R.G : 14/02585
décision du
Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond
du 29 janvier 2014
RG : 12/03081
ch n°1
[X]
[B]
[I]
[I]
[I]
C/
[A]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 01 Décembre 2015
APPELANTS :
M. [N] [X]
né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représenté parla SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
Assisté de la SCP DEYGAS-PERRACHON et ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Mme [S] [B] épouse [X]
née le [Date naissance 3] 1945 à [Localité 6] (USA)
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
Assistée de la SCP DEYGAS-PERRACHON et ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Mme [Q] [M] [I]
née le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 2]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
Assistée de la SCP DEYGAS-PERRACHON et ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Mme [O] [I]
née le [Date naissance 5] 1969 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
Assistée de la SCP DEYGAS-PERRACHON et ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Mme [F] [I]
née le [Date naissance 6] 1971 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
Assistée de la SCP DEYGAS-PERRACHON et ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
Mme [T] [A] épouse [E]
née le [Date naissance 4] 1962 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par la SELARL DREZET- PELET, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 04 Mars 2015
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Novembre 2015
Date de mise à disposition : 01 Décembre 2015
Audience tenue par Marie-Pierre GUIGUE, conseiller et Michel FICAGNA, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier
A l'audience, Marie-Pierre GUIGUE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Jean-Jacques BAIZET, président
- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller
- Michel FICAGNA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur et madame [X] sont propriétaires d'un tènement immobilier comprenant une maison d'habitation sise à [Localité 1] et constitué des parcelles cadastrées section AD n° [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] lieudit [Localité 3].
Les consorts [I] sont propriétaires d'un tènement comprenant une maison d'habitation cadastré section AD n°[Cadastre 3] situé à l'est du tènement des époux [X], les deux propriétés étant séparées par la partie sud du chemin de [Adresse 1] d'une longueur d'environ 150 m.
Ce chemin privé d'une largeur de 6 m comporte une voie de circulation et est cadastré AD n°[Cadastre 7].
La propriété de ce chemin a été revendiquée tant par les époux [X] et les consorts [I] que par Madame [T] [E] propriétaire d'un tènement situé dans la partie Nord du chemin de [Adresse 1] séparé par la [Adresse 3].
Par acte délivré le 17 Janvier 2012, monsieur et madame [X] et les consorts [I] ont cité Madame [T] [E] devant le tribunal de grande instance de Lyon en revendication de la propriété indivise du chemin.
Par jugement du 29 janvier 2014, le tribunal a':
-débouté monsieur et madame [X] et les consorts [I] de leur action en revendication,
-débouté madame [E] de sa demande aux fins de se voir reconnaître seule propriétaire de la même parcelle cadastrée AD n° [Cadastre 7],
-dit que les parties au litige possèdent chacune des droits indivis sur la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 7],
-débouté les parties du surplus de leurs demandes,
-laissé à la charge de chacune des parties ses propres dépens.
Monsieur et madame [X] et les consorts [I] ont relevé appel et demandent à la cour' sur le fondement des articles 544 et suivants, 2258, 2255 et suivants, et 2272 et suivants du Code civil de':
-réformer le jugement dont appel,
-dire et juger recevable et bien fondée l'action en revendication intentée par monsieur et madame [X] et les consorts [I] afin de faire reconnaître leur droit de propriété indivis sur la parcelle AD5,
-déclarer en conséquence monsieur et madame [X] et les consorts [I] propriétaires indivis de la parcelle cadastrée section AD [Cadastre 7] pour une superficie de 9 ares, 02 centiares, sur le territoire de la commune de Fontaines-Sur-Sane, et condamner madame [T] [E] à la leur restituer, libre de toutes charges et servitudes qu'elle aurait pu consentir,
-débouter de madame [E] de son appel incident et de toutes ses demandes,
-condamner madame [E] à leur payer une somme de 5000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
-la condamner aux dépens de première instance que d'appel, ceux-ci distraits au profit de la SCP Aguiraud & Nouvellet, sur son affirmation de droit, ainsi qu'à supporter les frais de publication de la décision de justice à intervenir.
Ils font valoir':
-que monsieur et madame [X] et les consorts [I] possèdent de façon continue, publique, paisible et non équivoque depuis trente ans au moins le chemin de [Adresse 1] dans sa partie Sud, c'est-à-dire située entre la [Adresse 3], lieu-dit « [Localité 3] », cadastrée section AD [Cadastre 7], d'une superficie de 9 ares, 02 centiares sur le territoire de la commune de [Localité 1],
-que cette possession est dûment caractérisée par des actes d'entretien régulier, d'aménagement et par un usage à titre de desserte unique, chacune des deux propriétés disposant pour la première, de deux portails d'accès, et pour la seconde, d'un portail d'accès et de deux portes piétons sur ladite voie,
-que notamment des conventions de servitude établies avec des tiers, des travaux réalisés, des échanges avec l'administration ainsi qu'avec l'ancien propriétaire du bien de madame [E] depuis 1978 établissent cette possession plus que trentenaire, ce que confirme le témoignage de monsieur [ZA], secrétaire de la commune dans les années 1970 à 1990,
-que le tribunal a considéré à tort qu'un règlement de l'époux de madame [E] de 358, 80 euros à titre de quote-part de l'entretien du chemin par lettre du 5 avril 2001 contredisait cette possession amplement établie par les pièces produites alors qu'elle ne concernait qu'une participation aux frais de fauchage et d'entretien de la parcelle AD [Cadastre 7] en raison du droit de passage sur le chemin privé consenti à monsieur [W], gérant de la SCI [Adresse 1],
-que cette lettre ne vaut pas démonstration d'un droit de propriété de l'adversaire ni interruption de la possession et n'est corroboré par aucune mention du titre de propriété de l'adversaire contrairement à ce qu'a retenu le tribunal,
-que les consorts [X]-[I] justifient encore leur propriété indivise sur le chemin grâce à la production de titres antérieurs pourvus d'une force probante, celui des époux [X] précisant que la vente comprend tous droits de copropriété sur le chemin de [Adresse 1] et reprend sur ce point les actes antérieurs, alors que Madame [E] ne fonde, elle, son argumentation que sur un acte récent ne permettant pas de retrouver l'origine de propriété qu'elle revendique,
-que leurs titres de propriété mentionnent ainsi dans les confins le chemin de [Adresse 1] qualifié de privé et que les titres des époux [X] font explicitement référence depuis 1945 de «'tous droits de copropriété sur le chemin de [Adresse 1]'»,
-que Madame [E] s'est considérée à tort comme seule propriétaire de cette parcelle, et a entendu exercer sans titre les attributs de cette propriété courant 2011, notamment en concédant à la société GRDF ou à d'autres concessionnaires, tel SIGERLY, des autorisations destinées à permettre l'implantation d'ouvrages sous le chemin,
-que le tribunal ne pouvait sans contradiction les débouter de leur action en revendication de propriété tout en reconnaissant un droit de copropriété sur le chemin.
Madame [E] demande à la cour de':
Vu les articles 544, 2262 et suivants, 1382 du code civil,
Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [X]-[I] de leur demande de voir qualifier la parcelle AD5 comme leur propriété exclusive,
Infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que les consorts [X]-[I] et Madame [E] seraient détenteurs de droits indivis sur la parcelle AD5,
En conséquence,
Dire et juger que Madame [E] est seule propriétaire du chemin cadastré section AD n° [Cadastre 7], dénommé Lieudit [Localité 4], sis commune de [Localité 1],
Dire et juger qu'aucune prescription acquisitive ne confère la propriété dudit chemin cadastré section AD n° [Cadastre 7] aux consorts [X]-[I],
Dire et juger que Madame [E], seule propriétaire du chemin cadastré section AD n°[Cadastre 7], a consenti une servitude de passage aux consorts [X]-[I],
En tout état de cause,
Condamner in solidum les consorts [X]-[I] à lui payer la somme de 2500 euros en réparation de son préjudice,
Condamner les consorts [X]-[I] à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance.
Madame [E] soutient':
-que l'acte de vente de 1999 entre la SCI de [Adresse 1] et madame [G] précise que la parcelle AD [Cadastre 7] appartient à l'acquéreur et que le vendeur précise, selon titre verbal et tacite, répartir l'entretien entre madame [X] et madame [I],
-que le tribunal ne pouvait retenir un droit de copropriété sur le chemin qui n'est établi par aucun des titres produits, ni par accord des parties ou prescription acquisitive,
-que les demandeurs ont participé à l'entretien du chemin sans en revendiquer la propriété et ont toujours été informés qu'ils bénéficiaient seulement d'un droit de passage avec partage des frais d'aménagement et d'entretien entre les différents utilisateurs pour lesquels monsieur [X] a toujours demandé une autorisation à la SCI [Adresse 1],
-que les demandeurs ne peuvent invoquer aucune possession paisible publique, continue, ininterrompue, non équivoque mais ont joui d'une simple tolérance,
-que les conventions de servitude invoquées par les demandeurs ne concernent nullement le chemin litigieux,
-que la mention «'tous droits de copropriété'» du titre des époux [X] est impropre et doit être qualifiée de servitude de passage,
-que les demandeurs l'ont privée de l'accès à sa propriété par le chemin litigieux ainsi qu'il ressort d'un constat d'huissier du 5 juin 2014 ce qui justifie, sur son appel incident, une indemnisation à hauteur de 2500 euros.
MOTIFS
Monsieur et madame [X] et les consorts [I] fondent leur action en revendication sur la prescription acquisitive trentenaire de l'article 2272 du code civil confortée par les titres.
Il leur appartient, en conséquence, de rapporter la preuve d'avoir pendant ce délai bénéficié d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de seuls propriétaires sur la portion revendiquée du chemin de [Adresse 1] cadastrée AD n°[Cadastre 7].
A l'examen des pièces communiquées entre les parties, les faits de possession justifiés par les appelants sont les suivants:
-Signature de convention de servitude par Messieurs [K] et [N] [X] et par Monsieur [I], conventions en dates des 8, 26 et 28 juin 1978.
Contrairement à ce que soutient Madame [E], ces pièces sont probantes de la possession à titre de propriétaire de cette parcelle AD [Cadastre 7] par les consorts [X]-[I].
En effet, les conventions passées avec EDF-GDF en 1978 concernent bien le chemin de [Adresse 1] dans la partie litigieuse selon le libellé des trois conventions.
Il y est précisé qu'EDF GDF s'adresse aux propriétaires [X] et [I] au titre de « l'occupation de propriété privée par une canalisation de gaz'».
Il n'est produit en défense aucune convention similaire qui aurait été proposée par EDF GDF aux auteurs de madame [E].
La lecture du plan annexé à la convention signée par Monsieur [N] [X] identique à celles également signées par Monsieur [K]
[X], d'une part, et Monsieur [I], d'autre part, communiquée ensuite d'une sommation délivrée en cause d'appel, plan annexé à la convention d'EDF-GDF produite en pièce 20, permet de constater que la servitude EDF GDF en 1978 portait bien sur la partie du chemin de [Adresse 1] en litige ainsi qu'il ressort sur le plan du positionnement de la canalisation à la perpendiculaire de la rue [Adresse 2], entre les rues Berthelot et Pasteur par comparaison avec le plan cadastral en pièce 5.
Madame [E] ne peut donc valablement soutenir qu'au vu dudit plan, la servitude consentie porterait sur une parcelle cadastrée CD n° [Cadastre 6].
Cette référence sert en effet à identifier le chemin départemental n°[Cadastre 6] situé à la perpendiculaire de la partie du chemin de [Adresse 1] litigieux.
Le chemin apparaissant sur le plan, objet de la servitude, consiste donc en une emprise sur la parcelle n° AD [Cadastre 7] constituant la voie privée dont l'utilisation était nécessaire à EDF-GDF.
Il est ainsi établi qu'en 1978, les consorts [X]-[I] avaient la libre disposition et la jouissance de cette voie dont ils étaient considérés comme propriétaires par EDF GDF.
-Signature d'une convention de servitude avec la Communauté Urbaine de LYON en juillet 1986 par Monsieur [N] [X] et Monsieur [I] pour des travaux d'assainissement.
Il ressort de la pièce 21, échange de correspondances et convention de servitude entre la Communauté urbaine de Lyon et Monsieur [N] [X] du 3 juillet 1986 et de la pièce 22, échange de correspondances et convention de servitude entre la Communauté urbaine de Lyon et Monsieur [I] du 3 juillet 1986, que Messieurs [K] et [N] [X] et monsieur [I] ont signé une convention de passage sur le chemin privé cadastré AD n°[Cadastre 7] lieu dit [Localité 3].
La Communauté Urbaine de Lyon s'adresse à messieurs [X] et [I] en qualité de copropriétaires de la parcelle AD [Cadastre 7] lieu dit [Localité 3] ce qui correspond à la parcelle litigieuse [Adresse 1], ce que reprend la convention intitulée 'pour l'autorisation de passage en terrain privé des canalisations évacuant des eaux usées et pluviales'.
-Il ressort des pièces produites 23 à 27 que différents travaux ont été réalisés à l'initiative des propriétaires indivis sur le chemin, et à leurs frais exclusifs, tels que':
-branchement distribution et compteur eau en juin 1982,
-raccordement à l'égout à titre personnel en 1986 ;
-pose gabarit de hauteur pour limiter l'accès du chemin en 1990,
-pose borne escamotable interdisant l'accès aux véhicules non autorisés en 2001,
-entretien par eux-mêmes ou par un tiers et réparation borne escamotable en 2002, 2007 et le 12 septembre 2009.
-Des échanges avec l'administration établissent que messieurs [X] et [I] étaient considérés comme possesseurs et copropriétaires de la parcelle en cause en pièce 28, lettre de la Communauté Urbaine de LYON à monsieur [X] du 8 juin 2001 concernant une autorisation de travailler sur la parcelle avec compte rendu de réunion et pièce 29, lettre du 6 juillet 2001 de la Communauté urbaine de LYON à Messieurs [X] et [I] avec plan en annexe.
La Commune de [Localité 1] avait demandé diverses autorisations de passage aux familles [X] et [I] par courriers des 1er avril 1996, 27 janvier 2003 et 26 janvier 2007 les considérant comme personnes ayant qualité pour donner une autorisation de passage sur le chemin privé.
-Des échanges de lettres entre monsieur [W], gérant de la SCI [Adresse 1] (alors propriétaire du tènement vendu à Madame [E]) et monsieur [X] établissent que celui-ci était bien considéré par son voisin comme un propriétaire de la parcelle AD n°[Cadastre 7].
En effet, monsieur [X], dans sa lettre du 30 juin 1988, écrivait au gérant de la SCI [Adresse 1] afin de le prévenir des travaux envisagés de pose de panneaux sens interdit en ces termes': « Or, comme vous le savez, ce tronçon a conservé le caractère de propriété privée sur lequel vous bénéficiez d'un droit de passage», puis lui écrivait le 5 octobre 1988 qu'il envisageait la pose d'une chaîne ou d'un dos d'âne afin de limiter les passage sur le chemin privé de [Adresse 1].
Dans sa réponse du 10 octobre 1988, pièce 31, monsieur [W] répondait sur l'efficacité de l'une ou l'autre des solutions et suggérait la pose d'une borne sans aucunement contester le fait que le chemin 'a conservé le caractère de propriété privée sur lequel vous bénéficiez d'un droit de passage'.
En pièce 23 bis, est communiqué un courrier signé de madame [Z] du 7 août 1993 par lequel la SCI [Adresse 1] demandait à monsieur [X] de laisser déposée la barre métallique empêchant l'accès au chemin jusqu'au 1er octobre afin de permettre le passage direct d'une ambulance.
Le Tribunal a cependant considéré que si les consorts [X]-[I] prouvaient une possession plus que trentenaire, un courrier de monsieur [U] [E], époux de Madame [T] [E], accompagnant le règlement d'une somme de 358,80 euros au règlement d'une quote-part concernant l'entretien du chemin, contredisait la possession continue, paisible, publique et non équivoque invoquée par les consorts [X]-[I]
Les premiers juges ont considéré que la mention dans ce courrier, d'une «copropriété chemin de [Adresse 1] » confirmait l'existence d'un chemin invidis entre l'ensemble des parties, ce qui serait rappelé dans l'acte de propriété de Madame [E] en date du 6 janvier 2000.
Le tribunal en a tiré l'existence d'une copropriété du chemin entre les parties au litige.
Toutefois, la cour retient que les appelants ont démontré des faits de possession continue, paisible, publique et non équivoque du chemin litigieux en se comportant comme propriétaires vis à vis des tiers, assurant en particulier l'entretien et le règlement des autorisations juridiques concernant la parcelle au moins depuis 1978 et même depuis une période bien antérieure si l'on se reporte au témoignage de Monsieur [V] [ZA] en date du 16 novembre 2012, lequel occupait les fonctions de secrétaire général de la commune.
Dans ce témoignage, monsieur [ZA], qui précise avoir exercé ses fonctions du 1er septembre 1972 au 2 avril 1999, déclare que ces propriétaires riverains du chemin avaient autorisé le passage pour se rendre à la salle des sports située rue du Stade mise en service le 20 septembre 1973 et que cette autorisation a duré jusqu'en 1990.
Par ailleurs dans le courrier de Monsieur [E] en date du 5 avril 2001, la mention 'copropriété [Adresse 1]' figure en référence du courrier et ne constitue pas l'affirmation d'un droit de propriété qui aurait été contenu dans le texte de la lettre.
Cette lettre exprime seulement l'adhésion des époux [E] à l'accord de participation aux frais de fauchage et d'entretien de la parcelle AD[Cadastre 7] en considération d'une autorisation de passage sur le chemin.
La mention faite par monsieur [E] « références : copropriété [Adresse 1] » confirme certes l'existence d'une copropriété sans pour autant établir une propriété indivise entre toutes les parties au litige, étant relevé que madame [E] ne produit aucun autre écrit ou pièce faisant état de cette situation.
Cette correspondance ne fait donc que confirmer le fait que les consorts d'Aubarège-Adenot se comportaient bien en copropriétaires du chemin mais ne caractérise pas une interruption du délai de prescription acquisitive trentenaire.
Le partage par quart de cette facture par les usagers du chemin est confirmée par la lettre de monsieur [H] produite par l'intimée dans laquelle ce voisin fait état de son droit de passage sur le chemin litigieux sans prétendre en être propriétaire.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments une possession continue, paisible, publique et non équivoque, qui est démontrée pour la période comprise entre 1973 et 2011, à titre de propriétaire du chemin litigieux parcelle cadastrée AD5 par les époux [X] et les consorts [I] remplissant les conditions posées par les articles 2261 et 2276 du code civil.
Concernant la confrontation des titres de propriété, il est de principe que le titre ne permet pas en lui-même d'établir d'une façon absolue le droit de propriété alors que le cadastre ne constitue qu'un indice. En présence de plusieurs titres contradictoires, il appartient au Juge de procéder à la confrontation des actes pour accorder la préférence à celui qui lui paraît le plus probant.
Constatant l'existence d'une contradiction, le premier juge a conclu à l'existence d'une copropriété indivise entre toutes les parties concernées.
Or, les titres de propriété des auteurs des demandeurs, acte de vente du 9 février 1945 pour les époux [X] et acte de vente du 19 septembre 1944 pour les consorts [I] contiennent, en termes identiques, une désignation des biens vendus avec pour confins le chemin de [Adresse 1] et précisent que les biens sont vendus "y compris tous droits de copropriété sur le chemin de [Adresse 1]'».
L'acte de vente de madame [E] du 6 janvier 2000 désigne dans les biens vendus la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 7] correspondant au chemin litigieux sans faire état de droit de copropriété.
Les titres de propriété produits par les appelants mentionnent ainsi un droit de copropriété sur le chemin alors que le titre plus récent de madame [E] fait mention de la vente de la parcelle correspondant au chemin litigieux.
Cependant, madame [E] ne produit pas de titre antérieur à 1999 faisant mention du chemin de [Adresse 1].
Contrairement à l'appréciation du tribunal, l'acte de constitution de la SCI par les consorts [P]-[W] du 30 décembre 1946 ne mentionne pas la parcelle litigieuse et ne vise pas même un chemin privé.
Madame [E] a acquis sa propriété de Madame [Y] [RX], divorcée [G], suivant acte passé le 6 janvier 2000. Madame [RX]-[G], marchand de biens, avait elle-même acheté cette propriété le 4 juin 1999 à la SCI « [Adresse 1] ».
L'origine de propriété figurant dans l'acte d'acquisition de Madame [E] du 6 janvier 2000 précise que différentes parcelles ont été acquises par monsieur [P] entre 1922 et 1936 et que la parcelle (1 hectare 98 ares 32 centiares) a été acquise par ses trois filles mesdames [D], [C] et [W] auprès des consorts [R]-[L], suivant acte passé en l'Etude de Maître [FY] les 18 et 19 août 1944.
Dans cet acte notarié des 18 et 19 août 1944, il n'est fait aucune mention du chemin de [Adresse 1].
Les consorts [R]-[L] avaient vendu leur principale propriété à monsieur [WN] par acte passé le 5 mai 1944. Il était précisé dans cet acte antérieur que la vente comprenait « tous droits de copropriété sur le chemin de [Adresse 1] ».
Cette mention sera reprise dans l'acte de vente de la même propriété par monsieur et madame [WN] à Monsieur [K] [X] le 9 février 1945.
Enfin, lors de la constitution de la SCI [Adresse 1], mesdames [D], [C] et [W] ont fait apport de l'ensemble de ces parcelles héritées et acquises, suivant un acte de Maître [FY] du 30 décembre 1946, deux ans après l'achat par monsieur [K] [X] à Monsieur [WN] suivant acte du 9 février 1945 qui mentionnait déjà le droit de copropriété sur le chemin litigieux.
Face aux énonciations des titres de propriété plus anciens et à la chronologie des ventes, Madame [E] ne peut donc soutenir sur sa seule affirmation que la formulation « tous droits de copropriété sur le chemin de [Adresse 1] » figurant sur les titres de propriété antérieurs revendiqués par Monsieur [X] serait impropre et devrait être requalifiée en servitude de passage.
La mention figurant dans l'acte de vente entre la SCI de [Adresse 1] et madame [G] du 4 juin 1999 selon laquelle « la parcelle AD [Cadastre 7] appartient à l'acquéreur, et le vendeur précise à titre verbal et tacite répartir l'entretien de ce chemin» ne renferme que la déclaration du vendeur contredite par les différents titres antérieurs versés aux débats par les appelants ensuite de ventes successives intervenues à l'initiative des consorts [R]-[L] en 1944.
En ce qui concerne les éléments cadastraux, qui peuvent constituer des indices, mais non des éléments directs de preuve de la propriété, la cour relève'que seule la partie Nord du chemin de [Adresse 1] figurait au cadastre Napoléonien sous le numéro 28p section B et que le chemin nouvellement désigné AD [Cadastre 7] « en [Localité 3] » n'a été affecté à la SCI [Adresse 1] qu'à l'occasion de la rénovation cadastrale en 1954 par une circulaire adressée à cette société postérieurement aux actes sus-énoncés transférant la copropriété du chemin aux consorts [X]-[I].
Il convient de souligner également que le plan d'alignement du 20 décembre 1869 établi par l'administration et approuvé par l'autorité préfectorale produit en appel en pièce 45 comporte sur le chemin de [Adresse 1] séparant les propriétés actuellement [X]-[I] (cette dernière étant à l'époque propriété [L]) la mention« desserte », ce qui vient confirmer que ce chemin était bien un chemin de desserte présumé appartenir aux riverains dont l'accès aux propriétés est permis par de telles voies.
En conclusion, il ressort de l'ensemble de ces éléments que les consorts [X][I] justifient du bien-fondé de leur action en revendication de la parcelle cadastrée AD n°[Cadastre 7].
Il convient, par réformation du jugement entrepris, de déclarer les époux [X] et les consorts [I] propriétaires indivis de la parcelle cadastrée section AD [Cadastre 7] pour une superficie de 9 ares, 02 centiares, sur le territoire de la commune de [Localité 1] et de condamner Madame [T] [E] à la leur restituer, libre de toutes charges et servitudes qu'elle aurait pu consentir.
En conséquence, Madame [E] sera déboutée de sa demande en revendication de propriété de la dite parcelle.
Madame [E] ne rapporte pas la preuve d'une attitude procédurale fautive de ses adversaires dont l'action en revendication avait été partiellement accueillie par le premier juge et est admise par la cour.
La demande d'indemnisation pour trouble de jouissance ne peut prospérer dès lors que madame [E] a intenté une action distincte pour obstruction à son droit de passage et qu'il résulte Elle allègue un trouble de jouissance résultant de la volonté fautive des appelants et du rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur [J] dans le cadre du litige avec la société GRT GAZ que la borne a été détériorée durant les travaux réalisés par les entreprises mandatées par GRT GAZ, le coût des travaux de remise en état étant évalué par l'expert à la somme de 4188 euros.
Madame [E] doit donc être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Le jugement constatant la propriété de l'une des parties à l'instance doit être publié en application de l'article 28 4° e du décret n°55-22 du 4 janvier 1955.
Madame [E], qui succombe, supporte les dépens de première instance et d'appel, y compris les frais de publication de l'arrêt, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement,
Déclare monsieur et madame [X] et les consorts [I] propriétaires indivis de la parcelle cadastrée section AD n° [Cadastre 7] pour une superficie de 9 ares, 02 centiares, sur le territoire de la commune de [Localité 1],
Condamne madame [T] [E] à leur restituer la dite parcelle, libre de toutes charges et servitudes qu'elle aurait pu consentir,
Déboute madame [E] de sa demande en revendication de propriété et en dommages et intérêts,
Condamne madame [E] à payer à monsieur et madame [X] et aux consorts [I], ensemble, la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande présentée par madame [E] sur le même fondement,
Condamne madame [E] aux dépens de première instance et d'appel avec pour ces derniers droit de recouvrement direct au profit de la SCP Aguiraud & Nouvellet, avocats ainsi qu'à supporter les frais de publication de l'arrêt en application de l'article 28 4°e du décret n°55-22 du 4 janvier 1955.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT