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08/01/2009 | FRANCE | N°07/08055

France | France, Cour d'appel de Lyon, Troisième chambre civile section b, 08 janvier 2009, 07/08055


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION B

ARRET DU 08 Janvier 2009

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 septembre 2007

N° rôle : 2006j1330

N° RG : 07 / 08055

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société A7B BOHEMIA AS, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice Uneticka 75 Horomerice 252 62 U PHAHI PRAGUE (REPUBLIQUE TCHEQUE)

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de la VOGEL et VOGEL, avocats au barreau de PA

RIS
INTIMEE :
Société CANDIA SA, anciennement dénommée CEDILAC, SA, poursuites et diligences de ses représentants ...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION B

ARRET DU 08 Janvier 2009

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 21 septembre 2007

N° rôle : 2006j1330

N° RG : 07 / 08055

Nature du recours : Appel

APPELANTE :

Société A7B BOHEMIA AS, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice Uneticka 75 Horomerice 252 62 U PHAHI PRAGUE (REPUBLIQUE TCHEQUE)

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de la VOGEL et VOGEL, avocats au barreau de PARIS
INTIMEE :
Société CANDIA SA, anciennement dénommée CEDILAC, SA, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, 42, cours Suchet 69286 LYON CEDEX 02

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Aurélie NALLET, avocat au barreau de LYON

Instruction clôturée le 21 Novembre 2008

Audience publique du 01 Décembre 2008

LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION B DE LA COUR D'APPEL DE LYON,

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Madame Laurence FLISE, Président Madame Christine DEVALETTE, Conseiller Monsieur Alain MAUNIER, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 01 Décembre 2008 sur le rapport de Madame Laurence FLISE, Président

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Madame Joëlle POITOUX, Greffier

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 08 Janvier 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Laurence FLISE, Président, et par Madame Joëlle POITOUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Se plaignant d'une rupture déloyale et brutale de relations contractuelles la société A7B BOHEMIA a fait assigner la société CANDIA devant le tribunal de commerce de Lyon pour obtenir une indemnisation.
Par jugement en date du 21 septembre 2007 le tribunal de commerce de Lyon a débouté la société A7B BOHEMIA de l'ensemble de ses demandes et fait application des dispositions de l'article 700 CPC en faveur de la société CANDIA.
La société A7B BOHEMIA a interjeté appel de cette décision le 20 décembre 2007.
Aux termes de ses dernières écritures, elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris et demande que la société CANDIA soit condamnée à lui verser, à titre de dommages et intérêts, une somme de 1 876 163 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 août 2004. Elle sollicite l'application en sa faveur des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle explique :
- que les sociétés A7B ont été successivement depuis la fin de l'année 1992 le distributeur exclusif des produits de la marque CANDIA (et principalement du lait aromatisé) sur les marchés tchèque et slovaque qu'elles avaient défrichés
- qu'après avoir proposé au mois d'avril 2003 (c'est-à-dire juste avant l'intégration des marchés tchèque et slovaque au marché unique européen) une formalisation écrite de partenariat, la société CANDIA a a mis fin à leur coopération le 31 juillet 2003 avec effet au 31 décembre 2003.
Elle précise :
- qu'à la suite d'un arrêt de la cour de céans en date du 3 novembre 2005 accueillant une exception de litispendance elle s'est désistée de l'instance en concurrence déloyale qu'elle avait introduite devant les juridictions tchèques
- que la société CANDIA a été déboutée par les juridictions tchèques d'actions en préservation de droits d'auteur et en concurrence déloyale.
Elle reproche au tribunal de commerce de Lyon d'avoir, pour estimer suffisant le préavis de cinq mois, limité à trois années la durée des relations commerciales entre les parties et d'avoir écarté l'existence d'une situation de dépendance exclusive à l'égard de la société CANDIA. Elle soutient :
- que suivant contrat en date du 21 novembre 2000 (conforme aux dispositions du code civil et du code de commerce tchèques) elle a repris les activités de la société A7B TRADING (M. X... étant à la fois son gérant et celui de la société A7B TRADING) et que les relations commerciales établies depuis 1992 par la société CANDIA avec la société A7B TRADING se sont poursuivies avec elle
- que la société CANDIA est de particulière mauvaise foi lorsqu'elle prétend qu'elle n'a pas été informée de la reprise du contrat de distribution et que deux contrats de distribution successifs ont été conclus avec deux entités distinctes.
Elle évalue à 40 % (dégageant 50 % de la marge commercial) la part des produits CANDIA dans son chiffre d'affaires. Elle se plaint des difficultés auxquelles elle se serait heurtée pour organiser sa reconversion.
Elle estime que la société CANDIA en formulant au mois d'avril 2003 une proposition dont elle a ensuite modifié les conditions puis en rompant les relations commerciales a mis à exécution la décision, prise de longue date, d'évincer un partenaire devenu encombrant au moment de l'ouverture des marchés tchèque et slovaque. Elle trouve la confirmation de ce comportement déloyal dans les reproches qui lui ont été ultérieurement adressés par la société CANDIA, reproches dont la pertinence n'est pas établie et qui concernent de surcroît les années pendant lesquelles la société CANDIA prétend avoir eu pour seul partenaire la société A7B TRADING.
Elle évalue à 19 mois la durée supplémentaire de préavis qui aurait dû lui être accordée. Elle obtient la somme de 1 876 163 € en ajoutant à 19 mois de marge brute moyenne (18 084 € sur trois années) soit 343 596 € une perte de fonds de commerce soit 1 532 567 €.
Aux termes de ses dernières écritures la société CANDIA conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite l'application en sa faveur des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle impute la rupture des relations commerciales aux carences de la société A7B BOHEMIA qui aurait manqué de dynamisme et d'efficacité.
Pour soutenir que la durée de ses relations commerciales avec la société A7B BOHEMIA n'a été que de 3 années, elle fait observer que cette société de droit tchèque n'a été immatriculée qu'au cours de l'année 2000 et constitue une personne morale entièrement distincte de la société A7B TRADING et qu'aucune fusion ou absorption n'est intervenue. Elle estime que l'existence et la validité du contrat de cession ne peuvent être tenues pour certaines et souligne qu'en toute hypothèse cette cession n'a pas été acceptée par elle.
Se prévalant du fait qu'aucun contrat écrit n'a été conclu entre les parties elle conteste que la société A7B BOHEMIA ait eu le statut de distributeur exclusif des produits CANDIA. Elle soutient que toute exclusivité temporaire dont a pu jouir la société A7B BOHEMIA était révocable discrétionnairement.
Elle considère comme non probants les documents comptables et les tableaux produits par la société A7B BOHEMIA. Elle ne trouve par ailleurs pas dans les pièces adverses (au nombre desquelles ne figure pas le chiffre d'affaires 2004) la preuve des difficultés de reconversion alléguées par la société A7B BOHEMIA qui, selon, se serait en réalité reconvertie en commercialisant des contrefaçons des produits CANDIA.
Elle se plaint d'avoir été évincée du marché tchèque par les pratiques déloyales de la société A7B BOHEMIA.
Elle soutient qu'en toute hypothèse la marge brute mensuelle de la société A7B ne peut être évaluée à plus de 12 250 € et que la perte, au demeurant non établie, d'un fonds de commerce ne peut être de surcroît réparée.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 novembre 2008.
SUR CE :

Attendu que, dans le courrier adressé le 14 avril 2003 à la société A7B BOHEMIA, la société CANDIA s'est plainte de la décroissance permanente des volumes de ventes depuis 1999, de l'entrée de deux nouveaux concurrents et de l'absence de respect par son co-contractant du délai normal de paiement des factures et a fait part de son souhait de développer une stratégie plus agressive sur le marché tchèque avant l'élargissement de l'Union Européenne ;

Qu'elle a ainsi loyalement averti la société A7B BOHEMIA à la fois de l'insatisfaction que lui procurait la situation actuelle et des recherches qu'elle entreprenait pour trouver le distributeur qui serait capable d'appliquer sa politique et qui pourrait être soit la société A7B BOHEMIA soit un tiers ;
Que sa décision ultérieure de choisir un autre distributeur que la société A7B BOHEMIA, avec laquelle se poursuivait une relation commerciale à durée indéterminée, n'est pas en elle-même constitutive d'une faute ;
Attendu que, pour vérifier si la rupture de cette relation commerciale a été brutale, il convient de rechercher quelles avaient été la durée et l'importance de cette relation ;

Attendu que le contrat de " cession d'activités de vente " conclu le 21 novembre 2000 entre la société A7B TRADING et la société A7B BOHEMIA et versé aux débats vise expressément la distribution en République tchèque et en République slovaque des produits CANDIA ;

Attendu qu'à supposer même que la validité et l'opposabilité aux tiers de cet acte juridique puissent être contestées il n'en demeurerait pas moins que la société CANDIA a, de fait, poursuivi avec ces deux sociétés une relation commerciale n'ayant connu aucune autre modification que celle tenant à la dénomination de deux personnes morales qui étaient certes distinctes mais qui possédaient le même actionnaire principal et dont la seconde ne constituait que le prolongement de la première ;
Attendu qu'il apparaît, en tenant compte de la durée totale de cette relation (soit une dizaine d'années) et de l'exclusivité dont les sociétés A7B bénéficiaient en pratique, ainsi que le confirme notamment le mail adressé le 30 avril 2001 par un représentant de la société CANDIA et précisant que " A7B est notre seul distributeur " (en République Tchèque), que la durée du préavis accordé à la société A7B BOHEMIA aurait du être de 10 mois ;
Attendu que pour établir la part de son chiffre d'affaires résultant de la distribution des produits CANDIA ainsi que le montant de la marge brute correspondant à cette part de chiffre d'affaires la société A7B BOHEMIA se contente de produire une attestation établie par son propre conseil fiscal, dont l'objectivité est incertaine, ainsi que des documents comptables globaux qui ne permettent pas de vérifier l'exactitude des chiffres qu'elle avance ;
Que la société A7B BOHEMIA succombant, sur ces deux points, dans l'administration de la preuve, il convient de retenir le montant de marge brute proposé par la société CANDIA et d'allouer, en réparation de la rupture brutale de la relation commerciale, une indemnité d'un montant de 60 000 € ;
Attendu que la rupture brutale de sa relation commerciale n'a entraîné pour la société AB7 BOHEMIA, qui perdait un fournisseur libre d'établir des liens avec d'autres co-contractants et qui conservait sa propre clientèle en ayant la possibilité de lui vendre d'autres produits, aucune disparition de fonds de commerce ;
Que la demande de dommages et intérêts présentée de ce chef doit, par conséquent, être rejetée ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour
Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris
Statuant à nouveau
Condamne la société CANDIA à payer à la société A B BOHEMIA une somme de 60 000 € à titre de dommages et intérêts
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
Condamne la société CANDIA aux dépens de première instance et aux dépens d'appel qui seront distraits au profit de la SCP Baufumé Sourbé, avoué.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Troisième chambre civile section b
Numéro d'arrêt : 07/08055
Date de la décision : 08/01/2009
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Conditions - Détermination.

Pour vérifier si la rupture d'une relation commerciale a été brutale, il convient de rechercher quelles avaient été la durée et l'importance de cette relation.En l'espèce, en tenant compte de la durée totale de la relation d'une dizaine d'années et de l'exclusivité dont la société bénéficiait en pratique, la durée du préavis aurait dû être plus longue. Dès lors, il y a eu une rupture brutale de la relation commerciale.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 21 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2009-01-08;07.08055 ?
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