COUR D'APPEL DE LIMOGESCHAMBRE CIVILE ---==oOo==---ARRET DU 26 MARS 2015---===oOo===---
ARRET N .
RG N : 14/00016
AFFAIRE :
Association SHAMBHALA
C/
M. DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES
Le VINGT SIX MARS DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Association SHAMBHALA, dont le siège est au Mas Marvent - 87700 SAINT YRIEIX SOUS AIXE FRANCE
représentée par la SELARL DELSOL AVOCATS, avocat au barreau de LYON, Me Marie-odile CHARTIER, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d'un jugement rendu le 21 NOVEMBRE 2013 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
LA DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUESdont le siège est 31 rue montmailler - 87043 limoges
représentée par Me Catherine DUPUY, avocat au barreau de LIMOGES
INTIME
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Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 12 Février 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 12 Mars 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 novembre 2014.
A l'audience de plaidoirie du 12 Février 2015, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et de Monsieur François PERNOT, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur Gérard SOURY, conseiller a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 26 Mars 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
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FAITS et PROCÉDURE
L'association Shambhala, qui est régie par la loi du 1er juillet 1901 et qui a pour objet de promouvoir et pratiquer les enseignements et les arts Shambhala, gère un centre d'étude et de pratique situé au Mas Marvent à Saint Yrieix sous Aixe (87)
Cette association a fait l'objet d'une vérification de comptabilité et la direction générale des finances publiques lui a adressé des mises en demeure datées du 29 juillet 2011 de déclarer des dons manuels provenant de ses membres.
Le 7 septembre 2011, en l'absence de dépôt des déclarations, l'administration fiscale a adressé à l'association une proposition de rectification des droits d'enregistrement pour les années 2005 à 2010, les périodes correspondantes faisant l'objet d'une taxation d'office.
Le 13 mars 2012, l'association a adressé une réclamation contentieuse à l'administration fiscale qui l'a rejetée le 7 septembre 2012, des délais de paiement lui ayant été cependant accordés.
Par acte du 31 octobre 2012, l'association a saisi le tribunal de grande instance de Limoges pour contester le redressement fiscal et les pénalités afférentes en soutenant que les dons manuels qui lui ont été consentis sont exonérés de toute taxation au titre des droits d'enregistrement en application de l'article 757 du code général des impôts.
Par jugement du 21 novembre 2013, le tribunal de grande instance a notamment:-constaté que l'administration fiscale renonçait à la taxation d'office au titre des années 2005, 2006, 2007 et 2010;-débouté l'association de ses demandes.
L'association a relevé appel de ce jugement.
Par ordonnance du 11 mars 2014, le premier président de la cour d'appel a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 21 novembre 2013.
MOYENS et PRÉTENTIONS
L'association demande à être exonérée de toute taxation au titre des droits d'enregistrements en application de l'article 757 du code général des impôts. Elle conclut à la nullité de la procédure suivie par l'administration fiscale et soutient qu'elle poursuit un but d'intérêt général. Subsidiairement, elle fait valoir que la révélation d'un don manuel entraînant la taxation ne peut provenir que d'un choix volontaire du contribuable et non d'un contrôle fiscal. Très subsidiairement, elle demande la diminution de la taxation en excluant certains dons de son assiette de calcul.
L'administration fiscale conclut à la confirmation du jugement.
MOTIFS
Attendu que le litige ne concerne plus que la taxation d'office de l'association au titre des années 2008 et 2009, l'administration fiscale ayant renoncé à la taxation d'office au titre des années 2005, 2006, 2007 et 2010.
Sur la régularité de la procédure.
1) Le défaut de saisine de la commission départementale de conciliation.
Attendu que l'association se prévaut des articles L59 et L59 B du livre des procédures fiscales pour soutenir que l'administration avait l'obligation de donner une suite favorable à sa demande, exprimée par courrier du 29 février 2012, de saisine de la commission départementale de conciliation; que l'administration n'ayant pas saisi cette commission, la procédure est, selon l'association, entachée d'une irrégularité substantielle.
Mais attendu que la procédure d'imposition n'est pas irrégulière lorsque l'administration fiscale n'a pas donné suite à la demande du contribuable de saisir la commission départementale de conciliation, incompétente lorsque l'administration a procédé, comme en l'espèce, par voie de taxation d'office.
2) L'erreur de l'administration sur les modalités de contestation du rejet de la réclamation de l'association.
Attendu que la réclamation contentieuse de l'association a été rejetée par l'administration fiscale par courrier du 7 septembre 2012 qui précise que ce rejet peut être contesté devant le juge saisi par demande sur papier libre datée et signée adressée au tribunal de grande instance de Limoges, alors qu'en réalité cette saisine ne peut être faite que par voie d'assignation; que cette erreur est reconnue par l'administration fiscale.
Mais attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour d'appel adopte que les premiers juges ont constaté que cette erreur n'avait causé aucun grief à l'association, qui a régulièrement saisi le tribunal de grande instance par voie d'assignation, et retenu que la nullité de la procédure fiscale n'était pas encourue de ce chef.
Sur l'exonération fiscale des dons manuels consentis à l'association.
1) L'exonération bénéficiant aux organismes d'intérêt général.
Attendu que l'association se prévaut du dernier alinéa de l'article 757 du code général des impôts qui exclut de l'assujettissement aux droits de mutation les dons manuels consentis aux organismes d'intérêt général mentionnés à l'article 200 du même code; que l'association estime entrer dans la catégorie des organismes d'intérêt général que ce dernier texte définit comme étant ceux ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement nature ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.
Mais attendu que l'association diffuse la pratique de la méditation selon les préceptes de deux maîtres de méditation tibétains; que cette démarche spirituelle individuelle ne concoure ni à la création, ni à la diffusion, ni à la protection des oeuvres de l'art et de l'esprit mais tend uniquement à favoriser une pratique personnelle; que la transmission des savoirs invoquée par l'association se situe elle-même dans la cadre de cette démarche spirituelle individuelle; que c'est à juste titre, et par des motifs pertinents que la cour d'appel adopte, que les premiers juges ont retenu que l'association ne constitue pas un organisme d'intérêt général au sens de l'article 200 du code général des impôts et qu'elle ne peut donc prétendre être exonérée des droits de mutation sur les dons manuels qu'elle perçoit de ses membres.
2) L'application de l'article 757 du code général des impôts aux personnes morales et la notion de révélation de dons manuels.
Attendu que c'est par une exacte application de l'article 757 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-709 du 1er août 2003, que le tribunal de grande instance a décidé que les associations étaient soumises à l'obligation de déclaration des dons manuels révélés à l'administration fiscale et se trouvaient assujetties à l'imposition de ces dons, sauf à relever de la catégorie des organismes d'intérêt général visés à l'article 200 du même code, ce qui n'est pas le cas de l'association en cause pour les motifs précités.
Et attendu que l'association considère qu'elle n'a révélé aucun don spontanément puisqu'elle a été contrainte de le faire pour répondre à l'injonction de l'administration fiscale dans le cadre de la procédure de contrôle.
Mais attendu que les opérations de contrôle diligentées par l'administration fiscale du 31 mars au 7 juillet 2011 ont révélé que l'association avait perçu d'importantes sommes en provenance de personnes physiques ou morales étrangères; que, par courrier du 16 mai 2011, l'administration fiscale a interrogé l'association sur la nature de certaines sommes perçues en 2008 et 2009; que l'association a répondu, par courrier du 16 juin 2011, que ces sommes n'étaient ni des prêts, ni des subventions, ni des rémunérations, mais des dons versés par ses membres de manière désintéressée; que cette réponse de l'association n'est pas intervenue sous la contrainte mais a été faite spontanément; qu'en vertu des alinéas 1 et 2 de l'article 757 du code général des impôts, pour être imposable, le don manuel doit être révélé à l'administration fiscale par le bénéficiaire de la mutation:-soit spontanément,-soit en réponse à une demande de l'administration fiscale,-soit au cours d'une procédure de contrôle ou d'une procédure contentieuse;qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que l'administration fiscale a décidé que les dons manuels révélés par l'association en réponse à sa demande de renseignements étaient imposables et qu'elle a mis en demeure cette dernière de les déclarer.
Sur la taxation d'office et les pénalités.
Attendu qu'en l'absence de dépôt de la déclaration de don manuel dans les trente jours de la réception de la mise en demeure, le 1er août 2011, l'administration fiscale était fondée, conformément à l'article 757 du code général des impôts, à procéder à la taxation d'office des dons perçus par l'association au cours des années 2008 et 2009 selon la procédure prévue à l'article L.66, 4o, du livre des procédures fiscales et à appliquer la pénalité prévue à l'article 1728,1, du code général des impôts.
Sur les dons en provenance du centre de Cologne.
Attendu que l'association demande que ces dons consentis par le centre allemand en vue de la réalisation de travaux doivent être retirés de l'assiette de taxation.
Mais attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour d'appel adopte que le tribunal de grande instance a rejeté ce chef de demande.
Qu'il s'ensuit que le jugement sera confirmé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Attendu que l'équité ne justifie pas l'application de ce texte.
PAR CES MOTIFS
La cour d'appel, statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi,CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Limoges le 21 novembre 2013;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE l'association Shambhala aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.