R. G : 10/ 03784
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 18 Octobre 2011
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 29 avril 2010
RG : 08. 6153 1ère chambre section 2 cab A
X...
C/
SCI ABELI
APPELANTE :
Madame Marie X... née le 14 Février 1959 à BRON (69500) ... 69590 SAINT SYMPHORIEN SUR COISE
représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me DENARD, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
SCI ABELI représentée par ses dirigeants légaux 8 allée du Rhône 69320 FEYZIN
représentée par Me Annie GUILLAUME, avoué à la Cour
assistée de Me Patrick LEVY, avocat au barreau de LYON substitué par Me COGNE, avocat
Date de clôture de l'instruction : 06 Décembre 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Septembre 2011
Date de mise à disposition : 18 Octobre 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Françoise CLEMENT, conseiller
assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier
A l'audience, Pascal VENCENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
La SCI ABELI, constituée par cinq chirurgiens dentistes associés, a souhaité étendre ses locaux professionnels existants de 130m ² supplémentaires. Elle a alors contacté madame X..., architecte et fille de l'architecte qui avait construit les premiers locaux.
Aucun contrat n'a été signé entre les parties.
Il apparaît que madame X... a alors procédé fin 2004 au dépôt d'un permis de construire auprès de la mairie de FEYZIN sans que le chiffrage des travaux n'ait été réalisé, adressé et accepté par la SCI ABELI.
Le permis de construire a été accordé le1er décembre 2004.
Madame X... a établi deux factures :- l'une de 6. 135 euros HT-l'autre de 12. 865 euros HT.
La société ABELI n'a payé que la somme globale de 5. 980 euros et a mis fin immédiatement à toutes relations avec madame X... estimant que le projet était trop dispendieux.
Partant du principe que le montant des travaux était de 380. 000 euros et que ses honoraires devaient être calculés sur la base de 10 % du montant des dits travaux, madame X... a entendu revendiquer la somme de 16. 744 euros.
Par acte d'huissier du 27 mars 2008, celle-ci a saisi le tribunal de grande instance de LYON aux fins de voir condamner la SCI ABELl à lui payer ladite somme outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 juillet 2007 et indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par un jugement en date du 29 avril 2010, le tribunal de grande instance de LYON déboutait cette dernière de ses demandes, estimant qu'elle ne pouvait prétendre qu'à une somme de 5. 980 euros au titre de ses honoraires de permis de construire, déboutait la SCI ABELI de sa demande en remboursement d'une somme de 4. 186 euros et condamnait madame X... à payer à la société ABELI la somme dc 1. 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame X... a relevé appel de cette décision et demande à la cour de réformer entièrement le jugement déféré et de dire et juger qu'elle a réalisé un certain nombre de prestations pour le compte de la SCI ABELI puisqu'un contrat verbal s'est formé entre les parties.
Il est ainsi demandé à la cour de fixer les honoraires de madame Marie X... à la somme de 16. 744 euros et de condamner la SCI ABELI à payer cette somme outre celle de 2. 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Il est soutenu en substance qu'un contrat verbal s'est formé entre les parties nonobstant l'article 11 du décret du 20 mars 1980 qui réglemente la profession d'architecte lequel prévoit bien la rédaction d'un contrat écrit, qu'il en existe un commencement de preuve par écrit du fait du versement d'une provision. S'agissant d'un contrat qui ne peut être que rémunéré sur la base de 10 % du montant des travaux, il conviendrait bien de retenir un chiffre de rémunération de 16. 744 euros.
A l'opposé, la SCI ABELI demande à la cour de confirmer le jugement de débouté concernant les demandes de madame X... mais de le réformer en ce qu'il a également débouté la dite SCI de sa demande reconventionnelle en remboursement de l'acompte versé, soit la somme de 4. 186 euros outre 5. 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est affirmé à cette occasion que aucun contrat n'a jamais été formalisé entre les parties alors même que les régles déontologiques de la profession d'architecte en font une obligation, qu'aucune mission d'architecture n'a été définie. Ainsi peu importerait qu'un permis de construire ait été déposé ou qu'une note d'honoraires ait été payée par la SCI ABELI, ces documents ne prouvant pas qu'un accord sur la rémunération de madame X... ait été conclu entre elle et la SCI ABELI.
Si des travaux ont été effectués par l'architecte ils n'auraient été d'aucune utilité pour n'avoir été précédés d'aucun devis, la somme globale des dépenses générées par les travaux de plus de 500. 000 euros, connue des mois après le dépôt du permis de construire eut été, si elle avait été connue en son temps, un obstacle dirimant à toute poursuite de ces études de faisabilité.
Cette absence de devis au moins concomitant à la dépose du permis de construire aurait généré d'importants contretemps pour l'intimée qui estime être en droit d'obtenir le remboursement de l'acompte versé et le versement de dommages et intérêts pour 5. 000 euros.
SUR QUOI LA COUR
Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, il convient bien de noter immédiatement que le fait que les plans n'aient pas été approuvés par le client n'exclut pas la rémunération de l'architecte. Il est donc présentement indifférent pour la solution du présent litige de savoir si la SCI ABELLI a donné suite ou non au projet élaboré par madame X....
Il est incontestable qu'un contrat verbal d'architecture a bien été passé entre madame X... et la SCI ABELLI courant 2004 portant sur l'extension de locaux professionnels.
L'élaboration de plans sur des données factuelles et techniques forcément communiquées par le maître de l'ouvrage et le dépôt en mairie de permis de construire au nom de la SCI sans protestation de sa part en sont la preuve incontestable.
Il est tout aussi avéré que les parties ne sont pas formellement parvenues à définir contractuellement le montant de la rémunération de l'architecte.
Par voie de conséquence, conformément à une jurisprudence constante, il appartient au prestataire, en sa qualité de demandeur, d'établir le montant de sa créance et à cet effet de fournir les éléments permettant de fixer ce montant, le juge appréciant celui-ci en fonction notamment de la qualité du travail fourni.
Si une rémunération à hauteur de 10 % du montant des travaux n'est pas absurde en elle même, il est constant que les honoraires de la profession sont libres et évoluent entre 5 % et 20 % en fonction de la loi de l'offre et de la demande, ainsi qu'en tenant compte de la complexité de l'ouvrage à réaliser.
Madame X... ne fait donc pas la preuve de ce que les parties se sont entendues sur le dit pourcentage.
Concernant le deuxième paramètre de calcul des honoraires lié au montant du marché, il est là encore avéré qu'il ne résulte d'aucun accord contractuel, le document produit par l'architecte intitulé " Estimation du coût des travaux " d'un montant TTC de 519. 286 euros n'ayant aucune valeur en ce domaine pour être non daté, non signé et sans preuve quant à un éventuel envoi à la dite SCI avant ou après la demande de permis de construire.
Le seul élément dont madame X... puisse se prévaloir dans le cadre de la démonstration qui lui incombe au visa de l'article 1315 du code civil tient dans le fait que sur la base d'une note d'honoraires du 12 mai 2004 la dite SCI et la SCM de ces chirurgiens dentistes lui ont effectivement réglé la somme demandée de 5. 980 euros TTC.
La lecture de cette facture laisse cependant apparaître qu'il ne s'agit pas d'une demande de provision mais bien d'une facture réglant la phase no1 de tout chantier de construction, soit l'établissement de plans sommaires et de situation en vue de l'obtention du permis de construire délivré par les autorités administratives.
L'élaboration de ces plans sommaires, l'établissement de cette facture, son règlement intégral par le maître de l'ouvrage et l'absence de tout document contractuel postérieur obligent à dire et juger que les relations contractuelles entre les parties se sont arrêtées à cette première phase.
Il est à noter qu'un tel contrat limité n'est pas étranger aux usages de la profession, un architecte pouvant parfaitement n'être missionné que pour accomplir cette première étape.
Quant au caractère forfaitaire de cette rémunération, soit en réalité la somme arrondie de 5. 000 euros HT, elle peut parfaitement se concevoir s'agissant de la rémunération de l'architecte pour des peines et soins limités et difficilement quantifiables avant tout chiffrage des travaux permettant l'élaboration d'une rémunération au pourcentage. Cette somme est cohérente et apparaît correspondre à la réalité de la rémunération du travail accompli.
Partant, il convient de constater l'accord des parties sur la chose et sur le prix de cette prestation limitée et de confirmer la décision déférée qui a débouté tout à la fois madame X... de sa demande injustifiée d'honoraires complémentaires et la dite SCI de sa demande en remboursement des sommes versées.
Chaque partie en cause d'appel succombe en ses prétentions, il n'y a donc pas lieu devant la cour ni à dommages et intérêts pour procédure abusive, ni à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni à condamnation aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Confirme en toutes ses dispositions la décision déférée.
Dit n'y avoir lieu en cause d'appel ni à dommages et intérêts pour procédure abusive, ni à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que chaque partie conserve ses dépens d'appel.
Le greffier, Le président.