R.G : 16/00399
Décision du
Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond
du 15 décembre 2015
RG : 11/13542
ch n°3
[Y]
C/
SARL COCODE
SARL SECOIA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 12 Décembre 2017
APPELANT :
Me [L] [Y] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société BRASSERIE DE L'EUROPE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON
INTIMÉES :
La SELARL ALLIANCE MJ, représentée par Me [B] et Me [B]-[O], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL COCODE, assignée en reprise d'instance
[Adresse 2]
[Adresse 2]
défaillante
La Société SECOÏA, SARL, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par la SELARL BOIRIVENT & KAEMPF AVOCATS, avocats au barreau de LYON
Assistée de Me Philomène CONRAD, avocat au barreau de PARIS
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Date de clôture de l'instruction : 18 Mai 2017
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 31 Octobre 2017
Date de mise à disposition : 12 Décembre 2017
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Françoise CARRIER, président
- Marie-Pierre GUIGUE, conseiller
- Michel FICAGNA, conseiller
assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier
A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
Selon acte sous-seing privé du 29 juin 2006, la société Secoïa a donné à bail des locaux à usage de restaurant, situés situé à [Adresse 4], à la société Cocode, laquelle par acte du 31 août 2007 a cédé son fonds de commerce et le droit au bail, à la société Brasserie de l'Europe, dirigée par M. et Mme [J].
Par acte du 11 février 2011, la société Brasserie de l'Europe étant défaillante dans le paiement des loyers, la société Secoïa lui a délivré un commandement de payer visant la clause résolutoire.
Par acte du 3 mars 2011, la société Brasserie de l'Europe, invoquant un manquement de la société Secoïa son obligation de délivrance des lieux loués eu égard à la non conformité du système d'extraction et de ventilation du restaurant , l'a assignée devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon , ainsi que la société Cocode, aux fins d'expertise judiciaire et de suspension des effets du commandement.
La société Secoïa a formé à titre reconventionnel une demande de provision au titre des loyers impayés.
Par ordonnance du 2 mai 2011, le juge des référés a fait droit à la demande d'expertise, a désigné pour y procéder M. [K], a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de suspension des effets du commandement de payer, et a condamné la société Brasserie de l'Europe à payer à la société Secoïa une provision de 70 000 € à titre provisionnel à valoir sur le montant des loyers et charges impayés.
Par jugement du 24 mai 2011, la société Brasserie de l'Europe a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire par jugement du 17 janvier 2012.
Par acte du 20 octobre 2011, la société Brasserie de l'Europe assistée de Me [I], administrateur judiciaire a assigné en référé devant le président du tribunal de commerce de Lyon la société Secoïa et la société Cocode aux fins de condamnation à lui payer une provision de 510 282 € à titre de dommages et intérêts en raison de leurs comportements fautifs tenant à la dissimulation de l'illicéité de l'exploitation du fonds de commerce en raison de l'absence de conduit d'extraction aux normes, ayant eu pour conséquence la perte du fonds de commerce et l'impossibilité de désintéresser les créanciers de la procédure collective.
Par ordonnance du 20 décembre 2011, le juge des référé du tribunal de commerce, au vu du rapport d'expertise déposé par M. [K] le 14 septembre 2011 ayant conclu à une non conformité du système de ventilation extraction, a condamné in solidum les défenderesses à payer à la société Brasserie de l'Europe une provision de 195 000 €.
Par arrêt du 26 mars 2013, la cour d'appel de Lyon 8 ème chambre a infirmé en totalité cette ordonnance et a dit n'y avoir lieu à référé.
Par acte des 11, 12 et 21 octobre 2011, la société Secoïa a assigné la société Brasserie de l'Europe, Maître [P] [I] en sa qualités, Maître [L] [Y] en sa qualités et la société Cocode devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de voir fixer sa créance de loyer au passif de la société Brasserie de l'Europe et aux fins de voir la société Cocode être condamnée au paiement de la même somme en sa qualité de garant de la société Brasserie de l'Europe.
La société Brasserie de l'Europe, représentée par son liquidateur Maître [L] [Y] a conclu au rejet des demandes invoquant l'exception d'inexécution par la société Secoïa de son obligation de délivrance de locaux conformes à la destination contractuelle de restaurant, compte tenu que les lieux loués n'étaient pas équipés d'une gaine d'extraction respectant les réglementations en vigueur.
Parallèlement, Maître [Y] , M. et Mme [J] , ont assigné la société Secoïa au fond devant le tribunal de commerce de Lyon par acte du 25 janvier 2012 en demandant notamment de voir :
- de dire et juger que tant la société Cocode que la société Secoïa ont sciemment trompé la société Brasserie de l'Europe, en dissimulant volontairement l'illicéité de l'exploitation du fonds de commerce, l'absence de conduit d'extraction aux normes et le refus déjà exprimé par les copropriétaires de voir pratiquer les travaux permettant d'y remédier,
- de dire et juger que les comportements fautifs de la société Cocode et de la société Secoïa ont pour conséquence directe et exclusive la perte du fonds de commerce de la société Brasserie de l'Europe et l'impossibilité de désintéresser les créanciers de la procédure collective,
- de condamner la société Secoïa et la société Cocode au paiement d'une somme de 730 536,93 € à titre de dommages et intérêts.
La société Secoïa a assigné en intervention forcée et en garantie Maître [H] avocat et l'Agence EOS Conseil par exploit du 26 mars 2012 aux fins notamment de voir dire et juger que ces derniers, seuls débiteurs d'une obligation de conseil et de renseignement vis-à-vis des demandeurs principaux, ont commis une faute.
A la demande de Maître [H] et après jonction de l'appel en garantie, la procédure a été renvoyée devant le tribunal de grande instance de Vienne par un jugement du tribunal de commerce de Lyon du 11 juillet 2012.
Cette procédure fait l'objet d'un sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour.
Maître [Y] a rendu les clés du local le 15 mai 2012.
La déclaration de créance de la société Secoïa a été contestée et les parties ont été convoquées devant le juge commissaire à une audience du 17 juillet 2012.
Le juge commissaire a rendu une ordonnance le 26 juillet 2012 par laquelle il s'est déclaré incompétent compte-tenu du litige existant entre les parties sur la créance de loyers et/ou d'indemnité d'occupation de la société Secoïa.
Par jugement du 15 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Lyon a :
- mis hors de cause Maître [P] [I] pris en qualité d'administrateur judiciaire de la société Brasserie de l'Europe, et M. [J] et Mme [J] ;
- rejeté l'exception d'inexécution invoquée par Maître [L] [Y] ;
- fixé la créance de la société Secoïa au passif de la société Brasserie de l'Europe à la somme de 102 498,23 € pour la période antérieure au jugement de redressement judiciaire rendu le 24 mai 2011, à la somme de 40 481,14 € pour la période postérieure au 24 mai 2011 ;
- condamné la société Cocode à payer à la société Secoïa la somme de 135 426,31€ en exécution de sa garantie des sommes dues par la société Brasserie de l'Europe;
- débouté Maître [L] [Y] en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe, et la société Cocode de leurs demandes ;
- condamné solidairement Maître [L] [Y], en sa qualités de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe, et la société Cocode à payer à la société Secoïa la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- prononcé l'exécution provisoire du présent jugement ;
- condamné solidairement Maître [L] [Y], en sa qualités de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe, et la société Cocode aux entiers dépens, et dit que l'avocat de la société Secoïa pourra recouvrer directement contre eux les dépens exposés sans recevoir provision.
Me [Y] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Brasserie de l'Europe a relevé appel de ce jugement par déclaration du 18 janvier 2016 à l'encontre des sociétés Secoïa et Cocode.
Il demande à la cour :
Vu les articles 565 et 566 du code de procédure civile, 74 et 771 du code de procédure civile, 1108 et 1116 du code civil, 1719 et suivants du code civil,
- de dire et juger recevables et non nouvelles en cause d'appel ses demandes,
- de dire et juger irrecevable l'exception de litispendance comme non soulevée in limine litis ni non plus devant le conseiller de la mise en état, ni relative à un litige entre deux juridictions de même degré, et la dire en tout état de cause totalement infondée,
- de constater que la société Secoïa et la société Cocode étaient parfaitement informées de l'impossibilité d'exploitation aux normes en vigueur et du refus de la copropriété de travaux de mise en conformité dès avant la cession du fonds de commerce et du bail à la société Brasserie de l'Europe,
- de constater que ni la société Secoïa ni la société Cocode n'ont informé, par écrit ou dans une clause contractuelle, la société Brasserie de l'Europe de cette impossibilité portant sur un élément substantiel de l'engagement du cessionnaire preneur,
- de dire et juger qu'il existe un défaut de cause à l'engagement de la société locataire et cessionnaire du fonds, la société Brasserie de l'Europe, de nature à entraîner la nullité du contrat de bail et du contrat de cession et sur lequel se fonde la société Secoïa pour solliciter la fixation de sa créance au passif,
- de dire et juger que la société Secoïa et la société Cocode ont également commis une réticence dolosive de nature à entraîner la nullité du contrat de bail et du contrat de cession et sur lequel se fonde la société Secoïa pour solliciter la fixation de sa créance au passif,
- de dire et juger nuls en conséquence le contrat de bail et le contrat de cession et réformer en conséquence le jugement dont appel en toutes ses dispositions et débouter l'intimée de l'ensemble de ses demandes,
subsidiairement,
- de dire et juger inopposable au preneur le bail non annexé à l'acte de cession et inopposables les clauses du bail dont le bailleur se prévaut à l'encontre du preneur,
- d'infirmer en conséquence en toutes ses dispositions le jugement dont appel et débouter la société Secoïa de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment de sa demande de fixation au passif de sa créance à la procédure collective de la société Brasserie de l'Europe,
- de dire et juger à tout le moins que le contrat de bail est résilié aux torts exclusifs de la société Secoïa,
- de débouter en conséquence la société Secoïa de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de sa demande de fixation au passif de sa créance à la procédure collective de la société Brasserie de l'Europe,
- d'infirmer en conséquence le jugement dont appel,
très subsidiairement,
- de dire et juger que la société Secoïa n'a pas rempli son obligation de délivrance à l'égard de la société Brasserie de l'Europe,
- de dire et juger ainsi bien-fondée l'exception d'inexécution opposée à la société Secoïa,
- d'infirmer en conséquence le jugement dont appel,
- de débouter en conséquence la société Secoïa de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de sa demande de fixation au passif de sa créance à la procédure collective de la société Brasserie de l'Europe,
- de condamner la société Secoïa à lui payer es qualité de mandataire liquidateur de la société Brasserie de l'Europe, la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la société la société Secoïa aux dépens d'instance et d'appel, distraits au profit de la société d'avocats Laffly & associés-Lexavoué sur son affirmation de droit.
Il soutient :
- que la société Cocode a affirmé lors de la cession du fonds de commerce que les installations étaient aux normes, alors qu'il s'est avéré impossible de poursuivre une activité de restaurant en raison de l'absence d'extraction obligatoire conforme, d'une interdiction de poursuivre l'activité en l'état comme de l'impossibilité, tenue cachée tant par le vendeur que par le bailleur, de faire réaliser de tels travaux de mise en conformité par la copropriété, ce qui caractérise un défaut de cause à l'engagement de la société locataire et cessionnaire du fonds et des réticences dolosives évidentes du bailleur et du cédant de nature à entraîner la nullité du contrat de bail sur lequel se fonde la société Secoïa pour solliciter la fixation de sa créance au passif ,
- que sa demande au titre du dol présentée en cause d'appel n'est pas irrecevable, puisqu'il s'agit d'un moyen nouveau et non d'une prétention nouvelle,
- que les clauses du bail revendiquées par la société bailleresse sont inopposables au preneur dès lors que le bail n'a jamais été porté à sa connaissance, ainsi qu'elle le justifie par un constat de Me [W], huissier, qui s'est rendu aux services des impôts afin de savoir quel acte était effectivement signé et enregistré,
- que seules les dispositions relatives au bail figurant sur l'acte de cession sont opposables à la société locataire,
- que cet acte de cession ne prévoit en aucune manière que les travaux de mise aux normes de sécurité, exigée qui plus est par l'administration, soient à la charge du preneur, tandis que l'article 1720 du code civil dispose que, durant toute la durée du bail, le bailleur doit faire "toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives",
- que la société Brasserie de l'Europe ne pouvait être tenue d'acquitter des loyers d'un bien dont elle ne pouvait avoir la jouissance.
La société Le Secoïa demande à la cour :
Vu les articles 100, 565, 566 du code de procédure civile, l 624-1 et l 624-2 du code de commerce, L143-2 du code de commerce, 146, 147, 808 et 809 du code de procédure civile,
- de dire et juger Me [Y] irrecevable en ses nouvelles demandes de nullité du bail et de l'acte de cession,
- de confirmer le jugement déféré,
- de fixer la créance de loyers et de charges et/ou d'indemnité d'occupation pour la période antérieure au 24 mai 2011 à la somme de 102 498,23 € et pour la période postérieure au 24 mai 2011 à la somme totale de 40 481,14 € ,
- de condamner la société Alliance MJ es qualité de liquidateur judiciaire de la société Cocode au paiement de la somme de 135 426,31 € au titre de son obligation de garantie solidaire,
- de condamner «solidairement» Me [Y] à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner «les mêmes» sous la même solidarité aux entiers dépens qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- que Me [Y] demandait dans ses dernières conclusions signifiées devant le tribunal de grande instance de Lyon le 17 février 2014 sous le visa de l'article 1719 du code civil de voir dire et juger, que la société Secoïa a manqué à son obligation de délivrance conforme, alors qu'il demande en cause d'appel, de voir prononcer la nullité du bail et de la cession du fonds de commerce sous le visa des articles 1108 et 1116 du code civil,
- que ces demandes sont irrecevables en application de l'article 565 du code de procédure civile, dès lors que l'action en nullité ou en résolution, qui a pour effet de mettre à néant le contrat, ne tend pas aux mêmes fins que l'action en responsabilité, qui laisse subsister le contrat,
- qu'il existe une confusion des demandes avec la procédure pendante devant le tribunal de grande instance de Vienne, au vu des dispositions de l'article 100 du code de procédure civile,
- que le bail qu'elle a consenti sur le local commercial formant les lots 13 et 31 de l'état descriptif de division de l'immeuble du [Adresse 5] prévoit expressément que les travaux à y effectuer pour les mettre en conformité par rapport à l'activité autorisée sont à la charge du preneur,
- que la société Brasserie de l'Europe était tenue à la mise en conformité des installations d'extraction des fumées et odeurs de cuisson du local qu'elle exploitait, dont les caractéristiques et la puissance dépendaient uniquement de l'orientation de son activité,
- que le dol par réticence en l'absence de tout lien contractuel et de toute obligation d'information suppose la démonstration de l'intention de provoquer une erreur déterminante du consentement,
- qu'aucune faute ne peut être retenue à son encontre en l'absence de toute obligation légale ou contractuelle d'information à la charge du bailleur à l'occasion d'une cession de fonds à laquelle elle n'est pas intervenue,
- que la délivrance des locaux parfaitement en l'état d'être exploités ressort de l'historique du local, des bilans de la société Cocode puis de la société Brasserie de l'Europe et de l'absence de toute réclamation de ces dernières et particulièrement de la société Brasserie de l'Europe avant novembre 2010,
- que Me [Y] n'a nullement justifié d'une impossibilité d'exploiter le fonds,
- que Maître [Y] n'a nullement justifié de l'existence d'un préjudice certain, né, et actuel pouvant expliquer et justifier que la société Brasserie de l'Europe n'ait pas payé pendant plus de 2 ans les loyers et charges contractuellement dus alors qu'elle exploitait parfaitement les lieux,
La société Cocode n'a pas constitué avocat devant la cour.
Me [Y] indique que cette société a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire le 9 février 2016 et qu'il a produit la créance de la société Brasserie de l'Europe le 29 février 2016 entre les mains de la société Alliance MJ, liquidateur de la société Cocode.
Par acte du 23 mars 2016, elle l'a assignée à comparaître devant la cour et en reprise d'instance, en lui notifiant sa déclaration d'appel, par acte remis à une personne habilitée.
Il sera donc statué par arrêt réputé contradictoire.
MOTIFS
Sur l'appel dirigé contre la société Cocode
Ni l'appelant, ni la société Secoïa, intimée, ne justifient avoir signifié leurs conclusions à la société Cocode ou à son mandataire judiciaire.
Il sera observé par ailleurs que la société Secoïa ne justifie pas avoir produit sa créance entre les mains du liquidateur de la société Cocode et qu'elle maintient une demande de condamnation à son encontre, alors que sa demande ne devrait tendre qu'à la fixation de sa créance.
En conséquence, les demandes de Me [Y] et de la société Secoïa dirigées contre la société Cocode sont irrecevables.
Sur la recevabilité de la demande d'annulation ou de résiliation du bail formée par Me [Y] es qualité contre la société Secoïa
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
L'action en nullité ou résiliation, qui a pour objet de mettre à néant le contrat, ne tend pas aux mêmes fins que l'action en dommages et intérêts pour manquements du bailleur à ses obligations ou que l'action en exception d'inexécution, qui laissent subsister le contrat.
En conséquence, la demande d'annulation du bail est irrecevable.
Sur l'opposabilité du bail
La société Brasserie de l'Europe qui acquiert un fonds de commerce comprenant un droit au bail ne peut soutenir à l'encontre du bailleur que ce bail ne lui serait pas opposable.
Sur l'obligation de délivrance de la société Brasserie de l'Europe
Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, de délivrer au locataire la chose louée, de l'entretenir en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail, obligations qui ne cèdent qu'en cas de force majeure, aucune clause contractuelle ne pouvant le décharger de son obligation de délivrance de la chose louée, obligation qui persiste tout au long du bail et oblige le bailleur à maintenir les qualités de la chose pour en garantir la jouissance au preneur.
En l'espèce, le local loué a été exploité à destination de restaurant depuis 1991, et en particulier par la société Cocode de juin 2006 jusqu'au 31 août 2007, puis par la société Brasserie de l'Europe jusqu'en 2012, soit pendant 5 ans, laquelle a réalisé les chiffres d'affaires suivants :
exercice 1/09/2007-31/08/2008 : 270 294,00 €
exercice 110912008-3110812009 : 326 001,00 €
exercice 1/09/2009-31/08/2010 : 316 024,00 €
ainsi qu'un chiffre d'affaire moyen pendant la période d'observation de 18 594 €.
La restitution des clés du local par le liquidateur est intervenue sans justification d'un quelconque arrêté administratif de fermeture ni même d'une procédure engagée par le syndicat des copropriétaires, ce dont il résulte que l'exploitation n'a jamais été rendue impossible.
En tout état de cause, le local était équipé d'un système d'extraction, qui n'était pas aux normes, mais qui n'avait donné lieu à aucune difficulté jusqu'aux travaux et modifications des lieux effectués par la société Cocode dont la responsabilité lui incombe et aux droits de laquelle vient la société Brasserie de l'Europe.
Ainsi dans un courrier du 6 janvier 2007, le conseil syndical a indiqué au syndic que lors de la réunion du 18 décembre 2006, il a été évoqué plusieurs désagréments liés à la récente réouverture de la brasserie de l'Europe ( par la société Cocode).
Il apparaît également qu'un four à pizza a été rajouté et raccordé sur la gaine de la hotte, et que la hotte présentait un manque d'entretien.(cf. rapport Cap réalisation).
Le bail mentionne de surcroît que les travaux de mise en conformité par rapport à l'activité autorisée, sont à la charge du preneur.
De surcroît, la société Secoïa a correctement collaboré avec la société Brasserie de L'Europe.
Elle a , sans délai, entrepris les démarches nécessaires auprès du syndic de copropriété afin de présenter à l'assemblée générale une demande d'autorisation de réaliser une gaine d'extraction aux normes réglementaire, en façade de l'immeuble.
Cette résolution a été rejetée, par l'assemblée générale les 4 octobre 2007 et 20 septembre 2011.
Un nouveau projet a été soumis à l'assemblée générale le 28 juin 2012 qui a été de nouveau rejeté.
Par acte du 24 septembre 2012, la société Secoïa a assigné le syndicat des copropriétaires aux fins d'être autorisée judiciairement à effectuer les travaux, nonobstant l'opposition des copropriétaires.
Par jugement du 14 avril 2016, le tribunal de grande instance de Lyon a fait droit à cette demande.
Il en résulte qu'il existait bien une possibilité de régularisation de la situation.
La société Brasserie de l'Europe avait également la possibilité de faire installer un dispositif provisoire de traitement des odeurs pour un coût de matériel d'environ 1000 €. (cf rapport Cap réalisation et devis société France Air)
En conséquence, il n'est pas démontré un manquement de la société Secoïa à son obligation de délivrance et le jugement sera confirmé.
Sur les loyers
Dès lors que le bailleur a respecté ses obligations essentielles, le local étant exploité et générant un chiffre d'affaire, la société Brasserie de l'Europe était tenue de régler les loyers.
L'exception d'inexécution soulevée par la société Brasserie de l'Europe pour justifier sa défaillance dans le paiement des loyers n'est donc pas fondée.
Sur la fixation de la créance de la société Secoïa
Il convient de faire droit à la demande non contestée sur son quantum.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour,
- Déclare irrecevables la demande de Me [Y] es qualité de mandataire liquidateur de la société Brasserie de l'Europe aux fins d'annulation du contrat de cession de fonds de commerce du 31 août 2007 intervenu entre la société Cocode et la société Brasserie de l'Europe, et aux fins d'annulation ou résiliation du bail conclu entre la société Secoïa et la société Cocode le 29 juin 2006,
- Déclare irrecevables les demandes dirigées contre la société Cocode représentée par la société Alliance MJ,
- Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :
- rejeté l'exception d'inexécution invoquée par Maître [L] [Y];
- fixé la créance de la société Secoïa au passif de la société Brasserie de l'Europe à la somme de 102 498,23 € pour la période antérieure au jugement de redressement judiciaire rendu le 24 mai 2011, à la somme de 40 481,14 € pour la période postérieure au 24 mai 2011 ;
- débouté Maître [L] [Y] en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe ;
- condamné Maître [L] [Y], en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe à payer à la société Secoïa la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Maître [L] [Y], en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe aux entiers dépens, et dit que l'avocat de la société Secoïa pourra recouvrer directement contre eux les dépens exposés sans recevoir provision,
y ajoutant,
- Condamne Me [L] [Y], en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe à payer à la société Secoïa la somme de 2 000 € supplémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne Me [L] [Y], en sa qualité de mandataire judiciaire chargé de la liquidation judiciaire de la société Brasserie de l'Europe aux dépens d'appel, et dit que l'avocat de la société Secoïa pourra recouvrer directement contre eux les dépens exposés sans recevoir provision.
LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE