AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE
R.G : 05/01409
SA TRANS HELICOPTERE SERVICE
C/
X...
APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON
du 14 Février 2005
RG : F 02/03305
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2006
APPELANTE :
SA TRANS HELICOPTERE SERVICE
Aéroport de Lyon Bron
BP 120
69672 BRON CEDEX
représentée par Me Stéphane BOURQUELOT, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Madame Carole X...
...
33740 ARES
représentée par Me Pascale REVEL, avocat au barreau de LYON substitué par Me Murielle Y..., avocat au barreau de LYON
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Septembre 2006
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
M. Didier JOLY, Président
M. Dominique DEFRASNE, Conseiller
Mme Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller
Assistés pendant les débats de Monsieur Julien MIGNOT, Greffier.
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 25 Octobre 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé par M. Didier JOLY, Président, et par Monsieur Julien MIGNOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Statuant sur l'appel formé par la SA TRANS HELICOPTERE SERVICE d'un jugement du Conseil de Prud'hommes de LYON, en date du 14 Février 2005 qui a :
- dit que le licenciement de Madame Carole X... était abusif
- condamné la société TRANS HELICOPTERE SERVICES à payer à Madame Carole Z... :
• 1704,78€ à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire
• 170,47€ à titre des congés payés afférents
• 6974,52€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis
• 697,45€ à titre de congés payés afférents
avec intérêts légaux à compter de la demande
• 15473,57€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
avec intérêts légaux à compter du prononcé de la décision
• 300€ en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
- débouté Madame Carole X... du surplus de sa demande
- condamné la société TRANS HELICOPTERE SERVICE aux dépens
Vu les écritures et les observations orales à la barre, le 6 Septembre 2006, de la société TRANS HELICOPTERE SERVICE SA (THS), appelante qui demande à la Cour :
- de réformer le jugement du Conseil de Prud'hommes
- de dire qu'aucun fait fautif n'est imputable à l'employeur et qu'en conséquence la rupture du contrat de travail de Madame X... peut avoir les effets d'une démission
- de débouter Madame X... de l'intégralité de ses prétentions
- de la condamner au paiement de la somme de 1000€ en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens
Vu les écritures et les observations orales à la barre, le 6 Septembre 2006, de Madame Carole X..., intimée qui demande de son côté à la Cour :
- de confirmer le jugement entrepris sur le licenciement sauf à porter à 30000€ le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts en raison de l'exécution déloyale du contrat de travail
- de condamner la société TRANS HELICOPTERE SERVICE à lui payer la somme de 10000€ pour exécution déloyale du contrat de travail
- de condamner la société TRANS HELICOPTERE SERVICE à lui payer la somme de 1500€ en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens
MOTIFS DE LA COUR
Attendu que Madame Carole X... a été embauchée par la société TRANS HELICOPTERE SERVICE, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 1er Septembre 1998, en qualité de Co-Pilote sur BEECH 200, moyennant une rémunération fixée en dernier lieu à 2439,17€;
Qu'en Janvier 2002 la société TRANS HELICOPTERE SERVICE a demandé à Madame X... de prendre des congés au cours de ce mois compte tenu de la faible activité de vol en Beech 200; que la salariée à contesté cette décision au motif qu'elle ne respectait pas les mesures prévues à cet effet en terme de forme et de délai;
Que le 14 Juin 2002 l'employeur a notifié à Madame X... un avertissement pour avoir, malgré la remarque qu'il lui avait été faite précédemment à plusieurs reprises, positionné de manière incorrecte ses pieds sur les freins à l'atterrissage; que la salariée a contesté cette sanction en expliquant qu'aucun de ses précédents instructeurs commandants de bord n'avait eu à déplorer ce problème;
Que le 5 Juillet 2002 la société TRANS HELICOPTERE SERVICE a notifié à Madame X... un nouvel avertissement motivé par son refus de prendre en charge la presse et le et le catering lors du vol du 4 Juillet 2002 à destination de Caen;
Que par courrier du 9 Juillet 2002 Madame X... a fait connaître à la société TRANS HELICOPTERE SERVICE sa décision de démissionner en lui précisant que cette démission deviendrait effective le 9 Octobre 2002 après l'exécution de son préavis de 3 mois;
Que le 12 Juillet 2002 l'employeur a notifié à Madame X... une mise à pied en lui reprochant d'avoir refusé d'être pilote en fonction lors du vol du 9 Juillet 2002 malgré la demande qui lui en avait été faite;
Que par courrier en réponse du 15 Juillet 2002 Madame X... a indiqué à la société TRANS HELICOPTERE SERVICE que sa décision de démissionner était provoquée par le harcèlement moral dont elle faisait l'objet depuis quelques temps, harcèlement confirmé par le dernier courrier envoyé le lendemain de sa démission dans le seul but de la faire quitter son emploi sans les salaires de son préavis; que l'employeur, par courrier recommandé du 17 Juillet 2002 a contesté ces agissements de harcèlement moral et l'a convoquée à un entretien préalable en vue d'un licenciement; qu'après cet entretien Madame X... a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er Aout 2002 non sans avoir dans un dernier courrier du 22 Juillet 2002 réitéré ses accusations de harcèlement moral et contesté l'ensemble des sanctions qui lui avaient été infligées;
Que la lettre de licenciement était motivée par l'insubordination de la salariée en regard des faits sanctionnés par les deux avertissements et la mise à pied;
Attendu que Madame X... fait valoir que la société TRANS HELICOPTERE SERVICE par les multiples pressions exercées à son encontre, constitutives de harcèlement moral, n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail; qu'elle se réfère aux congés payés qui lui ont été imposés sans le respect du délai de prévenance, aux avertissements des 14 Juin et 5 Juillet ainsi qu'à la mise à pied disciplinaire du 12 Juillet qu'elle estime totalement injustifiés;
qu'elle rattache aussi à la déloyauté de l'employeur une discrimination sexiste en expliquant qu'elle n'a pas bénéficié de l'évolution de carrière à laquelle elle pouvait prétendre, à savoir les fonctions de commandant de bord alors que 2 collègues masculins moins expérimentés ont déjà accédé à ces fonctions;
Qu'elle fait valoir en second lieu que la rupture du contrat de travail ne saurait résulter de sa lettre de démission du 9 Juillet 2002 écrite sur un coup de tête en raison des pressions constantes de l'employeur mais rétractées dès le 15 Juillet et que cette rupture est intervenue à l'occasion du licenciement notifié par l'employeur le 1er Août 2002, licenciement manifestement illégitime puisqu'il était motivé par des faits déjà sanctionnés par les avertissements et par la mise à pied disciplinaire;
Que la société TRANS HELICOPTERE SERVICE soutient de son côté que Madame X... a pris la décision claire et non équivoque le 9 Juillet 2002 de démissionner et qu'elle s'est contentée postérieurement de revenir sur l'imputabilité de sa décision sans toutefois remettre en cause le principe même de la rupture qui était acquise; qu'elle en déduit que le licenciement prononcé le 1er Août 2002 est sans effet sur la qualification de la rupture et qu'elle explique le licenciement par la persistance des actes d'insubordination de la salariée;
Que l'employeur conteste par ailleurs les accusations de harcèlement et de discrimination formulées par Madame X... en indiquant que les avertissements étaient fondés, que l'aspect caractériel du comportement de la salariée était incompatible avec le travail en équipage inhérent à la fonction de commandant de bord et que le non respect du délai de prévenance à l'occasion des congés pays du mois de Janvier 2002 ne peut être considéré comme suffisamment grave pour justifier la rupture des relations contractuelles;
1-Sur la rupture du contrat de travail
Attendu que la démission pour être valable doit résulter d'une volonté claire non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail;
Qu'en l'espèce, la lettre de démission de Madame X... en date du 9 Juillet 2002 ne comporte aucune réserve et ne fait mention d'aucun grief à l'égard de l'employeur; que les faits antérieurs ou contemporains de cette démission, notamment les sanctions disciplinaires prononcées ne suffisent pas à démontrer qu'elle a été provoquée par la société TRANS HELICOPTERE SERVICE; qu'il y a lieu dans ces conditions de constater que la salariée a démissionné librement et en connaissance de cause; et que les explications données après coup, dans ses courriers des 15 et 22 Juillet, sont inopérantes ;
Que par ailleurs, la lecture des courriers des 15 et 22 Juillet 2002 révèle que Madame X..., contrairement à ses dires n'a pas voulu rétracter sa démission mais seulement en imputer la responsabilité à l'employeur; qu'il apparaît, au surplus, qu'elle n'a jamais repris le travail depuis son refus le 9 Juillet d'assurer un vol en qualité de pilote;
Que la rupture du contrat de travail est donc intervenue le 9 Juillet 2002 par la démission de la salariée et que le licenciement décidé par l'employeur le 1er Août 2002 n'a pas être examiné par la Cour, étant dépourvu d'objet; que Madame X... sera déboutée de ses demandes en paiement des indemnités de rupture;
2- Sur l'exécution déloyale du contrat de travail reproché à l'employeur
Attendu que sous couvert d'une action en responsabilité contractuelle de droit commun, Madame X... reproche à son employeur d'avoir violé les prescriptions des articles des articles L 122-49 et L 123-1 du Code du Travail qui étaient déjà applicables à la date des faits reprochés ;
Qu'en réalité, la société TRANS HELICOPTERE SERVICE justifie du bien fondé des avertissements notifiés à la salariée les 4 Juin 2002 et 5 Juillet 2002 par plusieurs témoignages émanent de pilotes de l'entreprise : celui de Monsieur A... qui explique que Madame X... ne tenait pas compte des remarques qui lui étaient faites sur la position des pieds sur les freins ce qui représentait un risque à l'atterrissage et qu'une telle remarque lui avait été faite lors d'un vol sur Caen début Mai 2002 puis lors d'un vol de contrôle hors ligne le 28 Mai 2002, ceux de Messieurs B... et C... qui indiquent que tous les Co-Pilotes sont chargés d'apporter le catering pour les vols qui le nécessitent; que la copie du manuel d'exploitation produit par la salariée elle-même mentionne expressément parmi les charges du Co-Pilote le catering et la presse;
Que la mise à pied disciplinaire du 12 Juillet 2002 est également une sanction justifiée car il résulte d'attestations de Monsieur C... que l'alternance du travail de pilote en fonction et non en fonction est indispensable aux dosage du travail et au maintient pour chaque pilote de son niveau de pilotage; que Madame X... ne fournit aucune explication sérieuse à son refus le 9 Juillet d'être le pilote en fonction; qu'il convient par ailleurs de noter que son bulletin de salaire de Juillet 2002 ne fait pas mention d'une retenue correspondant à la mise à pied; qu'aucune faute ne saurait donc être reprochée à la société TRANS HELICOPTERE SERVICE de ce chef;
Que s'agissant de l'évolution de carrière, l'employeur affirme que Madame X... était inapte à la fonction de commandant de bord en raison de son caractère et de son comportement en vol; qu'il verse aux débats le témoignage d'un autre pilote qui confirme cette appréciation en expliquant qu'elle a tendance à l'énervement en cas de conflit ou de problèmes techniques et que cet aspect de son comportement est un obstacle majeur à la bonne synergie du travail en équipage; que dans ces conditions, la différence de traitement invoquée par l'intéressée est justifiée et non discriminatoire;
Que le non respect qui n'est pas contesté du délai de prévenance au moment des congés payés imposés par l'employeur n'est pas une circonstance de nature à caractériser un fait de harcèlement moral; que Madame X... ne justifie pas davantage un préjudice à cet égard;
Qu'en conséquence, son action en responsabilité contre la société TRANS HELICOPTERE SERVICE ne peut prospérer et qu'il convient de la débouter de sa demande en paiement de dommages et intérêts;
Attendu que Madame X... qui succombe supportera les dépens ; qu'il convient d'allouer à la société TRANS HELICOPTERE SERVICE la somme de 1000€ en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;
PAR CES MOTIFS
Dit l'appel recevable
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame Carole X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour inexécution déloyale du contrat de travail par l'employeur et pour harcèlement moral de ce dernier
Réformant le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :
Dit que la rupture du contrat de travail de Madame Carole X... résulte de la démission de cette dernière
Déboute Madame Carole X... de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et des salaires correspondant à la mise à pied
Y ajoutant :
Condamne Madame Carole X... à payer à la SA TRANS HELICOPTERE SERVICE la somme de 1000€ ( mille euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
Condamne Madame Carole X... aux dépens de première instance et d'appel
Le greffier Le président