ARRET N.
RG N : 11/ 01650
AFFAIRE :
M. André X..., Mme Rose Y...épouse X...
C/
SAS SEILHAC DISTRIBUTION prise en la personne de son représentant légal
DB-iB
Grosse délivrée à Selarl DAURIAC COUDAMY CIBOT, avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 20 DECEMBRE 2012--- = = = oOo = = =---
Le VINGT DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur André X...de nationalité Française né le 13 Mars 1930 à Paris (75012) Profession : Sans profession, demeurant ...-95120 ERMONT
représenté par la SELARL DAURIAC-COUDAMY-CIBOT, avocats au barreau de LIMOGES, Me Dominique VAL, avocat au barreau de BRIVE-LA-GAILLARDE
Madame Rose Y...épouse X...de nationalité Française née le 11 Mai 1934 à SEILHAC (19) Profession : Sans profession, demeurant ...-95120 ERMONT
représentée par la SELARL DAURIAC-COUDAMY-CIBOT, avocats au barreau de LIMOGES, Me Dominique VAL, avocat au barreau de BRIVE-LA-GAILLARDE
APPELANTS d'un jugement rendu le 30 SEPTEMBRE 2011 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BRIVE
ET :
SAS SEILHAC DISTRIBUTION prise en la personne de son représentant légal dont le siège social est 29, avenue Jean Vinatier-19700 SEILHAC
représentée par Me Jean-Pierre GARNERIE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Alexandre BRUGIERE, avocat au barreau de POITIERS
INTIMEE
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Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 06 Novembre 2012 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 4 Décembre 2012. L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 juillet 2012.
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile Madame Martine JEAN, Président de chambre et Monsieur Didier BALUZE, Conseiller, assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, ont tenu seuls l'audience au cours de laquelle Monsieur Didier BALUZE, Conseiller a été entendu en son rapport, Maîtres VAL et BRUGIERE, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure
Après quoi, Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 20 Décembre 2012 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Madame Martine JEAN, Président de chambre et Monsieur Didier BALUZE, Conseiller, ont rendu compte à la Cour composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE, Conseiller et de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
M et Mme X...sont propriétaires de diverses parcelles à Seilhac en Corrèze, dont les parcelles 138 et 139 sur lesquelles ils ont fait construire leur maison d'habitation en 2003-2004.
A l'époque de cette construction, il y avait par rapport au côté Sud-Est de la maison un grand pré et au-delà, notamment un magasin Super U.
Ensuite, la SAS Seilhac Distribution, gestionnaire de cette moyenne surface, a acquis la ou les parcelles correspondant à ce pré et elle y a fait construire en 2008 une nouveau bâtiment commercial.
M et Mme X...ont engagé une action pour trouble anomal de voisinage.
Par jugement du 30 septembre 2011, le tribunal de grande instance de Brive la Gaillarde a statué pour l'essentiel de la manière suivante :
- rejette les demandes au titre des parcelles 99 et 307 (qui apparaissent situées ailleurs),
- rejette les demandes des époux X...relatives à l'existence, pour leur maison d'habitation, d'un trouble anormal de voisinage de nature visuelle ou en raison de travaux de terrassement,
- avant dire droit sur un trouble anormal de voisinage de nature sonore, par rapport à la maison : ordonne une expertise, désigne M. B...pour y procéder,
- réserve les demandes d'indemnisation.
Il peut être précisé que le rapport d'expertise a été déposé et conclut à des dépassements des seuils réglementaires acoustiques et à des nuisances sonores.
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M et Mme X...ont interjeté un appel limité dans leurs conclusions.
Ils font valoir qu'il y a un impact visuel du fait de la nouvelle construction qui n'existait pas avant avec l'ancien bâtiment, que le nouveau bâtiment a été implanté à une distance non réglementaire (6 m au lieu de 10, par rapport à l'arrêté applicable), que de même le bandeau-enseigne a été installé au dessus du bâtiment et non contre le bardage ainsi que cela était cependant prévu par le permis de construire.
M et Mme X...présentent donc les demandes suivantes :
- réformer le jugement en ce qu'il a statué qu'il n'existait pas de trouble anormal d'ordre visuel,
- constater qu'ils subissent un trouble anormal de voisinage,
- condamner la SAS SEILHAC DISTRIBUTION à leur payer :-51. 400 € au titre de la moins-value de leur immeuble,-20. 000 € pour préjudice de jouissance,-10. 000 € pour préjudice moral,
- condamner la SAS SEILHAC DISTRIBUTION à déposer l'enseigne en vue de sa mise en conformité avec les prescriptions administratives, sous astreinte.
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La SAS Seilhac Distribution conclut au rejet de l'appel.
Elle fait valoir qu'il y avait déjà un environnement commercial à proximité et que l'extension du bâtiment n'a pas d'impact significatif.
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Il est renvoyé aux conclusions des parties transmises par M et Mme X...le 29 mars 2012 et par la SAS Seilhac Distribution le 29 mai 2012.
SUR CE,
Seilhac est un chef-lieu de canton de 1. 700 habitants environ.
Il apparaît que la maison de M et Mme X...est située dans le centre-bourg (selon Mme C...) ou en tout cas au sortir de celui-ci, mais encore à l'intérieur de cette localité.
Il y a (et il y avait) autour et ensuite, en allant vers l'extérieur, d'autres maisons et, après le pré sus-évoqué, il y avait déjà (avant la construction de la maison) une surface commerciale, avec station service, une jardinerie, un bâtiment genre gymnase.
Ces locaux, notamment la surface commerciale, étaient en contrebas. Sa toiture (rouge à l'époque) devait être visible depuis la maison.
Celle-ci n'était donc pas implantée, de manière isolée, en pleine campagne, dans une zone purement rurale, mais dans un bourg urbanisé.
Le nouveau bâtiment commercial a été construit en le rapprochant des parcelles où la maison est implantée. Il jouxte maintenant le terrain X....
La vue donne maintenant d'abord sur le toit de cette surface commerciale.
Il y a certes un trouble visuel dans la mesure où la vue immédiate est donc celle-ci alors qu'avant elle était d'abord sur un pré (avec un bosquet, plus vers le Sud). Mme C...fait ainsi état d'une vue désagréable sur le toit du Super U et de ses aérations.
Cela étant, le trouble ne donne lieu à réparation que s'il présente un caractère anormal.
En l'occurrence, le bâtiment a été construit de manière encaissée. Il subsiste une vue sur l'horizon. Au-delà de ce qui était le pré auparavant et qui est devenu le bâtiment litigieux, la vue reste similaire (vu notamment les premières photographies du constat du 3 mars 2009 ; Mme C..., dans les agréments de la maison, mentionne vue sur les Monédières en partie).
Il n'y a pas une absence de vue ou une occultation de la vue sur la campagne environnante, ni un obscurcissement ou une privation même partielle d'ensoleillement.
Il ne peut y avoir, à l'intérieur même d'un bourg, un droit acquis à la conservation en toute hypothèse d'une vue, au risque de figer tout évolution urbanistique. Le déplacement avec agrandissement semble-t-il de ce bâtiment commercial a été autorisé par les autorités administratives. Le non respect de telle ou telle disposition réglementaire ou règle d'urbanisme n'est pas en soi un critère d'anormalité du trouble. En l'occurrence notamment le fait que le bâtiment soit à six mètres de distance au lieu de dix n'est pas déterminant par rapport à l'existence ou non d'un trouble visuel anormal de voisinage.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'existence d'un trouble de voisinage d'ordre visuel présentant un caractère anormal n'est pas caractérisée.
Sur la demande au titre de l'enseigne, selon l'arrêté du 25 avril 2008 produit (dont il n'est pas discuté qu'il se rapporte au bâtiment litigieux) le permis a été accordé sous réserve notamment du respect des prescriptions de l'architecte des bâtiments de France. Le service départemental de l'architecture et du patrimoine a recommandé selon document du 19/ 12/ 2007 de prévoir l'enseigne Super U contre le bardage. Un schéma (pièce 20 appelants, date 18 juin 2009) sur le permis de construire modificatif mentionne que l'enseigne Super U a été mise en place sur la façade et non en plein ciel comme prévu au permis initial.
M et Mme X...allèguent que l'enseigne a été posée au-dessus du bâtiment. Ils produisent une photographie (pièce 22) montrant un bâtiment surplombé d'une fin d'enseigne " PER U " ;
L'intimée ne discute pas ces éléments.
Il en ressort que la SAS Seilhac Distribution n'a pas respecté une disposition du permis de construire, ce qui est préjudiciable aux époux X...dont la vue est gênée, perturbée et détériorée par cette enseigne faisant saillie.
Ce chef de demande sera donc admis.
--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---
LA COUR
Statuant par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement,
Y ajoutant :
Ordonne à la SAS Seilhac Distribution de déposer l'enseigne du magasin litigieux pour l'installer contre la façade ou le bardage,
Dit que la SAS Seilhac Distribution devra procéder à cette mesure dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, à défaut d'exécution à l'issue de ce délai, elle devra à M et Mme X...une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard,
Rejette les autres demandes de M et Mme X...et rejette celle de la SAS Seilhac Distribution au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Martine JEAN.