AFFAIRE SÉCURITÉ SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : 16/07416
époux [C]
C/
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOURG EN BRESSE
du 19 Septembre 2016
RG : 657/14
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 12 DECEMBRE 2017
APPELANTS :
[I] [C]
né le [Date naissance 1] 1982
[Adresse 1]
[Localité 1]
représenté par Me Marie-noëlle FRERY, avocat au barreau de LYON
[C] [C]
née le [Date naissance 2] 1981
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Marie-noëlle FRERY, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Mme [M], munie d'un pouvoir
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Novembre 2017
Présidée par Laurence BERTHIER, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
- Elizabeth POLLE-SENANEUCH, président
- Laurence BERTHIER, conseiller
- Thomas CASSUTO, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 12 Décembre 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Elizabeth POLLE-SENANEUCH, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Les époux [C] sont arrivés en France en 2006 et revendiquent une double nationalité serbe et kosovarde.
Ils sont les parents de trois enfants mineurs :
- [Z], né le [Date naissance 3] 2002 à [Localité 3],
- [Z], né le [Date naissance 4] 2004 à [Localité 4],
- [R], née le [Date naissance 2] 2007 à [Localité 5].
Suite au rejet de leur demande d'asile, ils ont obtenu dans un premier temps, le 3 juillet 2008, des récépissés avec autorisation de travail, puis une carte de séjour temporaire portant la mention 'vie privée et familiale' valable du 7 avril 2009 au 6 avril 2010, renouvelée ensuite, puis une carte de résidents de longue durée-CE valable du 7 avril 2013 au 6 avril 2023.
L'enfant [R] bénéficie d'un titre d'identité républicain pour étranger mineur né en France valable du 29 janvier 2014 au 28 janvier 2019.
Les enfants [Z] et [Z] sont détenteurs d'un document de circulation pour étrangers mineurs, valable du 8 janvier 2014 au 8 janvier 2019.
Le 31 mai 2010, les époux [C] ont sollicité le regroupement familial 'sur place' pour leurs enfants [Z] et [Z] qui a été rejeté le 24 mars 2011 par la préfecture de l'Ain au motif que les enfants étaient rentrés irrégulièrement sur le territoire français. Un jugement du 21 octobre 2015 du tribunal administratif de Lyon a rejeté leur recours contre cette décision.
Les époux [C] perçoivent les prestations familiales pour [R].
La Caisse d'allocations familiales de l'Ain leur a refusé le bénéfice des prestations familiales pour [Z] et [Z] qui sont entrés irrégulièrement en France.
Les époux [C] qui avaient saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Ain pour obtenir le bénéfice des prestations familiales au titre de leurs trois enfants, ont été déclarés recevables, mais déboutés de leur demande, par jugement du 27 décembre 2010.
Aux termes d'un arrêt du 24 avril 2012, la Cour d'appel de Lyon a infirmé ce jugement et a déclaré irrecevable l'action intentée par les requérants devant le tribunal.
Devenus titulaires d'une carte de résident de longue durée, les époux [C] ont par la suite sollicité un réexamen de leur dossier.
La Caisse d'Allocations Familiales a indiqué par courrier du 5 février 2014 que 'ces enfants nés à l'étranger n'ont pas fait l'objet d'une mesure de regroupement familial et les titres de séjour n'ont pas été délivrés aux parents au titre de l'article L.313-11 alinéa 7 du C.E.S.E.D.A. La délivrance de cartes de résident valable 10 ans ne remet pas en cause ce refus'.
La Commission de recours amiable, saisie le 26 mai 2014, n'a pas rendu de décision.
Par un nouveau courrier 15 juillet 2014, la Caisse d'Allocations Familiales confirmait son refus.
Les époux [C] ont saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Ain en contestation de cette décision, par requête en date du 6 novembre 2014.
Par jugement du 19 septembre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale a déclaré leur recours recevable mais mal fondé et les a déboutés de leurs demandes.
Monsieur et Madame [C] ont régulièrement interjeté appel du jugement le 18 octobre 2016.
Par leurs dernières conclusions déposées le 27 mars 2017 et reprises oralement lors de l'audience, ils demandent à la Cour de :
- Infirmer le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Bourg- en-Bresse en date du 19 septembre 2016,
- Dire et juger que les époux [C] ont droit aux prestations familiales y compris pour leurs enfants [Z] et [Z] et ce à compter de la délivrance de leur premier titre de séjour avec autorisation de travail, soit du 3 juillet 2008,
Subsidiairement,
- Dire et juger que les époux [C] ont droit aux prestations familiales pour leurs enfants [Z] et [Z] au minimum depuis la date de l'entrée en vigueur des échanges de lettres entre la France et le Kosovo, soit à compter du 6 février 2013,
Encore plus subsidiairement,
- Dire et juger que les époux [C] ont droit aux prestations familiales pour leurs enfants [Z] et [Z] au minimum depuis la date de la délivrance de la carte de résident de longue durée, soit à compter du 7 avril 2013,
- Condamner de la Caisse d'Allocations Familiales de l'Ain à payer la somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues au vu de la résistance abusive des services de la Caisse d'Allocations Familiales et de la nécessité de diligenter une procédure particulièrement longue et onéreuse pour les époux [C],
- Condamner la Caisse d'Allocations Familiales à payer à Monsieur et Madame [C] [D] et [L] la somme de 1500 € au titre de l'Article 700 du Code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions déposées le 9 mars 2017 et reprises oralement lors de l'audience, la Caisse d'Allocations Familiales de l'Ain demande à la Cour de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions.
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Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu'elles ont fait viser par le greffier lors de l'audience de plaidoiries et qu'elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n'avoir rien à y ajouter ou retrancher.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité du recours des époux [C] n'est pas contestée au vu des dispositions de l'article R.142-6 du code de la sécurité sociale.
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La Caisse d'Allocations Familiales a refusé le bénéfice des prestations familiales pour les enfants [Z] et [Z] au motif que ces derniers ne pouvaient démontrer une entrée régulière en France et ne justifiaient pas d'une attestation préfectorale indiquant qu'ils étaient entrés en même temps que leur parents.
Monsieur et Madame [C] estiment que cette position méconnaît les articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH). Ils font valoir que la jurisprudence de la Cour de cassation qui tolère une limitation au principe d'égalité de traitement relatif aux prestations familiales lorsqu'elle revêt un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, est intervenue pour des enfants arrivés en France postérieurement à leurs parents et en dehors de la procédure de regroupement familial. Or, tel n'est pas le cas de leurs propres enfants, qui sont arrivés en France en même temps que leurs parents.
Monsieur et Madame [C] font valoir que leurs enfants sont en situation régulière et qu'ils ont d'ailleurs déjà eu l'occasion de ressortir et de rentrer à nouveau en France puisqu'ils disposent d'un document de circulation établi par la préfecture. De plus, ils ont sollicité dès 2010 le regroupement familial 'sur place' pour lequel ils ont reçu un avis favorable par l'enquêteur, non suivi toutefois par le Préfet. Ainsi, selon eux, ils subissent une différence de traitement qui n'est basée sur aucune justification objective et raisonnable et ce alors qu'il n'existe aucune possibilité concrète de faire régulariser leur situation.
Monsieur et Madame [C] estiment par ailleurs que la convention internationale des droits de l'Enfant (C.I.D.E.) ( articles 9.1 et 26) et la Charte des droits fondamentaux (articles 24 et 34) ont été violées puisqu'elles prévoient un droit aux prestations de sécurité sociale et la prise en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Ils soutiennent ainsi que la décision de la Caisse d'Allocations Familiales 'revient à solliciter l'éloignement des enfants [C] de leurs parents'.
La Caisse d'Allocations Familiales fait valoir en réponse que la position des appelants va à l'encontre de celle de la Cour de Cassation qui a retenu à plusieurs reprises l'absence d'atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la CEDH et la nécessité de l'Etat d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants. Elle précise que la haute juridiction s'est notamment déterminée en considération de l'absence de violation de l'article 3-1 de la C.I.D.E. relatif à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Elle précise que les deux premiers enfants des époux [C] sont entrés en France de façon irrégulière de sorte que le certificat médical de l'OFII prévu dans le cadre du regroupement familial n'a pu être produit et que par ailleurs les appelants ne produisent pas l'attestation préfectorale indiquant que les enfants sont entrés en même temps que les parents titulaires d'un titre de séjour pris sur le fondement de l'article L.313-11 al.7 du CESEDA.
Elle rappelle en outre que le Conseil Constitutionnel a, le 15 décembre 2005, décidé que l'article 89 de la loi de financement de la sécurité sociale complétant l'article L.512-2 du code de la sécurité sociale n'est pas contraire à la constitution.
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L'article D.512-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n°2009-331 du 25 mars 2009, applicable au présent litige, donne une liste exhaustive de titres de séjour réguliers exigés pour ouvrir le droit aux prestations familiales au bénéfice des enfants étrangers, soit :
1° Extrait d'acte de naissance en France ;
2° Certificat de contrôle médical de l'enfant, délivré par l' Office français de l'immigration et de l'intégration à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ;
3° Livret de famille délivré par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, à défaut, un acte de naissance établi, le cas échéant, par cet office, lorsque l'enfant est membre de famille d'un réfugié, d'un apatride ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire. Lorsque l'enfant n'est pas l'enfant du réfugié, de l'apatride ou du bénéficiaire de la protection subsidiaire, cet acte de naissance est accompagné d'un jugement confiant la tutelle de cet enfant à l'étranger qui demande à bénéficier des prestations familiales ;
4° Visa délivré par l'autorité consulaire et comportant le nom de l'enfant d'un étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 313-8 ou au 5° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5° Attestation délivrée par l'autorité préfectorale, précisant que l'enfant est entré en France au plus tard en même temps que l'un de ses parents admis au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
6° Titre de séjour délivré à l'étranger âgé de seize à dix-huit ans dans les conditions fixées par l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à charge et au titre desquels il demande des prestations familiales est justifiée par la production de l'un de ces documents.
Il n'est pas discuté que Monsieur et Madame [C] n'ont pu fournir aucune de ces pièces.
Ils estiment que l'exigence de produire un certificat médical délivré par l'OFII est en particulier, disproportionnée dans la mesure où il n'existe pas de possibilité concrète de faire régulariser leur situation.
Toutefois, il est constant que l'exigence par le texte précité de la production d'un des documents attestant d'une entrée régulière des enfants étrangers en France, et notamment pour les enfants entrés au titre du regroupement familial, du certificat médical délivré par l'OFII, qui revêt un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, ne porte pas atteinte au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la CEDH, ni plus qu'à l'intérêt supérieur de l'enfant, sans qu'il y ait lieu de faire une distinction selon que les enfants sont arrivés en France avec leurs parents ou postérieurement à ces derniers.
Ces dispositions ont en outre été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil
Constitutionnel (décision n°2005-528 du 15 décembre 2005) qui a toutefois formulé
une réserve afin de préciser que 'lorsqu'il sera procédé, dans le cadre de la procédure
de regroupement familial, à la régularisation de la situation d'un enfant déjà entré en
France, cet enfant devra ouvrir droit aux prestations familiales' (pour procédure de
regroupement familial 'sur place'). Or, en l'espèce le regroupement familial sur place n'a pas été accepté ainsi qu'il ressort du jugement du tribunal administratif du 31 mai 2010.
En outre, le 8 septembre 2015, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a décidé que le refus d'attribuer les allocations familiales aux requérants était dû, non pas à leur seule nationalité ou à tout autre critère couvert par l'article 14, mais au non-respect par eux des règles applicables au regroupement familial prévues par le livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), ces dernières constituant une différence de traitement reposant sur une justification objective et raisonnable.
Ces moyen doivent donc être rejetés comme l'ont indiqué les premiers juges.
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Monsieur et Madame [C] soutiennent par ailleurs que le refus de verser les prestations familiales est contraire à l'article 1 du Protocole additionnel 1 qui prévoit que chacun a droit au respect de ses biens.
Si les prestations familiales constituent un bien patrimonial au sens de l'article 1er du protocole additionnel n°1 à la CESDH, cette disposition n'interdit pas de subordonner en France l'attribution des prestations familiales au respect d'une procédure spécifique répondant à la nécessité d'assurer le contrôle des conditions d'accueil .
Le moyen n'est donc pas fondé.
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Les appelants invoquent encore le principe d'égalité issu de plusieurs accords bilatéraux qui prévoient le principe d'égalité en matière de prestations familiales et d'allocations familiales, des ressortissants français.
Ils revendiquent en premier lieu l'application de la convention générale sur la sécurité sociale signée entre la France et la Yougoslavie le 5 janvier 1950 et l'accord du 26 mars 2003 qui a permis de continuer à lier la France et l'Union de Serbie et Monténégro publié par décret n°2013-349 du 24 avril 2013.
La Caisse répond que l'accord n'a pris effet qu'à compter du 6 février 2013 de sorte que le versement des prestations aux enfants [C] ne pourrait intervenir qu'à compter du mois de février 2013 et pas avant. Elle précise que toutefois s'agissant des prestations familiales qu'il y a lieu de se référer aux articles 23, 23A et 23B qui ne régissent que les travailleurs salariés exerçant leur activité dans un autre Etat que celui où résident leurs enfants ou ceux détachés avec leur famille dans un autre pays que le leur. Or, la situation professionnelle de Monsieur et Madame [C] ne peut être retenue comme étant une situation de travailleurs détachés au sens de la directive européenne du 16 décembre 2016. Par ailleurs, les enfants ne sont pas restés dans leur pays d'origine, de sorte que les accords précités n'ont pas vocation à s'appliquer selon elle.
Aux termes de l'article L512-2 du code de la sécurité sociale '... Bénéficient également de plein droit des prestations familiales dans les conditions fixées par le présent livre les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, titulaires d'un titre exigé d'eux en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux pour résider régulièrement en France.
Ces étrangers bénéficient des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de l'une des situations suivantes :
(...)
-leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 10° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 313-13 du même code ;
-leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de l'une des cartes de séjour mentionnées à l'article L. 313-8 du même code ;
-leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 7° de l'article L. 313-11 du même code à la condition que le ou les enfants en cause soient entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leurs parents titulaires de la carte susmentionnée.'
En l'espèce, il ressort de l'attestation de la Préfecture de l'Ain du 9 avril 2009 que les enfants [Z] et [Z] [C] sont entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leur parent autorisés à se maintenir sur le territoire sur le fondement de l'alinéa 11 de l'article L.313-11 du code précité et non de l'alinéa 7, de sorte que Monsieur et Madame [C] sont mal fondés à invoquer les dispositions de la convention générale entre la France et la Yougoslavie sur la sécurité sociale signée le 5 janvier 1950.
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Monsieur et Madame [C] invoquent en deuxième lieu l'application de l'accord de stabilisation et d'association entre l'Union européenne et la Serbie entré en vigueur le 1er septembre 2013 et que la Serbie a ratifié en octobre 2013, qui garantit un principe d'égalité de traitement entre les citoyens de l'UE et les ressortissants serbes pour le bénéfice des allocations familiales. Ils font valoir l'instruction de la Caisse Nationale des Affaires Familiales (CNAF) du 5 juillet 2013 qui demande à ses services de valoriser les droits aux prestations en faveur des ressortissants des pays signataires d'accord d'association euro-méditerranéen. Ils ajoutent qu'ils disposent bien de la nationalité serbe, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal. Ainsi, leurs droits aux allocations familiales doivent être régularisés de manière rétroactive dans la seule limite de la date de régularité de séjour des parents à savoir depuis avril 2008.
La caisse réplique que Monsieur et Madame [C] ne sont pas de nationalité serbe mais kosovarde de sorte qu'ils ne peuvent prétendre à l'application de cet accord lequel en tout état de cause ne pourrait pas prendre effet en l'absence de décision du conseil de stabilisation et d'association institué par l'accord, et ce en application de l'article 51 dudit accord.
Monsieur et Madame [C] ne produisent aux débats pour justifier de la nationalité serbe qu'ils revendiquent que des certificats datant du 10 novembre 2015 et du 23 mars 2016 indiquant qu'ils sont ressortissants de la République de Serbie, leurs lieux de naissance étant toutefois situés en République du Kosovo, Etat dont l'indépendance n'a pas été reconnue par la Serbie mais par d'autres pays comme la France.
Ils n'établissent pas avoir obtenu la délivrance de passeports serbes mais uniquement kosovars.
Il n'y a pas lieu de retenir au vu de ces éléments que Monsieur et Madame [C] établissent disposer de la nationalité serbe et partant d'examiner la question de l'application de l'accord de stabilisation et d'association entre la Serbie et l'Union européenne.
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Les appelants sollicitent en troisième lieu l'application de la convention générale sur la sécurité sociale du 5 janvier 1950 et de l'accord du 26 mars 2003 conclu entre le gouvernement français et le conseil des ministres de Serbie et Monténégro.
Il ressort toutefois des motifs qui précèdent que cette convention ne peut trouver à s'appliquer au regard de la situation de Monsieur et Madame [C] et de l'absence de démonstration de la détention de la nationalité serbe.
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Monsieur et Madame [C] demandent en quatrième lieu à la Cour de faire application de la directive n°2003/109 CE du 25 novembre 2003 du statut de résident longue durée qui prévoit que celui-ci bénéficie de l'égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne notamment la sécurité sociale, l'aide sociale et la protection sociale. Ils ajoutent que leurs enfants bénéficient nécessairement des droits afférents au titre de séjour de leurs parents, à savoir la carte de résident.
La Caisse réplique que la loi n°2006-911 du 24 juillet 2006 prise en application des dispositions de la directive ne prévoit pas de régime égalitaire quant au versement des prestations familiales pour les enfants étrangers dont les parents sont titulaires d'une carte de résident de longue durée, observant que ces derniers bénéficient eux-mêmes d'une égalité de traitement et ont droit aux prestations sociales pour eux-mêmes.
L'article 11 de la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants des pays tiers résidents de longue durée, précise :
'Egalité de traitement
1 . Le résident de longue durée bénéfice de l'égalité de traitement avec les nationaux
en ce qui concerne : ('.)
d) la sécurité sociale, l'aide sociale et la protection sociale telles qu'elles sont définies
par la législation nationale (...) .
4 . En matière d'aide sociale et de protection sociale, les Etats membres peuvent
limiter l'égalité de traitement aux prestations essentielles (...)'.
L'article 2 précise que :
'Aux fins de la présente directive, on entend par :
(...)
b) 'résident de longue durée', tout ressortissant d'un pays tiers qui est titulaire du
statut de résident de longue durée prévu aux articles 4 à 7 ;
(...)
e) 'membre de la famille', le ressortissant d'un pays tiers qui réside dans l'Etat
membre concerné conformément à la directive 2003/86/CE du Conseil du 22
septembre 2003 relative au droit au regroupement familial'.
Il résulte de ces textes que d'une part l'égalité de traitement dont bénéficie le résident de longue durée avec les nationaux en ce qui concerne, notamment, la sécurité sociale, l'aide sociale et la protection sociale, lesquelles comprennent, en droit interne, les prestations familiales, ne s'applique qu'autant que les membres de la famille au titre desquels les prestations sont demandées répondent à la définition donnée par la directive par référence aux personnes entrées sur le territoire de l'Etat membre concerné conformément à la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial. D'autre part, il appartient aux Etats membres de définir les prestations auxquelles ils entendent établir l'égalité de traitement et qui peuvent se limiter aux prestations essentielles.
En l'espèce, les enfants [Z] et [Z] de Monsieur et Madame [C] sont entrés en France en dehors de la procédure de regroupement familial de sorte que le principe d'égalité ne peut être invoqué par les époux [C] et ne peut leur bénéficier.
Le jugement qui a débouté Monsieur et Madame [C] de leurs demandes, en ce compris celle relative aux dommages et intérêts pour résistance abusive, doit donc être confirmé.
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Monsieur et Madame [C] qui succombent sont mal fondés en leur demande de condamnation de la Caisse à une indemnité procédurale.
La procédure est sans frais en application de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale.
PAR CES MOTIFS
La cour,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions.
Dit n'y avoir lieu à dépens ou à paiement de droit en application de l'article R144-10 du code de la sécurité sociale.
LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE
Malika CHINOUNE Elizabeth POLLE-SENANEUCH