AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLEGIALE
R.G : 07/03031
SAS PARALU
C/
X...
CPAM DE LYON
APPEL D'UNE DECISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 25 Octobre 2006
RG : 20041268
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2007
APPELANTE :
SAS PARALU
237 rue Général de Gaulle
69530 BRIGNAIS
représentée par Maître Jean-Claude DESSEIGNE, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
Monsieur Hassen X...
...
69230 SAINT GENIS LAVAL
représenté par Maître Jean-Philippe KLINZ, avocat au barreau de LYON
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LYON
Service Contentieux
69907 LYON CEDEX 20
représenté par Monsieur RACHET en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIES CONVOQUEES LE : 7 mai 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 23 Octobre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Bruno LIOTARD, Président
Madame Hélène HOMS, Conseiller
Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller
Assistés pendant les débats de Madame Radia GRAIRI, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier.
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 20 novembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président et par Madame Radia GRAIRI, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *************
EXPOSE DU LITIGE
Hassen X..., salarié de la S.A.S. PARALU en qualité d'ouvrier soudeur, a été victime d'un accident du travail le 24 septembre 2002 ;
Suite à l'échec de la tentative de conciliation constaté le 5 juillet 2006, Hassen X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Le 25 octobre 2006, le tribunal des affaires de sécurité sociale a imputé l'accident à la faute inexcusable de la S.A.S. PARALU, a fixé au maximum la majoration de la rente, a organisé une expertise médicale de Hassen X... et a condamné la S.A.S. PARALU à verser à Hassen X... la somme de 1.500 euros à titre d'indemnité provisionnelle et la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Le jugement a été notifié le 26 octobre 2006 à la S.A.S. PARALU qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 23 novembre 2006 ;
L'affaire a été radiée le 6 mars 2007 puis réinscrite au rôle ;
L'expert désigné par le tribunal a déposé son rapport le 25 janvier 2007 ;
Par conclusions reçues au greffe le 29 juin 2007 et le 29 août 2007, maintenues et soutenues oralement à l'audience, Hassen X... :
- sollicite la confirmation du jugement entrepris,
- demande que la Cour évoque l'affaire et que l'employeur soit condamné à lui verser la somme de 6.000 euros au titre du pretium doloris, la somme de 3.000 euros au titre du préjudice esthétique, la somme de 6.000 euros au titre du préjudice d'agrément, la somme de18.553 euros au titre de la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle,
- réclame la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Par conclusions reçues au greffe le 30 avril 2007 et le 18 octobre 2007, maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. PARALU :
- soutient avoir mis en place les mesures de protection nécessaires,
- observe l'origine indéterminée de l'accident,
- en déduit qu'elle ne pouvait pas avoir conscience du danger et conteste donc la faute inexcusable,
- subsidiairement, offre la somme de 3.500 euros en réparation du pretium doloris, la somme de 2.100 euros en réparation du préjudice esthétique, et s'oppose aux demandes formées au titre du préjudice d'agrément et du préjudice professionnel ;
Par conclusions reçues au greffe le 4 septembre 2007, maintenues et soutenues oralement à l'audience, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de LYON s'en rapporte ;
MOTIFS DE LA DECISION
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat notamment en ce qui concerne les accidents du travail et le manquement à cette obligation a le caractère de la faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du code du travail lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
L'accident est survenu dans les circonstances suivantes : Hassen X... effectuait une soudure ; il était porteur d'un masque, de gants et d'un tablier de cuir ; un morceau de métal en fusion se glissait au niveau du dos entre les couches de ses vêtements ce qui provoquait leur combustion ; un collègue de travail a vu de la fumée et des flammes dans le dos de Hassen X... ; il s'est précipité et a tenté de lui enlever ses habits ; pour arrêter le feu les collègues de Hassen X... l'ont plaqué au sol puis l'ont conduit aux douches ; Hassen X... a été grièvement brûlé au dos ; la lenteur à pouvoir secourir efficacement Hassen X... est la cause de la gravité de ses brûlures ;
La S.A.S. PARALU avait nécessairement conscience que les travaux professionnels de soudure provoquent des gerbes d'éclats de métal en fusion ; d'ailleurs, elle avait muni son salarié d'un masque à soudure, de gants et d'un tablier de cuir ; en revanche, elle n'avait pas prévu des dispositifs permettant d'éteindre très rapidement tout départ de feu ; c'est seulement après l'accident que l'employeur a mis à la disposition des salariés une couverture anti-feu et un extincteur et a installé un lavabo à proximité du poste de travail ;
Ainsi, la S.A.S. PARALU n'avait pas pris toutes les mesures nécessaires pour préserver son salarié d'un danger dont elle avait conscience ;
Dans ces conditions, la faute inexcusable de l'employeur doit être reconnue ;
Aucune faute ne peut être reprochée à Hassen X... ; ce dernier doit donc bénéficier de la majoration de la rente au taux maximum prévu par la loi ;
En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé ;
L'expert a déposé son rapport ; en application des dispositions de l'article 568 du nouveau code de procédure civile et conformément aux demandes concordantes des parties, la Cour évoque l'indemnisation des préjudices de Hassen X... ;
Hassen X... est né le 4 août 1974 ;
L'expert évalue le pretium doloris à 3,5/7 compte tenu des soins prodigués et des troubles psychiques consécutifs à l'accident ; il doit être alloué la somme de 5.000 € en réparation du prétium doloris et du préjudice moral ;
L'expert évalue à 2,5/7 le préjudice esthétique lié à une vaste cicatrice dorsale gauche et à une cicatrice moindre de la région lombaire gauche ; il doit être alloué la somme de 3.000 € en réparation de ce préjudice ;
L'expert ne retient pas de préjudice d'agrément ; Hassen X... qui ne produit aucune pièce venant contredire les conclusions de l'expert doit être débouté de la demande formée de ce chef;
La perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle doit être certaine et non pas hypothétique ; le salarié doit démontrer qu'il avait des chances sérieuses d'accéder à un emploi d'un échelon supérieur à celui qu'il avait au moment de l'accident ; l'expert relève que les manifestations phobiques à l'égard du feu interdisent la reprise de l'activité antérieure; en effet, Hassen X... qui a présenté syndrome anxio-dépressif sévère et une névrose post traumatique a refusé de reprendre son travail à la S.A.S. PARALU laquelle l'a licencié le 25 juillet 2007 ; il a été classé par la COTOREP travailleur handicapé de catégorie B pour une durée de 5 ans à compter du 1 mars 2006 ; les services de la sécurité sociale ont retenu un taux d'I.P.P. de 40 % ; Hassen X... avait été embauché en qualité d'ouvrier professionnel niveau II coefficient 185 ; les commémoratifs de l'expertise révèlent qu'il a effectué sa scolarité dans des sections spéciales et a obtenu un C.A.P. de serrurier ; il a échoué aux C.A.P. de chaudronnerie et de métallurgie ; Hassen X... ne peut pas continuer dans un métier qui lui plaisait et doit changer d'orientation professionnelle alors qu'il n'a aucune qualification et connaît uniquement le métier de soudeur ; Hassen X... était âgé de 28 ans au moment de l'accident ; il donnait satisfaction à son employeur puisqu'après avoir eu recours à ses services dans le cadre d'une mission d'intérim celui-ci l'a embauché par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée ; Hassen X... pouvait donc légitimement espérer monter des échelons dans l'entreprise ; en revanche, son absence de qualification ne lui permettait pas d'accéder à un poste de rang élevé ; la perte ou la diminution de promotion professionnelle est certaine mais peu importante ; il doit donc être allouée la somme de 2.500 € de ce chef de préjudice ;
Après déduction de l'indemnité provisionnelle de 1.500 €, il reste dû à Hassen X... la somme de 9.000 € ;
L'équité commande de condamner la S.A.S. PARALU à verser à Hassen X... la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris ;
Evoquant sur l'indemnisation des préjudices complémentaires ;
Déboute Hassen X... de sa demande formée au titre du préjudice d'agrément ;
Condamne la S.A.S. PARALU à verser à Hassen X..., après déduction de l'indemnité provisionnelle, la somme de 9.000 € en réparation du pretium doloris, des souffrances morales, du préjudice esthétique et de la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle ;
Juge que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de LYON doit faire l'avance des sommes allouées à Hassen X... à charge pour elle de recouvrer lesdites sommes ainsi que les frais d'expertise auprès de la S.A.S. PARALU ;
Condamne la S.A.S. PARALU à verser à Hassen X... la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Dispense la S.A.S. PARALU, appelant succombant, du paiement du droit prévu à l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale .
LE GREFFIER LE PRESIDENT