R.G : 10/00381
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON
au fond du 07 janvier 2010
RG : 07/12655
ch n°1
SCI M.G.C. [Adresse 8]
C/
[I]
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 29 Mars 2011
APPELANTE :
SCI M.G.C. [Adresse 8]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Me François CORNUT, avocat au barreau de LYON
INTIME :
M. [U] [I]
né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 6] (Syrie)
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER, avoués à la Cour
assisté de Me Eric BERIOT, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 18 Janvier 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 1er Mars 2011
Date de mise à disposition : 29 Mars 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Jean-Jacques BAIZET, président
- Claude MORIN, conseiller
- Agnès CHAUVE, conseiller
assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier
A l'audience, Jean-Jacques BAIZET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DE L'AFFAIRE
Par suite sous seing privé du 2 août 2006, la Sci M.G.C. [Adresse 8] s'est engagée à vendre à Monsieur [I] un immeuble situé à [Localité 7] pour le prix de 500.000 euros. La promesse de vente était assortie d'une condition suspensive relative à l'obtention par l'acquéreur d'un prêt de 500.000 euros, d'une durée de vingt ans, au taux de 4 %. L'acte prévoyait que l'acquéreur devait justifier au vendeur de l'acceptation ou du refus du prêt par pli recommandé, au plus tard dans les cinq jours suivant l'expiration du délai fixé au 30 novembre 2006. La date limite de réitération de la vente était fixée au 31 mars 2008.
Le 12 décembre 2006, la Sci M.G.C. [Adresse 8] a mis en demeure Monsieur [I] de la fixer sur l'obtention ou non d'un financement. Monsieur [I] a fait répondre, par son notaire, le 22 décembre 2006, qu'il renonçait au bénéfice de la condition suspensive.
L'acte de vente n'ayant pas été régularisé, la Sci M.G.C. [Adresse 8] a assigné Monsieur [I] afin de voir constater la caducité du compromis et d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 15.000 euros correspondant au dépôt de garantie. Monsieur [I] s'est opposé à la demande et a sollicité la condamnation de la Sci M.G.C. [Adresse 8] à lui restituer le dépôt de garantie et à lui verser le montant de la clause pénale.
Par jugement du 7 janvier 2000, le tribunal de grande instance de Lyon a rejeté les demandes de la Sci M.G.C. [Adresse 8] et l'a condamnée à payer à Monsieur [I] le montant du dépôt de garantie et la clause pénale de 50.000 euros.
La Sci M.G.C. [Adresse 8], appelante, conclut à la réformation du jugement. Elle considère que le compromis est devenu caduc en l'absence de réitération par acte authentique au 31 mars 2008 et sollicite la condamnation de Monsieur [I] à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages intérêts et la même somme pour la conservation du dépôt de garantie. Elle fait valoir que Monsieur [I] n'a jamais justifié de l'existence des fonds au jour de l'expiration de la condition suspensive, alors que les parties avaient prévu la sanction de la caducité pour cette omission, afin de permettre au vendeur d'avoir la certitude que l'acquéreur disposait des fonds nécessaires à l'acquisition. Elle estime que Monsieur [I] n'a pas respecté les délais d'information de l'obtention ou du refus du prêt, ce qui lui a causé un préjudice puisqu'elle a été contrainte d'immobiliser son bien pendant près d'un an. Elle soutient que l'absence de réalisation de la condition suspensive n'est due qu'à l'inaction de Monsieur [I] qui n'a effectué aucune démarche pour obtenir un prêt, de sorte qu'elle est fondée à conserver le dépôt de garantie. Elle considère que la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt n'était pas stipulée dans le seul intérêt de l'acquéreur.
A titre subsidiaire, elle sollicite la réduction de la clause pénale à un euro.
Monsieur [I], intimé, conclut à la confirmation du jugement. Il fait valoir qu'il a régulièrement renoncé à la condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt, stipulée dans son intérêt. Il considère que la réitération de la vente n'a pu intervenir en raison de la résistance de la Sci M.G.C. [Adresse 8], qui avait trouvé un autre acquéreur pour un prix supérieur.
Il soutient qu'en application de la promesse de vente et de l'article 1134 du code civil, il est fondé à réclamer le paiement de la clause pénale et du dépôt de garantie.
MOTIFS
Attendu que le compromis de vente du 2 août 2006 a été consenti sous la condition suspensive de l'obtention par l'acquéreur d'un ou plusieurs prêts d'un montant de 500.000 euros auprès de tout organisme de son choix, d'une durée de vingt ans, à un taux variable; que l'acte prévoit que l'acquéreur devra justifier au vendeur de l'acceptation ou du refus du prêt par pli recommandé au plus tard dans les cinq jours suivant l'expiration du délai fixé au 30 novembre 2006, et qu'à défaut d'envoi dans ce délai de la lettre recommandée ainsi prévue, le vendeur pourra mettre en demeure l'acquéreur de lui produire une lettre d'accord ou de refus du prêt, et qu'à défaut de réponse à cette mise en demeure dans les cinq jours, les présentes seront nulles et non avenues et le vendeur sera en droit de conserver le montant du dépôt de garantie ;
Attendu que par lettre du 12 décembre 2006, dont les dates d'expédition et de réception ne sont ni précisées ni justifiées, la Sci M.G.C. [Adresse 8] a mis Monsieur [I] en demeure de justifier de l'acceptation ou du refus des prêts ; que par lettre du 22 décembre 2006, Monsieur [I] a fait savoir, par son notaire, qu'il renonçait au bénéfice de la condition suspensive et qu'il réitérerait la vente à la date prévue ; qu'il a confirmé cette position le 26 avril 2007 en réponse à une nouvelle demande de l'avocat de la Sci le mettant en demeure de produire une lettre d'accord ou de refus du prêt ;
Attendu que la condition suspensive relative à l'octroi d'un prêt ayant été stipulée dans le seul intérêt de l'acquéreur, celui-ci pouvait y renoncer régulièrement ; que dès lors, c'est à tort que par lettre du 24 mai 2007, la Sci M.G.C. [Adresse 8] a fait connaître à Monsieur [I] qu'elle avait décidé de retrouver sa liberté et de vendre le bien à un tiers ;
Attendu qu'aucune clause du compromis ne prévoit que l'acquéreur devait justifier de l'existence des fonds au jour de l'expiration de la condition suspensive et qu'à défaut, l'acte serait nul ; que la Sci ne peut dès lors se prévaloir de la caducité du compromis à défaut de justification, par Monsieur [I], de ce qu'il disposait des fonds nécessaires au financement, à la date d'expiration de la condition suspensive ; qu'il ne peut non plus lui être reproché de n'avoir pas justifié de la disposition des fonds au 31 mars 2008, date limite de réitération de la vente, puisque la Sci lui avait fait savoir qu'elle avait choisi de vendre l'immeuble à un tiers; qu'il justifie, par la déclaration établie au titre de l'ISF, qu'il disposait d'un patrimoine lui permettant de faire face au paiement du prix ;
Attendu qu'en l'absence de faute de l'acquéreur, ce dernier est fondé à solliciter le remboursement du dépôt de garantie de 15.000 euros versé lors de la signature du compromis ;
Attendu que cet acte prévoit une clause pénale de 50.000 euros à la charge de l a partie refusant de régulariser l'acte authentique dans le cas où toutes les conditions prévues sont réalisées ; que dès lors que la Sci M.G.C. [Adresse 8] a refusé de poursuivre la vente pour offrir le bien à un tiers, alors que les conditions suspensives étaient réalisées et que Monsieur [I] a sollicité la réitération de la vente, notamment par voie judiciaire, elle est débitrice de la clause pénale ; que celle-ci n'apparaît pas manifestement excessive, notamment au regard du préjudice subi par Monsieur [I] qui a été privé de la possibilité d'acquérir un ensemble immobilier se composant de deux bâtiments à usage commercial ;
Attendu que la Sci M.G.C. [Adresse 8] qui a refusé à tort de réitérer la vente ne peut solliciter des dommages intérêts en réparation de l'immobilisation de son bien ;
Attendu qu'elle doit supporter les dépens et une indemnité supplémentaire en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement entrepris;
Déboute la Sci M.G.C. [Adresse 8] de sa demande de dommages intérêts,
Condamne la Sci M.G.C. [Adresse 8] à payer à Monsieur [I] la somme supplémentaire de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 EUROS) en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la Sci M.G.C. [Adresse 8] aux dépens, avec droit de recouvrement direct par la Société Civile Professionnelle (Scp) Ligier de Mauroy-Ligier, avoués.
Le Greffier Le Président