R.G : 10/02783
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 20 Mars 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSEAu fonddu 22 mars 2010
RG : 2008/01631ch no
SAS TEREVA
C/
SARL COTESOCIETE CARRER CAPPELANS
APPELANTE :
SAS TEREVA anciennement MARTIN BELAYSOUDreprésentée par ses dirigeants légaux18 avenue d'ArsonvalZI Nord01000 BOURG-EN-BRESSE
représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON
assistée de la SELARL BERNASCONI ROZET MONNET SUETY FOREST, avocats au barreau de l'AIN
INTIMÉES :
SARL COTEreprésentée par ses dirigeants légaux100 chemin du Mollard01110 HAUTEVILLE LOMPNES
représentée par Me Laurent CORDIER, avocat au barreau de l'AIN
Société CARRER CAPELLANS venant aux droits de la Société INDUSTRIAS MATEUreprésentée par ses dirigeants légauxC. Capellans 3Polig. Ind. El Congost08170 MONTORNES DEL VALLES (ESPAGNE)
représentée par la SCP BRONDEL TUDELA, avocats au barreau de LYON
assistée de Me Eric DEZ, avocat au barreau de l'AIN
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Date de clôture de l'instruction : 25 Janvier 2012
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Février 2012
Date de mise à disposition : 20 Mars 2012Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président- Dominique DEFRASNE, conseiller- Catherine ZAGALA, conseiller
assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Catherine ZAGALA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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La SNC MOLENE a confié à la société COTE selon marché de travaux des 17 juillet 2002 et 14 novembre 2002 la réalisation du lot plomberie VMC dans le cadre de la construction de 79 puis 20 logements dans un ensemble immobilier situé à PREVESSIN MOËNS (Ain).
Des dégâts des eaux sont apparus courant 2004 dans différentes villas en raison de fuites au niveau des joints des flexibles fournis par la société TEREVA.
Par ordonnance du 25 janvier 2005, le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE statuant en référé a désigné monsieur Z... en qualité d'expert.La société TEREVA a appelé en cause son fournisseur la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve la société CARRER CAPELLANS.
Vu le rapport d'expertise de monsieur Z... déposé le 27 novembre 2006,
Vu la décision rendue le 22 mars 2010 par le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE ayant :- jugé que la société TEREVA avait manqué à son devoir d'information en livrant des matières incompatibles, et en ne répercutant pas à l'acquéreur les informations techniques qui lui étaient fournies par le fabricant,- mis hors de cause la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve aujourd'hui la société CARRER CAPELLANS,- condamné la société TEREVA à payer à la société COTE les sommes suivantes :. 6.135,64 € outre intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2006,. 8.418,29 € avec outre intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2008 avec le bénéfice de l'exécution provisoire pour la moitié de ces sommes,. 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné la société TEREVA aux dépens incluant les frais d'expertise.
Vu l'appel formé le 14 avril 2010 par la société TEREVA,
Vu les conclusions de la société COTE signifiées le 5 septembre 2011,Vu les conclusions de la société CARRER CAPELLANS venant aux droits de la société INDUSTRIAS MATEU signifiées le 7 novembre 2011,Vu les conclusions de la société TEREVA anciennement dénommée MARTIN BELAYSOUD signifiées le 8 novembre 2011.
Vu l'ordonnance de clôture du 25 janvier 2012.
La société TEREVA demande à la cour, réformant le jugement critiqué : à titre principal :- de constater qu'elle n'a pas manqué à son devoir de conseil et que la société COTE ne justifie pas d'un préjudice indemnisable,
à titre subsidiaire :- de condamner la société CARRER CAPELLANS venant aux droits de la société INDUSTRIAS MATEU qui a manqué à son obligation d'information à son égard, à la relever et garantir au visa des articles 1147 et suivants du code civil, de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre, - de réduire à de plus justes proportions les condamnations prononcées,- de condamner qui mieux le devra à lui payer la somme de 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société COTE demande à la cour :- de confirmer le jugement critiqué,
y ajoutant :- de condamner la société TEREVA à lui payer la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société CARRER CAPELLANS venant aux droits de la société INDUSTRIAS MATEU demande à la cour :- de confirmer le jugement critiqué,
y ajoutant :- de dire qu'elle n'a commis aucune faute engageant sa responsabilité,- de dire que seuls les manquements aux règles de l'art par la société COTE sont à l'origine des dégâts survenus,- de dire que la société TEREVA est responsable de l'absence d'information transmise à la société COTE,- de débouter la société TEREVA et la société COTE de leurs demandes,- de condamner la société TEREVA à lui payer la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les responsabilités
Alors que l'expert avait conclu dans son pré-rapport que les flexibles de marque MATEU vendus par la société TEREVA anciennement dénommée MARTIN BELAYSOUD se sont avérés inadaptés pour être fixés sur des colonnettes de marque "PORQUET" ou "IDEAL STANDARD" car leur mode de fabrication écrasait les joints caoutchouc et occasionnait des fuites d'eau, la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve la société CARRER CAPELLANS, a adressé un dire faisant état des essais effectués dans son laboratoire dont les résultats mettaient en évidence :- que le résultat d'un excès de serrage est exactement le même quant à la découpe du joint (16mm de diamètre) que la portée du joint soit égale au diamètre du joint (18mm) ou à peine réduite (16mm),- que sans excès de serrage le joint ne se découpe pas.Elle contestait les dimensions des joints et de la colonnette mentionnés sur le plan réalisé par l'expert.
L'expert, répondant à ce dire à rappelé que les résultats des essais avaient déjà été communiqués le 26 avril 2006, examinés en réunion de synthèse le 8 septembre 2006 à la suite de quoi, le pré rapport avait été adressé aux parties.Il indique que ces essaies ne modifient pas son avis qui a été partagé avec les autres experts présents à cette réunion, que les plans joints sont sans intérêt puisque les croquis effectués par ses soins ont été établis contradictoirement lors du second accédit.
Après avoir examiné ce dire, monsieur Z... explique que lors du serrage du flexible sur les colonnettes, la partie plate du raccord laiton étant inférieure au diamètre de serrage du joint et le diamètre intérieur de la colonnette étant de 15mm, le joint s'écrase en se pliant dans l'espace libre entre le diamètre intérieur de la colonnette et la partie plane de la tétine. Il précise pour illustrer le croquis réalisé, que le joint est écrasé sur la portée des colonnettes et qu'en serrant, le flexible tourne sur lui-même, le joint du flexible étant alors marqué et même découpé.Il relève, en réponse au dire de la société COTE que si un serrage excessif était à l'origine du désordre on retrouverait les mêmes conséquences à l'autre extrémité du flexible, ce qui n'est pas le cas.Il précise à cet égard que ce flexible fixé à son autre extrémité à un raccord laiton classique dont l'épaulement offre un appui plus large au joint, n'est pas endommagé alors qu'il a été serré de la même manière.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les dommages causés aux joints à l'origine des désordres ne proviennent pas d'un excès de serrage de ces joints mais d'une inadaptation des flexibles utilisés sur ce chantier aux colonnettes de robinetteries de baignoires de marque IDEAL STANDARD et PORQUET.
Il convient donc, sans avoir à examiner si la TEREVA était en mesure de transmettre à la société COTE les éventuelles consignes sur le serrage maximum, de conclure que la responsabilité de la société TEREVA qui, sans l'en informer, a fourni à la société COTE du matériel incompatible, doit être retenue.
Les flexibles fournis par la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve la société CARRER CAPELLANS n'étant pas défectueux, et aucun manquement à son obligation d'information n'étant établi à l'encontre de cette dernière , il n'y a pas lieu de retenir sa responsabilité.
La décision critiquée doit être confirmée en ce qu'elle jugé que la société TEREVA avait manqué à son devoir d'information en livrant du matériel incompatible et mis hors de cause la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve aujourd'hui la société CARRER CAPELLANS.
Sur la réparation du préjudice
Le préjudice subi par la société COTTE se compose d'une part du montant de la retenue de garantie conservée par le maître de l'ouvrage qui a pris en charge les réparations nécessaires suite aux sinistres déclarés et d'autre part des frais que la société COTTE a engagés pour remédier aux désordres et prévenir l'apparition de nouveaux désordres.
Sur le premier point, l'expert, s'appuyant sur le courrier de la société MOLENE, qui relève que la retenue de garantie de 4.409,73 € sur la phase 1 et de 4.008,56 € sur la phase 2 correspond aux dépenses que le maître de l'ouvrage a du supporter en raison des sinistres afférents aux fuites d'eau.Ces sommes ont été effectivement affectées par le maître de l'ouvrage au compte de la société COTTE qui a donc été privée de la somme totale de 8.418,29 €.
Sur le second point:La société COTTE dont le siège est situé à 1h30 du chantier litigieux, est intervenue dans un premier temps au fur et à mesure de la survenance des sinistres et par la suite pour réaliser une intervention préventive dans les logements non encore touchés par les fuites d'eau.
Le fait qu'elle soit intervenue à 21 reprises sur le chantier litigieux, ne caractérise nullement un défaut d'organisation, justifiant de limiter son droit à réparation sur les heures d'intervention et les frais de déplacement chiffrés à 4.332,13 € HT.
Par ailleurs, elle a du procéder pour changer les joints défectueux à la réalisation de trappe de visites dans les baignoires, pour éviter d'avoir à démonter l'ensemble des meubles des salle des bains.
Il n'est pas établi que la société COTTE ait été destinataire des avis techniques réalisés par la société INDUSTRIAS MATEU aux droits de la quelle se trouve la société CARRER CAPELLANS sur la nécessité de l'accessibilité des flexibles et l'expert indique que les règles de l'art n'imposent pas de trappes de visite sous les baignoires.
Il ne peut donc être fait grief à la société COTTE qui a respecté le descriptif contractuel fourni par le maître de l'ouvrage, de ne pas avoir pris l'initiative de réaliser de telles trappes.
Les frais afférents à ces travaux, soit 798,00 € HT supportés par la société COTTE constituent donc un élément de son préjudice.
Il convient donc de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle fait droit à la demande d'indemnisation de la société COTTE en lui accordant d'une part la somme de 6.135,64 € et celle 8.418,29 €.Il convient cependant de dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la décision soit le 22 mars 2010.
Sur le dépens et les frais irrépétibles
Il convient de confirmer le jugement critiqué et, y ajoutant, de dire qu'il n'apparaît pas inéquitable que chacune des parties garde à sa charge les frais visés à l'article 700 du code de procédure civile engagés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Déclare la société TEREVA recevable en son appel.
Confirme le jugement entrepris, sauf en sa disposition ayant fixé le point de départ des intérêts au taux légal.
Et statuant à nouveau sur ce chef,
Dit que les condamnations prononcées à l'encontre de la société TEREVA porteront intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2010.
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société TEREVA aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.
Le greffier Le président