AFFAIRE PRUD'HOMALE
DOUBLE RAPPORTEUR
R.G : 14/02414
SAS MJ INDUSTRIE
C/
[K]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'OYONNAX
du 20 Décembre 2012
RG : F 11/00174
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 27 MARS 2014
APPELANTE :
SAS MJ INDUSTRIE
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Lionel COUTACHOT,
avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
INTIMÉ :
[D] [K]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représenté par Me Philippe HEURTON
avocat au barreau d'ANGERS
PARTIES CONVOQUÉES LE : 24 Mai 2013
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 Janvier 2014
Présidée par Jean-Charles GOUILHERS, Président de Chambre et Christian RISS, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier
.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Jean-Charles GOUILHERS, président
- Christian RISS, conseiller
- Agnès THAUNAT, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 27 Mars 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement contradictoire rendu entre les parties le 20 décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes d'OYONNAX, dont appel ;
Vu les conclusions déposées le 26 juin 2013 par la S.A.S. MJ INDUSTRIE, appelante
Vu les conclusions déposées le 20 décembre 2013 par [D] [K], intimé ;
Ouï les parties en leurs explications orales à l'audience du 16 janvier 2014 ;
La Cour,
Attendu que suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er mars 1989, [D] [K] été embauché en qualité de 'merchandiser' (sic),la Cour qui s'en tient à l'ordonnance de VILLERS-COTTERÊTS ignorant tout de la signification d'un tel vocable qui n'appartient pas au vocabulaire français, par une société FP DISTRIBUTION ;
qu'à compter du 1er septembre 1992 le contrat de travail a été transféré à la S.A.S. MJ INDUSTRIEqui exploite une activité de négoce de produits d'équipements sanitaires et de jardin commercialisés auprès des enseignes de la grande distribution alimentaire et de bricolage ;
que par la suite [D] [K] a été promu chef de région puis directeur des ventes ;
qu'il a été licencié pour motif économique le 03 novembre 2011 ;
Attendu que saisi à la requête du salarié le 07 décembre 2011, le Conseil de Prud'hommes d'OYONNAX a notamment, par jugement du 20 décembre 2012 :
- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamné en conséquence la S.A.S. MJ INDUSTRIE à payer à [D] [K]
1° la somme de 15 102,60 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 1 510,26 € pour les congés payés y afférents,
2° la somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts ;
Attendu que la société MJ INDUSTRIE a régulièrement relevé appel de cette décision le 10 janvier 2013 ;
Attendu que contrairement à ce qu'a estimé le Conseil de Prud'hommes, il n'apparaît pas de bonne justice à la Cour de grouper en une seule cause des instances engagées par cinq salariés contre le même employeur dès lors que les situations respectives des uns et des autres sont différentes et que si les intérêts des salariés sont semblables, ils ne sont cependant pas liés ;
que la Cour ordonnera donc la disjonction des instances conformément aux dispositions de l'article 367 du Code de Procédure Civile ;
que la procédure d'appel opposant la S.A.S. MJ INDUSTRIE à [D] [K] se poursuivra sous le numéro 14/2414 du répertoire général ;
Attendu que la lettre de licenciement du 03 novembre 2011 fixe les limites du litige ;
qu'il est longuement expliqué dans cette missive que la forte hausse des matières premières ainsi que des salaires en Chine qui ne peut être répercutée sur les clients par des augmentations tarifaires a entraîné une importante baisse d'activité de la société ayant conduit à un résultat négatif, de sorte que seul le secteur 'jardin' restant rentable pourra continuer à être exploité ;
qu'il est précisé que malgré les recherches effectuées, aucune solution de reclassement en interne n'a été trouvée et que [D] [K] n'ayant pas accepté les solutions de reclassement qui lui ont été proposées au sein de l'ensemble des sociétés du groupe ABCIA dont la société appelante fait partie, cette dernière est contrainte de procéder à son licenciement ;
Attendu que la société MJ INDUSTRIE soutient que les difficultés évoquées dans la lettre de licenciement précitée concernent l'ensemble du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ;
Attendu cependant que la lettre de licenciement ne contient aucune précision à ce sujet et qu'elle n'indique pas quelles sont les sociétés du groupe ABCIA qui exercent une activité dans le même secteur industriel et commercial que la société MJ INDUSTRIE ;
que les pièces produites aux débats par la société appelante ne permettent pas davantage de savoir quelles pourraient être ces sociétés ;
qu'ainsi, le salarié n'a pas été mis en mesure de vérifier que les difficultés économiques évoquées par la lettre de licenciement concernaient l'ensemble des sociétés du groupe ABCIA exploitant une activité de même nature dans le secteur du négoce des équipements sanitaires ;
Attendu que les pièces versées aux débats par la société appelante ne démontrent pas davantage que l'activité de négoce des équipements sanitaires était déficitaire et qu'il convenait de la supprimer pour assurer la compétitivité et la pérennité de l'entreprise ;
Attendu que vainement la société appelante se prévaut-elle du déficit comptable d'un million d'Euros par elle enregistré pour l'année 2011 alors qu'elle a, pour ce même exercice, consigné une provision pour risques de 400 000 € et effectué un report de charges exceptionnelles pour 766 827 €, sans qu'aucune explication argumentée et documentée ne soit fournie à cet égard ni dans la lettre de licenciement ni aux débats ;
Attendu qu'il ressort de ce qui précède que la lettre de licenciement est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait référence qu'à une situation comptable nullement justifiée et, de facto, purement artificielle, et sans que soit établie la nécessité de supprimer l'activité de négoce d'équipements sanitaires et le poste jusqu'alors occupé par le salarié ;
Attendu en conséquence que la décision querellée sera confirmée en ce qu'elle a déclaré le licenciement de [D] [K] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Attendu que les premiers juges ont exactement apprécié le préjudice subi par [D] [K] ensuite d'un licenciement abusif ;
Attendu que le fait que le salarié ait, sous la contrainte économique, accepté de signer un contrat de sécurisation professionnelle, ne saurait le priver de son droit à indemnité compensatrice de préavis ;
Attendu qu'en définitive, le jugement attaqué sera intégralement confirmé ;
Attendu que pour assurer la défense de ses intérêts devant la Cour, l'intimé a été contraint d'exposer des frais non inclus dans les dépens qu'il paraît équitable de laisser, au moins pour partie, à la charge de la société appelante ;
que celle-ci sera donc condamnée à lui payer une indemnité de 2 000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
En la forme, déclare l'appel recevable ;
Ordonne la disjonction de l'instance opposant la S.A.S. MJ INDUSTRIE à [D] [K] sous le numéro 14/2414 du répertoire général ;
Au fond, dit l'appel injustifié ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Condamne la S.A.S. MJ INDUSTRIE à payer à [D] [K] une indemnité de 2000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
La condamne aux dépens.
Le Greffier, Le Président,
Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS