AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R. G : 08/ 02003
SA PROMODIP
C/ X...
APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 07 Mars 2008 RG : F 07/ 00701
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2009
APPELANTE :
SA PROMODIP 42 rue des Sept Arpents 93698 PANTIN CEDEX
représenté par Me CHEVALLIER, avocat au barreau de BREST substitué par Me AZERAD, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
Dahbia X... ... 69007 LYON
comparante en personne, assisté de Me SCHARYCKI, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008/ 014312 du 29/ 05/ 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 Septembre 2009
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Didier JOLY, Président Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller Yolande ROGNARD, Vice-présidente placée
Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 03 Novembre 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par contrat à durée indéterminée du 8 juillet 2004, la SA PROMODIP a embauché Mme X... en qualité de collaboratrice chargée d'actions de promotions commerciales à réaliser aux dates et lieux imposés par les clients de la SA PROMODIP. Il a été contractuellement convenu que :
- la SA PROMODIP ne pouvait pas avoir connaissance à l'avance des missions,- Mme X... pouvait ne pas réserver l'exclusivité de son temps à la SA PROMODIP dont elle pouvait refuser les missions,- le contrat ne donnait droit à aucune indemnité de précarité.- la convention collective applicable était celle du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.
Mme X... a exécuté des missions pour la SA PROMODIP de quatre jours en 2004, de 17 jours en 2005 et de 4 jours en 2006.
Par lettre du 8 janvier 2007, Mme X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motifs de l'irrégularité de son contrat de travail et du manquement de la SA PROMODIP de son obligation de lui fournir du travail.
Par lettre du 14 février 2007, la SA PROMODIP a contesté les griefs mais a pris acte de la rupture et a établi à la salariée un certificat de travail mentionnant la qualité de contrat à durée indéterminée intermittent.
Le 21 février 2007, Mme X... a saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande tendant à faire juger que le contrat était irrégulier et que la prise d'acte de la rupture devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par décision du 7 mars 2008, le contrat intermittent a été jugé irrégulier et qualifié de contrat à durée indéterminée à temps plein, la prise d'acte a été imputé à l'employeur qui a été condamné à payer à Mme X... :
-2 508, 56 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,-250, 85 euros d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,-313, 57 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,-7 575, 68 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par lettre du 18 mars 2008, la SA PROMODIP a formé appel de la décision.
A l'audience et par conclusions, la SA PROMODIP a sollicité la réformation du jugement et le rejet des demandes de Mme X.... Elle a soutenu que le contrat n'était pas un contrat intermittent mais atypique comme cela a été jugé et qu'il ne pouvait être, non plus, qualifié de contrat à plein temps puisqu'il est démontré que Mme X... n'était pas à sa disposition exclusivement ayant travaillé pour d'autres employeurs. En ce qui concerne la rupture, la SA PROMODIP a rappelé que le contrat n'imposait aucun minimum de travail à fournir, qu'elle n'a donc pas manqué à ses obligations d'employeur et que dès lors la rupture s'analyse en une démission. La SA PROMODIP a sollicité 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Mme X... a soutenu que le contrat, qualifié par la SA PROMODIP elle même de contrat intermittent, est irrégulier au regard de l'article L 3123-31 du code du travail qui soumet la conclusion de tels contrats à celle d'un accord collectif préalable, ce qui n'est pas le cas. De plus, le contrat intermittent signé entre Mme X... et la SA PROMODIP ne respecte pas les exigences légales puisqu'il n'est stipulé aucun élément de rémunération et aucune durée minimale de travail, il doit donc être requalifié en contrat à durée indéterminée à temps complet. Mme X... a encore soutenu que le contrat était irrégulier en application des règles générales du droit du travail et qu'il constitue une fraude à la loi puisqu'utilisé à la place de contrat à durée déterminée. L'intimée a conclu que la prise d'acte de la rupture était donc imputable à l'employeur qui a manqué à ses obligations de fournir du travail et de régulariser une situation contraire à la loi. Mme X... a demandé la confirmation des sommes allouées par les premiers juges.
MOTIFS
Sur la qualification du contrat :
En application de l'article L 3123-31 un contrat de travail intermittent peut être conclu pour pouvoir un emploi permanent comportant une alternance de périodes travaillées et non travaillées. La conclusion d'un tel contrat est subordonnée à celle d'un accord collectif précisant les modalités d'application. Le contrat intermittent impose que le salarié soit à la disposition exclusive de son employeur durant la période travaillée.
En l'espèce, le contrat liant Mme X... et la SA PROMODIP dispensait la salarié d'une mise à disposition exclusive et lui permettait de refuser les missions proposées et l'autorisait à travailler pour d'autres employeurs, ce qu'elle a fait comme le démontre les pièces produites.
Nonobstant le terme impropre de " contrat à durée indéterminée intermittent " utilisé dans le seul certificat de travail remis à Mme X..., la qualification revendiquée n'est donc pas applicable.
Le contrat litigieux ne peut pas, non plus, être qualifié de contrat d'intervention réglementé par l'avenant du 20 septembre 2002 et relatif à l'accueil événementiel. Les signataires de cet accord collectif ont en effet expressément limité le champ d'application aux seules entreprises d'accueil événementiel. Et si l'accord a été étendu aux entreprises d'animations commerciales dont dépend la SA PROMODIP par un nouvel accord du 13 février 2006, ce dernier n'a été applicable qu'en vertu d'un décret du 16 avril 2007, soit postérieurement à la rupture du contrat.
Enfin, le contrat ne peut pas être qualifié de contrat à durée déterminée ou de contrat à durée indéterminée à temps complet puisqu'il est acquis que Mme X... n'avait aucune obligation de disponibilité à l'égard de son employeur, ayant refusé une mission et ayant travaillé pour d'autres employeurs durant la période du contrat.
Le contrat signé est donc atypique.
Sur la rupture du contrat :
Cependant, nonobstant le caractère atypique du contrat, l'employeur ne pouvait pas se délier de son obligation de fournir du travail à Mme X.... La SA PROMODIP ne justifie pas, par la production de son activité, avoir été dans l'impossibilité de proposer à Mme X... des missions aussi limitées que celles fournies (4 jours en 2004 et 2006 et 17 jours en 2005) et dont l'offre totale s'analyse, en réalité, en une absence de fourniture de travail.
En conséquence, c'est à bon droit que Mme X... a pris acte de la rupture pour manquement de l'employeur à son obligation de lui fournir du travail. La prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En application de l'article L 1235-3 du code du travail, Mme X... qui avait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de dix salariés a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Mme X... a perçu au total la somme de 191, 24 euros en 2004, de 830, 02 euros en 2005 et de 201, 23 euros en 2006.
L'indemnité de licenciement doit être fixée à la somme de 3000 euros.
En revanche, Mme X... n'a pas travaillé suffisamment pour que des droits indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents lui soient ouverts.
En outre, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur à Pole Emploi des indemnités chômage payées à Mme X... du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités chômage.
La SA PROMODIP succombe, sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.
La SA PROMODIP supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
Reçoit l'appel régulier en la forme.
Infirme le jugement en ce qu'il a qualifié le contrat de contrat à durée indéterminée à temps plein.
Confirme le jugement en ce qu'il a dit que la prise d'acte s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Infirme le jugement pour le surplus.
Statuant à nouveau :
Condamne la SA PROMODIP à payer à Mme X... une indemnité de licenciement de 3000 euros.
Condamne la SA PROMODIP à payer à Pole Emploi les indemnités chômage versées à Mme X... du jour du licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d'indemnités de chômage. Rejette la demande de la SA PROMODIP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SA PROMODIP aux dépens.