COUR D'APPEL DE LYON
6ème CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2002
Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance VILLEURBANNE du 07 décembre 2000 (R.G. : 200000421) N° R.G. Cour : 01/00936
Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en paiement des loyers et des charges et/ou tendant à faire prononcer ou constater la résiliation pour défaut de paiement ou défaut d'assurance et ordonner l'expulsion Sans procédure particulière APPELANTES : Madame Danièle X... MIGAIRE Y... : 26 rue Racine 69100 VILLEURBANNE représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués assistée de Maître NOVEL, Avocat, (TOQUE 531)
Madame Rachelle IS Y... : 26 rue Racine 69100 VILLEURBANNE représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués assistée de Maître NOVEL, Avocat, (TOQUE 531) INTIMEE : Madame Agnès Z... Y... : 6 rue Racine 69100 VILLEURBANNE représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué assistée par Maître NICOLAS, Avocat, (TOQUE 472) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2001/008054 du 14/06/2001 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
Instruction clôturée le 21 Mai 2002 Audience de plaidoiries du 28 Mai 2002
LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des
débats et du délibéré de :
. Monsieur VEBER, Président
. Madame DUMAS, Conseiller
. Monsieur SORNAY, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame A..., Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant prononcé à l'audience publique du 11 SEPTEMBRE 2002, par Monsieur VEBER, Président, qui a signé la minute avec Madame A..., Greffier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon un acte sous seing privé en date du 20 octobre 1987, Madame Suzanne X... a consenti à Monsieur Jean B... un bail d'habitation portant sur un appartement sis 6, rue Racine à VILLEURBANNE pour lequel Madame Agnès Z... s'est portée caution solidaire.
Des loyers ont cessé d'être réglés en 1994 et par acte du 14 avril
1999, Mesdames Danièle NAVET-MIGAIRE et Rachelle IS, venant aux droits de Madame X..., ont fait délivrer à Monsieur B... un commandement de payer pour la somme de 118.669,84 F représentant les arriérés de loyers et de charges.
Par ordonnance de référé du 17 juin 1999, Monsieur B... a été condamné à payer à Mesdames IS et X...- MIGAIRE à titre de provision la somme de 126.685,83 F représentant le montant des loyers et des charges arrêtés au 31 mai 1997, décision confirmée par arrêt de la Cour d'Appel de LYON du 24 octobre 2000.
Par arrêt du 20 février 2001, la Cour d'Appel de LYON a confirmé l'ordonnance de référé du 14 octobre 1999 qui a constaté la résiliation de plein droit du bail et ordonné l'expulsion.
Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE ont mis en demeure le 21 juillet 1999 Madame Z... de régler la somme de 126.685,33 F en sa qualité de caution solidaire. Cette lettre étant restée sans effet, par acte du 3 février 2000, elles ont fait assigner Madame Z... devant le Tribunal d'Instance de VILLEURBANNE aux fins d'obtenir paiement de la somme en principal de 136.787,83 F représentant le solde de loyers et charges dû au 30 septembre 1999 ainsi qu'une indemnité d'occupation.
Par jugement du 7 décembre 2000, le Tribunal d'Instance a :
- rejeté l'exception de nullité de la citation ;
- prononcé la nullité de l'engagement de caution de Madame Z... dans le contrat de bail du 20 octobre 1987 ;
- débouté Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE de toutes leurs demandes.
Appelantes de cette décision, Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE soutiennent à l'appui de leur demande de réformation que l'acte de cautionnement, irrégulier au regard de l'article 1326 du Code Civil, n'est pas nul mais constitue un commencement de preuve par écrit qui peut être complété par tout moyen de preuve. Elle font ainsi valoir que Madame Z..., qui est la compagne de Monsieur B... et a été destinataire de nombreux courriers de leur part, n'a jamais contesté son engagement de caution. Elles estiment qu'au regard de ces éléments extrinsèques, Madame Z... avait pleinement conscience de l'étendue de son engagement de caution. Elles demandent sa condamnation à leur payer la somme de 20.854,69 Euros en principal outre intérêts ainsi que la somme de 1.600 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Madame Z... réplique que selon la jurisprudence relative aux articles 1326 et 2015 du Code Civil, l'acte juridique constatant un cautionnement illimité doit porter écrite de la main de la caution une mention expriment de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée. Elle estime que la seule mention "lu et approuvé" est insuffisante à caractériser un engagement précis et non équivoque, que sa qualité de compagne n'est pas comparable à la situation de caution d'associés et que la solidarité de l'article 220 du Code
Civil applicable entre époux ne l'est pas en cas de concubinage. Elle précise également qu'elle n'a jamais fait l'objet d'un commandement faisant référence à sa qualité de caution. Elle conclut à la confirmation du jugement déféré et sollicite une somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 1326 et 2015 du Code Civil que l'acte juridique constatant un cautionnement illimité doit porter, écrite de la main de la caution, une mention exprimant sous une forme quelconque mais de façon explicite et non équivoque, la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée ;
Attendu, en l'espèce, que Madame Z... s'est portée caution solidaire des engagements locatifs de Monsieur B... par acte sous seing privé du 20 octobre 1987; que la case caution est suivie d'une mention manuscrite "lu et approuvé" au-dessus de la signature de Madame Z... ;
Que cette mention incomplète au regard des dispositions de l'article 1326 du Code Civil vaut cependant commencement de preuve par écrit ; Attendu que Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE font état de la qualité de Madame Z..., concubine du preneur, pour soutenir que de cet élément extrinsèque vient compléter le commencement de preuve ;
Attendu, cependant, que le seul fait que la caution soit la compagne du preneur n'établit pas que celle-ci est au fait de tous les engagements pris par ce dernier et qu'elle a en conséquence connaissance de l'étendue de son engagement ;
Que notamment le fait que l'écriture de la mention "lu et approuvé" soit différente de celle utilisée pour remplir le cadre "caution solidaire" laisse penser qu'il ne peut y avoir aucune présomption sérieuse de connaissance de l'étendue de son engagement par Madame
Z... ;
Que les appelantes ne fournissent, par ailleurs, aucun élément postérieur à l'acte du 20 octobre 1987 par lequel Madame Z... aurait pu confirmer l'engagement pris ; qu'il ressort en outre des différentes pièces de procédure produites par celles-ci que Madame Z... n'a jamais été recherchée en sa qualité de caution avant la présente instance ;
Attendu qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré qui a constaté que Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE ne démontraient pas que le commencement de preuve pouvait être confirmé par d'autres éléments de conviction et les a dès lors déboutées de leurs demandes ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que Mesdames IS et X...- MIGAIRE qui succombent supportent les dépens ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Rejette toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
Condamne Mesdames IS et NAVET-MIGAIRE aux dépens d'appel et autorise Maître DE FOURCROY, Avoué, à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT