AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE R.G : 01/03709 SOCIETE LYONNAISE DE TRANSPORTS EN COMMUN SLTC C/ RODRIGUEZ X... D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON du 21 Mai 2000 RG : 199902849 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 07 DECEMBRE 2004 APPELANTE :
SOCIETE LYONNAISE DE TRANSPORTS EN COMMUN SLTC représentée par Me BACHELET, avocat au barreau de BORDEAUX INTIME : C... STEPHANE X comparant en personne, assisté de Me Luc A..., avocat au barreau de LYON substitué par Me Z..., avocat au barreau de ROANNE PARTIES CONVOQUEES LE : 12 MAI 2004 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Novembre 2004 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : M. Didier JOLY, Président M. Dominique DEFRASNE, Conseiller Madame Aude LEFEBVRE, Conseiller Assistés pendant les débats de Madame Yolène BRISSY, Greffier. ARRET : CONTRADICTOIRE Prononcé à l'audience publique du 07 Décembre 2004 par M. Didier JOLY, Président, en présence de Madame Yolène BRISSY, Greffier, qui ont signé la minute. *************
LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 22 juin 2001 par la Société lyonnaise de transport en commun d'un jugement rendu le 21 mai 2001 par le Conseil de Prud'hommes de LYON (section commerce) qui a : 1°) dit et jugé que le licenciement de Stéphane X était dépourvu de cause réelle et sérieuse, 2°) condamné la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X : - la somme de 157 407, 00 F (23 996, 54 ) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - la somme de 2 500 F (381, 12 ) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, 3°) débouté Stéphane X du surplus de ses demandes ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 2 novembre 2004 par la Société lyonnaise de
transport en commun qui demande à la Cour de : 1°) réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré abusif le licenciement de Stéphane X et débouter ce dernier de ses demandes de dommages-intérêts à ce titre, 2°) confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Stéphane X de ses demandes relatives : - à l'application du coefficient 270 de la convention collective, - au complément d'heures supplémentaires, - au rappel de salaires concernant les permis C et C1, 3°) débouter Stéphane X de toutes ses demandes, fins et conclusions, 4°) condamner Stéphane X à verser à la Société lyonnaise de transport en commun la somme de 1 500 au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par Stéphane X qui demande à la Cour de : 1°) confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré abusif le licenciement de Stéphane X et condamné en conséquence la Société lyonnaise de transport en commun à verser à Stéphane X la somme de 23 996, 54 à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2°) réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Stéphane X de ses demandes relatives : - à l'application du coefficient 270 de la convention collective, - au complément d'heures supplémentaires, - au rappel de salaires concernant les permis C et C1, 3°) dire et juger que Stéphane X bénéficie du palier 270 depuis le mois de juin 1994 et lui allouer la somme de 14 227, 40 (93 325 F) calculée sur la base du coefficient 270, 4°) condamner la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X : - la somme de 25, 85 (169, 50 F) au titre d'un complément d'heures supplémentaires effectuées dans la nuit du 12 mai 1998, - la somme de 1 051, 90 (6 900 F) correspondant au permis C prévu au contrat de travail signé le 16 avril 1984, - la somme de 1 311, 06 (8 600 F) correspondant au permis C1 prévu au contrat de travail signé le 16 avril 1984, 7°)
condamner la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X la somme de 2 000 au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que Stéphane X a été engagé par la Société lyonnaise de transport en commun en qualité d'électronicien OP1, palier 4, coefficient 170, suivant contrat écrit à durée indéterminée du 16 avril 1984 ; qu'il a été promu technicien d'atelier le 1er novembre 1988 ; qu'il était en dernier lieu technicien T1 (échelon 2, palier 12, coefficient 240) depuis le 1er avril 1990 ; que son contrat de travail était soumis d'une part à la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986, d'autre part à la convention collective locale du personnel de la la Société lyonnaise de transport en commun ;
Que par lettre recommandée du 30 mars 1999, non réclamée par le destinataire, la Société lyonnaise de transport en commun a convoqué Stéphane X le 7 avril en vue d'un entretien préalable à son licenciement ; que cette lettre a été notifiée au salarié par acte d'huissier du 22 avril 1999 ; que par lettre recommandée du 4 mai 1999, l'employeur a notifié à Stéphane X son licenciement pour les motifs suivants :
Vos nombreux arrêts de travail pour maladie sont, compte tenu de leurs fréquences, avec information du service la veille ou le jour même, de la nature de l'emploi que vous occupez et de l'organisation du service auquel vous appartenez, extrêmement préjudiciables à la bonne marche de ce dernier.
Aussi, la prolongation de votre maladie depuis le 19 mai 1998 rend malheureusement impossible le maintien de votre contrat de travail compte tenu de la désorganisation qu'elle occasionne au sein de l'Unité de transports du Métro Ligne A et plus particulièrement au
service maintenance où vous êtes affecté et de l'obligation dans laquelle nous sommes de procéder, corrélativement, à votre remplacement définitif.
Nous vous rappelons, par ailleurs, que le trouble au bon fonctionnement du service généré par votre absence pour longue maladie fait suite à celui résultant de nombreuses absences répétées pour maladie depuis plus de 3 ans qui ne nous permettaient plus de compter sur une collaboration régulière de votre part.
En effet, au cours des trois dernières années, vous avez totalisé 487 journées d'absence pour maladie :
1996
28 journées
1997
113 journées
1998
226 journées
1999
120 journées (au 30 avril 1999)
Que le 6 juillet 1999, Stéphane X a saisi le Conseil de Prud'hommes qui a rendu le jugement entrepris ; Sur la demande de rappel de salaire fondé sur l'application du coefficient 270 :
Attendu que Stéphane X, promu en avril 1990 au coefficient 240 (groupe 3, technicien T1, 2ème échelon, palier 12), sollicite, avec effet rétroactif au mois de juin 1994, le bénéfice du coefficient 270, correspondant à l'emploi de technicien T2, 2ème échelon, palier 14, emploi du groupe 4 dans la classification de l'avenant n°1 à la convention collective locale du personnel de la Société lyonnaise de transports en commun ; qu'il fait valoir au soutien de sa demande qu'il bénéficiait d'un coefficient inférieur à celui des salariés composant son équipe et occupant les mêmes fonctions ; qu'il ressort cependant de la classification conventionnelle susvisée que le critère discriminant des emplois des groupes 3 et 4 n'est pas la nature de la tâche effectuée, mais le caractère plus ou moins précis des instructions données et la latitude plus ou moins grande laissée au salarié dans le choix des moyens pour l'accomplir ; qu'à cet égard, les comptes rendus d'entretiens d'évaluation communiqués par la Société lyonnaise de transport en commun font apparaître de la part de Stéphane X un manque d'implication, une propension à se soustraire aux règles en vigueur et une assiduité insuffisante, ayant conduit l'employeur à un bilan négatif inconciliable avec la marge d'initiative inhérente aux emplois du groupe 4 ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Stéphane X de ce chef de demande ; Sur les motifs du licenciement :
Attendu que si l'article L 122-45 du code du travail, qui fait interdiction de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II de ce même code, ne s'oppose pas à son licenciement motivé, non par l'état de santé du
salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif ;
Qu'en l'espèce, si la Société lyonnaise de transport en commun a engagé Tamine MOUHOUB en qualité de technicien d'intervention pour une durée déterminée du 22 septembre 1998 au 4 janvier 1999, le contrat de travail vise comme motif de recours au contrat à durée déterminée "un accroissement temporaire d'activité découlant des interventions liées à la remise à niveau du tapis de pilotage automatique" ; que Tamine MOUHOUB n'a pas été chargé, comme Stéphane X, d'intervenir dans l'urgence sur les installations fixes des transports en commun, mais seulement d'effectuer des travaux d'entretien courant programmés ; que son contrat de travail a été prolongé pour une nouvelle durée déterminée expirant le 1er mars 1999 ; que l'intéressé a ensuite été engagé en remplacement de Stéphane X par contrat à durée indéterminée du 2 mars 1999 ; que Tamine MOUHOUB présentait donc les qualités requises pour remplacer le salarié absent dans le cadre d'un contrat à durée déterminée conclu sans terme précis en application des articles L 122-1-1 (1°) et L 122-1-2 (III) du code du travail ; qu'en choisissant d'abord de répartir les missions urgentes d'intervention entre les autres membres de l'équipe et en visant comme motif de recours au contrat à durée déterminée de Tamine MOUHOUB l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, la Société lyonnaise de transport en commun s'est privée de la possibilité de pallier dans la durée les perturbations résultant de la prolongation prévisible de l'absence de Stéphane X, déclaré en longue maladie par la Caisse primaire d'assurance maladie dès le 2 octobre 1998 ; que la nécessité alléguée de procéder
finalement au remplacement définitif de ce dernier résulte d'une situation que l'employeur a lui-même créée en s'enfermant dans une impasse dont il a tenté ensuite de sortir au moyen du licenciement litigieux ; que dans ces conditions, le jugement entrepris doit être confirmé sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ; Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Attendu que Stéphane X qui a été licencié sans cause réelle et sérieuse, alors qu'il avait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de dix salariés, est en droit de prétendre, en application de l'article L 122-14-4 du code du travail, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; qu'il ne communique aucune pièce démontrant l'existence d'un préjudice de nature à justifier l'octroi d'une indemnité supérieure au minimum légal défini qui, au vu de l'attestation destinée à l'ASSEDIC, s'élève à la somme de 15 407, 32 (101 065, 39 F) ;
Qu'en outre, en application des dispositions de l'article L 122-14-4 (alinéa 2) du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par la Société lyonnaise de transport en commun à l'ASSEDIC concernée des indemnités de chômage payées à Stéphane X du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ; Sur la demande de complément d'heures supplémentaires (nuit du 12 mai 1998) :
Attendu qu'aux termes de l'article L 212-1-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, le juge forme sa conviction au vu des éléments que l'employeur doit lui fournir pour justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ;
Qu'en l'espèce, la Société lyonnaise de transport en commun a communiqué à Stéphane X un relevé d'heures détaillé correspondant à la journée du 12 mai 1998 ; que le salarié n'oppose à ce décompte aucune critique pertinente, admettant même à l'audience qu'il lui était très difficile de faire la preuve de l'erreur de calcul qu'il impute à la société ; qu'en tout cas, s'agissant plus particulièrement du déplacement pour aller dépanner à la station Bonnevay, celui-ci a été pris en compte pour trente minutes, contrairement à ce que soutient Stéphane X ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera encore confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires ; Sur les permis de conduire C et C1 :
Attendu qu'aux termes du paragraphe II "Formation à la conduite" du contrat de travail de Stéphane X, la Société lyonnaise de transport en commun assurait la formation à la conduite des candidats qui, à l'embauche, ne possédaient pas les permis de conduire C et C1 et prenait à sa charge tous les frais relatifs à la formation de l'intéressé en vue de l'obtention des permis de conduire, sous la seule réserve que l'agent tienne son emploi pendant au moins un an à compter de la délivrance du permis ; que l'engagement de l'employeur n'était subordonné à aucune condition liée à l'affectation du salarié à des tâches impliquant l'obtention des permis de conduire litigieux ; qu'il n'importe que Stéphane X n'ait de son côté jamais sollicité le bénéfice de la clause susvisés, dès lors qu'il n'y a pas expressément renoncé ; que le manquement de l'employeur aux obligations qu'il avait contractée a porté préjudice au salarié en le privant d'une qualification utile dans la perspective d'une recherche d'emploi, après la rupture du contrat de travail qui le liait à la Société lyonnaise de transport en commun ; que ce préjudice sera évalué au coût des deux permis de conduire, soit la somme de 2 362,
96 (15 500 F) ; Sur les frais irrépétibles Sur les frais irrépétibles :
Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser Stéphane X supporter les frais qu'il a dû exposer, tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'une somme de 2 000 lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a : 1°) dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Stéphane X, 2°) débouté Stéphane X de sa demande de rappel de salaire fondée sur l'application du coefficient 270 et de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires,
Le réforme dans ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau :
Condamne la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X la somme de quinze mille quatre cent sept euros et trente-deux centimes (15 407, 32 ) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2001, date du jugement entrepris ;
Ordonne le remboursement par la Société lyonnaise de transport en commun à l'ASSEDIC concernée des indemnités de chômage payées à Stéphane X du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Condamne la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X la somme de deux mille trois cent soixante-deux euros et quatre-vingt-seize centimes (2 362, 96 ) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif au manquement de l'employeur à son obligation contractuelle d'assurer la formation du salarié aux
permis de conduire C et C1, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt ;
Condamne la Société lyonnaise de transport en commun à payer à Stéphane X la somme de deux mille euros (2 000 ) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
La condamne aux entiers dépens, de première instance et d'appel.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT
Y. Y...
D. B...