AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLÉGIALE
RG : 11/02579
SA CASINO DE [Localité 4]
C/
URSSAF DE L'AIN
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AIN
du 28 Mars 2011
RG : 427.09
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2011
APPELANTE :
SA CASINO DE [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Jan-Jack SEBAG,
avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
URSSAF DE L'AIN
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Mme [Z] [U]
munie d'un pouvoir spécial
PARTIES CONVOQUÉES LE : 05 Mai 2011
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Novembre 2011
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Nicole BURKEL, Président de chambre
Hélène HOMS, Conseiller
Marie-Claude REVOL, Conseiller
Assistées pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 13 Décembre 2011 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre et par Suzanne TRAN, Adjoint assermenté faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite d'un contrôle portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006, l'URSSAF de l'Ain a adressé à la SA CASINO d'[Localité 4] une lettre d'observations envisageant neuf chefs de redressement et deux observations.
Sur les deux points contestés par la SA CASINO d'[Localité 4], l'URSSAF a renoncé à la régularisation pour l'un d'eux, devant être pris en compte pour l'avenir, et a maintenu l'autre chef de redressement concernant une déduction forfaitaire spécifique pour les frais professionnels des membres du comité de direction.
La SA CASINO d'[Localité 4] a saisi la commission de recours amiable pour contester ce chef de redressement mais sa contestation a été rejetée par décision du 29 juin 2009 notifiée le 28 juillet 2009. La SA CASINO d'[Localité 4] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourg-en-Bresse. Celui-ci, par jugement du 28 mars 2011 a confirmé la décision de la commission de recours amiable et condamné la SA CASINO d'[Localité 4] à verser à l'URSSAF une indemnité de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 avril 2011, la SA CASINO d'[Localité 4] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions écrites, déposées le 8 novembre 2011, visées par le greffier et soutenues oralement, la SA CASINO d'[Localité 4] demande à la cour de :
- réformer le jugement dont appel,
- annuler le redressement contesté au titre de la déduction forfaitaire spécifique concernant les membres du comité de direction des jeux,
- condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
subsidiairement, vu les articles 179 et 232 du code de procédure civile,
- ordonner un constat ou un transport sur les lieux afin de vérifier que les salariés en cause travaillent bien dans les salles de jeux ou sont en contact avec les joueurs et leur apportent directement ou indirectement un service lié aux jeux ou désigner tel huissier qu'il lui plaira chargé de recueillir à l'attention de la cour tous éléments d'information sur les conditions de travail sus énoncées.
Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier 15 novembre 2011, soutenues oralement, l'URSSAF de l'Ain demande à la cour de :
- rejeter le recours de la SA CASINO d'[Localité 4],
- confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale et la décision de la commission de recours amiable,
- rejeter la demande de condamnation de l'URSSAF au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
subsidiairement,
- rejeter la demande de constat ou transport sur les lieux de la SA CASINO d'[Localité 4].
Pour plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour renvoie, en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon les termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant de calcul aux cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre des frais professionnels que dans les conditions et les limites fixées par arrêté interministériel.
L'article 9 de l'arrêté ministériel du 20 décembre 2002 modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005 stipule : 'les professions, prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif prévu aux articles précédents peuvent bénéficier d'une déduction forfaitaire spécifique. Cette déduction est, dans la limite de 7.600 euros par année civile, calculée selon les taux prévus par l'article 5 de l'annexe IV du code précité (...)'.
L'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, énonce en ce qui concerne les casinos et cercles :
- personnel supportant des frais de représentation et de veillée : 8 %,
- personnel supportant des frais de double résidence : 12 %,
- personnel supportant à la fois des frais de représentation et de veillée et des frais de double résidence : 20 %.
Les parties ne sont pas contraires sur les conditions d'application de cette déduction posées par la jurisprudence du Conseil d'Etat.
Ainsi d'une part, la déduction supplémentaire pour les personnels des casinos et cercles supportant des frais de représentation, de veillée ou de double résidence, s'agissant d'une société gérant un casino, bénéficie aux personnels affectés aux activités de casino, y compris aux services annexes, mais non à l'ensemble du personnel susceptible de supporter lesdits frais et d'autre part, doivent être regardés comme affectés aux activités de casino les personnes exerçant effectivement leur activité dans des locaux spéciaux, distincts ou séparés où sont autorisés les jeux, que leurs fonctions soient liées directement aux jeux ou qu'elles se rattachent aux services annexes proposés aux joueurs.
D'autre part, selon les textes relatifs à la réglementation des jeux dans les casinos, lorsque la société exploitant le casino a la forme d'une société anonyme, le directeur responsable doit être le directeur général ou un directeur général délégué choisi obligatoirement parmi les administrateurs ; en outre, le comité de direction doit comprendre au moins un membre appartenant au conseil d'administration ou au directoire, qui sera membre du comité de direction appeler à suppléer le directeur auquel peuvent être adjointes des personnes prises au dehors.
Ainsi certains membres du comité de direction des jeux sont des mandataires sociaux.
Il résulte des éléments sus exposés, que la SA CASINO d'[Localité 4] doit établir d'une part que les membres du comité de direction, qui sont également mandataires sociaux, sont titulaires d'un contrat de travail distinct de leur mandat social pour une activité professionnelle spécifique et qu'ils bénéficient de deux rémunérations distinctes et d'autre part, pour chacun des salariés pour lesquels elle souhaite bénéficier de la déduction dérogatoire à la règle générale, qu'il exerce effectivement son activité professionnelle dans les salles dont l'accès est exclusivement réservé aux joueurs, que ses fonctions sont directement liées aux jeux ou qu'elles se rattachent aux services annexes réservés aux joueurs.
La SA CASINO d'[Localité 4] produit le contrat de travail de quatre membres du comité de direction des jeux sans précision et pièces sur leur éventuel mandat social.
Elle ne démontre donc pas que les mandataires sociaux membres du comité de direction remplissent les conditions pour bénéficier de la déduction spécifique.
Elle ne démontre pas non plus, que les membres du comité de direction dont elle met en avant le rôle commercial et relationnel soient, comme elle le prétend, affectés au contrôle des jeux et exercent, en permanence, leurs fonctions dans les salles de jeux.
D'après la plaquette de présentation des fonctions des membres du comité de direction qu'elle produit, ces salariés ont également des fonctions importantes de management et de contrôle qui sont par ailleurs prévues dans la réglementation des jeux.
L'activité des membres du comité de direction n'est donc pas effectuée exclusivement dans les salles de jeux.
De plus, la SA CASINO d'[Localité 4] ne produit aucun élément démontrant que les membres du comité de direction des jeux pour lesquels elle souhaite bénéficier de la déduction dérogatoire à la règle générale, exposent des frais de représentation et de veillée ou de double résidence ou des deux à la fois.
Les plannings qu'elle produit en cause d'appel relatifs aux mois de janvier et décembre 2005 et de janvier et décembre 2006 qui ne l'ont pas été lors du contrôle et qui ont été édités le 4 novembre 2011 et dont ne permet de s'assurer de leur date d'établissement, outre qu'ils ne prévoient pas l'affectation systématique des salariés, membres du comité de direction, à des horaires tardifs, ne renseignent pas sur le lieu d'exercice de leurs fonctions.
Par ailleurs, la SA CASINO d'[Localité 4] fait valoir que l'ACOSS, par lettre du 20 janvier 2011 adressée par à [T] [N], a admis, après étude de l'argumentation des casinos et du contenu réel des professions concernées, l'essentiel de son argumentation en souhaitant que ce point de vue ne s'impose qu'à compter du 1er janvier 2011 et pas aux procédures en cours.
Elle fait valoir que cette restriction temporelle n'est pas admissible car elle porte atteinte à l'égalité des citoyens devant la loi et s'oppose, ainsi à un principe constitutionnel.
Cette lettre précise qu'il s'agit d'une tolérance administrative qui n'est donc pas créatrice de droit. Elle ne permet donc pas à la SA CASINO d'[Localité 4] de prétendre à son application rétroactive que la lettre exclue expressément. De plus cette lettre rappelle les conditions permettant l'application de la déduction forfaitaire spécifique et elle ne dispense pas les casinos de démontrer que les conditions sont remplies.
En conséquence et en l'espèce, le recours de la SA CASINO d'[Localité 4] n'est pas fondé et il doit être rejeté sans nécessité d'ordonner une mesure d'instruction qui ne peut établir, à ce jour, que les conditions d'application de la déduction spécifique en litige étaient remplies à l'époque du contrôle.
Il y a lieu, dès lors, de confirmer le jugement entrepris y compris sur la condamnation de la SA CASINO d'[Localité 4] prononcée par le tribunal des affaires de sécurité sociale sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, texte au bénéfice duquel appelante, partie perdante, ne peut prétendre.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris,
Déboute la SA CASINO d'[Localité 4] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Dispense la SA CASINO d'[Localité 4] du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale.
Le GreffierLe Président
Suzanne TRANNicole BURKEL