AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 11/06453
SAS AGEFIL
C/
[Y]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 12 Septembre 2011
RG : F 09/01247
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 05 JUILLET 2013
APPELANTE :
SAS AGEFIL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par la SELARL VANDEVELDE AVOCATS (Me Hélène AULIARD) avocats au barreau de LYON
substitué par Me Lidwine MEYNET, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
[J] [Y]
née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Laurence SEGURA-LLORENS, avocat au barreau de LYON
substitué par Me Johanne SFAOUI, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/026098 du 04/10/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
PARTIES CONVOQUÉES LE : 09 Mars 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Décembre 2012
Présidée par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre
Hervé GUILBERT, Conseiller
Christian RISS, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Juillet 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement contradictoire rendu entre les parties le 12 septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes de LYON , dont appel ;
Vu les conclusions déposées le 7 décembre 2012 par la S.A.S. AGEFIL, appelante, incidemment intimée ;
Vu les conclusions déposées le 7 décembre 2012 par [J] [Y], intimée, incidemment appelante ;
Ouï les parties en leurs explications orales à l'audience du 7 décembre 2012 ;
La Cour,
Attendu que suivant contrat de travail à durée indéterminée du 20 décembre 2012 [J] [Y] a été embauchée en qualité d'agent de service par la société AGEFIL, entreprise de nettoyage ;
qu'à la suite d'un accident du travail du 17 juillet 2007, elle a bénéficié d'arrêts de travail renouvelés jusqu'au 10 mars 2008 et qu'elle a ensuite repris son poste sous le régime du mi-temps thérapeutique ;
que du 12 mai au 12 décembre 2008 elle a été placée en congé individuel de formation aux fonctions de secrétaire assistante ;
que pendant ce congé individuel de formation, elle a fait l'objet de deux arrêts de travail pour maladie du 3 au 5 juin 2008 puis du 23 au 30 juin 2008 ;
qu'elle a été victime d'un second accident du travail 5 septembre 2008 qui a entraîné de nombreux arrêts de travail jusqu'en janvier 2009 ;
Attendu qu'après deux visites médicales de reprise des 15 décembre 2008 et 5 janvier 2009, le médecin du Travail l'a déclarée définitivement inapte à son poste d'agent de service mais apte à un poste administratif ;
qu'elle a été licenciée le 2 février 2009 en raison d'une inaptitude définitive et d'une impossibilité de reclassement ;
Attendu que saisi à la requête de la salariée le 26 mars 2009, le Conseil de Prud'hommes de LYON a, par jugement du 12 septembre 2011 :
- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamné la S.A.S. AGEFIL à payer à [J] [Y] :
1° la somme de 16 010,28 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
2° la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour retards dans l'établissement des documents nécessaires à la prise en charge de la salariée par l'assurance maladie ;
Attendu que la S.A.S. AGEFIL a régulièrement relevé appel de cette décision le 21 septembre 2011 ;
Attendu que la société appelante soulève la nullité du jugement entrepris pour défaut de motivation au visa de l'article 455 et 458 du Code de Procédure Civile ;
Attendu que la Cour ne peut que constater que la décision critiquée ne comporte aucune motivation dès lors que les juges du premier degré n'ont énoncé aucune des raisons de fait ou de droit qui les ont conduits à considérer que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Attendu en conséquence, qu'en application de l'article 460 du Code de Procédure Civile, il échet de prononcer la nullité du jugement entrepris , les considérations de l'intimée relatives aux conditions d'exercice de l'appel-nullité étant hors de sujet et parfaitement inopérantes ;
Attendu que par l'effet dévolutif de l'appel, la Cour est saisie de l'entier litige ;
Attendu, sur la rupture du contrat de travail, que l'intimée ne saurait se prévaloir du défaut de consultation des délégués du personnel dès lors qu'il n'en existait pas au sein de l'entreprise, ce dont la société appelante justifie par la production d'un procès-verbal de carence dûment transmis à l'inspection du Travail ;
qu'au reste, ce moyen semble abandonné devant la Cour, les écritures d'appel de [J] [Y] ayant toutefois été, sur ce point, volontairement rédigées en termes équivoques ;
Attendu qu'il est constant qu'à l'issue de la première visite médicale de reprise du 15 décembre 2008 le médecin du Travail a déclaré l'intimée inapte temporaire à son poste d'agent de service et apte à un poste sans port de charges de plus de 3 kg, sans port de charges avec le bras gauche, sans station debout prolongée au-delà de trente minutes, mais apte à un poste de type administratif ;
qu'à l'issue de la deuxième visite médicale de reprise, le même médecin du Travail a déclaré l'intéressée définitivement inapte à son poste d'agent de service avec les mêmes observations que dans son avis précédent ;
Attendu, dès lors, qu'il incombait à l'employeur soit de reclasser la salariée, soit de la licencier si ce reclassement se révélait impossible ;
Attendu que la S.A.S. AGEFIL fait partie d'un groupe de trois sociétés, savoir en outre la société MAVIC qui est une société holding et la société PROPRETÉ RHÔNE-ALPES qui est également une entreprise de nettoyage ;
Attendu que la société appelante établit par la production des registres du personnel que les sociétés AGEFIL et PROPRETÉ RHÔNE-ALPES emploient exclusivement des agents de service ou des chefs d'équipe qui doivent essentiellement assurer personnellement des tâches d'agents de service, mais qu'il n'y existe aucun poste à caractère administratif ;
que les quelques postes à caractère administratif existant au sein de la société holding MAVIC étaient tous pourvus au jour du licenciement ;
Attendu que l'intimée qui soutient que la S.A.S. AGEFIL n'a pas recherché une adaptation de son poste ;
qu'elle ne précise cependant pas quelles étaient les possibilités d'adaptation de son poste compte tenu de l'avis du médecin du Travail ;
Attendu encore que l'intimée fait valoir que la société appelante a embauché une dame [K] en qualité de secrétaire commerciale par contrat de travail à durée déterminée d'une durée d'un mois pour la période du 1er au 31 mai 2009 et qu'elle ne lui a donc pas proposé cet emploi disponible ;
Attendu cependant que l'intimée ne démontre pas que la nécessité de recourir à cet emploi temporaire existait au jour de son licenciement ;
que si l'intimée a suivi une formation de secrétaire assistante, elle n'a de toute façon pas obtenu la qualification correspondante ;
qu'en l'état, l'employeur n'était pas tenu de proposer un emploi de ce type à la salariée au jour du licenciement ;
Attendu en conséquence, qu'il y a lieu de dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de débouter [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;
Attendu, sur les retards de payement du salaire du mois de juin 2008 et sur les retards de transmission des documents nécessaires à la prise en charge de la salariée par l'assurance maladie, que ceux-ci sont établis et reconnus expressément par la société appelante qui se borne à faire valoir qu'il n'en serait résulté aucun préjudice pour l'intimée ;
Attendu que ce moyen ne saurait être accueilli dès lors que son salaire ou les indemnités journalières de la sécurité sociale qui s'y substituent constituent la seule source de revenus de l'intimée ou, à tout le moins, sa principale source de revenus ;
que ces carences de l'employeur dont peu importent les causes et dont il est seul responsable ont nécessairement porté préjudice à la salariée ;
qu'il convient donc d' allouer de ce chef à [J] [Y] la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts ;
Attendu que l'article L 6323-19 du Code du Travail dispose que dans la lettre de licenciement, l'employeur informe le salarié, s'il y a lieu, de ses droits en matière de droit individuel à la formation ;
que le défaut d'information sur ce point cause nécessairement un préjudice au salarié qui doit être réparé par l'allocation de dommages et intérêts ;
Attendu qu'il est constant que la lettre de licenciement du 2 février 2009 ne comporte aucune indication relative au droit individuel à la formation acquis par [J] [Y] au jour du licenciement ;
que le préjudice qu'elle a ainsi subi sera réparé par l'octroi d'une somme de 500 € à titre de dommages et intérêts ;
Attendu que l'indemnité de licenciement versée à la salariée ne tient pas compte de la majoration pour inaptitude consécutive à un accident du Travail ;
que la société appelante a déclaré à l'audience ne pas s'opposer à la demande en payement d'un reliquat d'indemnité de licenciement d'un montant de 354,77 € présentée par l'intimée ;
qu'il lui en sera donné acte ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile non plus que celles de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;
Attendu que chaque partie succombant en certaines de ses prétentions, les dépens seront partagés par moitié ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
En la forme, déclare recevables tant l'appel principal que l'appel incident ;
Au fond, les dit l'un et l'autre justifiés ;
Prononce la nullité du jugement rendu entre les parties le 12 septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes de LYON ;
Dit fondé le licenciement de [J] [Y] par la S.A.S. AGEFIL pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Déboute [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la S.A.S. AGEFIL à payer à [J] [Y] la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour retard dans le payement su salaire du mois de juin 2008 et retards dans la transmission à l'assurance maladie des documents nécessaires à la prise en charge de la salariée ;
La condamne à payer à [J] [Y] la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qui lui a été causé par l'omission, dans la lettre de licenciement du 2 février 2009, de toute indication relative à son droit individuel à la formation ;
Donne acte à la S.A.S. AGEFIL de ce qu'elle offre de régler à [J] [Y] la somme de 354,77 € à titre de solde de l'indemnité de licenciement majorée ;
La condamne, en tant que de besoin, à payer ladite somme à [J] [Y] ;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile non plus que de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties .
Le Greffier, Le Président,
Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS