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28/11/2002 | FRANCE | N°2001/04921

France | France, Cour d'appel de Lyon, 28 novembre 2002, 2001/04921


1 RG : 2001/4921 La première chambre de la cour d'appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de : Monsieur JACQUET, président, Madame BIOT, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame KROLAK, greffier, a rendu l'arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE:

Les époux X... sont propriétaires, à la Boisse, d'une parcelle de terrain acquise en 1963 et sur laquelle ils ont fait construire une maison en 1964. Courant 1998, la société Semcoda a acquis la parcelle contiguù et a fait édifier un immeuble à

usage d'habitation composé de huit logements collectifs et de 16 logem...

1 RG : 2001/4921 La première chambre de la cour d'appel de Lyon, composée, lors des débats et du délibéré, de : Monsieur JACQUET, président, Madame BIOT, conseiller, Monsieur GOURD, conseiller, en présence, lors des débats en audience publique, de Madame KROLAK, greffier, a rendu l'arrêt contradictoire suivant, EXPOSE DU LITIGE:

Les époux X... sont propriétaires, à la Boisse, d'une parcelle de terrain acquise en 1963 et sur laquelle ils ont fait construire une maison en 1964. Courant 1998, la société Semcoda a acquis la parcelle contiguù et a fait édifier un immeuble à usage d'habitation composé de huit logements collectifs et de 16 logements individuels. Se plaignant du trouble anormal de voisinage résultant de ces constructions, les époux X... ont fait assigner, le 15 juin 1999, devant le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse, la société Semcoda en paiement de 200.000 francs de dommages et intérêts outre 15.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société Semcoda s'est opposée à ces demandes. Par jugement du 22 janvier 2001, le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a débouté les époux X... de l'ensemble de leurs prétentions.

* Ils ont relevé appel de cette décision.

Les époux X... demandent de réformer le jugement entrepris, de

condamner la société Semcoda à leur payer 30.489 euros 80 de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice, 4.573 euros 47 pour résistance abusive et 2.286 euros 74 en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Subsidiairement, ils sollicitent l'organisation d'une expertise aux fins d'évaluer leur préjudice résultant du trouble de voisinage. Ils font valoir que leur pavillon est situé dans un quartier extrêmement calme, résidentiel et campagnard, constitué exclusivement de maisons individuelles. Ils précisent que l'immeuble édifié à proximité de leur propriété leur fait perdre la vue dont ils bénéficiaient sur le prieuré de la Boisse datant du 11ème siècle, que leur pavillon est privé d'ensoleillement et que les balcons de l'immeuble litigieux ont une vue directe et plongeante sur leur jardin portant atteinte à leur intimité et les empêchant d'utiliser normalement ce jardin. Ils ajoutent que la société Semcoda n'a pas respecté le plan d'occupation des sols et les règles d'urbanisme afférentes à la commune de la Boisse, qu'elle a édifié son immeuble à moins de trois mètres de la limite parcellaire et a surélevé son immeuble par un remblaiement d'environ 1 mètre 50. * L'intimée demande de confirmer le jugement entrepris, de débouter ses adversaires de leurs prétentions et de les condamner à lui payer 1.524 euros 49 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1.524 euros 49 en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle entend préciser que la construction des époux X... est située en zone urbaine au centre du village, dans un

périmètre constitué de plusieurs maisons d'habitation, qu'une voie de chemin de fer passe à 30 mètres et qu'il existe, un peu plus loin, une autoroute. Elle prétend qu'elle a obtenu le permis de construire, que ce dernier n'a pas été contesté, que le certificat de conformité lui a été délivré et que le fait de ne pas respecter les règles d'urbanisme est, du reste, indifférent quant à l'appréciation du trouble anormal de voisinage. Elle estime que les époux X... se trompent quant à l'appréciation de la limite séparative, le mur existant en limite de propriété n'étant pas un mur mitoyen. Elle affirme que la hauteur totale de son immeuble ne dépasse pas sept mètres et que le terrain n'a pas été anormalement surélevé. Elle soutient que la perte de vue invoquée ne constitue pas un trouble anormal de jouissance, que les époux X... ne démontrent pas une perte anormale d'ensoleillement en raison de la préexistence d'un haut mur séparatif de 2 mètres 50 et du paysage arboré de leur propriété. Elle ajoute que la valeur vénale du pavillon des époux X... n'est pas remise en cause et que ces derniers ne démontrent pas l'existence de leur préjudice. MOTIFS DE LA DECISION : Attendu que le litige intervient dans un environnement résidentiel ; que les époux X... se plaignent à la fois d'une perte de vue sur le clocher, d'une réduction de leur ensoleillement et de la gêne occasionnée par la vue directe sur leur propriété, dont bénéficient, de leur balcon, les propriétaires voisins; que la perte de vue sur le clocher du prieuré du village de la Boisse, dès lors que le pavillon des époux X... est implanté en plein village dans une zone résidentielle, n'est pas, en soi, un trouble de voisinage qui présente un caractère anormal ; que les époux X... se plaignent également de la proximité immédiate d'un immeuble construit par la société Semcoda qui nuit à l'ensoleillement de leur propriété et qui les gène anormalement dès lors que le balcon de cet immeuble donne directement sur leur propriété ; que, même si

la propriété des appelants est séparée de leur voisin par un mur et même si leur propriété est arboré, les époux X... établissent que celle-ci a perdu, du fait de la construction voisine, une partie de son ensoleillement et qu'ils se trouvent gênés par la vue plongeante sur leur propriété à partir du balcon de leurs voisins immédiats ; qu'il appartient aux époux X... de démontrer que le trouble qu'ils subissent ainsi est anormal ; que pour étayer leur réclamation à cet égard, ces derniers soutiennent, d'abord, que la construction voisine prévue à 7 mètres de hauteur est en fait plus élevé, car faite sur un remblai de 1mètre 50 ; mais qu'ils ne démontrent pas leurs allégations à cet égard par la seule production d'un constat d'huissier qui n'a pas relevé l'altitude du terrain avant construction ; que les époux X... soutiennent également que l'implantation de la construction voisine s'est faite à moins de trois mètres de leur propre parcelle en violation de l'article R.111-19 alinéa 1 du code de l'urbanisme ; qu'ils produisent à l'appui de leur affirmation, notamment, un document d'un géomètre expert mandaté par leurs soins qui établit que la façade Est de l'immeuble édifié par Semcoda est, à certains endroits, distante de 2 mètres 55 e,t à d'autres, de 1 mètre 86 de leur limite de propriété ; que la société Semcoda soutient que le mur séparatif n'est pas un mur mitoyen et que le géomètre, en prenant ses mesures à partir de la moitié de la largeur du mur a fait un calcul erroné ; mais attendu qu'il résulte du procès verbal de bornage contradictoire en date du 29 juillet 1998, page 3, que ce mur est mitoyen ; qu'il convient d'admettre, dans ces conditions, les mesures prises par Monsieur Henri Y..., qui ne sont pas autrement contestées techniquement et font apparaître que l'immeuble le plus proche a été construit par la société Semcoda à une distance inférieure aux 3 mètres imposés ; que cette circonstance, qui accroît la gène occasionné aux époux X... quant

à la privation d'ensoleillement de leur propriété et à la vue directe sur celle-ci par leurs voisins depuis leur balcon, rend le désordre de voisinage en résultant anormal ; qu'il convient, au vu des éléments d'appréciation produits et sans qu'il soit nécessaire d'organiser une expertise judiciaire, d'indemniser les époux X... de leur trouble anormal de voisinage ainsi caractérisé par l'attribution de 10.000 euros de dommages et intérêts au paiement desquels il y a lieu de condamner la société Semcoda ; qu'il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires, en particulier chacune d'entre elles de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive, non justifiée en l'espèce ;

* attendu que la partie, qui perd son procès, doit en supporter les entiers dépens ; qu'il y a lieu de condamner la société Semcoda à payer 1.200 euros aux époux X..., en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : La cour, Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau : Déclare fondée la demande pour trouble anormal de voisinage formée par les époux X... contre la société Semcoda . En conséquence, Condamne la société Semcoda à payer aux époux X... la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts. Condamne la société Semcoda à payer 1.200 euros aux époux X..., en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Déboute chacune des parties de ses prétentions plus amples ou contraires.

Condamne la société Semcoda aux dépens de première instance et

d'appel. Autorise l'avoué de son adversaire à recouvrer directement contre elle les dépens d'appel dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.

* Cet arrêt a été prononcé publiquement par le président, en présence du greffier, et a été signé par eux. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, Madame KROLAK,

Monsieur JACQUET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 2001/04921
Date de la décision : 28/11/2002

Analyses

PROPRIETE - Droit de propriété - Atteinte - Applications diverses - Troubles anormaux de voisinage - Caractérisation - Cas

Constitue un trouble anormal de voisinage le fait de construire un immeuble en violation des dispositions de l'article R111-19 du Code de l'urbanisme, lequel impose l'implantation d'une construction à plus de trois mètres de la parcelle voisine, pour éviter des pertes d'ensoleillement et des vues directes sur le fonds voisin


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2002-11-28;2001.04921 ?
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