R.G : 15/03583
Décision du tribunal de grande instance de Lyon
Au fond du 07 avril 2015
4ème chambre
RG : 07/02610
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 05 Janvier 2017
APPELANTS :
[S] [Z]
né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
assisté de la SELARL PINET - BARTHELEMY - OHMER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
[Z] [O] épouse [Z]
née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 2]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
assistée de la SELARL PINET - BARTHELEMY - OHMER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
INTIMEES :
MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par la SELARL BERARD - CALLIES ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
assistée de la SCP COMOLET MANDIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
SAS RHONE ALPES FONDATIONS
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER, avocat au barreau de LYON
assistée de la SELARL TACOMA, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 09 février 2016
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 novembre 2016
Date de mise à disposition : 05 janvier 2017
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Jean-Louis BERNAUD, président
- Françoise CLEMENT, conseiller
- Vincent NICOLAS, conseiller
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Jean-Louis BERNAUD a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Louis BERNAUD, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
****
Les époux [S] et [Z] [Z] sont propriétaires d'une maison d'habitation édifiée en 1983 située à SAIN BEL ( Rhône).
Ils ont souscrit le 1er septembre 1998 auprès de la compagnie d'assurances MACSF une police d'assurance multirisque habitation couvrant notamment les dommages subis par l'immeuble.
Le bâtiment a subi des désordres dans le délai de la garantie décennale, ce qui a conduit à l'instauration d'une expertise judiciaire confiée à Monsieur [H], lequel a conclu le 29 juin 1990 à l'existence d'une fissuration généralisée résultant d'un tassement différentiel des fondations dû à une erreur de conception et d'exécution.
Les travaux de soutènement préconisés par l'expert, consistant en la pose de micro pieux sous les murs porteurs, ont été réalisés en janvier 2003 par la société RHONE ALPES FONDATIONS.
De nouveaux désordres sont apparus au cours de l'été 2003, marqué par une importante canicule, à la suite d'un phénomène de gonflement et de retrait des sols argileux sous la construction.
Un arrêté de catastrophe naturelle, classant la commune de SAIN BEL comme zone sinistrée, a été pris le 11 janvier 2005.
Par acte d'huissier du 29 janvier 2007 les époux [Z] ont fait assigner la compagnie d'assurances MACSF en paiement du coût de la réparation des désordres causés par l'épisode caniculaire de 2003, demandant avant dire droit l'instauration d'une expertise judiciaire.
Une première expertise confiée à Madame [J] [X] a été ordonnée par le juge de la mise en état le 29 mai 2007, mais en raison de très nombreuses difficultés a donné lieu au dépôt d'un rapport en l'état.
Par jugement du 10 mai 2010 le tribunal de grande instance de Lyon a ordonné une nouvelle expertise confiée à Monsieur [N], dont les opérations ont été par la suite étendues à la société RHONE ALPES FONDATIONS.
L'expert a déposé son rapport le 27 février 2013, dont il résulte en substance que les désordres consistent en de nombreuses fissurations, en une désolidarisation du garage avec le pignon de la maison et en un décollement d'un faux plafond, que ces désordres sont dus à un phénomène de gonflement et de retrait des sols argileux sous la construction lors de la canicule de l'été 2003, que la construction n'était pas à l'abri des mouvements de sols du fait du caractère flottant du dallage qui n'avait pas été repris en sous-'uvre et qu'il convenait de mettre en place des micros pieux sous le dallage.
Sur la base de ce rapport les époux [Z] ont sollicité la condamnation de leur assureur à leur payer la somme de 254 498,98 € au titre du coût des travaux de remise en état retenus par l'expert, outre remboursement de leurs dépenses de réparation et d'investigations techniques et dommages et intérêts pour défaut de loyauté et de diligence dans le processus d'indemnisation.
Subsidiairement ils ont demandé la condamnation de la société RHONE ALPES FONDATIONS au paiement des mêmes sommes.
Par jugement du 7 avril 2015 le tribunal de grande instance de Lyon a débouté les époux [Z] de leur demande dirigée contre la société MACSF, mais a condamné la société RHONE ALPES FONDATIONS à leur payer la somme de 40 951,78 € en réparation de leurs préjudices, outre une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a considéré que la garantie catastrophes naturelles de l'assureur habitation n'était pas acquise sur le fondement de l'article L. 125'1 du code des assurances dès lors que les désordres, qui n'étaient pas inévitables, auraient pu être prévenus par une conception ou une modification de l'ouvrage adaptée à la nature argileuse du sol.
Le tribunal a en revanche estimé que la société RHONE ALPES FONDATIONS avait engagé sa responsabilité contractuelle pour n'avoir pas préconisé la réalisation de micro pieux sous le dallage flottant, ce qui était à l'origine d'un préjudice de perte de chance quantifié à 50 % des dommages en relation avec ce défaut de conseil.
Les époux [S] et [Z] [Z] ont relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 27 avril 2015.
Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 5 novembre 2015 par les époux [S] et [Z] [Z] qui demandent à la cour, par voie de réformation du jugement,
A titre principal
de condamner la MACSF à leur payer les sommes de :
' 254 498,98 € au titre des travaux de réparation avec intérêts capitalisés à compter du 11 avril 2005,
' 1 529,75 € au titre des travaux réalisés en novembre 2005 sur les canalisations affaissées,
' 19 913,40 € correspondant aux dépenses d'investigations techniques engagées dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire,
' 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'assureur à son obligation de loyauté et de diligence dans le processus d'indemnisation,
À titre subsidiaire
de condamner la société RHONE ALPES FONDATIONS au paiement des mêmes sommes sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil,
À titre infiniment subsidiaire
de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société RHONE ALPES FONDATIONS sur le fondement de la perte de chance en évaluant toutefois leur préjudice aux sommes de 100 000 € et de 19 913,40 €
En tout état de cause
de condamner qui mieux le devra à leur payer une indemnité de 15 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 23 décembre 2015 par la société MACSF Assurances qui demande à la cour :
A titre principal
de confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que les conditions de mobilisation de la garantie catastrophe naturelle n'étaient pas remplies,
À titre subsidiaire
de dire et juger que les désordres sont de nature décennale et engagent exclusivement la responsabilité de la société RHONE ALPES FONDATIONS, qui devra la relever et garantir intégralement.
À titre infiniment subsidiaire
de dire et juger qu'elle est en droit d'opposer aux demandes les plafonds de garantie et la franchise prévus à la police d'assurance et de réduire à de plus justes proportions le montant des demandes d'indemnisation,
En tout état de cause
de fixer au 24 mai 2013 le point de départ de la capitalisation des intérêts,
de condamner les époux [Z] à lui payer une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 32'1 du code de procédure civile,
de condamner les époux [Z] ou toute autre partie à lui payer une indemnité de 8 000 € pour frais irrépétibles.
Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 16 novembre 2015 par la SA RHONE ALPES FONDATIONS qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement,
A titre principal
de dire et juger que ni sa responsabilité civile décennale ni sa responsabilité contractuelle ne sont engagées et de rejeter en conséquence toutes les demandes formées à son encontre,
À titre subsidiaire
de confirmer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation à la somme de 40 951,78 € et de condamner la MACSF à la relever et garantir intégralement,
En tout état de cause
de condamner les époux [Z] et la compagnie MACSF à lui payer une indemnité de 2 000 € pour frais irrépétibles.
*
* *
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la garantie catastrophe naturelle de l'assureur multirisque habitation
Il est soutenu par les époux [Z] :
'' qu'il résulte clairement des opérations d'expertise judiciaire que tous les désordres trouvent leur origine exclusive dans l'épisode de sécheresse de l'année 2003, qui a entraîné un phénomène naturel de gonflement et de retrait du sol argileux d'une intensité anormale,
'' que toutes les mesures «habituelles» de prévention avaient été prises, puisque les travaux de remise en état préconisés par le premier expert judiciaire ([H]) avaient été intégralement exécutés par une entreprise hautement spécialisée avant la survenance du nouveau sinistre.
Il est répliqué par l'assureur :
'' que selon les deux experts commis les désordres sont la conséquence d'une erreur de conception et de construction du bâtiment du fait de l'absence du micro pieux en terrain argileux, l'épisode de sécheresse n'ayant été qu'un facteur déclenchant,
'' que la garantie catastrophe naturelle n'est donc pas acquise en l'absence de lien de causalité exclusif entre la sécheresse et la survenance des désordres.
Sur ce
Aux termes de l'article L. 125 '1 du code des assurances, qui impose à l'assureur de dommages aux biens situés en France de garantir l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, «sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs non assurables ayant pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises».
Il résulte des informations recueillies par l'expert judiciaire [M] [N], qui a été désigné par jugement du 10 mai 2010 après échec de la première mesure d'instruction technique confiée à Madame [J] [X]:
'' qu'à la suite de la première série de fissurations survenue en 1989 une expertise a été confiée à Monsieur [H] qui a estimé le 29 juin 1990 que les désordres étaient dus à un tassement de la maison en raison d'une mauvaise conception des fondations et qui a préconisé de fonder l'ensemble des murs porteurs sur des micropieux,
'' que les maîtres d'ouvrage ont été indemnisés par les constructeurs et leur assureur, mais n'ont pas immédiatement entrepris les travaux de confortement préconisés par l'expert sur les conseils d'une entreprise de maçonnerie qui avait estimé que les tassements étaient stabilisés,
'' que de nouveaux désordres sont survenus en 1998, qui n'ont pas toutefois été pris en charge par l'assureur multirisque habitation à défaut de réalisation des micro pieux,
'' que c'est dans ce contexte que les époux [Z] ont fait réaliser au cours des mois de décembre 2002 et de janvier 2003 par l'entreprise RHONE ALPES FONDATIONS les travaux préconisés par l'expert judiciaire [H],
'' que de nouveaux désordres importants dans les cloisons sont toutefois survenus au cours du mois de septembre 2003 à la suite de la canicule de l'été 2003, qui a fait l'objet le 11 janvier 2005 d'un arrêté de catastrophe naturelle classant la commune de SAIN BEL en zone sinistrée,
'' qu'une aggravation des désordres existants et de nouveaux désordres sont apparus en 2005 (désolidarisation du mur pignon de la charpente du garage, fissures dans le sol du garage et aggravation des fissures en façade et dans les cloisons).
Après avoir entrepris des investigations géotechniques confiées à un maître d''uvre spécialisé, lequel a considéré que compte tenu de la nature du sol argileux très sensible aux phénomènes de gonflement et de retrait la solution de traitement de sol par injection de résine n'était pas envisageable, l'expert judiciaire [N], en accord avec l'expert de la MACSF, a considéré que le remède le plus adapté consistait en la création d'une dalle portée sur longrines et micropieux dans la partie habitation.
Analysant la cause des désordres survenus à la suite de l'épisode caniculaire de 2003, l'expert [N] a notamment constaté et estimé :
'' qu'il résultait clairement et sans ambiguïté de l'ensemble des investigations que les désordres sont liés à la nature du sol argileux très sensible aux phénomènes de gonflement et de retrait,
'' que l'expert [H], qui n'a pas disposé de données géotechniques sur le degré de sensibilité du sol aux variations hydriques, a considéré que les premiers désordres étaient dus au tassement différentiel des fondations sous les murs porteurs, ce qui l'a amené à ne préconiser la pose de micropieux que sous les semelles,
'' que la non prise en compte des caractéristiques des argiles est à l'origine des désordres constatés à chaque sécheresse,
'' que la canicule de l'été 2003 a causé les désordres constatés en septembre 2003, puisque le dallage était flottant et qu'aucune reprise en sous 'uvre n'avait été réalisée sur cette partie de l'ouvrage.
Répondant aux dires des parties l'expert a enfin constaté qu'aucun des experts présents, pas même celui de la MACSF, n'a exprimé à l'origine des réserves quant à la solution technique préconisée par l'expert [H].
En conclusion l'expert [N] a considéré que la canicule de l'été 2003 a causé les désordres constatés à défaut de reprise en sous 'uvre du dallage flottant, que si la reprise de cette partie de l'ouvrage avait été réalisée après la première expertise judiciaire, tous les travaux intérieurs et extérieurs décrits par l'expert [H] auraient dû être déjà réalisés, ce dont il résulte que toutes les réparations des désordres doivent être imputées à la catastrophe naturelle de l'été 2003.
En considération de ces conclusions techniques circonstanciées, et nonobstant le fait que la construction implantée en terrain argileux est affectée d'un vice de conception, comme ne disposant pas à l'origine d'un complexe de fondations la mettant à l'abri des mouvements du sol, les nouveaux désordres survenus en 2003 trouvent leur cause directe et déterminante dans l'épisode de sécheresse exceptionnelle de l'année 2003, classée en catastrophe naturelle, au sens de l'article L.125-1 susvisé, qui n'exige pas que l'agent naturel constitue la cause exclusive des dommages.
À cet effet la cour observe qu'en dépit du vice de construction affectant les fondations du bâtiment sinistré, la sécheresse exceptionnelle de 2003 doit être considérée comme la cause prépondérante des nouveaux désordres, alors que l'aggravation importante de la fissuration des murs et des cloisons est survenue dans le mois qui a suivi un épisode caniculaire d'une exceptionnelle intensité et après que les travaux de confortement préconisés par le premier expert judiciaire aient été réalisés par une entreprise hautement spécialisée.
Il ne peut en outre être sérieusement soutenu que «les mesures habituelles» pour prévenir les dommages n'ont pas été prises, dès lors que c'est sur la base de conclusions expertales, dont la pertinence technique était admise par tous, et sur la préconisation de l'assureur lui-même, qui avait refusé sa garantie au titre d'une deuxième série de désordres survenue en 1998, que les maîtres d'ouvrage ont fait réaliser à la fin de l'année 2002 et au tout début de l'année 2003 les travaux de renforcement des fondations par pose de micropieux sous les semelles, dont rien ne laissait présumer à l'époque qu'ils se révéleraient insuffisants en raison de l'extrême sensibilité du sol argileux aux phénomènes de gonflement et de retrait, qui n'a été révélée qu'à la faveur d'études géotechniques poussées (des échantillons de sol ont dû être prélevés et étudiés en laboratoire).
Par voie de réformation du jugement déféré, la MACSF sera par conséquent condamnée à prendre en charge les conséquences dommageables du sinistre en application de la garantie catastrophe naturelle du contrat d'assurance multirisque habitation souscrit par les époux [Z].
La demande subsidiaire formée par ces derniers à l'encontre de la société RHONE ALPES FONDATIONS sur le fondement de sa responsabilité civile décennale, ou à défaut au titre de sa responsabilité contractuelle de droit commun pour manquement à son obligation de conseil, est dès lors sans objet, puisqu'ils obtiennent satisfaction au principal.
Sur l'évaluation du préjudice consécutif aux désordres
L'expert [N] a considéré que toutes les réparations des désordres doivent être imputées à la catastrophe naturelle de l'été 2003, puisque s'il avait été procédé à la reprise en sous 'uvre du dallage flottant après la première expertise judiciaire réalisée par Monsieur [H], tous les travaux intérieurs et extérieurs auraient dû être réalisés.
Cette conclusion est admise par la MACSF.
Analysant les divers devis soumis à son appréciation l'expert judiciaire a évalué le coût des travaux de remise en état nécessaires, y compris les honoraires de maîtrise d''uvre et de relogement des Maîtres d'ouvrage pendant la durée des travaux, à la somme globale de 263 775,44 € TTC.
Il a par ailleurs vérifié les dépenses engagées par les époux [Z] au cours des opérations d'expertise pour les besoins de l'étude géotechnique, qu'il a chiffrées à la somme de 19 913,40 € TTC.
Cette évaluation n'est pas contestée par la MACSF, qui sera par conséquent condamnée à payer aux époux [Z] les sommes réclamées de 254 498,98 € et de 19 913,40 €.
La condamnation au paiement de la somme de 254 498,98 € portera intérêt au taux légal avec capitalisation annuelle dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter de la demande en justice valant mise en demeure par assignation du 29 janvier 2007.
Les époux [Z] seront en revanche déboutés de leur demande en paiement de la somme complémentaire de 1529,75 euros au titre des travaux réalisés en novembre 2005 sur les canalisations affaissées, dont ils n'établissent pas, à défaut d'avoir soumis cette question à l'expert judiciaire, qu'ils sont imputables à l'état de catastrophe naturelle.
Il sera fait application en outre de la franchise légale de 1 520 €, qui n'est contestée ni dans son principe ni dans son montant par les maîtres d'ouvrage.
Ne se fondant sur aucune stipulation particulière du contrat d'assurance, la MACSF ne saurait toutefois faire dire et juger que la réparation ne peut excéder la valeur vénale du bien, étant observé qu'elle n'apporte aucun justificatif laissant supposer que le montant de la réparation précédemment allouée excéderait la valeur marchande de la propriété.
Sur la demande en dommages et intérêts pour manquement de l'assureur à son obligation de loyauté et de diligence
Eu égard à la nature particulière des désordres, qui pouvaient être le résultat de plusieurs facteurs, la MACSF a légitimement fait procéder à des investigations techniques poussées afin de déterminer si la sécheresse était la cause déterminante des dommages.
Elle a par ailleurs répondu aux demandes de l'assuré et a motivé son refus de garantie.
Elle n'a donc pas fait preuve d'incurie ou de déloyauté dans l'instruction de la déclaration de sinistre.
La demande d'indemnisation complémentaire formée par les époux [Z] sera par conséquent rejetée.
Sur le recours de la société d'assurances MACSF à l'encontre de la société RHONE ALPES FONDATIONS
La compagnie d'assurances MACSF recherche à titre subsidiaire la responsabilité décennale de la société [Z] en faisant notamment valoir :
'' que les désordres qui portent atteinte à la solidité de l'ouvrage et le rendent impropre à sa destination constituent des dommages de nature décennale,
'' que contrairement à ce qui est soutenu les désordres n'affectent pas seulement le dallage flottant, alors que les deux experts judiciaires ont conclu à l'existence de défauts intrinsèques à la construction,
'' que le constructeur est également responsable de plein droit du vice du sol en application de l'article 1792 du code civil,
'' que la nature particulière du sol imposait à la société [Z] de prendre en compte ce facteur,
'' qu'il n'existe pas en l'espèce de cause étrangère exonératoire, puisque la constatation de l'état de catastrophe naturelle n'est pas en soi constitutive de la cause étrangère qui implique l'existence d'un événement imprévisible et irrésistible.
La société RHONE ALPES FONDATIONS réplique :
'' qu'elle est intervenue en janvier 2003 pour réaliser les micros pieux sous les fondations selon les préconisations du premier expert judiciaire,
'' que ses travaux, dont la qualité n'est pas critiquée, n'est pas la cause des nouveaux désordres qui proviennent du dallage flottant de la maison,
'' qu'elle n'a donc pas manqué à son obligation de résultat,
'' qu'elle n'a pas plus manqué à son devoir de conseil alors qu'il n'est pas techniquement établi qu'une intervention sur le dallage aurait permis d'éviter de façon certaine la survenance du sinistre.
Sur ce
La société [Z] a été chargée par les époux [Z] de réaliser les travaux de renforcement des fondations préconisés par l'expert judiciaire [H] consistant en la pose de micro pieux sous l'ensemble des murs porteurs de la construction.
En raison de leur nature, de leurs caractéristiques, de leur importance (la facture de la société s'élève à la somme de 26 032,13 €) et du fait qu'ils sont indissociables de la structure de la construction, les travaux litigieux doivent être regardés en eux-mêmes comme un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, ce qui au demeurant n'est pas contesté.
S'il résulte des investigations techniques menées par l'expert judiciaire [N] que les nouveaux désordres survenus en septembre 2003 sont dus à l'absence de reprise en sous 'uvre du dallage flottant, et non pas à une exécution défectueuse des travaux de pose des micropieux sous les semelles de fondation, la société RHONE ALPES FONDATIONS a néanmoins accepté de sécuriser la construction affectée par les phénomènes de gonflement et de retrait du sol argileux et est susceptible à ce titre de devoir répondre des conséquences dommageables de l'insuffisance du remède appliqué dans le cadre de la garantie décennale de plein droit qu'elle doit aux maîtres d'ouvrage.
L'impropriété à la destination et l'atteinte à la solidité de l'ouvrage doivent, en effet, être appréciées au niveau de l'existant, puisque les travaux litigieux de renforcement des fondations devaient permettre d'assurer la stabilité du bâtiment.
Bien que la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne soit pas en soi constitutive de la cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs, il résulte cependant des circonstances propres à l'espèce que l'aggravation importante des désordres quelques mois seulement après l'exécution des travaux litigieux trouve son origine dans un événement présentant les caractères d'irrésistibilité et d'extériorité de la force majeure, alors qu'il est constant que la canicule de l'été 2003 a constitué un phénomène météorologique d'une exceptionnelle rareté, durée et intensité, que la société RHONE ALPES FONDATIONS s'est strictement conformée aux préconisations du premier expert judiciaire dont les conclusions étaient admises par tous, y compris par l'expert de l'assureur des maîtres d'ouvrage, et que l'extrême sensibilité du sol argileux aux phénomènes de gonflement et de retrait n'a été révélée que bien postérieurement dans le cadre de la seconde expertise judiciaire après étude en laboratoire d'échantillons de sol.
La compagnie MACSF sera par conséquent déboutée de son recours formé à l'encontre de la société RHONE ALPES FONDATIONS.
Sur les demandes accessoires
L'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société RHONE ALPES FONDATIONS.
Succombant au principal la société MACSF ne saurait obtenir de quelconques dommages et intérêts pour procédure abusive.
Elle sera au contraire condamnée à payer aux époux [Z] une indemnité de 5 000 € pour frais irrépétibles.
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* *
PAR CES MOTIFS
La Cour,
statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Dit et juge que la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF) doit prendre en charge le sinistre dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle du contrat d'assurance multirisque habitation souscrit par les époux [S] et [Z] [Z],
Condamne la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF) à payer aux époux [S] et [Z] [Z] la somme de 254 498,98 € avec intérêts au taux légal capitalisés annuellement dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter du 29 janvier 2007, sous déduction de la franchise légale de 1 520 €,
Condamne la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF) à payer aux époux [S] et [Z] [Z] la somme de 19 913,40 € au titre des dépenses d'investigations techniques,
Déboute les époux [S] et [Z] [Z] de leurs demandes en paiement des sommes de 1 529,75 € au titre des travaux de reprise des canalisations affaissées et de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'assureur à son obligation de loyauté et de diligence,
Déboute la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF) de son recours en garantie à l'encontre de la SA RHONE ALPES FONDATIONS,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de cette dernière,
Dit n'y avoir lieu à dommages intérêts pour procédure abusive,
Condamne la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS(MACSF) à payer époux [S] et [Z] [Z] une indemnité de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la MUTUELLE D'ASSURANCES DU CORPS DE SANTE FRANCAIS (MACSF) aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise de Monsieur [N] et de Madame [X], dont distraction pour ceux d'appel au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
Joëlle POITOUXJean-Louis BERNAUD