COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 FEVRIER 2013 ARRET N.
RG N : 11/ 00906
AFFAIRE :
SARL RESIDENCE GUYNEMER, Nadine X...ès-qualités de mandataire liquidateur SARL RESIDENCE GUYNEMER C/ SNC EIFFAGE CONSTRUCTION LIMOUSIN
JPC-iB Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix
Grosse délivrée à la SELARL DAURIAC-COUDAMY, CIBOT, avocats
Le vingt six Février deux mille treize la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par la mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
SARL RESIDENCE GUYNEMER dont le siège social est 39 rue des granges galand-37550 SAINT AVERTIN représentée par Me Jean-Pierre GARNERIE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Antoine GENTY, avocat au barreau de PARIS
Maître Nadine X...ès-qualités de mandataire liquidateur SARL RESIDENCE GUYNEMER de nationalité Française Profession : Mandataire judiciaire, demeurant ...représentée par Me Jean-Pierre GARNERIE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Antoine GENTY, avocat au barreau de PARIS
APPELANTS d'un jugement rendu le 09 MARS 2011 et d'un jugement rectificatif rendu le 29 juin 2011 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES
ET :
SNC EIFFAGE CONSTRUCTION LIMOUSIN, dont le siège social est 50-80 rue Pierre et Marie Curie, Les Hauts de Bel Air-87000- LIMOGES, venant aux droits de la SAS GRANDS TRAVAUX DU LIMOUSIN " G. T. L. " Représentée par la SELARL DAURIAC-COUDAMY-CIBOT SELARL, avocats au barreau de LIMOGES, Me Nathalie PREGUIMBEAU, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
L'affaire a été fixée à l'audience du 16 Octobre 2012, après ordonnance de clôture rendue le 5 septembre 2012.
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle, Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseiller a été entendu en son rapport, Maître GARNERIE et PREGUIMBEAU, avocats, ont déposé leur dossier et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure
Après quoi, Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 13 Décembre 2012 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi. A cette date, le délibéré a été prorogé au 26 Février 2013.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Didier BALUZE, Conseiller faisant fonction de Président, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller et de Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
LA COUR
EXPOSE DU LITIGE :
Dans le cadre de la construction d'un ensemble immobilier, situé impasse H Becquerel – rue F. Villon – Rue du Clos Londeix à Limoges, comprenant un immeuble de 14 logements et 9 maison individuelles, la SARL Résidence Guynemer a confié à la SAS G. T. L. Grands Travaux du Limousin (la société GTL) la réalisation des travaux du lot no 02 – gros œ uvres-pour un montant de 800 000 € HT soit 956 800 € TTC, selon un acte d'engagement en date du 27 avril 2006 et un marché régularisé le 03 mai 2006.
Ce marché a fait l'objet d'un avenant en date du 24 juillet 2007 aux termes duquel le montant des travaux a été porté à 824 823, 13 € HT, soit 986 488. 46 € TTC.
Des travaux supplémentaires ont donné lieu à un devis no 07 10 03 du 24 octobre 2007 pour un montant de 7. 537, 50 € HT.
Le procès-verbal de réception des travaux a été dressé le 25 juin 2008 par le maître de l'ouvrage, hors la présence de la société GTL qui l'a approuvé le 8 septembre suivant.
Un litige est apparu lors de l'établissement des comptes entre les parties, la SARL Résidence Guynemer s'estimant créancière de diverses sommes dues au titre des pénalités de retard et des malfaçons.
Par acte d'huissier en date du 8 décembre 2009, la société GTL a fait assigner son cocontractant devant le tribunal de commerce de Limoges en vue d'obtenir le paiement de la somme de 60 135, 33 € TTC dont 9 301, 83 € dus au titre des intérêts moratoires ainsi qu'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement en date du 9 mars 2011, rectifié le 29 juin 2011, le tribunal de commerce a :- pris acte de ce que la société GTL reconnaît devoir la somme de 272, 20 € à la SARL Résidence Guynemer au titre des pénalités pour absence aux réunions de chantier ;
- condamné la SARL Résidence Guynemer à verser à la société GTL la somme de 30 827, 10 € ;
- pris acte de ce que la SARL Résidence Guynemer accepte de restituer la somme de 1 484, 42 € à la société GTL au titre de la retenue de garantie ;
- condamné la SARL Résidence Guynemer aux entiers dépens et à verser à la société GTL la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La SARL Résidence Guynemer qui a régulièrement interjeté appel de cette décision, a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Tours en date du 6 mars 2012. Maître Nadine X... a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Par conclusions signifiées le 30 mai 2012, cette dernière demande à la cour de :
- lui donner acte de ce qu'elle intervient à la présente procédure en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Résidence Guynemer ;
- infirmer le jugement dont appel ;
- condamner la société GTL à régler à la SARL Résidence Guynemer la somme de 25 223, 63 € outre les intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2009 ;
- subsidiairement, ordonner une expertise afin de vérifier la conformité du coulage des planchers aux règles de l'art ainsi que la conformité de la largeur du pavillon no 7 au plan contractuel ;
En toute hypothèse,
- déclarer la société GTL irrecevable et mal fondée à son appel incident et l'en débouter ;
- condamner cette dernière aux entiers dépens et à payer à la SARL Résidence Guynemer la somme de 7 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- accorder le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile à son conseil
Par conclusions signifiées le 20 juin 2012, la société Eiffage, venant aux droits de la société GTL, demande à la cour de :- dire et juger irrecevable la demande de Me X..., ès qualités de liquidateur de la SARL Résidence Guynemer, d'indemnisation du préjudice résultant de la vente du pavillon no7 présentée pour la première fois devant la Cour ;
- confirmer la décision entreprise sauf en ce qu'elle a jugé fondée la retenue opérée au titre des pénalités de retard ;
- en conséquence, fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Résidence Guynemer, à la somme de 54 317. 92 € TTC ;
A titre subsidiaire,
- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Résidence Guynemer, à la somme de 32 311. 52 € TTC ;
En toute hypothèse,
- débouter Me X..., ès qualités, de l'ensemble de ses demandes ;
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SARL Résidence Guynemer, à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens et fixer la créance au passif à ce montant ;
- condamner Me X..., ès qualités, à lui verser la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;
- condamner Me X..., ès qualités, aux entiers dépens de l'appel ;
- dire et juger que les indemnités au titre de l'article 700 et les dépens devant la Cour seront pris en frais privilégiés de justice, et accorder à Me A...le bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières conclusions.
La clôture de la procédure devant le conseiller de la mise en état a été ordonnée le 05 septembre 2012.
SUR CE,
Sur la recevabilité de la demande relative à l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de conformité du pavillon no 7 :
En cause d'appel, la SARL Résidence Guynemer a modifié le montant de l'indemnisation sollicitée en première instance au titre du préjudice qu'elle aurait subi à la suite d'un défaut de conformité de la largeur du pavillon no7, en précisant la nature de ce préjudice (une moins-value subie lors de la vente du pavillon) ce qu'elle n'avait pas fait dans ses écritures soutenues devant les premiers juges, dans lesquels elle s'était contentée d'invoquer un préjudice.
Cette demande qui tend aux mêmes fins que celle présentée en première instance ne constitue pas une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du Code de procédure civile. Elle sera donc déclarée recevable.
Sur les retenues opérées par le maître de l'ouvrage au titre des malfaçons :
La SARL Résidence Guynemer a procédé à la réception des travaux le 25 juin 2008, hors la présence du constructeur, ce dernier ayant ensuite approuvé le procès-verbal de réception des travaux le 8 septembre 2008. La réception des travaux a donc été réalisée de manière contradictoire.
Il est mentionné dans ce procès-verbal au titre des réserves : " pavillon no 3 :- cuisine : fissures au niveau de l'escalier montant du RDJ au RDC à reprendre-fournir les dossiers de recollement en trois exemplaires. "
Il apparaît ainsi que les désordres allégués dans le cadre de la présente procédure, à savoir un défaut de conformité de la largeur du pavillon no7 et une non-conformité du coulage des planchers n'ont pas été mentionnés dans le procès-verbal de réception alors même que le maître de l'ouvrage avait parfaitement connaissance de l'existence de ces deux désordres au jour de la réception des travaux comme en attestent les échanges de courriers entre le constructeur et l'architecte (courrier du 9 août 2007 du constructeur adressé à l'architecte), d'une part, et entre le maître de l'ouvrage et l'architecte (lettre du 3 août 2007 de l'architecte adressé au maître de l'ouvrage), d'autre part.
Ces désordres apparents sont donc couverts par l'absence de réserve émise au moment de la réception des travaux et, dans ces conditions, la SARL Résidence Guynemer n'est pas fondée à solliciter une indemnisation à ce titre. La décision des premiers juges sera donc confirmée de ce chef.
Sur l'application des pénalités de retard :
Il résulte du contrat et de ses annexes liant le maître de l'ouvrage et la société GTL que les travaux du lot " gros oeuvre " devait débuter le 1er juin 2006 et s'achever le 7 décembre 2006.
Dans les faits, les travaux ont été achevés le 6 février 2007 avec 61 jours de retard par rapport à la date initialement prévue.
La SARL Résidence Guynemer sollicite l'application des pénalités de retard prévues au contrat, à hauteur de 23 jours, en se fondant sur le décompte établi par son architecte et en reconnaissant par ailleurs que le retard correspondant à la période comprise entre le 7 décembre 2006 et le 15 janvier 2007 n'est pas imputable à société GTL.
Il apparaît dans le décompte de l'architecte, explicité dans un courrier du 23 juillet 2007, que celui-ci accepte tout d'abord un report de la date d'achèvement des travaux au 3 janvier 2007 en prenant en compte un report de 27 jours de la date de début des travaux. Ensuite, il retient un retard de 44 jours à compter du 3 janvier 2007, ce qui correspond à un achèvement des travaux à la date du 16 février 2007 mais qui est manifestement erronée puisqu'il est admis que les travaux se sont achevés en réalité le 06 février 2007. Le retard est donc de 34 jours desquels il convient de déduire, à l'instar de l'architecte, 21 jours liés à des modifications de prestations non imputables à la société GTL, ce qui n'est pas contesté.
Au final, cette dernière demeure responsable de 13 jours de retard pour lesquels elle ne justifie d'aucune cause d'exonération, qu'il s'agisse d'une cause contractuelle (les intempéries) ou d'un événement présentant les caractéristiques de la force majeure, étant précisé, s'agissant du retard pris dans le démarrage des travaux que les parties se sont abstenues d'en indiquer l'origine.
En conséquence, la société GTL est redevable de la somme de 12 438, 40 € TTC au titre des pénalités de retard (13 x 800 € = 10 040 € HT). La décision des premiers juges sera réformée sur ce point.
Enfin, la pénalité pour absence aux réunions de chantier (272, 70 €) ne fait pas l'objet de contestation de la part du constructeur.
Sur le compte entre les parties :
Au vu des éléments ci-dessus et des données non contestées, le compte entre les parties s'établit comme suit :
Le montant total des travaux exécutés (TTC) 995 503, 31 € Acomptes à déduire (TTC)-942 397, 11 € Solde des travaux : 53 106, 20 € Pénalités pour absence de réunion de chantier-272, 70 € Pénalités de retard (TTC)-12 438, 40 € Total (TTC) : 40 395, 10 € La créance de la société GTL au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Résidence Guynemer sera donc fixée à la somme de 40 395, 10 € TTC, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de déduire la retenue de garantie compte tenu du mode de calcul opéré ci-dessus, réalisé à partir de la différence entre le montant total des travaux exécutés et les acomptes perçus par le constructeur.
Sur les autres demandes :
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre de la SARL Résidence Guynemer placée en liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Déclare recevable la demande l'indemnisation formée par la SARL Résidence Guynemer au titre du préjudice résultant d'un défaut de conformité du pavillon no7 ;
Confirme le jugement dont appel sauf en ses dispositions ayant condamné la SARL Résidence Guynemer à verser à la société GTL la somme de 30 827, 10 € ;
Statuant à nouveau,
Juge que la société Eiffage, venant aux droits de la société GTL, est redevable de la somme de 12 438, 40 € TTC au titre des pénalités de retard ;
En conséquence, fixe la créance de la société Eiffage, venant aux droits de la société GTL, au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Résidence Guynemer à la somme de 40 395, 10 € TTC ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Maître X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de la SARL Résidence Guynemer aux entiers dépens la procédure d'appel qui seront pris en frais privilégiés de ladite procédure de liquidation judiciaire ;
Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile au conseil de la société Eiffage, venant aux droits de la société GTL ;
LE GREFFIER LE CONSEILLER, Marie-Christine MANAUD. Jean-Pierre COLOMER.
En l'empêchement légitime du Président, cet arrêt est signé par Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller qui a participé au délibéré.