fermages non prescrits et de 1 200 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'appelante fait valoir que Monsieur Z... savait forcément que son époux n'est pas propriétaire des parcelles litigieuses, puisqu'il les a exploitées à la suite de son beau-père, et qu'il n'avait aucune qualité pour donner ces parcelles à bail. Elle ajoute que leur mise à disposition gratuite et révocable ne peut s'apparenter à un bail rural, qui suppose une contrepartie financière, qui n'existe pas en l'espèce. Au cas où la cour en jugerait autrement, l'appelante sollicite la résiliation du bail en raison du défaut d'entretien des parcelles, ainsi que le versement d'un loyer sur la période non prescrite de cinq ans.
Bernard Z... conclut à la confirmation de la décision critiquée, sauf quant au montant des dommages-intérêts, qu'il entend voir porter à la somme de 6 000 €, réclamant en outre les sommes de 1 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour la première instance et de 2 000 € sur le fondement de ce texte pour ses frais irrépétibles d'appel.
L'intimé s'en remet quant à la mise hors de cause de Monsieur Paul Y.... Il affirme, qu'il bénéficie d'un bail à ferme, opposable au véritable propriétaire lorsqu'il a été consenti par le propriétaire apparent de la chose louée et qu'il ne peut être soutenu que la convention de fermage ne comporte pas de contrepartie onéreuse. Il ajoute que celle-ci doit être interprétée de manière extensive et qu'il s'est acquitté en lieu et place du bailleur, des cotisations sociales afférentes aux parcelles louées auprès de la Mutualité Sociale Agricole. A titre subsidiaire, il soutient que la demande de résiliation du bail est irrecevable comme n'ayant pas été soumise au préalable de conciliation, la parcelle en cause étant parfaitement entretenue et les désordres résultant des travaux entrepris par l'appelante elle-même, de sorte que la résiliation du bail ne saurait être encourue.
SUR QUOI, LA COUR
Madame Marie-Louise Y... soutient que l'attestation de mise à disposition de parcelles à usage agricole, signée par son époux Paul Y... en faveur de Bernard Z... le 30 septembre 1974 ne lui est pas opposable, car celui-ci n'avait pas qualité pour ce faire, puisqu'elle est la seule propriétaire des biens litigieux. C'est à bon droit que le tribunal a considéré qu'un bail consenti par le propriétaire apparent de la chose louée est opposable au véritable propriétaire lorsque le locataire a traité de bonne foi, ce qui n'est pas contestable en l'espèce, étant précisé par ailleurs que la mise hors de cause de Paul Y... n'est pas discutée.
Il résulte des dispositions de l'article L.411-1 du code dural que toute mise à disposition d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole doit intervenir à titre onéreux pour relever du statut de fermage, le texte précité ne comportant aucune indication quant au montant ou à la nature de la contrepartie due au propriétaire. Cette condition n'est pas remplie en l'espèce, le paiement des cotisations MSA, qui n'est que la conséquence de l'exploitation des parcelles, est effectué au profit de l'exploitant et non du bailleur. Faute de contrepartie onéreuse, la convention litigieuse ne saurait s'analyser en un bail rural, mais constitue une simple mise à disposition gratuite et révocable. Il y a lieu par conséquent de réformer dans ce sens le jugement déféré et de débouter Bernard Z... de l'ensemble de ses demandes.
Il apparaît équitable d'allouer à Madame Y... la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et de condamner Monsieur Z... aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme le jugement rendu le 27 février 2007 par le tribunal paritaire des baux ruraux de TULLE et statuant à nouveau,
Dit que la convention passée le 30 septembre 1974 n'est pas un bail rural et que Bernard Z... ne bénéficie pas du statut du fermage,
Le déboute en conséquence de toutes ses demandes,
Condamne Monsieur Z... à verser à Madame Marie-Louise Y... la somme de HUIT CENTS (800) EUROS en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Le condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Cet arrêt a été prononcé à l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES en date du douze novembre deux mille sept par Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre.