RG N° : 07/07587
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE au fond du 15 novembre 2007
RG N° : 2006/538
X...
C/
X...
COUR D'APPEL DE LYONPREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 28 OCTOBRE 2008
APPELANT :
Monsieur Marc X......01700 BEYNOST
représenté par la SCP LAFFLY-WICKY avoués à la Cour
assisté de Me PERRE-VIGNAUD avocat au barreau de LYON
INTIME :
Monsieur Robert X......01700 BEYNOST
représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET avoués à la Cour
assisté de Me Jean SANNIER avocat au barreau de LYON
L'instruction a été clôturée le 26 Septembre 2008
L'audience de plaidoiries a eu lieu le 29 Septembre 2008
L'affaire a été mise en délibéré au 28 Octobre 2008
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur BAIZET,Conseiller : Monsieur ROUX,Conseiller : Madame MORIN
Greffier : Madame WICKER, pendant les débats uniquement.
A l'audience Monsieur ROUX a fait son rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
ARRET : contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile,
signé par Monsieur BAIZET, président et par Madame JANKOV greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Robert X... a créé le 1er avril 1991 un fonds artisanal de plomberie, zinguerie, qu'il a exploité à BEYNOST (Ain).
Le 15 novembre 1999 il a créé la Sarl ADEC ASSISTANCE ayant pour activité déclarée: "entretien, dépannage de chaudières, de systèmes de régulation et de climatisation, vente de pièces détachées".
Par acte en date du 4 Mars 2003 Monsieur Robert X... a cédé à son fils Marc X... son fonds artisanal pour le prix de 19.694 euros.
L'acte comportait une clause de non-rétablissement ainsi rédigée " Il (Monsieur Robert X...) s'interdit formellement de se rétablir ou de s'intéresser, directement et indirectement, à une activité de plomberie, zinguerie pendant deux années à compter du jour de l'entrée en jouissance, et ce sur le territoire des départements de l'Ain et du Rhône".
L'entrée en jouissance était fixée au 1er octobre 2002.
Le 9 mars 2005 Monsieur Robert X... a créé la Sarl AQUA CLEAN dont le sigèe social était à BEYNOST et l'activité déclarée : "travaux de plomberie, chauffage et installation d'adoucisseurs d'eau, achat et vente de matériel".
Monsieur Marc X... soutient que son père n'a pas respecté la clause de non-rétablissement puisqu'il a effectué des activités de plomberie dans le cadre de la Société ADEC ASSISTANCE. Il soutient en effet que cette Société a procédé à des installations de chaudières, ce qui implique nécessairement des activités de plomberie. Il reproche à Monsieur Robert X... la création de la Société AQUA CLEAN dans la ville de BEYNOST.
Par acte en date du 7 février 2006 Monsieur Marc X... a assigné Monsieur Robert X... devant le Tribunal de Grande Instance de LYON afin d'obtenir sur le fondement des articles 1184, 1126 et 1145 du Code Civil le paiement des sommes suivantes :
- 19.694,00 euros à titre de restitution du prix de cession,
- 5.770,28 euros au titre du montant des intérêts relatifs au prêt qu'il avait contracté pour acquérir le fonds,
- 179,40 euros et 42 euros correspondant aux frais de dossier et de timbres relatifs à ce prêt,
- 1.412,34 euros au titre du montant des frais de l'acte de cession,
- 50.000,00 euros à titre de dommages et intérêts,
- 3.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur Robert X... résistait à la demande en soutenant avoir respecté la clause de non-rétablissement. Il exposait qu'il n'avait exercé qu'une activité de chauffagiste dans laquelle les activités de plomberie n'étaient qu'accessoires. Il précisait que son fils Monsieur Marc X... avait cessé son activité le 31 décembre 2004 et que la Société AQUA CLEAN créée postérieurement n'avait pas pu le concurrencer.
Par jugement en date du 15 novembre 2007 le Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE a relevé :
- que la clause de non-rétablissement devait être interprétée restrictivement,
- que la Société ADEC ASSISTANCE existait avant la vente du fonds artisanal du 4 mars 2003, et que l'acquéreur du fonds ne pouvait l'ignorer,
- qu'il résultait de factures produites par Monsieur Marc X... que la Société ADEC ASSISTANCE avait sous-traité certains travaux à des entreprises de plomberie et avait posé ou remplacé des chaudières en 2003 et 2004,
- que ces pièces ne permettaient pas de caractériser l'exercice par la Société ADEC ASSISTANCE d'une activité effective et régulière de plomberie,
- que la réalisation directe ou indirecte par la Société ADEC ASSISTANCE de rares travaux de plomberie à titre accessoire, activité que Monsieur Marc X... ne pouvait ignorer lors de la cession ne pouvait suffire à caractériser un inexécution contractuelle de nature à entraîner la résolution judiciaire de la vente,
- qu'il n'était pas démontré que Monsieur Robert X... ait détourné la clientèle du fonds cédé, de sorte que l'article 1626 du Code Civil n'était pas applicable,
- que la Société AQUA CLEAN ne pouvait être à l'origine d'un détournement puisqu'elle avait été créée après la radiation de Monsieur Marc X... du répertoire des métiers en date du 31 décembre 2004.
Le Tribunal déboutait en conséquence Monsieur Marc X... de l'ensemble de ses demandes et le condamnait à payer à Monsieur Robert X... la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par acte en date du 30 novembre 2007 Monsieur Marc X... a relevé appel de cette décision.
Il expose que postérieurement à la cession du 4 mars 2003 il a appris que Monsieur Robert X... avait maintenu une activité le mettant en contact avec la clientèle à laquelle il s'était interdit de s'intéresser lors de la cession et qu'en outre au lendemain de la fin de la période de non-concurrence il avait créé la Société AQUA CLEAN qui avait détourné la clientèle du fonds cédé.
Il soutient que la clause de non-rétablissement doit s'interpréter de manière extensive en faveur du créancier et par rapport à l'activité réelle de l'entreprise cédée.
Il expose que Monsieur Robert X... lui a cédé une activité de "plomberie-zinguerie-chauffage" et que la clause de non-rétablissement s'étend à l'activité de "chauffage".
Il précise que la Société ADEC ASSISTANCE a maintenu une activité d'installation de chauffage alors que son activité était cantonnée à "l'entretien, dépannage de chaudières, de systèmes de régulation et de climatisation, vente de pièces détachées".
Il indique qu'avant la cession de 2003 la Société ADEC ASSISTANCE ne faisait pas de pose ni de remplacement de chaudières, cette activité étant réservée à l'entreprise cédée.
Il fait valoir que la clause de non-rétablissement interdisait à Monsieur Robert X... d'exercer une activité le mettant en contact avec la clientèle liée à celle du fonds cédé, et soutient que par le biais de la Société ADEC ASSISTANCE il a contrevenu à cette interdiction.
Il maintient que la Société ADEC ASSISTANCE a postérieurement à l'acte de cession effectué des travaux de plomberie puisqu'elle a procédé à l'installation d'une salle de bains, au remplacement d'un ballon d'eau chaude, à des poses de radiateurs, et des installations de chaudières, prestations impliquant nécessairement des travaux de plomberie.
Il maintient également que Monsieur Robert X... a manqué à son obligation de garantie d'éviction en détournant sa clientèle par le biais de la Société ADEC ASSISTANCE puis par le biais de la Société AQUA CLEAN.
Il conclut à la réformation de la décision déférée et sollicite le bénéfice de son acte introductif d'instance.
Monsieur Robert X... expose que son fonds artisanal créé en 1991 avait une activité de "plomberie-zinguerie", l'activité de chauffagiste étant celle de la Société "ADEC ASSISTANCE".
Il fait valoir que son fils avait parfaitement connaissance de l'existence et de l'activité principale de l'entreprise cédée.
Il précise que la Société ADEC ASSISTANCE créée quatre ans plus tôt avait pour activité la vente de pièces détachées et donc de chaudières, ce que Monsieur Marc X... ne pouvait ignorer.
Il soutient que la Société ADEC ASSISTANCE n'a exercé qu'une activité de plomberie accessoire à son activité principale et ayant pour objet d'incorporer les chaudières à la plomberie existance ce qui ne correspond pas à la définition du métier de plombier, lequel monte, répare et entretient les canalisations en amont et en aval des appareils.
Il fait valoir par ailleurs qu'il était le seul employé de la Société ADEC ASSISTANCE a avoir des compétences en plomberie et qu'il a dû arrêter son activité pendant de longues périodes entre les années 2002 et 2005.
Il soutient qu'il n'a pas failli à l'obligation légale de garantie d'éviction en créant la Société AQUA CLEAN et fait valoir que cette Société créée après la cessation d'activité de Monsieur Marc X... a une activité centrée sur la climatisation et les adoucisseurs d'eau.
Il estime que la mauvaise gestion de Monsieur Marc X... est seule à l'origine de sa cessation d'activité.
Il conclut à la confirmation de la décision déférée et sollicite la condamnation de Monsieur Marc X... à lui payer :
- 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
DISCUSSION
Attendu que la clause de non-rétablissement figurant à la page 3 de l'acte de cession du 4 mars 2003 ne porte que sur les travaux de plomberie zinguerie pendant deux ans à compter du 1er octobre 2002 date de l'entrée en jouissance, sur les départements de l'Ain et du Rhône ;
Attendu que cette clause n'interdisait pas à Monsieur Robert X... d'exercer une activité de chauffagiste impliquant la fourniture et le remplacement de chaudières, ballons d'eau chaude, radiateurs ;
Attendu que Monsieur Marc X... soutient que la Société ADEC ASSISTANCE aurait procédé à l'installation d'une salle de bains à BEYNOST ; qu'il verse à l'appui de cette affirmation une facture de l'Entreprise BIROLIN à la Société ADEC ASSISTANCE (pièce 5) du 23 juin 2004 ;
Attendu que cette facture porte sur des frais de main-d'oeuvre dans une salle de bains pour un montant de 287,50 euros H.T. ; qu'il est illusoire de penser qu'une facture d'un montant aussi modeste puisse correspondre à l'installation d'une salle de bains ;
Attendu que toutes les factures émanant de la Société ADEC ASSISTANCE versées au débat (pièce 2 versée par Monsieur Marc X..., pièces 18 et 20 versées par Monsieur Robert X...) concernent des travaux entrant dans l'activité de cette entreprise : fourniture et pose de chaudières, de radiateurs, de ballons d'eau chaude, de cumulus, de brûleurs... ; que la Société ADEC ASSISTANCE a facturé des travaux de raccordement ; que ces derniers constituent une activité accessoire à l'activité de chauffagiste mais non pas une activité principale de plomberie ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que la Société ADEC ASSISTANCE n'avait pas contrevenu à la clause de non-rétablissement ;
Attendu que l'obligation du vendeur de garantir l'acheteur de toute éviction n'interdisait pas à Monsieur Robert X... de se réinstaller après l'expiration du délai fixé par la clause de non-rétablissement et alors surtout que Monsieur Marc X... avait cessé son activité ; que dès lors la création en mars 2005 de la Société AQUA CLEAN ne peut en aucun cas constituer un manquement à l'obligation de garantie prévue par les articles 1625 et 1626 du Code Civil ;
Attendu qu'en l'absence de preuve d'un manquement de Monsieur Robert X... à ses obligations conventionnelles ou légales il convient de confirmer le jugement déféré qui a débouté Monsieur Marc X... de l'ensemble de ses demandes ;
Attendu que Monsieur Marc X... ne démontre pas avoir subi un préjudice justifiant les dommages et intérêts qu'il sollicite ;
Attendu par contre que l'équité commande d'élever à la somme de 1.500 euros le montant de l'indemnité allouée à Monsieur Robert X... en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf à élever à la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 EUROS) le montant de l'indemnité alloué à Monsieur Robert X... en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur Marc X... aux dépens de l'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la Société Civile Professionnelle AGUIRAUD-NOUVELLET, Société d'avoués.