R.G : 17/02490
Décision du
Tribunal de Grande Instance de ROANNE
Au fond
du 20 mars 2017
RG : 15/00814
ch n°
SARL GERESE
SARL J. X... F...
C/
Y...
Y... NEE Z...
Société ADAGE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 05 Juin 2018
APPELANTES :
La société GERESE, SARL
Montroussier
[...]
Représentée par la SELARL BLG, avocats au barreau de ROANNE
J. X... F..., SARL
[...]
Représentée par la SELARL BLG, avocats au barreau de ROANNE
INTIMES :
M. David Y...
né le [...] à ROANNE (42)
[...]
Représenté par la SELARL A..., avocats au barreau de ROANNE
Mme Stéphanie Z... épouse Y...
née le [...] à ROANNE (42)
[...]
Représentée par la SELARL A..., avocats au barreau de ROANNE
La Société ADAGE, SCP, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés [...]
Représentée par Me la SELARL BERTHIAUD ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 23 Avril 2018
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Avril 2018
Date de mise à disposition : 05 Juin 2018
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Françoise CARRIER, président
- Michel FICAGNA, conseiller
- Florence PAPIN, conseiller
assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier
A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DE L'AFFAIRE
Selon acte en date des 22 et 27 décembre 2006, la société Gerese et la société J. X... F... ont acquis de la commune de [...] (42) une terrain de grande superficie en vue de le lotir en 32 lots.
Selon devis accepté du 28 décembre 2006, les acquéreurs ont confié à la Scp Pierre B... Jean-Paul C..., aux droits de laquelle vient la société Adage, la réalisation de toutes les opérations liées à la réalisation du futur lotissement.
Selon acte notarié du 17 décembre 2010, M. et Mme Y... ont acquis de la société Gerese et de la société J. X... F..., le lot n° 28 du lotissement.
Par acte du 2 septembre 2015, ils ont assigné les venderesses devant le tribunal de grande instance de Roanne aux fins de condamnation à leur payer une somme de 28 774,65 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'empiétement d'une voie d'accès au lotissement sur leur parcelle et de la nécessité pour eux de faire édifier un mur de soutènement en limite de leur propriété, le long de cette voirie.
Les défenderesses ont conclu au débouté et à titre subsidiaire ont appelé en garantie la société Adage, laquelle a conclu au débouté de l'appel en garantie.
Par jugement du 20 mars 2017, le tribunal de grande instance de Roanne a :
- fait droit à la demande principale des époux Y... dirigée contre les sociétés venderesses,
- a condamné ces sociétés à payer en outre aux époux Y... la somme de 10000€ de dommages et intérêts pour résistance abusive outre 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a débouté ces sociétés de leur appel en garantie dirigé contre la société Adage, et les a condamnées à payer à celle-ci une somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a ordonné l'exécution provisoire
- les a condamnées aux dépens.
La société Gerese et la société J. X... F... ont relevé appel de ce jugement à l'encontre de toutes les parties.
Elles demandent à la cour :
Vu les dispositions de l'article 1147 du Code civil,
- de réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu,
- de débouter en conséquence M. et Mme Y... de l'ensemble de leurs demandes,
subsidiairement,
- de condamner la société Adage à les relever et garantir,
- à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une expertise, aux fins principalement de donner son avis sur les travaux à effectuer,
en toutes hypothèses,
- de leur allouer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec le cas échéant, mise à la charge du débiteurs des sommes retenues par l'huissier,
- de condamner qui le mieux devra aux entiers dépens qui seront distraits au profit de Me Olivier H... de la société BLG Avocats sur son affirmation de droit.
Elles soutiennent :
- que les acquéreurs n'ignoraient pas au moment de la vente la réalisation de la voirie au sein du lotissement,
- que les travaux de terrassement de cette voirie ont été réalisés avant la vente du bien,
- que leur responsabilité ne peut être engagée sur le fondement des articles 545 et 1626 du code civil,
- que dans le cadre de la réalisation de la voie secondaire, il n'a nullement été prévu de créer un mur de soutènement et ce dernier ne correspond pas à une remise en état des lieux,
- que la demande est sans lien de causalité avec les désordres allégués,
- que le préjudice de jouissance doit être rejeté puisque rien n'empêchait M. et Mme Y... de clôturer leur terrain,
- que la société Adage s'est vu confier l'ensemble du dossier du lotissement, notamment le bornage de chaque lot et de la voirie,
- que la mission incluait évidemment les sujétions techniques relatives à la pente naturelle du terrain et aux terrassements,
- que lors de l'expertise amiable, cette société avait implicitement admis sa responsabilité,
- qu'à défaut, une expertise judiciaire devra être ordonnée.
M. et Mme Y... demandent à la cour :
- vu les articles 545 et 1147 du code civil,
- de déclarer irrecevables la demande d'expertise judiciaire,
- de débouter les appelantes de leurs prétentions,
- de confirmer le jugement, sauf à voir condamner les appelantes à leur payer une somme de 60 000 € au titre du préjudice de jouissance,
- de les condamner à leur payer 2 000 € de dommages et intérêts pour résistance abusive et 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec mise à la charge des débiteurs des frais de l'article 10 du tarif des d'huissiers en cas de recouvrement forcé,
- de condamner les sociétés appelantes aux dépens en ce compris les frais d'expertise, dont distraction au profit de Me A..., avocat sur son affirmation de droit.
Ils soutiennent :
- que la demande d'expertise formée pour la première fois en cause d'appel par les sociétés Gerese et J. X... F... est irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile et n'est pas fondée sur motif légitime en l'absence de visa d'un texte de loi et n'est pas utile pour éclairer la cour, alors que les parties ont reconnu lors de la réunion de chantier du 9 octobre 2012, l'empiétement sur leur fond,
- qu'en présence d'un contrat de vente l'article 1147 et 1626 doivent trouver application,
- que la garantie d'éviction implique qu'en présence d'un empiétement subi par l'acquéreur sur sa parcelle fraîchement acquise inhérente à l'action de son aliénateur, ce dernier peut être poursuivi pour un défaut de délivrance de la parcelle vendue, sa contenance étant modifiée, et ce quoique lors de la vente il n'ait été fait aucune stipulation sur la garantie,
- qu'en l'espèce, un empiétement d'une largeur de plus d'un mètre est matérialisé sur toute la longueur de la propriété,
- qu'ils n'ont jamais été informés de la nécessité d'un talutage de leur fonds,
- qu'il aurait dû soit être envisagé en bordure de la voirie à créer un mur de soutènement avec remblais permettant ainsi de conserver l'assiette de la parcelle des époux Y... en son état actuel soit borner leur parcelle suivant un retrait de un mètre pour permettre la réalisation d'un talus,
- que la seule solution possible pour qu'ils bénéficient de la jouissance de leur entière parcelle consiste à réaliser un mur de soutènement avec remblais,
- que l'expertise amiable a préconisé la réalisation de certains travaux selon devis de la société JPC pour un montant de 28 774,65 €,
- que les sociétés Gerese et X... doivent être condamnées à une remise en état ou au paiement du coût des travaux actualisés au jour de la décision.
La société Adage demande à la cour :
Vu les dispositions des articles 545 et 1626 du code civil, 564 à 566 et 700 du nouveau code de procédure civile,
à titre liminaire,
- de déclarer irrecevable la demande d'organisation d'une mesure d'expertise judiciaire sollicitée par les sociétés Gerese et J. X... F..., en ce que cela constitue une demande nouvelle,
à titre principal,
- de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Roanne du 20 mars 2017, en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie formé contre la société Adage,
à titre subsidiaire,
- de constater que les époux Y... étaient parfaitement informés du projet de construction d'une voie d'entrée secondaire au moment de la vente,
en conséquence,
- de rejeter l'ensemble des demandes formulées par les époux Y...
à titre infiniment subsidiaire,
- de constater que le quantum des demandes formulées par les époux Y... est injustifié,
- de rejeter l'ensemble des demandes formulées par les époux Y...,
- de rejeter la demande d'organisation d'une mesure expertale sollicitée par les sociétés Gerese et J. X... F...,
en tout état de cause,
- de condamner les sociétés Gerese et J. X... F..., à lui payer la somme de 5 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner les mêmes aux entiers dépens de la présente instance qui seront distraits au profit de la société Berthiaud et associés avocat sur son affirmation de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- que l'autorisation de lotir a fait l'objet de plusieurs permis de construire modificatifs, dont une autorisation en date du 30 juin 2010 permettant notamment la création d'une voie d'entrée secondaire,
- que la demande expertale constitue une demande nouvelle en ce que, d'une part, elle ne tend pas aux mêmes fins que les prétentions formulées en première instance par les appelantes et, d'autre part, en ce que cette sollicitation ne constitue pas un accessoire, ou un complément au sens de l'article 566 du code de procédure civile, des prétentions des Consorts Y..., demandeurs principaux,
- que, conformément au principe de concentration des moyens, cette demande est également irrecevable, en ce qu'elle n'a pas été soulevée dans le cadre de leurs premières conclusions d'appelant,
- qu'une telle expertise n'apparaît nullement utile,
- que la cour ne pourra que confirmer le raisonnement tenu par le tribunal de grande instance de Roanne,
- qu'en premier lieu, les sociétés Gerese et J. X... F... opèrent une lecture tronquée de l'article 1er de la loi n°46-942 qui indique simplement que la responsabilité personnelle du géomètre-expert est engagée en cas de dommages lui étant imputables, et non celle de la société dans laquelle il exerce,
- qu'il n'est nullement instauré un principe renforcé de responsabilité contractuelle, qui ouvre droit à réparation systématiquement lorsque le demandeur invoque une faute, une simple erreur de fait ou de droit,
- qu'elle n'a jamais reconnu sa responsabilité au titre des désordres, les appelantes se contentant de citer un extrait d'un courrier rédigé par la FILIA MAIF et invoquant le fait que la société Adage aurait produit un devis de reprise des dommages établi par la société Larue, alors que d'une part, l'extrait cité par les sociétés Gerese et J. X... F... du rapport d'expertise amiable se contente d'indiquer que selon M. D..., «il semblerait que cette sujétion technique n'ait pas été appréhendée», et d'autre part, que la production d'un devis relatif aux travaux de reprise dans le cadre des opérations d'expertise amiable, à l'instar du «commercialisateur du lotissement», la régie Gerbay et des consorts Y... ne correspond nullement à une reconnaissance de responsabilité,
- que la garantie d'éviction du fait d'un tiers est due si le trouble subi par l'acheteur est un trouble de droit, existant au moment de la vente, non déclaré et ignoré de l'acheteur (Cass., Civ 1., 28 octobre 2015, n°14-15.114),
- qu'en l'espèce, il ressort des éléments produits par les parties que les époux Y... n'ignoraient pas au moment de la vente la réalisation de cette seconde voirie au sein du lotissement, laquelle a été indiquée dans l'acte de vente ainsi que dans différents documents qui y étaient annexés,
- que ce fait n'est d'ailleurs pas contesté par les époux Y..., qui critiquent uniquement les modalités de réalisation de cette voie, ce que précise d'ailleurs un courrier du 22 août 2014 de leur assureur, la MAIF,
- qu'en deuxième lieu, il appert des comptes-rendus de chantier en date des 2 septembre 2010 et 9 octobre 2010 que les travaux de terrassement relatifs à cette voie secondaire ont été réalisés avant la vente du bien,
- qu'ainsi, le compte-rendu de chantier du 2 septembre 2010 indique (pièce adverse dans les intérêts des époux Y... n°5) :
«VOIRIE : Remettre en place le fond de forme et finir le terrassement de la voie entre les lots 28 et 30»,
- que l'acte de vente précise (pièce adverse Y... n°2) que «le VENDEUR ne confère pas de garantie de contenance du terrain d'assiette telle qu'elle est indiquée ci-dessus par référence aux documents cadastraux»,
- que l'argument soulevé par les époux Y... relatif à un défaut de délivrance au regard de la contenance du terrain, aux fins de justifier leurs demandes indemnitaires, apparaît donc non fondé,
- subsidiairement, que la cour ne pourra que confirmer le jugement en ce qu'il a écarté les demandes formulées au titre d'un prétendu préjudice de jouissance relatif à une prétendue impossibilité de clore leur propriété,
- que dans le cadre de la réalisation de cette voie secondaire, il n'a nullement été prévu de créer un mur de soutènement et ce dernier ne correspond en tout état de cause pas à une remise en état des lieux relative à un prétendu empiétement,
- qu'il s'agit en conséquence d'une demande de réalisation de travaux, sans lien de causalité entre les désordres allégués et les manquements contractuels invoqués.
MOTIFS
Sur l'application de l'article 564 du code de procédure civile et suivants à la demande d'expertise
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Cette demande formée à titre infiniment subsidiaire, a seulement pour objet de faire écarter en son quantum, la demande de dommages et intérêts formée par M. et Mme Y....
Elle n'est donc pas nouvelle au sens de l'article sus-mentionné.
La société Adage n'articule aucun moyen de droit au soutien de l'irrecevabilité qu'elle soulève au titre d'un prétendu principe de «concentration des moyens» qui n'aurait pas été respecté.
Ce moyen sera donc rejeté.
Précisions sur les faits et la chronologie
Selon les termes de l'acte de vente du 17 décembre 2010, M. et Mme Y... sont devenus propriétaires du lot 28 le jour de leur acquisition.
Cet acte ne mentionne aucun avant-contrat valant vente, mais seulement l'intervention d'un commercialisateur en la personne de la société Gerbay, par l'intermédiaire de laquelle les «termes, prix et conditions» de la vente ont été négociés, à une date qui n'est pas connue.
Dans des écrits et courriers des 9 octobre 2012 et 10 octobre 2012 (pièces 7 et 8) M. Y... indique d'ailleurs :
«(...) un décaissement a été réalisé , en bordure de la face ouest/nord-ouest de la parcelle [...] afin de créer un deuxième accès au lotissement. Déjà lors de ce décaissement, une partie de la parcelle [...] avait été modifiée»
Le terrain des époux Y... se «terminait de façon verticale (90°) par rapport au chemin. Le terrain initial se trouvait entre +1,00 m à + 0,30 m par rapport au chemin d'accès.»
Ainsi au jour de leur acquisition, M. et Mme Y... avaient connaissance du profil du lot qu'ils acquéraient puisque la voirie avait été mise en place dès septembre 2010.
Il résulte de ces éléments que M. et Mme Y... ont acquis un terrain se terminant «à la verticale» en limite de la voirie formant un «mur» allant de 0,30m à 1 m de hauteur.
De plus, M. et Mme Y... ont terrassé leur terrain en y ajoutant des remblais sur une épaisseur de 20 à 30 centimètres, ainsi que cela résulte du rapport de leur expert Cet.
Dans le compte-rendu de réunion daté du 9 octobre 2012, M. Y... indique, que des travaux de finition de la voirie ont été entrepris depuis début septembre (éclairage, enrobé, bordures ...) et que durant ces travaux plusieurs m² de terrain ont été modifiés sur la parcelle [...] et que plusieurs m3 de terre ont été évacués sans son accord.
Il résulte des photos produites, qu'ensuite de ces travaux, le terrain du lot 28 en limite de propriété ne forme plus un «mur» mais un talus d'environ 30°, mis en forme par prélèvement de terre sur le lot 28.
M. et Mme Y... ont sollicité l'intervention de leur assureur la société Maif qui a organisé une expertise amiable à laquelle les vendeurs n'ont pas été convoqués.
L'expert a conclu à la nécessité de réaliser un mur de soutènement en limite de propriété avec remblaiement en partie arrière du mur.
L'expert après avoir vérifié les devis transmis, a retenu celui de la société JPC construction en date du 18 novembre 2013 établi à la demande de M. Y..., devis qu'il a jugé seul «techniquement pertinent et complet car incluant toutes les prestations techniquement ou réglementairement nécessaires» pour un coût de 26464,97 €.
En réponse à une sollicitation de l'expert en date du 11 mai 2014, les vendeurs ont répondu dans un courrier du 1er juillet 2014, que «l'empiétement» n'est pas contesté, que ceci pourra être corrigé, mais qu'il n'est absolument pas nécessaire de procéder à des travaux de soutènement, eu égard au profil du talus et au motif que M. et Mme Y... ont acquis leur lot en sachant bel et bien que les travaux de finition nécessitant la réalisation d'un talus étaient différés.
Sur les responsabilités
sur l'empiétement :
Le remède à un empiétement consiste dans la démolition de la chose qui empiète sur le fonds concerné.
Tel n'est pas le cas en l'espèce, puisque M. et Mme Y... ne sollicitent aucune restitution de portion de terrain, ni démolition ou enlèvement d'ouvrage.
Il n'est pas démontré une emprise de la voirie sur le lot 28 par la réalisation sur ce lot d'un ouvrage ( enrobé, trottoir, bordure...) qui empêcherait ces derniers de clore leur propriété sur la limite telle qu'elle résulte du bornage.
La création d'un talus réalisé sur le terrain de M. et Mme Y... ou l'enlèvement de terre, ne réalise pas un empiétement sur leur terrain, mais constitue une dégradation de ce terrain, qui peut être réparée par une remise en état.
sur le préjudice résultant de l'atteinte à la propriété :
Postérieurement à la vente, le lotisseur a fait araser le terrain du lot 28 le long de la voirie, sur une largeur d'environ 2m et sur une longueur de l'ordre de 40 m par enlèvement de plusieurs m3 de terre sur le lot 28.
Aucun document contractuel ne fait état de ce que les acquéreurs se devaient d'accepter une telle atteinte à leur lot.
Il sera relevé que les vendeurs eux-mêmes ne produisent aucun plan qui aurait été communiqué aux acquéreurs avec l'indication de la voirie supplémentaire et la mention du talus à réaliser sur leur lot.
En conséquence, le prélèvement de plusieurs m3 de terre sur le lot 28 , postérieurement à la vente, constitue une dégradation du terrain laquelle atteinte au droit de propriété doit être réparée par la remise en état des lieux en application de l'article 545 du code civil.
Sur la remise en état
Il est acquis qu'avant le reprofilage litigieux, le terrain de M. et Mme Y..., tel qu'il existait lors de l'acquisition, jouxtait la voirie «à la verticale».
Or, aucune clause du contrat de vente ne mettait à la charge du vendeur la construction d'un mur de soutènement en l'état de ce profil « la verticale».
Les acquéreurs se devaient donc nécessairement tôt ou tard de réaliser, à leur frais, un mur de soutènement en limite de propriété.
Seul le coût du remblaiement derrière le mur de soutènement, rendu nécessaire par les prélèvements intempestifs de volumes de terre, doit être mis à la charge des vendeurs, soit selon le devis :
- fourniture de tout-venant : 25 m3 406,25 €
- fourniture terre végétale : 15 m3 474 €
total : 880,25 € HT.
Sur le préjudice de jouissance
Avant les travaux litigieux le terrain était à la verticale de la voirie et présentait donc déjà un certain danger.
Aucun danger supplémentaire n'a été généré par la création du talus.
En revanche, les acquéreurs ont subi une privation de jouissance de la superficie représentée par la pente du talus totalement inutilisable, soit environ 80 m² pendant environ 6 années.
Au vu de la valeur du terrain, un peu plus de 50 € le m² et des faibles possibilités de valorisation de cette bande de terrain en l'absence de consolidation de la limite, le préjudice sera réparé par l'allocation d'une indemnisation de 4 000€.
Sur l'appel en garantie
Les vendeurs justifient que la société de géomètres-experts C..., D... avait reçu de leur part une mission complète, comprenant le bornage des lots, le plan de composition et de voirie, un profil en travers de la voirie, le calcul de la surface des lots et de la voie, les plans modifiés, la demande de modificatif, la consultation des entreprises, les quantitatifs et le suivi des travaux.
Il appartenait donc à ce professionnel, maître d'oeuvre, tenu d'un devoir de conseil, d'alerter le maître d'ouvrage sur les conséquences de la création du second accès au lotissement sur le profil du lot 28.
Il lui appartenait également, en tant que chargé du suivi des travaux, préalablement à toute intervention sur le lot 28, de s'assurer de l'accord du propriétaire du lot 28.
La société Adage, qui ne justifie pas avoir accompli les diligences ci-dessus, a donc failli dans l'exécution de ses obligations contractuelles à l'égard de ses mandantes.
L'appel en garantie est donc justifié.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive
La résistance des vendeurs aux réclamations excessives de M. et Mme Y... n'apparaît pas avoir été abusive.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
la cour,
Réformant le jugement déféré et statuant de nouveau,
- Condamne solidairement la société Gerese et la société J. X... F... à payer à M. Y... David et Mme Z... Stéphanie épouse Y..., la somme de 880,25 € HT outre celle de 4 000 € au titre du préjudice de jouissance outre celle de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel,
- Condamne la société Adage à relever et garantir les sociétés Gerese et J. X... F... du montant des ces condamnations y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à leur payer en sus, la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société Adage aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Olivier H... de la société BLG Avocats et au profit de Me A..., avocat, sur leur affirmation de droit.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE