AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLEGIALE
R.G : 06 / 08189
X...
C /
EAB SOCIETE
INTERIM SATT
CPAM DE LYON
S.A.R.L. BEMOT INTERIM
APPEL D'UNE DECISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 21 Novembre 2006
RG : 05. 1351
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2007
APPELANT :
Monsieur El houssaine X...
...
...
représenté par Maître ROUMEAS, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 011198 du 06 / 09 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
INTIMEES :
EAB SOCIETE
116 grande rue de la Guillotière
69007 LYON
représentée par Maître MICHEL, avocat au barreau de LYON
INTERIM SATT
Boulevard du Cerceron
BP 315
83703 SAINT RAPHAEL
non comparante
S.A.R.L. BEMOT INTERIM
7 rue de l'Abbé Boissard
Angle Rue Garibaldi
69007 LYON
non comparante
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LYON
Service Contentieux
69907 LYON CEDEX 20
représentée par Monsieur RACHET en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIES CONVOQUEES LE : 19 février 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 octobre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Bruno LIOTARD, Président
Madame Hélène HOMS, Conseiller
Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller
Assistés pendant les débats de Madame Radia GRAIRI, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier.
ARRET : REPUTE CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 13 novembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président et par Madame Radia GRAIRI, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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LA COUR,
Monsieur El Houssaine X... a été recruté le 1er octobre 2001 par l'entreprise de travail temporaire SATT Intérim, pour une mission en qualité d'aide maçon, au motif d'un accroissement temporaire d'activité de l'entreprise utilisatrice EAB.
Le 9 octobre 2001, Monsieur El Houssaine X... a été victime d'un accident du travail entraînant une fracture de son fémur gauche et une fracture de sa cheville gauche.
Le 29 octobre 2001, la Caisse primaire centrale d'assurance maladie de Lyon a notifié à Monsieur El Houssaine X... la prise en charge de son accident du travail.
Les lésions consécutives à cet accident ont été déclarées consolidées par la Caisse primaire d'assurance maladie le 31 décembre 2003 avec attribution d'une rente d'incapacité permanente à partir du 1er janvier 2004, sur la base d'un taux d'incapacité de 15 %.
Le 25 août 2004, Monsieur El Houssaine X... a saisi la Caisse primaire d'assurance maladie de Lyon d'une demande tendant à faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur.
La Caisse a organisé, dans le cadre des dispositions prévues à l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale, une réunion contradictoire en vue de concilier les parties ; l'employeur ne s'y est pas présenté ce qui a conduit à l'établissement d'un procès-verbal de carence par la caisse le 8 juin 2005.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 juin 2005, Monsieur El Houssaine X... a porté sa demande devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lyon lequel, par jugement du 21 novembre 2006, a considéré que la preuve d'une faute inexcusable de l'employeur n'était pas rapportée et a débouté celui-ci de sa demande.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 décembre 2006, Monsieur El Houssaine X... a interjeté appel de la décision qui lui a été notifiée le 6 décembre 2006.
Vu les conclusions du 26 avril 2007, maintenues et soutenues à l'audience, de Monsieur El Houssaine X... qui demande à la Cour de :
-réformer le jugement entrepris,
-dire et juger que l'accident dont il a été victime est dû à la faute inexcusable de l'entreprise utilisatrice,
-fixer au maximum la majoration de rente prévue par la loi,
-condamner in solidum les sociétés SATT Intérim et EAB à lui payer, à titre de provision, la somme de 2. 000 € à valoir sur le montant de l'indemnité qui lui sera attribuée en réparation de ses préjudices personnels,
-avant dire droit, ordonner une expertise médicale confiée à tel médecin expert qu'il plaira avec pour mission :
de décrire les lésions subies,
d'évaluer la totalité de son préjudice,
de déterminer le taux d'incapacité permanente partielle,
-d'évaluer le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément, le pretium doloris et la diminution ou la perte des possibilités de promotion professionnelle,
-condamner in solidum les sociétés SATT Intérim et EAB à lui payer la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions du 8 juin 2007, maintenues et soutenues à l'audience, de la société EAB qui sollicite la confirmation de la décision entreprise et formule, à titre subsidiaire, des observations sur le préjudice allégué ;
Vu les observations écrites en date du 4 septembre 2007 de la Caisse primaire d'assurance maladie de Lyon maintenues à l'audience et aux termes desquelles la caisse s'en rapporte à la sagesse de la Cour sur la faute inexcusable et demande à celle-ci de dire, si la faute inexcusable est retenue, qu'elle fera l'avance des sommes allouées à la victime et procédera au recouvrement auprès de l'entreprise, y compris des frais d'expertise et provisions dont elle aura fait l'avance.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la présomption de faute inexcusable
Il résulte de la combinaison des articles L. 231-8 alinéa 3 du code du travail et L. 231-3-1 alinéa 5 du même code, qu'un employé d'une entreprise de travail temporaire mis à la disposition d'une entreprise utilisatrice qui l'a affecté à un poste de travail présentant des risques pour sa santé et sa sécurité, sans qu'il ait bénéficié d'une formation renforcée à la sécurité et d'une formation adaptée aux conditions de travail, bénéficie de la présomption de faute inexcusable édictée par le premier de ces textes.
La liste des postes présentant des risques pour la santé et la sécurité du salarié est établie, selon l'article L. 231-3-1 du code du travail, par le chef d'entreprise après avis du médecin du travail et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut des délégués du personnel, s'il en existe ; elle est tenue à la disposition de l'inspecteur du travail.
Selon l'article L. 124-3 4o du code du travail l'affectation d'un salarié à un tel poste doit être mentionnée dans le contrat de mise à disposition liant l'utilisateur à l'entrepreneur de travail temporaire.
En l'espèce, Monsieur El Houssaine X... a été engagé en qualité d'aide maçon pour une aide au coffrage de murs.
Le contrat de mise à disposition signé le 1er octobre 2001 avec la société Satt intérim mentionne que le poste de travail ne figure pas sur la liste des postes à risque. Il ressort des précisions complémentaires figurant au dos du contrat de mise à disposition que cette mention fait référence à la liste des travaux particulièrement dangereux établie par l'entreprise utilisatrice, en application des dispositions de l'article L. 231-3-1 du code du travail, et pour laquelle l'intérimaire bénéficie d'une formation renforcée à la sécurité par l'entreprise utilisatrice.
Aucune preuve contraire à cette mention n'est apportée par Monsieur El Houssaine X..., qui d'ailleurs ne soutient pas la dangerosité de son poste en raison de son inscription sur la liste susvisée mais par rapport à une appréciation personnelle.
Cette appréciation personnelle est fondée sur une description de ses fonctions et des circonstances de survenance de l'accident du travail établie, d'une part, par ses propres déclarations et, d'autre part, par une attestation datée de trois années après les faits.
Par ailleurs, Monsieur El Houssaine X... vise les dispositions de l'article L. 231-3-1alinéa 1 du code du travail, qui imposent à l'entreprise utilisatrice d'organiser une formation pratique et appropriée en matière de sécurité, au bénéfice des travailleurs liés par un contrat de travail temporaire.
Si cette disposition du code du travail peut servir de fondement juridique à l'établissement de la faute inexcusable de l'employeur, elle ne peut être soulevée afin de faire peser une présomption de faute inexcusable sur l'employeur.
Il en résulte que la présomption édictée par l'article L. 231-8 du code du travail ne s'applique donc pas en l'espèce et il appartient ainsi à Monsieur El Houssaine X... d'établir l'existence de la faute inexcusable alléguée.
Sur la faute inexcusable
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail et le manquement à cette obligation a le caractère de faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La déclaration d'accident du travail établie par l'entreprise de travail temporaire le 10 octobre 2001, concernant l'accident du 9 octobre 2001 précise qu'« en marchant, ce mr a glissé et est mal tombé ».
Aucun témoin de l'accident n'est mentionné sur la déclaration.
C'est ensuite le 12 juillet 2004 que Monsieur El Houssaine X... a adressé au secrétaire du Tribunal du Contentieux de l'Incapacité une version différente de celle relatée dans la déclaration d'accident du travail. Selon cette version, Monsieur El Houssaine X... travaillait sur un échafaudage, à plus de cinq mètres du sol à fixer des panneaux de coffrage lorsque la clé lui a glissé des doigts à cause de la pluie et de l'huile et il a été projeté dans le vide, dans un espace non protégé par le garde de corps de l'échafaudage.
Le 4 septembre 2004, Abdallah Y... a attesté que Monsieur El Houssaine X... a fait une chute de trois mètres, au cours d'une opération d'installation de panneaux. La présence de ce témoin n'a cependant pas été indiquée dans la déclaration d'accident.
Le 19 juillet 2004, lors de son examen médical en évaluation du taux d'incapacité permanente de travail par le docteur Patrick B..., Monsieur El Houssaine X..., fait état, cette fois-ci, d'une chute d'une hauteur de trois mètres, sans autre précision.
La société EAB, quant à elle, soutient que Monsieur El Houssaine X... était entrain de fermer un panneau de coffrage qu'il serrait avec une clé lorsque celle-ci a ripé sur le boulon, ce qui a provoqué sa chute alors qu'il ne se trouvait nullement sur un échafaudage.
Les éléments versés aux débats par Monsieur El Houssaine X... sont insuffisants, eu égard tant à leur nature qu'à leur distance dans le temps avec les faits qu'ils relatent, à remettre en question la version des faits tels que décrits dans la déclaration d'accident du travail et à faire la preuve de l'exercice de fonctions dans les conditions évoquées par l'appelant.
Cette preuve ne saurait découler de la nature des lésions dont a été victime monsieur El Houssaine X....
Par conséquent, en l'absence d'éléments permettant de retenir une version autre que celle figurant sur la déclaration d'accident du travail, la faute inexcusable ne peut être retenue.
Succombant dans son action, monsieur El Houssaine X... ne peut prétendre au bénéfice de l'article l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme la décision entreprise,
Déboute Monsieur El Houssaine X... de sa demande en paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Dispense Monsieur El Houssaine X..., appelant succombant, du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale.
LE GREFFIER LE PRESIDENT