AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 15/08491
[L]
C/
SNC KIOSQUE D'OR
Saisine sur renvoi cassation :
Conseil de prud'hommes de [Localité 1] :
27/02/2004
RG 03/00264
Cour d'appel de Besançon :
23/09/2008
RG 07/00695
Cour de Cassation :
04/07/2012
Arrêt N°1666 F-D
Cour d'appel de Dijon :
11/07/2013
RG: 12/01087
Cour de Cassation :
14/10/2015
Arrêt N°1654 F-D
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 24 FEVRIER 2017
APPELANTE :
[T] [L]
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 2] ([Localité 2])
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Comparante en personne, assistée de Me Aïcha LAMAMRA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
SNC KIOSQUE D'OR
[Adresse 3]
[Adresse 4]
Représentée par Me Cécile PAYS de la SELARL BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Janvier 2017
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Michel SORNAY, Président
Didier JOLY, Conseiller
Natacha LAVILLE, Conseiller
Assistés pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 24 Février 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, conseiller, par empêchement du Président, et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Suivant contrat à durée indéterminée soumis à la convention collective nationale des commerces de gros, la société SNC KIOSQUE D'OR a engagé [T] [L] en qualité de comptable II, statut technicien, niveau V, échelon 1 à compter du 8 septembre 1997 moyennant une rémunération mensuelle brute de 9 000 francs.
En dernier lieu la rémunération de [T] [L] s'établissait à la somme de 1 445.06 euros.
A la naissance de son deuxième enfant, [T] [L] a bénéficié d'un congé parental du 2 juillet 1998 au 23 avril 2001. Elle a repris ses fonctions au sein de l'entreprise à BESANCON dès le 25 avril 2001.
Le 16 août 2002, la société SNC KIOSQUE D'OR a notifié à [T] [L] le transfert de son contrat de travail à compter du 1er septembre 2002 à la société MGI GESTION à laquelle l'employeur avait décidé de transférer son service comptabilité.
Le 3 septembre 2002, [T] [L] a reçu une proposition de mutation à BONDOUFLE (91) où allait s'exercer à compter du 1er novembre 2002 l'activité comptable à laquelle la salariée était affectée.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 septembre 2002, [T] [L] a refusé cette proposition pour des motifs familiaux.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 mars 2003, la société MGI GESTION a notifié à [T] [L] son licenciement pour motif économique.
Le 6 juin 2003, [T] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de BESANCON en lui demandant de condamner la société SNC KIOSQUE D'OR au paiement de diverses sommes au titre de commissions de standardiste, d'un manque à gagner pour le congé parental d'éducation, d'un manque à gagner sur les tickets-restaurant, de dommages et intérêts pour harcèlement moral, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité de procédure.
Par jugement rendu le 27 février 2004, le conseil de prud'hommes de BESANCON a débouté [T] [L] de ses demandes et l'a condamnée au paiement de la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
[T] [L] a interjeté appel devant la cour d'appel de BESANCON en lui demandant en dernier lieu de réformer le jugement et de condamner la société SNC KIOSQUE D'OR au paiement d'un rappel de salaire pour le manque à gagner subi durant son congé parental, de dommages et intérêts pour harcèlement moral et d'une indemnité de procédure.
La cour d'appel de BESANCON a par arrêt du 23 septembre 2008 confirmé le jugement.
Statuant sur le pourvoi de [T] [L] par arrêt du 4 juillet 2012, la Chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la Cour d'appel de BESANCON, a remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la Cour d'appel de DIJON.
La cassation a été encourue en ce que la cour d'appel ne s'était pas prononcée sur l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral et dans l'affirmative d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur.
Par arrêt du 11 juillet 2013, la cour de renvoi a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de BESANCON.
Statuant sur le second pourvoi de [T] [L] par arrêt du 14 octobre 2015, la Chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la Cour d'appel de DIJON, a remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la Cour d'appel de LYON.
La cassation a été encourue en ce que la cour d'appel n'a pas pris en considération les éléments médicaux produits, qu'elle a constaté que la salariée avait vu ses fonctions modifiées au retour de son congé parental ce qui laissait présumer une situation de harcèlement moral et que l'article L1225-55 du code du travail prévoit qu'à l'issue du congé parental, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire.
Cette cour, désignée comme cour de renvoi, a été saisie par [T] [L] dans le délai de quatre mois prévu par l'article 1034 du code de procédure civile.
Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 5 janvier 2017, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, [T] [L] demande à la cour:
- de juger qu'elle a fait l'objet de la part de [T] [L] d'un harcèlement moral et d'une discrimination,
- de condamner la société SNC KIOSQUE D'OR au paiement des sommes suivantes:
* 64 231.75 euros, subsidiairement 37 140.68 euros, à titre de rappel de salaire pour le manque à gagner subi durant son congé parental,
* 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral,
* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
* 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la discrimination,
* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pou une exécution déloyale du contrat de travail,
* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l'audience du 5 janvier 2017, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, la société SNC KIOSQUE D'OR demande à la cour de débouter [T] [L] de ses demandes, à titre subsidiaire de limiter le montant des dommages et intérêts pour harcèlement moral et le montant du rappel de salaire, et de condamner [T] [L] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
1 - sur le rappel de salaire
Attendu qu'il résulte des articles L1225-47 et l 1225-48 du code du travail que pendant la période qui suit l'expiration du congé de maternité, tout salarié justifiant d'une ancienneté minimale d'une année à la date de naissance de son enfant a droit au bénéfice d'un congé parental d'éducation durant lequel le contrat de travail est suspendu; que le congé parental d'éducation peut être prolongé deux fois.
Attendu qu'en l'espèce, [T] [L] a, par application des principes précités, bénéficié à la naissance de son deuxième enfant d'un congé parental du 2 juillet 1998 au 23 avril 2001.
Attendu que [T] [L] sollicite le paiement d'un rappel de salaire pour le manque à gagner subi durant son congé parental; qu'elle fait valoir que ce congé lui avait été imposé par l'employeur sous peine de perdre son emploi; qu'elle produit à l'appui les attestations de son ex-époux et de [U] [J], ancienne salariée de la société SNC KIOSQUE D'OR.
Attendu que la cour relève à l'examen des pièces du dossier que [T] [L], mère d'un enfant, a informé la société SNC KIOSQUE D'OR de son état de grossesse au début du mois de décembre 1997; que lors d'un entretien organisé le11 décembre 1997, un responsable de la société SNC KIOSQUE a proposé à cette salariée de solliciter un congé parental d'éducation; que par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 décembre 1997, [T] [L] a accepté de solliciter le congé; que l'employeur a donné son accord par lettre du 23 décembre 1997; que [T] [L] a sollicité une première prolongation de son congé par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 février 1999, puis une seconde prolongation par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 mars 2000 jusqu'au 23 avril 2001, date anniversaire de son second enfant à laquelle le congé parental d'éducation prendrait fin;
qu'en l'état, il n'existe dans le dossier aucune pièce de nature à établir que le congé parental d'éducation a été imposé par l'employeur à [T] [L], laquelle a librement sollicité ce congé.
Et attendu que les auteurs des attestations dont se prévaut [T] [L] se bornent à reproduire les assertions de celle-ci.
Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que [T] [L] n'est pas fondée en sa demande de rappel de salaire; que le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé.
2 - sur le harcèlement moral
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L1152-1 du code du travail qu'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet des dégradations de ses conditions de travail susceptible notamment d'altérer sa santé physique ou mentale.
Attendu qu'un acte unique ne peut pas constituer un harcèlement.
Attendu qu'en cas de litige reposant sur des faits de harcèlement moral, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement; qu'il appartient ensuite au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de supposer l'existence d'un harcèlement moral et dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Attendu qu'en l'espèce, [T] [L] sollicite le paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant d'un harcèlement moral; qu'elle invoque des faits survenus sur son lieu de travail qui constituent selon elle un harcèlement moral; que ces faits se présentent comme suit:
- la modification de son contrat de travail par la société SNC KIOSQUE D'OR qui d'une part a réduit ses tâches de comptabilité dès son retour de congé parental d'éducation en l'affectant notamment au standard, au secrétariat, à l'étiquetage et à la gestion des approvisionnements, cette modification étant confirmée par le fait que M. [K], engagé pour remplacer [T] [L] durant le temps de son congé parental d'éducation, a occupé définitivement ce poste en étant embauché par contrat à durée indéterminée;
- des pressions, réflexions, vexations et humiliations;
- la dégradation de son état de santé résultant des agissements précités.
Attendu que s'agissant de la modification du contrat de travail que d'une part il ressort des pièces du dossier que par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juin 2001, la société SNC KIOSQUE D'OR a informé [T] [L] qu'elle reprenait ses fonctions de comptable; que l'employeur a ajouté qu'elle serait en outre néanmoins chargée, dans le cadre d'une réorganisation du service comptabilité comptant désormais deux personnes, d'une liste non limitative de tâches inhérentes à sa qualification de comptable:
- rapprochement des factures avec les bons de livraison et bons de commande,
- suivi des paiements fournisseurs: interface BOR,
- pointage des comptes tiers,
- saisie des frais généraux,
- établissement des règlements des fournisseurs,
- classement;
que la société SNC KIOSQUE D'OR a conclu son courrier en rappelant à la salariée qu'elle était susceptible, en cas de période d'intense activité, d'être affectée à d'autres tâches (cadencier et classement notamment);
Attendu que les multiples pièces produites par [T] [L] confirment la multitude de tâches que la salariée a ainsi exercées à compter de son retour de congé parental d'éducation, et notamment au standard, au secrétariat, au service des commandes de matériel; que ces tâches ont à l'évidence considérablement limité la part des fonctions de comptabilité de [T] [L].
Attendu que d'autre part, la cour relève que selon l'annexe relative à la classification des emplois de la convention collective nationale des commerces de gros applicable à la relation de travail, l'emploi de comptable niveau V occupé par [T] [L] est défini comme suit:
'En sus des attributions de l'agent de comptabilité, est habilité à instruire et mener à bonne fin les dossiers comptables dont il a la charge';
que la définition conventionnelle de l'emploi d'agent de comptabilité est la suivante:
'Enregistre les opérations courantes de comptabilité selon les procédures qui lui sont indiquées, assure le suivi des comptes dont il a la charge et leur correspondance avec la comptabilité générale ; identifie et signale les écarts.';
Attendu ainsi que force est de constater à la lecture de ces définitions que les tâches confiées à [T] [L] à son retour de congé parental d'éducation dans les conditions précitées étaient pour certaines d'entres elles sans rapport aucun avec son emploi de comptable de niveau V; qu'il s'ensuit que la modification du contrat de travail est établie;
Attendu que pour autant, il n'est pas discutable que cette modification résulte d'une décision unique de l'employeur prise le 15 juin 2001 qui s'est maintenue dans le temps en produisant des effets qui se sont prolongés; que cette décision ne peut dès lors pas s'analyser en agissements répétés constitutifs de harcèlement moral.
Attendu que la cour relève ensuite que les pressions, réflexions, vexations et humiliations alléguées ne font l'objet d'aucune présentation précise de la part de [T] [L] qui se borne à demander à la cour de se reporter aux nombreuses attestations qu'elle produit; que force est de constater que ces attestations, qui émanent de trois salariés de la société SNC KIOSQUE D'OR, de divers proches de [T] [L] (amis, voisins et assistante maternelle) ainsi que de ses parents et de sa soeur ne citent aucun fait précis et daté et se bornent à restituer les déclarations reçues de [T] [L] en y ajoutant des commentaires personnels sur sa situation.
Attendu enfin que les pièces médicales versées aux débats, et desquelles il ressort que [T] [L] présente une pathologie dont il n'y a pas lieu ici de discuter la réalité, ne permettent pas d'établir l'existence d'un lien réel et direct entre cette pathologie et les conditions de travail de [T] [L] à partir de son retour de congé parental d'éducation.
Attendu qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que [T] [L] n'établit pas la matérialité de faits précis et concordants qui pris dans leur ensemble soient de nature à laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral en ce qu'ils auraient eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible notamment d'altérer sa santé physique ou mentale; que [T] [L] se trouve dès lors mal fondée en sa demande indemnitaire au titre du harcèlement moral; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef.
3 - sur l'obligation de sécurité
Attendu que [T] [L] sollicite pour la première fois en cause d'appel le paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de la société SNC KIOSQUE qui s'est abstenue d'une part de diligenter une enquête pour vérifier les faits de harcèlement moral et d'autre part d'envisager des solutions pour la préservation de la santé des salariés compromise par les faits de harcèlement moral.
Attendu que la demande indemnitaire au titre du harcèlement moral ayant été rejetée ci-dessus, il s'ensuit que la demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité n'est pas fondée; que [T] [L] sera donc déboutée de ce chef.
4 - sur la discrimination
Attendu qu'aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail, sont prohibées les mesures discriminatoires à l'égard d'un salarié en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat à raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
Attendu qu'il résulte de l'article L 1134-1 du code du travail qu'en cas de litige reposant sur une discrimination, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer
l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute
discrimination; qu'ensuite, le juge forme sa conviction.
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L1225-55 et L1225-71 du code du travail, qu'à l'issue du congé parental d'éducation, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente; qu'à défaut, le salarié a droit à des dommages et intérêts.
Attendu qu'en l'espèce, [T] [L] sollicite pour la première fois en cause d'appel la somme de 30 000 à titre de dommages et intérêts au titre d'une discrimination en raison de son état de grossesse; qu'elle fait valoir que l'employeur a souhaité maintenir [I] [K], qu'il avait embauché pour remplacer [T] [L] durant le temps de son congé parental d'éducation, à l'unique poste de comptable existant au sein de l'entreprise, au lieu de réemployer [T] [L] à cette fonction.
Attendu qu'il résulte de ce qui précède qu'à son retour de au titre des congés payés afférents, [T] [L] a effectivement exercé, outre quelques missions comptables, des tâches d'administration et de secrétariat qui sont sans rapport aucun avec son emploi de comptable de niveau V compte tenu de la définition résultant de la convention collective; que son contrat de travail s'en est trouvé modifié.
Attendu qu'il n'est donc pas discutable qu'à l'issue du congé parental d'éducation, la salariée n'a pas retrouvé son précédent emploi ou un emploi similaire.
Mais attendu que [T] [L] se prévaut en réalité d'un manquement de l'employeur à son obligation légale de réemploi; qu'elle n'établit pas pour autant la matérialité de faits précis et concordants qui sont de nature à supposer l'existence d'une discrimination à raison de l'état de grossesse; que la preuve d'une discrimination illicite n'est donc pas rapportée; que [T] [L] sera déboutée de sa demande de ce chef.
5 - sur l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail
Attendu que tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l'employeur d'exécuter le contrat de bonne foi.
Attendu que [T] [L] sollicite pour la première fois en cause d'appel le paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail de la société SNC KIOSQUE D'OR qui a imposé un congé parental à la salariée, qui a modifié son contrat de travail en lui retirant une partie substantielle de sa fonction de comptable et qui a dégradé ses conditions de travail.
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que s'il n'est pas établi que la société SNC KIOSQUE D'OR a imposé à [T] [L] de demander à bénéficier d'un congé parental d'éducation, il n'en demeure pas moins que cet employeur a modifié le contrat de travail de [T] [L] en lui imposant des tâches subalternes qui étaient sans rapport avec sa qualification de comptable; que cette situation caractérise une exécution déloyale du contrat de travail; que les éléments de la cause permettent de fixer le préjudice subi par la salariée à cette occasion à la somme de 5 000 euros; que la société SNC KIOSQUE D'OR sera donc condamnée à payer à [T] [L] la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
6 - sur les demandes accessoires
Attendu que les dépens de première instance et d'appel, suivant le principal, seront supportés par la société SNC KIOSQUE D'OR.
Attendu que l'équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel dans la mesure énoncée au dispositif.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de BESANCON le 27 février 2004 en ce qu'il a:
- débouté [T] [L] de sa demande en rappel de salaire au titre du au titre des congé parental d'éducation,
- débouté [T] [L] de sa demande au titre du harcèlement moral,
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau et Y AJOUTANT,
CONDAMNE la société SNC KIOSQUE D'OR à payer à [T] [L] la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
DEBOUTE [T] [L] de ses demandes au titre de l'obligation de sécurité et de la discrimination,
CONDAMNE la société SNC KIOSQUE D'OR aux dépens de première instance et d'appel,
CONDAMNE la société SNC KIOSQUE D'OR à payer à [T] [L] la somme de 1 500 euros aux dépens de première instance et d'appel.
Le GreffierLe Président
Gaétan PILLIEDidier JOLY