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12/09/2018 | FRANCE | N°16/04920

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 12 septembre 2018, 16/04920


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : N° RG 16/04920





X...



C/

société SEB DEVELOPPEMENT







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 03 Juin 2016

RG : F 13/03054











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2018







APPELANTE :



Jennifer X... épouse Y...

née le [...] à Ermont (95)



[...]

[...]



comparante en personne, assistée de Me Mélanie Z... de la SELARL CABINET Q... Z..., avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



société SEB DEVELOPPEMENT

[...]

[...]



représentée par Me Jean-baptiste R... de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIÉS, ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 16/04920

X...

C/

société SEB DEVELOPPEMENT

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 03 Juin 2016

RG : F 13/03054

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2018

APPELANTE :

Jennifer X... épouse Y...

née le [...] à Ermont (95)

[...]

[...]

comparante en personne, assistée de Me Mélanie Z... de la SELARL CABINET Q... Z..., avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

société SEB DEVELOPPEMENT

[...]

[...]

représentée par Me Jean-baptiste R... de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Mars 2018

Présidée par Evelyne ALLAIS, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

- Joëlle DOAT, président

- Natacha LAVILLE, conseiller

- Evelyne ALLAIS, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 12 Septembre 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 18 mars 2008, Madame Jennifer Y... née X... a été embauchée par la société SEB DEVELOPPEMENT à compter du [...], en qualité d'assistante service du personnel, niveau IV-échelon 3-coefficient 285, avec reprise d'ancienneté au 12 novembre 2007, compte tenu d'un contrat d'intérim et d'un contrat de travail à durée déterminée antérieurs.

Par avenant du 24 juillet 2012, l'emploi de Madame Y... a été aménagé à hauteur de 80 % du 1er septembre au 30 novembre 2012 dans le cadre d'un congé parental d'éducation.

Le contrat de travail était soumis à la convention collective des mensuels des industries métallurgiques du Rhône et ses avenants.

Le 23 avril 2013, Madame Y... a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 3 mai 2013, avec mise à pied à titre conservatoire.

Le 16 mai 2013, elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse, avec paiement intégral de sa période de mise à pied à titre conservatoire.

Madame Y... a saisi le conseil de prud'hommes de LYON le 27 juin 2013 aux fins de voir dire que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et condamner la société SEB DEVELOPPEMENT à lui payer des dommages et intérêts outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 3 juin 2016, le conseil de prud'hommes a :

-dit que le licenciement de Madame Y... était bien fondé,

-débouté Madame Y... de l'ensemble de ses demandes,

-débouté la société SEB DEVELOPPEMENT de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Madame Y... aux dépens.

Par lettre recommandée envoyée le 23 juin 2016, Madame Y... a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience, Madame Y... demande à la Cour de :

-dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

-condamner la société SEB DEVELOPPEMENT à lui payer les sommes nettes suivantes:

1.918 € à titre de rappel de majoration d'heures supplémentaires outre 191,30 € au titre des congés payés afférents,

189 € à titre de rappel de majoration sur les RTT non pris outre 18,90 € au titre des congés payés afférents,

51.500 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame Y... fait valoir :

-que quatre des griefs qui lui sont reprochés sont prescrits, remontant à plus de deux mois avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement ; que l'employeur ne prouve pas n'en avoir eu connaissance que grâce à une visite de l'inspection du travail du 10 avril 2013, faute d'établir l'existence et le contenu de cette visite,

-qu'elle avait de nombreuses missions dans le cadre de son emploi et que la gestion du suivi des temps ne représentait que 20 % de son temps de travail en 2012 ; que les manquements fautifs qui lui sont imputés ne sont pas fondés ; qu'au surplus, un d'entre eux, à savoir l'utilisation par elle de son profil gestionnaire pour modifier ses propres badgeages n'est pas mentionné dans la lettre de licenciement,

-que l'employeur ne souhaitait plus la conserver dans ses effectifs après son absence résultant de son congé de maternité puis de son congé parental,

-que l'employeur n'a pas majoré les heures supplémentaires et les jours de RTT conformément à l'accord applicable, de telle sorte que ses demandes en paiement de ces chefs sont bien fondées.

Dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience, la société SEB DEVELOPPEMENT demande à la Cour de :

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

-débouter Madame Y... de ses demandes de rappel de majoration d'heures supplémentaires et de majoration sur les RTT non pris,

-condamner Madame Y... à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SEB DEVELOPPEMENT fait valoir :

-qu'elle a mis en place différentes requêtes en matière d'horaires pour justifier de la stricte application de la législation inhérente à la durée du travail suite à une visite de l'inspection du travail en date du 10 avril 2013 ; qu'elle n'a eu connaissance des faits imputables à Madame Y... qu'après analyse de ces requêtes ; qu'en conséquence, aucun des faits reprochés à la salarié n'est prescrit,

-que Madame Y... était en charge de la gestion administrative du personnel et notamment du suivi des temps de certains salariés ; que Madame Y... a eu un comportement inapproprié lors d'une réunion en date du 27 février 2013, lequel a donné lieu à un entretien de mise au point du 5 mars 2013 ; que suite à la visite de l'inspection du travail, l'employeur a découvert de nombreux dysfonctionnements imputables à Madame Y..., lesquels sont fautifs,

-qu'elle a procédé au remplacement de Madame Y..., nonobstant la réorganisation du service, qui a eu lieu suite à la rupture du contrat de travail,

-que Madame Y... ne rapporte pas la preuve de l'absence de paiement de la majoration des heures supplémentaires dont elle fait état ; qu'en outre, elle n'était pas tenue de payer les jours de RTT non pris comme des heures supplémentaires.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions écrites susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION:

La société SEB DEVELOPPEMENT, qui fait partie du groupe SEB, spécialisé dans la fabrication et la commercialisation d'articles culinaires et d'appareils électroménagers, emploie environ 600 salariés.

Il ressort des explications des parties et des pièces versées aux débats que :

-le service des ressources humaines était composé d'un responsable ressources humaines et de trois assistantes, Mesdames Marie-Laure A..., Nathalie B... et Y...,

-Madame C..., responsable ressources humaines, est devenue la supérieure hiérarchique de Madame Y... au cours de l'année 2011 et a été remplacée par

Madame D... née E... pendant son congé de maternité, [...]

-Madame Y... a été en congé de maternité du 2 février 2012 au 18 juin 2012, puis en congé parental à temps complet jusqu'au 31 août 2012, date à partir de laquelle elle a repris son emploi à 80 % jusqu'au 30 novembre 2012.

sur la rupture du contrat de travail :

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

En application de l'article L.1232-6 du code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

Aux termes de l'article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Les fonctions de Madame Y..., qui ne sont pas précisées dans le contrat de travail ni dans aucun autre document contractuel, sont décrites dans l'entretien annuel d'évaluation de celle-ci en date du 19 avril 2011 ainsi que dans un document intitulé 'profil de poste de J.Y...' établi par l'employeur. Il résulte de ces documents que la salariée avait les missions suivantes :

-gestion du temps des salariés,

-suivi des tableaux de bord,

-déclarations réglementaires,

-établissement et suivi du budget des frais de personnel et des effectifs,

-mise à jour de l'organigramme de l'entreprise.

L'entretien annuel d'appréciation de Madame Y... en date du 3 mai 2011, fait apparaître que celle-ci, dont l'investissement, la rigueur et la disponibilité étaient relevés, fournissait un travail conforme aux attentes du poste (3/4) et que l'employeur comptait sur elle dans le cadre de la mise en place du logiciel Horoquartz, destiné à permettre à chaque salarié de gérer ses propres congés et à décharger à terme la salariée d'une saisie lourde et fastidieuse. Par ailleurs, Madame Y... a bénéficié d'augmentations régulières de sa rémunération en 2009 et 2012.

La lettre de licenciement mentionne que Madame Y... a eu un comportement inapproprié lors d'une réunion en date du 27 février 2013 et n'a pas respecté volontairement les directives de l'employeur à dix reprises dans le cadre de l'exécution du travail. En revanche, elle ne reproche pas à Madame Y... d'avoir modifié ses propres badgeages à l'aide de son profil gestionnaire. Il n'y a donc pas lieu d'examiner ce grief, bien qu'il soit développé dans les écritures de l'employeur.

Madame Y... soulève tout d'abord la prescription de quatre griefs reprochés dans la lettre de licenciement, à savoir :

-la création d'une consigne dans le logiciel de gestion des temps avec le transfert d'heures au profit de Madame F..., salariée de la société et elle-même dans leurs CET respectifs,

-le transfert de 3 jours de crédit d'heures dans son CET,

-le non respect du circuit de validation des congés (inscription d'un jour de congé dans l'agenda du manager a posteriori, sans validation préalable de hiérarchie),

-l'autorisation donnée à plusieurs reprises à un salarié de l'entreprise, Monsieur G..., de réaliser son horaire hebdomadaire sur 4,5 jours alors qu'une telle autorisation ne relève pas de sa responsabilité.

Le tableau produit par la salariée quant à la datation des griefs, corroboré par les pièces versés aux débats, montre que les quatre griefs susvisés remontent à 2011 et 2012 et que l'employeur a pris connaissance au plus tard des deux premiers griefs par une extraction informatique datée du 22 février 2013. Par ailleurs, la société SEB DEVELOPPEMENT n'établit par aucune pièce avoir eu connaissance des deux autres griefs suite à des requêtes en matière d'horaires mises en place après une visite de l'inspecteur du travail en date du 10 avril 2011. Les quatre griefs précités étant prescrits, ils ne peuvent fonder le licenciement.

Il convient dès lors d'examiner successivement les sept autres griefs.

comportement inapproprié du 27 février 2013 :

La réunion du 27 février 2013, dont l'objet est résumé par un courriel du même jour, était destinée à modifier des pratiques en matière d'aménagement du temps de travail. Toutefois, certaines mesures prises lors de cette réunion étaient contraires à l'accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (2 heures maximum de travail pouvant être versées dans le compteur AVR sans validation du manager et plafonnement du compteur AVR à 2 jours, contrairement aux dispositions de l'article 1.23 de l'accord qui prévoyait pour les ETAM une souplesse de 3 heures par semaine dans la limite des durées maximales de travail autorisées).

Madame Y... est d'accord pour reconnaître que lors de la réunion du 27 février 2013, elle a interpellé sa hiérarchie sur cette difficulté, compte tenu des fréquents dépassements horaires des ETAM, et qu'elle eu un entretien oral le 5 mars 2013 avec Madame D..., laquelle lui a reproché son attitude lors de cette réunion. Elle s'est immédiatement excusée de son comportement auprès de sa hiérarchie.

Madame D... étant l'ancienne supérieure hiérarchique de Madame Y..., sa seule attestation en date du 13 janvier 2016, rédigée presque trois ans après les faits, ne présente pas de garanties d'impartialité suffisantes pour prouver que Madame Y... aurait eu un comportement inapproprié lors de la réunion du 17 février 2013. Au surplus, les faits décrits dans cette attestation ne révèlent pas que Madame Y... aurait outrepassé sa liberté d'expression dans le cadre d'une réunion relevant de son domaine de compétence. Ce grief n'est dès lors pas établi.

saisie des temps de Madame H... :

'vous avez saisi dans l'outil de gestion des temps une durée de travail supérieure à 6 jours consécutifs et de plus de 10h sans validation du manager (cas de Mlle Chloe H..., du 13 novembre au 22 novembre 2012), sans informer votre hiérarchie ni au préalable, ni a posteriori. En réponse à notre questionnement, vous avez indiqué ne pas vous souvenir avoir saisi ces données'

Suite à une demande de Madame D... par courriel en date du 15 mars 2013, Madame Y... lui a précisé la durée du travail qu'elle avait saisie pour Madame H... du 13 au 22 novembre 2012, laquelle est effectivement supérieure à 6 jours de travail consécutifs et de 15 heures pour le samedi 17 novembre 2012. Toutefois, les courriels échangés en février et mars 2013 par Madame B..., assistante ressources humaines avec les managers ou Madame D... montrent que ces dépassements d'horaires étaient tolérés par la société jusqu'en mars 2013 et n'avaient rien d'exceptionnel. Au surplus, le logiciel Horoquartz permettait tant au manager de Madame I... qu'à Madame D... de contrôler les dépassements d'horaires considérés et l'employeur ne démontre pas que la salariée avait l'obligation d'informer par écrit sa responsable de tout dépassement horaire des salariés. Le grief considéré n'est pas établi.

régularisation des badgeages de Madame J... :

'vous avez dissimulé du travail sur du temps de repos en inversant les badgeages enregistrés (cas de Madame J... les 2 et 3 avril 2013 dont nous avons été alertés par le responsable hiérarchique qui s'en est étonné lors de la réception de l'état hebdomadaire de son équipe). La déclaration de présence de Madame J... semaine 14 est fausse de votre fait.'

L'état hebdomadaire manager du 1er au 7 avril 2013 fait apparaître que Madame J... a travaillé le mardi 2 avril 2013 de 8h38 à 12h10 alors que suivant courriel du 22 mars 2013, celle-ci avait été autorisée par Monsieur K..., son manager, à travailler le mercredi 3 avril 2013 au lieu du 2 avril 2013.

Toutefois, l'employeur ne démontre pas le caractère volontaire de cette erreur, ni avoir subi un quelconque préjudice de ce chef. Le grief n'est pas établi.

déplacement de Madame L...:

'vous avez dissimulé un motif de déplacement en saisissant des heures de travail le 13 mars 2013 pour Mlle L..., sous-entendant qu'elle était présente sur site, alors que la consigne "déplacement" est obligatoire et est associée, conformément à nos règles, à des modalités de récupération'

L'employeur produit une extraction d'heures de présence de Madame L... pour les 6,7 et 10 décembre 2012, commentée par lui. Cette extraction ne correspond manifestement pas à la date des faits visée dans la lettre de licenciement. Le grief n'est pas établi.

situation de Madame M... :

'vous avez accordé de votre propre autorité une autorisation d'absence payée pour un rendez-vous personnel à la Préfecture à Mademoiselle Guan M.... Nous avons eu connaissance de cette faveur le 18 avril lorsque le manager d'un salarié nous a fait une demande identique en se référant à ce geste de votre part qui crée donc un précédent pénalisant le fonctionnement de l'entreprise.'

Madame Y... reconnaît avoir régularisé le 11 mars 2013 une autorisation d'absence pour Madame M..., ayant considéré à tort que celle-ci avait un rendez-vous à la préfecture pour régulariser sa carte de séjour alors qu'en fait ce rendez-vous était lié à un simple changement d'adresse. L'employeur ne démontre pas le caractère intentionnel de cette erreur ni le préjudice qu'il en a subi, étant observé qu'il en a eu rapidement connaissance dès le 18 avril 2013. Le grief n'est également pas établi

situation de Madame N... :

'Le 12 avril 2013, suite à un contrôle, nous constatons que Madame Muriel N... en temps partiel, semaine 15, a effectué un volume d'heures complémentaires supérieur aux dispositions conventionnelles, et ce sans information au préalable de votre part alors qu'il est de votre rôle de nous alerter'

Par courriel du 13 mai 2013, Madame D... relate à Madame C... ainsi qu'à Monsieur O..., directeur des ressources humaines, que Jennifer lui a remis un état pour Madame N... et que suite à une demande de précision, 'c'est alors qu'elle a vu le volume d'heures hebdomadaire (nathalie a les feuilles justificatives) je confirme: pas d'alerte de sa part sur le dépassement'

Les pièces afférentes à la durée du travail de Madame N... sont afférentes à la semaine 14 et non 15. Au surplus, l'échange de courriels versé aux débats, qui ne contient pas la réponse de Madame Y... à la demande d'information de Madame D... en date du 14 avril 2013 quant aux horaires de travail de Madame N... pendant la semaine 14, est manifestement incomplet et ne permet pas d'établir un quelconque faute de la part de Madame Y... quant à la gestion des horaires de Madame N....

situation de Madame P...:

'le 18 avril 2013, vous me questionnez pour valider le crédit d'une heure à Mme P... qui n'aurait pas pris le temps de déjeuner ce jour là. Alors que nous vous demandons de vous renseigner sur cette demande, nous découvrons qu'à plusieurs reprises, vous avez pris l'initiative de modifier le badgeage de Madame P... en ajoutant une heure à la salariée quand elle vous déclare avoir travaillé pendant la pause déjeuner, faussant ainsi le décompte réel de la durée du temps de travail.

L'extraction des horaires de Madame P... montre que les 8 novembre, 13 décembre, 20 décembre 2012, 3 janvier et 22 janvier 2013, Madame Y... a rajouté une heure au temps de travail de Madame P....

Madame Y... justifie un tel procédé par le fait que Madame P... était parfois obligée de travailler pendant le temps de sa pause déjeuner. Or, l'employeur ne démontre pas le contraire pour les jours considérés. Ce grief n'est pas établi.

Seules deux erreurs vénielles de Madame Y... sont avérées. Celles-ci pouvaient être facilement détectées par les managers des salariés ou encore la supérieure hiérarchique de l'intéressée, qui avaient accès au logiciel horoquartz. En outre, elles ne sont pas constitutives de manquements disciplinaires imputables à la salariée.

Le licenciement de Madame Y... est dès lors sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé sur ce point.

La société SEB DEVELOPPEMENT a plus de 10 salariés. Madame Y... avait 33 ans et une ancienneté de plus de 5 ans et demi dans l'entreprise au moment du licenciement. Elle percevait à cette date un salaire mensuel brut moyen de 2.840 euros, prime comprise.

Madame Y... a subi un préjudice psychologique suite à son licenciement. Elle a été indemnisée à compter du 5 novembre 2013 à hauteur de 1.508 € et n'a retrouvé un emploi pérenne qu'à compter du 14 novembre 2013. Si elle indique que cet emploi est moins rémunérateur, le bulletin de paie du 1er février 2014 de son nouvel employeur n'est pas suffisant à le prouver. Au vu de ces éléments, la société SEB DEVELOPPEMENT sera condamnée à payer à Madame Y... la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts.

sur le rappel de majoration au titre des heures supplémentaires :

Madame Y... fait état de ce qu'elle a effectué 477 heures supplémentaires depuis 2008 et que la majoration afférente à ces heures supplémentaires ne lui aurait pas été payée. Toutefois, Madame Y... n'explicite pas les modalités de calcul de ces heures supplémentaires, alors que les bulletins de paie de décembre 2008 à 2012 de la salarié ne font pas état d'heures supplémentaires. Elle sera donc déboutée de sa demande en paiement d'une majoration au titre de ces heures supplémentaires.

sur le rappel de majoration au titre des jours de RTT non pris :

Madame Y... a bénéficié de la somme de 755,92 € au titre des RTT non prises lors de la rupture du contrat de travail. Si elle soutient que ces jours de RTT doivent être majorés comme les heures supplémentaires, elle ne le prouve pas au regard notamment de l'article 1.25 de l'accord sur l'aménagement et le temps de travail de l'entreprise. Elle sera également déboutée de sa demande en paiement au titre de la majoration des RTT.

La société SEB DEVELOPPEMENT , partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle sera également condamnée à payer à Madame Y... la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de celle-ci tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

STATUANT A NOUVEAU,

DIT que le licenciement de Madame Y... est sans cause réelle et sérieuse;

CONDAMNE la société SEB DEVELOPPEMENT à payer à Madame Y... la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

DIT que les sommes allouées supporteront, s'il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;

Y AJOUTANT,

DEBOUTE Madame Y... de ses demandes en paiement de rappel de majorations au titre d'heures supplémentaires ainsi que des jours de RTT non pris ;

CONDAMNE la société SEB DEVELOPPEMENT à payer à Madame Y... la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société SEB DEVELOPPEMENT aux dépens.

Le Greffier Le Président

Malika CHINOUNE

Joëlle DOAT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 16/04920
Date de la décision : 12/09/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°16/04920 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-12;16.04920 ?
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