AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R. G : 08 / 01482
SAS BENJAMIN
C /
X...
APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de GIVORS du 07 Janvier 2008 RG : F 06 / 00094
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 19 MARS 2009
APPELANTE :
SAS BENJAMIN 32 Rue Fleury Neuvesel 69700 GIVORS
comparant en personne, assistée de Me Christine DE ROQUETAILLADE, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
Jérôme X...... ... 07100 ANNONAY
non comparant
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 29 Janvier 2009
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Louis GAYAT DE WECKER, Président Dominique DEFRASNE, Conseiller Françoise CLEMENT, Conseiller
Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER.
ARRÊT : PAR DEFAUT
Prononcé publiquement le 19 Mars 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Louis GAYAT DE WECKER, Président, et par Anita RATION, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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M. X... Jérôme a été engagé par la SAS BENJAMIN le 14 juin 1990 en qualité de métallier ; par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 mars 2006, une mise à pied disciplinaire de trois jours lui a été notifiée pour la période du 28 au 30 mars suivant, au motif d'un comportement relevant de l'insubordination.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 juillet 2006, le salarié a été licencié pour faute grave, aux motifs de son insubordination et de son comportement insultant ou dédaigneux à l'égard du chef d'entreprise ou des autres salariés.
Contestant le bien fondé de la mise à pied et de son licenciement, M. X... Jérôme a saisi le Conseil de Prud'hommes de Givors lequel par jugement en date du 7 janvier 2008 a annulé la première et considéré le second comme dépourvu de toute cause réelle et sérieuse, condamnant, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la SAS BENJAMIN à payer à M. X... Jérôme les sommes de :
-280, 00 € à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied disciplinaire,-1. 030, 49 € à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire,-4. 532, 20 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-7. 478, 13 € à titre d'indemnité de licenciement, outre de ces sommes intérêts légaux à compter du jugement,-11. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-700, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et ordonnant la délivrance d'une attestation ASSEDIC rectifiée sous astreinte de 10, 00 € par jour à compter de la notification du jugement.
Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par la SAS BENJAMIN, appelante selon déclaration du 3 mars 2008, laquelle conclut à la réformation de la décision des premiers juges, soutient qu'une faute grave a motivé le licenciement de M. X... Jérôme et sollicite en conséquence le remboursement par l'intimé des sommes versées en exécution du jugement et sa condamnation à lui payer une indemnité de procédure de 2. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
M. X... Jérôme a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 juin 2008 à l'audience de la Cour d'Appel de Lyon devant se tenir le 29 janvier 2009 ; n'ayant pas retiré la lettre recommandée avec accusé de réception, invitation à faire citer son adversaire par huissier de justice a alors été faite par le Greffe à l'appelante selon courrier du 28 juillet 2008 ; le 20 janvier 2009, l'huissier de justice a tenté en vain de signifier à M. X... Jérôme la convocation devant la Cour d'Appel de Lyon, un procès-verbal étant alors dressé en application de l'article 659 du code de procédure civile ; un arrêt par défaut doit donc être rendu en l'espèce.
MOTIFS ET DECISION
L'appel interjeté dans le délai imparti par les articles 538 du code de procédure civile et R 1461-1 du code du travail doit être déclaré recevable.
I Sur la mise à pied disciplinaire :
L'article L1333-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige (concernant une sanction disciplinaire), le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La mise à pied notifiée à M. X... Jérôme le 22 mars 2006 reprochait à ce dernier, outre un comportement coléreux irascible et injurieux tant à l'égard de sa hiérarchie que de ses collègues de travail, une insubordination caractérisée par les éléments suivants :
- refus de poursuivre son travail de 5 minutes pour satisfaire un client le 27 février 2006,
- abandon de poste avec hurlements et propos inacceptables le lendemain matin alors que son employeur lui faisait part de son mécontentement pour l'incident de la veille, le salarié ne reprenant son travail que le surlendemain 1er mars,
- tenue de propos injurieux à l'encontre du chef d'entreprise le 13 mars 2006 au matin.
Dans un courrier en réponse adressé à son employeur le 2 avril 2006, M. X... Jérôme soutient qu'il ne lui a jamais été demandé de rester quelques instants de plus le 27 février, alors même qu'il serait resté jusqu'à 17 h15 ; il reconnaît ensuite avoir quitté l'entreprise le lendemain matin pour éviter que les relations ne dégénèrent avec son employeur qui lui faisait part de son mécontentement ; il conteste enfin avoir tenu des propos insultants le 13 mars suivant.
Les seuls éléments produits au dossier par la SAS BENJAMIN consistent d'une part dans l'attestation de M. B... Patrick, métallier au sein de la SAS BENJAMIN, qui indique que M. X... Jérôme a changé de comportement après le changement du chef d'entreprise remplacé par M. C... et précise que les relations étaient alors devenues très difficiles tant avec son nouvel employeur qu'avec ses collègues de travail dont il n'admettait plus aucune remarque ni demande d'information et d'autre part dans l'attestation de M. Y... Jean-Paul, tuyauteur-soudeur, qui se borne à indiquer que M. X... Jérôme arrivait fréquemment en retard au travail.
Aucun élément du dossier ne permet d'établir que le salarié ait refusé de rester quelques instants en compagnie d'un client le 27 février 2006, alors même comme l'a indiqué pertinemment le premier juge, que l'employeur avait la possibilité de solliciter une attestation dudit client, extérieur à l'entreprise.
S'il est par contre établi puisque le salarié le reconnaît lui-même, que M. X... Jérôme a quitté l'entreprise le lendemain matin pour ne reprendre son poste que le surlendemain, aucune justification de cet abandon de poste n'est apportée par l'intéressé.
Le simple désir d'éviter une discussion même annoncée conflictuelle, avec son employeur ne peut autoriser un salarié à abandonner son poste une journée entière, sauf situation particulière de danger non établie en l'espèce ; la mise à pied prononcée par la SAS BENJAMIN apparaît donc justifiée ; il convient en conséquence de réformer le jugement rendu de ce chef et de débouter le salarié de sa demande en rappel de salaire subséquente.
La SAS BENJAMIN demande que soit ordonnée la restitution des sommes versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire ; le présent arrêt, infirmatif de ce chef, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, outre intérêts à compter de la notification dudit arrêt ; il n'y a donc pas lieu de statuer sur la demande en remboursement présentée par la SAS BENJAMIN.
II Sur le licenciement :
La preuve de la faute grave privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur, la simple absence de l'intimé à l'instance ne pouvant suffire par son absence de contestation subséquente, à apporter cette dernière.
Si la très longue lettre de licenciement adressée à M. X... Jérôme énonce à son encontre de multiples faits susceptibles de caractériser l'insubordination et le comportement insultant qui lui sont reprochés, aucun élément du dossier ne permet toutefois d'établir la réalité des faits susvisés alors même que les attestations de MM. B... et Y... sont rédigées de façon générale sans situer aucun événement dans le temps, privant ainsi le juge de tout contrôle en matière de prescription.
Le caractère injustifié des absences reprochées à M. X... Jérôme ne peut non plus être déduit de l'examen ni des bulletins de paie délivrés à l'intéressé ni du relevé des heures accomplies par ce dernier dressé par l'expert-comptable de la société.
Les faits reprochés à M. X... Jérôme ne sont donc manifestement pas démontrés dans leur existence même ; il convient donc de confirmer la décision prise par le Conseil de Prud'hommes en la matière, en allouant à M. X... Jérôme les sommes non discutées dans leur quantum ne serait-ce qu'à titre subsidiaire par l'appelante, allouées à juste titre par les premiers juges et en ordonnant la délivrance d'une attestation ASSEDIC rectifiée sous astreinte.
III Sur le 13e mois :
Aucune critique n'est apportée par la SAS BENJAMIN concernant le rejet fait par le premier juge de la demande présentée de ce chef par M. X... Jérôme ; il convient en conséquence de confirmer la décision en la matière.
IV Sur l'article 700 du code de procédure civile :
L'équité et la situation économique des parties ne commandent pas l'octroi à la SAS BENJAMIN d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
- Déclare l'appel recevable,
- Réforme le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Givors le 4 février 2008 en ce qu'il a annulé la mise à pied disciplinaire prononcée par la SAS BENJAMIN le 22 mars 2006 et condamné la SAS BENJAMIN à payer à M. X... Jérôme une somme de 280, 00 € à titre de rappel de salaire pour la période correspondante,
- Statuant à nouveau,
- Dit et juge que la mise à pied disciplinaire prononcée le 22 mars 2006 est justifiée et déboute M. X... Jérôme de sa demande en rappel de salaire,
- Confirme le jugement susvisé pour le surplus,
- Déboute la SAS BENJAMIN de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la Cour,
- Condamne la SAS BENJAMIN aux dépens de première instance et d'appel.