COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 20 DÉCEMBRE 2012
Le vingt Décembre deux mille douze la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par la mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
SA BNP PARIBAS, dont le siège social est Boulevard 16 boulevard des Italiens-75009 PARIS 09 représentée par la SELARL DAURIAC-COUDAMY-CIBOT, avocats au barreau de LIMOGES
APPELANTE d'un jugement rendu le 21 DÉCEMBRE 2011 par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE GUÉRET
ET :
Nathalie X... épouse Y..., de nationalité Française, née le 08 Février 1971 à AUBUSSON (23000) Profession : Aide à domicile, demeurant... représentée par la SCP MAURY CHAGNAUD CHABAUD, avocats au barreau de LIMOGES, et Me Maria COLOMB-AUDRAS, avocat au barreau de CREUSE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 2893 du 05/ 07/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
INTIMÉE
Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 15 Novembre 2012 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 20 Décembre 2012. L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 août 2012
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Monsieur Didier BALUZE, magistrat rapporteur, assisté de Madame Pascale SEGUELA, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle Monsieur Didier BALUZE, conseiller a été entendu en son rapport, Me COUDAMY et Me COLOMB AUDRAS, avocats ont été entendus en leur plaidoirie et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.
Après quoi, Monsieur Didier BALUZE, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 20 Décembre 2012 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Didier BALUZE, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Didier BALUZE, Conseiller faisant fonction de président, de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseiller et de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
LA COUR
RÉSUMÉ du LITIGE
La BNP et Mme Nathalie Y... née X... ont convenu de trois crédits :
- autorisation de découvert en compte'Aurore'de 1500 €, 17 mai 2005,
- prêt personnel du 16/ 11/ 2007, 14. 000 €, 72 mensualités de 248, 74 €,
- prêt personnel 2/ 01/ 2008, 6. 500 €, 60 mensualités de 135, 15 €.
Suite à des impayés, la BNP a engagé une action en paiement le 27 août 2010.
Par jugement du 21/ 12/ 2011, le Tribunal d'Instance de Guéret a statué ainsi :
- condamne, quant au crédit du 17/ 05/ 2005, la BNP à restituer à Mme Y... les intérêts échus depuis l'origine, avec déduction sur le capital restant (le Tribunal retenant la déchéance du droit aux intérêts en raison du dépassement de l'autorisation de découvert),
- condamne Mme Y... à payer à la BNP :
-10. 525, 30 € avec intérêts pour le prêt du 16/ 11/ 2007,
-4. 508, 17 € avec intérêts pour le prêt du 2/ 01/ 2008,
- condamne la BNP à payer à Mme Y... 10. 000 € de dommages intérêts pour manquement au devoir de mise en garde.
La BNP a interjeté appel.
Elle demande de réformer le jugement sur deux aspects pour condamner Mme Y... à lui payer 1356, 87 € au titre du crédit utilisable en compte avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et rejeter la demande de dommages et intérêts pour défaut de mise en garde.
Mme Y... conclut à la confirmation.
Il est renvoyé aux conclusions des parties déposées par l'appelante le 16/ 05/ 2012 et l'intimée le 19/ 06/ 2012.
MOTIFS
Pour l'ouverture de crédit en compte, l'autorisation de découvert de 1. 500 € a été dépassée pendant plus de trois mois au moins, comme l'invoque Mme Y..., à compter de juin 2007.
Vu les dispositions des articles L 311-1 et 3, L 311-8 et suivants anciens du code de la consommation, il convenait alors que la banque propose une nouvelle offre de crédit conforme à la réglementation en matière de crédit à la consommation.
L'irrégularité a été constituée à l'expiration de ces trois mois, la régularisation possible était la conclusion d'une nouvelle autorisation.
Si courant 2008 (essentiellement d'avril à octobre), le débit est repassé en dessous de l'autorisation de découvert, cela est indifférent. L'irrégularité était constituée et perdurait. La restauration du découvert concerne un autre aspect (relatif à la forclusion) mais non la déchéance du droit aux intérêts, acquise par l'absence de nouvelle autorisation dans les trois mois du dépassement.
Cela étant, cette déchéance s'applique à compter du début de la période de dépassement, en l'espèce juin 2007 (il sera retenu le 25 juin 2007, vu le relevé et le solde de cet date).
Auparavant, la situation était régulière en raison de l'existence d'une autorisation de découvert prévue par le contrat de crédit du 17 mai 2005 (cas différent de celui où il n'y a pas à l'origine de contrat régulier d'autorisation de découvert).
Il n'est pas certain que les intérêts à restituer dépassent le principal restant dû. Ces intérêts étaient de l'ordre de 19 € par mois de juillet 2007 à janvier 2009 puis ensuite entre 35/ 38 € environ.
Le principal est de 2. 753, 36 € au 25. 11. 2009 dont il convient de déduire les acomptes pour un total de 1. 028, 47 € (vu décompte BNP 22/ 06/ 2010 mentionnant 4 acomptes) soit un solde de 1. 724, 89 €.
Il sera donc prononcé, vu l'article L 311-33 ancien du code de la consommation, une condamnation de l'emprunteur à payer cette somme et une condamnation de la banque à restituer les intérêts perçus selon les précisions au dispositif.
Pour les deux autres crédits, les créances sont justifiées par les contrats de prêt, les tableaux d'amortissement et les décomptes.
En ce qui concerne un manquement au devoir de mise en garde, les actes de prêts comprennent chacun une fiche de renseignement sur la situation de l'emprunteur (intitulée informations client recueillies pour étudier la demande de crédit).
Cette fiche comporte, comme sur les autres pages où il n'y a pas la signature elle-même, un paraphe'BN', devant correspondre à Y... Nathalie, avec un no de demande correspondant au prêt. Cela permet de considérer que ces fiches se rapportent bien aux prêts litigieux et ont été visées par Mme Y....
Dans la fiche pour le premier prêt, il est mentionné essentiellement : marié, pas d'enfants à charge, propriétaire, aide à domicile (avec nom employeur) revenus 18. 720 € (soit 1560 €/ mois) charges incluant celles liées au crédit demandé : 6006 € (500 €/ mois).
Sur la base de ces éléments déclarés par l'emprunteur, il n'y avait pas de risque d'endettement excessif et donc matière à mise en garde (les mensualités du prêt représentaient en elles même 16 % du revenu, les charges avec donc ces mensualités : 32 %).
La fiche du second prêt mentionne les mêmes données sauf : trois enfants à charge, charges dont celles liées au crédit demandé : 6. 433 € (536 €).
S'il y a certes une anomalie d'une fiche à l'autre par rapport aux enfants, le taux des charges (non détaillées) par rapport aux ressources restait admissible (34 %). Les mensualités des deux prêts (total 383 €) représentaient 24, 55 % de 1. 560 € (les prélèvements pour la réserve Aurore courant 2007 étaient de 60 €).
Par ailleurs, s'il apparaît selon une fiche interne, qu'il a été pris en considération les allocations familiales (5. 520 € et 13. 200 € revenus professionnels = 18. 720 €), il s'agit bien de revenus, elles peuvent être prises en considération dans l'analyse du budget, d'autant qu'il est pris en compte les charges, dont les charges d'enfant. Ces données (nature emploi, revenus professionnels, prestations sociales) ne manifestaient pas en elles mêmes d'anomalies.
Il s'avère que les revenus de Mme Y... n'étaient pas ceux déclarés, mais ce qui est imputable à celle-ci.
Il est certes discutable qu'une banque dispense des crédits sans demander de justificatifs mais en l'occurrence, si selon l'avis IRPP 2007, le revenu de Mme Y... n'était que de 2. 122 €, il convient d'observer que son mari avait des salaires (ou assimilés) pour 22. 515 € (soit 1. 876 €/ mois et 24. 637 € au total pour le couple, soit 2. 053 €, couple sous le régime de la communauté légale). Il peut être observé aussi même si cela concerne un période postérieure que selon l'avis d'IRPP 2008 les revenus du mari étaient de 21. 851 € et ceux du conjoint : 11. 407 €.
Par ailleurs, il convient de rappeler que Mme Y... était propriétaire, elle avait donc un bien immobilier, même s'il n'y a pas d'élément sur sa consistance et valeur, il s'agit en soi d'un élément d'actif et de solvabilité.
Dans ce contexte, l'état du compte qui était débiteur mais de moins de 1. 000 € n'est guère significatif. Et, il peut être observé que les prêts ont été payés jusque dans le courant 2009.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments (notamment donc déclarations erronées, situation du couple) la nécessité d'une mise en garde n'apparaît pas caractérisée en l'espèce.
Le jugement sera donc réformé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Réforme le jugement en sa première disposition,
Statuant à nouveau de ce chef :
Condamne Mme Nathalie Y... à payer à la SA BNP PARIBAS, au titre du crédit en compte no ... (contrat du 17/ 05/ 2005), la somme de 1. 724, 89 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 décembre 2009,
Condamne la SA BNP PARIBAS à restituer à Mme Y... les intérêts perçus sur ce compte à compter du 25/ 07/ 2007, avec intérêts au taux légal à compter du jour de leur perception pour chacun d'eux,
Ordonne la compensation entre les deux créances.
Confirme le jugement en sa disposition relative aux deux sommes allouées au titre des prêts des 16/ 11/ 2007 et 2/ 01/ 2008,
Reforme le jugement pour le surplus,
Rejette la demande de dommages intérêts de Mme Y...,
Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Y... aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER, Pascale SEGUELA, Didier BALUZE.