AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 14/03632
société D.B.S.
C/
[D]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 07 Avril 2014
RG : F 12/02898
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2015
APPELANTE :
société D.B.S.
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Jérôme LETANG de la SELARL JEROME LETANG, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
[C] [D]
né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (69)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Bertrand GONNET, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Juin 2015
Présidée par Vincent NICOLAS, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Michel BUSSIERE, président
- Agnès THAUNAT, conseiller
- Vincent NICOLAS, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 29 Septembre 2015 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Michel BUSSIERE, Président et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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[C] [D] a été engagé par la société D.B.S en qualité de mécanicien poids lourds et engins de chantier, selon un contrat à durée indéterminée du 18 août 2008.
Le 29 mars 2010 il a été victime d'un arrêt de travail, et mis en arrêt de travail.
Dans le cadre de la visite de reprise, le médecin du travail, à l'issue du premier examen le 12 décembre 2011, puis du second le 27 décembre suivant, l'a déclaré inapte à son poste de mécanicien.
Par lettre du 18 janvier 2012, la société D.B.S l'a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, et par lettre du 26 janvier suivant, elle l'a licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.
Le 23 juillet 2012, [C] [D] a saisi le conseil de prud'homme de Lyon en lui demandant de condamner la société D.B.S à lui payer des dommages-intérêts pour défaut de consultation des délégués du personnel et manquement à l'obligation de reclassement, outre une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 7 avril 2014, le conseil de prud'homme a :
- déclaré nul le licenciement ;
- condamné la société D.B.S à payer à [C] [D] 30.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, outre 850 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté [C] [D] du surplus de ses demandes ;
- débouté la société D.B.S de ses demandes.
Par déclaration envoyée au greffe le 2 mai 2014, la société D.B.S a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 9 avril 2014.
Par un écrit distinct et motivé déposée le 23 septembre 2014, la société D.B.S a présenté une demande d'examen d'une question prioritaire de constitutionnalité.
Par arrêt du 13 mai 2015, la présente cour a rejeté la demande de transmission à la cour de cassation de cette question prioritaire de constitutionnalité.
Vu les conclusions écrites de la société D.B.S remises au greffe le 8 juin 2015 et reprises oralement à l'audience, par lesquelles elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement ;
- principalement, débouter [C] [D] de toutes ses demandes ;
- subsidiairement, fixer en application de l'article L.1235-2 du code du travail à au plus un mois de salaire l'indemnité réclamée par ce dernier ;
- le condamner à lui payer 1.850 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions écrites de [C] [D] remises au greffe le 15 juin 2015 et reprises oralement à l'audience, par lesquelles il demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il dit que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de consultation des délégués du personnel et à son obligation de reclassement et en ce qu'il condamne la société D.B.S à lui payer 850 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- l'infirmer en ce qu'il fixe à 30.000 € les dommages-intérêts ;
- condamner la société D.B.S à lui payer 36.450 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;
- la condamner aussi à lui payer 10.000 € à titre de dommages-intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile, ainsi que la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour de plus amples relations des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, visées par le greffier, oralement reprises.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu qu'au soutien de sa demande de dommages-intérêts, [C] [D] fait valoir que les délégués du personnel n'ont pas été consultés préalablement à son licenciement ;
Attendu que la société D.B.S, qui ne conteste pas ce défaut de consultation et l'absence d'établissement d'un procès-verbal de carence, soutient que :
- seule la réalité d'un préjudice peut conduire à l'indemnisation minimale prévue par l'article L.1226-15 du code du travail ;
- [C] [D] n'établit pas la réalité de ce préjudice
Mais attendu que selon l'article L.1226-10 du code du travail, l'employeur doit prendre l'avis des délégués du personnel avant de proposer un poste de reclassement à un salarié déclaré inapte ; que la méconnaissance de cette formalité substantielle emporte les mêmes conséquences que celles de la méconnaissance par l'employeur de l'obligation de reclassement ; que cette situation ouvre droit, en l'absence de réintégration du salarié, à l'indemnité prévue par l'article L.1226-15 du code du travail, qui ne peut être inférieure à douze mois de salaire ; que s'agissant d'une sanction civile, le salarié n'a pas à prouver l'existence de son préjudice, sauf s'il sollicite le paiement d'une indemnité supérieure à douze mois de salaire ; qu'en l'espèce, l'omission de la consultation des délégués du personnel et l'absence d'établissement par la société D.B.S d'un procès-verbal de carence rend le licenciement illicite et ouvre droit au bénéfice de [C] [D] à l'indemnité minimale de douze mois de salaire ; que l'article L.1235-2 est applicable seulement en cas d'inobservation de la procédure de licenciement, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que [C] [D] n'établit pas avoir subi un préjudice non réparé par l'allocation de cette indemnité minimale ; que compte tenu de la rémunération qui lui était versée, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1226-15 du code du travail, sur la base d'un salaire mensuel brut de 2.450 €, une indemnité de 29.400 € ;
Sur la demande en paiement de dommages-intérêts en vertu de l'article 32-1 du code de procédure civile :
Attendu qu'il n'apparaît pas que la société D.B.S a fait dégénérer en abus son droit de résister aux prétentions de son adversaire ; que ce chef de la demande de [C] [D] sera par suite rejetée ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement, sauf sur le montant des dommages-intérêts alloués ;
Et statuant à nouveau,
Condamne la société D.B.S à payer à [C] [D] une indemnité de 29.400 € en application de l'article L.1226-15 du code du travail ;
Y ajoutant,
Déboute [C] [D] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ou dilatoire ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société D.B.S et la condamner à payer à [C] [D] la somme de 2.000 € ;
La condamne aux dépens d'appel.
Le greffierLe président
Sophie MascrierMichel Bussière