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30/10/2018 | FRANCE | N°18/03166

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 30 octobre 2018, 18/03166


N° RG 18/03166 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LVRI









Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 26 juillet 2017



RG : 14/08443

ch n°1 cab 01 A





Association INSTITUT DE FORMATION EN SOINS INFIRMIERS ROCKEFEL LER



C/



X...





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 30 Octobre 2018







AP

PELANTE :



L'Association INSTITUT DE FORMATION EN SOINS INFIRMIERS ROCKEFELLER

[...]



Représentée par la SCP ELATHA, avocats au barreau de LYON









INTIMÉE :



Mme F... X... épouse Y...

née le [...] à STRASBOURG (67)

[...]



Représentée pa...

N° RG 18/03166 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LVRI

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond

du 26 juillet 2017

RG : 14/08443

ch n°1 cab 01 A

Association INSTITUT DE FORMATION EN SOINS INFIRMIERS ROCKEFEL LER

C/

X...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 30 Octobre 2018

APPELANTE :

L'Association INSTITUT DE FORMATION EN SOINS INFIRMIERS ROCKEFELLER

[...]

Représentée par la SCP ELATHA, avocats au barreau de LYON

INTIMÉE :

Mme F... X... épouse Y...

née le [...] à STRASBOURG (67)

[...]

Représentée par la SELARL Z... & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 25 Septembre 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Octobre 2018

Date de mise à disposition : 30 Octobre 2018

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Françoise CARRIER, président

- Michel FICAGNA, conseiller

- Florence PAPIN, conseiller

assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier

A l'audience, Michel FICAGNA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

En 2010, Mme F... X... épouse Y..., en reconversion professionnelle après avoir exercé comme notaire, a été admise sur concours en 1ère année d'études préparatoires à l'institut de formation en soins infirmiers (A...) de Bourgoin-Jallieu.

Elle a été transférée à compter de sa 2ème année de formation à l'A... Rockefeller de Lyon, sur sa demande pour des raisons familiales.

Elle a validé les semestres 1,2 3 et 4 avec d'excellents résultats théoriques, mais avec néanmoins, des réserves concernant le déroulement des stages.

Au cours de la 3ème année de formation, les stages du 5 ème semestres ont donné lieu à des mauvaises appréciations sur son travail de sorte qu'elle n'a pu obtenir les 10 ECTS de stage ce qui ne lui a pas permis de se présenter au diplôme en juillet 2013.

Toutefois, elle a poursuivi sa formation en semestre 6 au cours duquel elle a été affecté en pédiatrie à l'Hopital Femme Mère Enfant puis en chirurgie à l'hôpital privé Jean Mermoz. Ce dernier stage a été arrêté le 17 mai 2013.

Mme X... épouse Y... a été présentée en commission d'attribution des crédits le 4 juillet 2013 et elle a été admise à faire deux stages de rattrapage à compter du 2 septembre 2013.

Le premier stage qui s'est déroulé dans un service de dialyse a donné lieu à un rapport négatif sur ses aptitudes.

Le second stage qui a débuté le 7 octobre 2013 à l'hôpital neurologique Unité 400 pour une durée de 10 semaines, a donné lieu le 23 octobre 2013, à un signalement du centre de stage avec l'observation suivante : «inadaptation aux situations de soins la rendant dangereuse».

Le 28 octobre 2013, Mme X... épouse Y... a été reçue par la directrice de l'A... de Rockefeller, pour un entretien et s'est vue remettre une invitation à se présenter devant un conseil pédagogique exceptionnel réuni à son intention pour avis sur la suite de sa formation, pour le 19 novembre 2013.

Mme X... épouse Y... a adressé un document à l'attention des membres de ce conseil et s'est présentée assistée de son mari.

A l'issue de ses travaux le conseil pédagogique à voté à bulletin secret dans les termes suivants :

- poursuite de la scolarité : 2 voix,

- épreuve pratique complémentaire : 0 voix,

- exclusion temporaire d'un an : 2 voix,

- exclusion définitive : 13 voix.

Par décision du 21 novembre 2013, la directrice de l'A... Rockefeller, a prononcé l'exclusion définitive de Mme F... X... épouse Y... de l'A... Rockefeller.

Par acte du 10 juillet 2014, Mme Y... a assigné l'association A... Rockefeller devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de voir annuler la décision d'exclusion et aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement contradictoire du 26 juillet 2017, le tribunal de grande instance de Lyon a:

- constaté que la procédure d'exclusion de Mme F... X... épouse Y... de l'A... Rockefeller n'est pas régulière,

- ordonné en conséquence la réintégration immédiate de Mme F... X... épouse Y... au sein de l'A... Rockefeller, à charge pour les parties de s'entendre sur un éventuel transfert vers un autre institut,

- condamné l'A... Rockefeller à payer à Mme F... X... épouse Y... les sommes de :

*10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

*5 400 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique,

*1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec faculté de recouvrement direct au profit de Me Eric Z...,

- débouté Mme F... X... épouse Y... du surplus de ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration du 22 août 2017, l'association A... Rockefeller a interjeté appel de ce jugement devant la cour d'appel de Lyon.

Par ordonnance du 11 janvier 2018, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l'affaire pour inexécution du jugement dont appel, condamné l'association A... Rockefeller à payer à Mme F... X... épouse Y... la somme de 600 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et réservé les dépens.

Le 24 avril 2018, l'affaire a fait l'objet d'une réinscription au rôle.

Dans ses dernières conclusions, notifiées le 17 septembre 2018, l'association A... Rockefeller demande à la cour de :

Vu le code de procédure civile,

Vu l'arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux,

Vu la jurisprudence administrative et judiciaire,

- constater que le premier juge s'est fondé sur la base d'un motif qui n'a pas été soumis aux débats contradictoires,

- en conséquence, annuler et, subsidiairement, réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau, dire et juger Mme F... X... épouse Y... prescrite en son action et, en conséquence, irrecevable en toutes ses demandes,

- subsidiairement, dire et juger Mme F... X... épouse Y... mal fondée en toutes ses demandes et l'en débouter,

- condamner Mme F... X... épouse Y... à lui payer la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

- la juridiction de première instance a fondé sa décision sur le moyen relatif au respect des droits de la défense de Mme F... X... épouse Y... alors que celle-ci n'en a jamais fait état dans ses conclusions et que les parties n'ont pas été invitées à se prononcer sur ce moyen,

- le recours contre la décision litigieuse aurait dû être exercé selon la forme du recours en excès de pouvoir dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision litigieuse, le 22 novembre 2013, si bien que l'action de Mme F... X... épouse Y..., introduite le 11 juillet 2014, est prescrite depuis le 22 janvier 2013,

- a tout le moins ayant exercé un recours hiérarchique, elle aurait dû exercé son recours contentieux deux mois après l'expiration du délai de deux mois pour statuer sur son recours gracieux,

- la décision d'exclusion définitive n'est pas une sanction disciplinaire dès lors qu'elle a été prise par la directrice de l'A... Rockefeller, après avis du conseil pédagogique,

- les droits de la défense ont été respectés puisque Mme F... X... épouse Y... a pu produire devant le conseil pédagogique des observations écrites et orales et qu'elle était accompagnée du conseil de son choix,

- la procédure d'exclusion est justifiée par les difficultés en matière d'hygiène et de sécurité rencontrées par Mme F... X... épouse Y... au cours de ses stages qui, malgré les aménagements mis en place, faisaient courir des risques pour les patients,

- la décision d'exclusion est fondée sur des évaluations et des rapports de stage circonstanciés rendus par les responsables des établissements hospitaliers, seuls compétents pour évaluer le travail effectué par Mme F... X... épouse Y... lors des stages.

Mme F... X... épouse Y... dans ses dernières conclusions, notifiées le 13 juillet 2018, demande à la cour de :

Vu l'Arrêté du 31 juillet 2009,

Vu l'Arrêté du 2 août 2011 et l'Arrêté du 21 avril 2007,

Vu l'article 1101, 1134, 1184 du Code Civil,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a constaté que la procédure d'exclusion à son encontre n'était pas régulière et ordonné sa réintégration immédiate au sein de l'A...,

- infirmer le jugement entrepris sur le quantum,

- en conséquence, dire et juger que son exclusion définitive est infondée et injustifiée.

- prononcer sa réintégration au sein de l'A... Rockefeller afin d'achever sa formation, à charge pour l'association A... Rockefeller d'organiser le transfert de Mme Y... dans un autre A... sur Lyon ou sa proche banlieue afin qu'elle puisse terminer sa formation dans de meilleures conditions,

- annuler l'invalidation des stages en hématologie, en chirurgie du membre supérieur, en endocrinologie et en dialyse et demander leur validation à l'association A... Rockefeller,

- constater l'existence du préjudice subi du fait de la prolongation de sa formation, de la perte de chance d'obtenir le diplôme d'État infirmier et de l'état d'anxiété dans lequel elle a été plongée,

- rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- condamner l'association A... Rockefeller à lui verser :

*la somme de 28 473 € au titre des frais engagés pour suivre sa formation,

*celle de 90 000 € au titre du manque à gagner durant la prolongation de sa formation,

*celle de 5 000 € au titre de la perte de chance d'obtenir son diplôme d'Etat infirmier,

*celle de 15 000 € au titre du préjudice moral,

*celle de 10 000 € pour refus abusif de sa réintégration nonobstant le jugement du 26 juillet 2017 assortie de l'exécution provisoire,

- rejeter la demande de nullité formée par l'association A... Rockefeller,

- constater que son action n'est pas prescrite et, en conséquence, rejeter l'irrecevabilité soulevée par l'association A... Rockefeller,

- condamner l'association A... Rockefeller au paiement d'une somme de 10000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle indique que :

- seule une faute de sa part pouvait justifier la rupture du contrat la liant à l'A... Rockefeller,

- la procédure devant le conseil pédagogique n'a pas été respectée, la privant de la possibilité de se défendre, puisqu'elle n'a pas été convoquée sur la base de l'article 10 alinéa 6-d du décret concernant les étudiants ayant accomplis des actes incompatibles avec la sécurité des personnes prises en charge, qu'elle n'a pas été informée qu'une exclusion pouvait être décidée en lieu du soutien particulier prévu par l'article 10 alinéa 6-a, que la convocation ne l'a pas informée de la possibilité de présenter des observations écrites ou orales, que ses observations n'ont été remises aux membres du conseil qu'au début de la séance du conseil,

- la décision d'exclusion définitive est illégale en raison de l'insuffisance de sa motivation en fait et de l'absence de motivation sur la non-application des autres mesures prévues par les textes,

- elle a dénoncé la violation de ses droits de la défense dès la première instance,

- son action n'est pas prescrite dès lors que les voies et délais de recours mentionnés à la décision litigieuse sont ceux du droit commun et qu'en toute hypothèse, son recours gracieux aurait dû être adressé à l'autorité administrative compétente,

- son inadaptation professionnelle n'est pas établie puisqu'elle est en situation d'apprentissage, que ses résultats antérieurs étaient excellents, que les carences ou maladresses constatées ne sont pas de nature à rendre intolérable la poursuite de sa formation, que l'A... Rockefeller n'a pas tout mis en oeuvre pour lui permettre d'acquérir les compétences pratiques nécessaires,

- en tout état de cause, l'exclusion définitive ne peut être motivée par l'inadaptation professionnelle puisqu'elle n'est pas l'un des motifs permettant la saisine du conseil pédagogique,

- aucun élément ne révèle des actes incompatibles avec la sécurité des personnes prises en charge ayant été accomplis volontairement,

- les rapports sur lesquels l'A... Rockefeller fonde sa décision sont rédigés à charge, ne sont pas suffisamment circonstanciés et détaillés, ne reposent pas sur des éléments objectifs et sont contredits par d'autres rapports qui attestent de son implication et de sa progression,

- sa réintégration au sein de l'A... Rockefeller s'impose en raison de la rupture abusive du contrat, du non-respect par l'A... Rockefeller de ses obligations et de l'impossibilité d'intégrer un autre A... au regard de son dossier pédagogique,

- l'A... Rockefeller a manqué à ses obligations en n'assurant pas un suivi pédagogique, notamment lors des stages, et en alternant les stages sans lien avec son but professionnel,

- l'A... Rockefeller n'a pas fait preuve de transparence en ne répondant pas à ses demandes et en ne lui transmettant pas les documents de son dossier,

- les manquements de l'A... Rockefeller et son exclusion arbitraire lui a causé une perte de chance d'obtenir son diplôme d'Etat, un préjudice financier, ayant acquitté une année de formation à l'A..., et l'oblige à prolonger sa formation.

MOTIFS

Sur la nullité du jugement

Il résulte des conclusions de première instance de Mme Y... que celle-ci a invoqué clairement des atteintes à ses droits à l'occasion de la procédure d'exclusion dont elle a fait l'objet.

En conséquence, aucun moyen n'a été soulevé d'office par le premier juge, et la demande d'annulation du jugement sera rejetée.

Sur la prescription

Une sanction d'exclusion définitive d'une formation prononcée par une association de formation des professionnels de santé, personne privée, qui ne fait pas obstacle à ce que l'élève s'inscrive dans un autre établissement, constitue une mesure d'ordre interne à cet établissement privé, dont la contestation relève du juge judiciaire et des règles de droit civil.

En conséquence, c'est à juste titre que la décision d'exclusion prise par la directrice mentionnait que «la décision peut faire l'objet d'une contestation devant les juridictions de droit civil dans les formes et délais de droit commun», en l'occurrence selon les règles de la responsabilité contractuelle de droit commun.

Le délai de prescription est donc celui de l'article 2224 du code civil aux termes duquel il est dit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'action de Mme Y... introduite moins de cinq ans à compter de la connaissance qu'elle a eu de la décision d'exclusion n'est donc pas prescrite.

Sur le fond

Il s'est formé entre l'A... Rockefeller, établissement d'enseignement privé et Mme Y..., un contrat d'enseignement qui doit s'exécuter dans le respect des dispositions réglementaires de l'arrêté du 21 avril 2007, dans sa version applicable à la date des faits, relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux.

Ainsi, il est institué au sein des A... un conseil pédagogique compétent sur toutes les questions relatives à la formation et à la vie des étudiants et constitué par arrêté du préfet de région.

Aux termes des articles 10 et 11 de cet arrêté modifié par arrêté du 2 août 2011, applicable à l'espèce, il est stipulé :

«Le conseil pédagogique est notamment consulté pour avis sur :

1. Le projet pédagogique de chaque année de formation : objectifs de formation, organisation générale des études, et notamment la date de rentrée de chaque année de formation, planification des enseignements et des périodes de congés, calendrier des épreuves de contrôle continu des connaissances.

2. Le règlement intérieur dont le contenu minimum est défini en annexe IV du présent arrêté ainsi que tout avenant à celui-ci.

3. L'effectif des différentes catégories de personnels, en précisant pour les personnels enseignants permanents la nature et la durée de leurs interventions.

4. L'utilisation des locaux et du matériel pédagogique.

5. Le rapport annuel d'activité pédagogique dont le contenu est défini en annexe V du présent arrêté.

6. Les situations individuelles :

a) Etudiants en difficulté pédagogique : le conseil peut alors proposer un soutien particulier, susceptible de lever les difficultés, sans allongement de la formation ;

b) Etudiants en difficulté pédagogique en lien avec des absences répétées à plusieurs unités d'enseignement;

c) Demandes de redoublement formulées par les étudiants, dans le cas où l'avis du conseil est requis pour l'examen de celles-ci par les textes relatifs à la formation concernée ;

d) Etudiants ayant accompli des actes incompatibles avec la sécurité des personnes prises en charge;

e) Modalités de reprise de la formation après une interruption de formation inférieure à trois ans, dans les conditions prévues aux articles 38 et 39 ;

f) Demandes d'admission en cours de formation, à l'occasion ou non d'un redoublement, formulées par les étudiants pour un motif exceptionnel ;

g) Le cas échéant, les demandes des candidats titulaires d'un diplôme extra-communautaire.

Concernant les points 1 et 2, lorsque le directeur ne souhaite pas suivre l'avis émis par le conseil pédagogique, il le convoque à nouveau afin de recueillir son avis. Cette nouvelle délibération doit avoir lieu dans un délai d'un mois à compter de la première réunion du conseil pédagogique.

Lors de cette nouvelle délibération, le directeur peut soumettre au conseil son projet initial ou un projet tenant compte de l'avis émis par le conseil lors de sa première délibération.

Le projet pédagogique et le règlement intérieur sont transmis aux membres du conseil au moins quinze jours avant sa réunion.

Pour les situations d'étudiants visées au 6, les membres du conseil reçoivent communication du dossier de l'étudiant, accompagné d'un rapport motivé du directeur, au moins quinze jours avant la réunion de ce conseil.

Pour les situations visées aux c et d du 6, l'étudiant reçoit communication de son dossier dans les mêmes conditions que les membres du conseil. Le conseil pédagogique entend l'étudiant, qui peut être assisté d'une personne de son choix.

L'étudiant présente devant le conseil pédagogique des observations écrites ou orales. Dans le cas où l'étudiant est dans l'impossibilité d'être présent ou s'il n'a pas communiqué d'observations écrites, le conseil examine sa situation.

Toutefois, le conseil peut décider à la majorité des membres présents de renvoyer à la demande de l'étudiant l'examen de sa situation à une nouvelle réunion. Un tel report n'est possible qu'une seule fois.

La décision prise par le directeur de l'institut de formation est notifiée par écrit à l'étudiant, dans un délai maximal de cinq jours après la réunion du conseil pédagogique. Elle figure à son dossier pédagogique et est adressée au président du conseil pédagogique.

Le directeur de l'institut de formation rend compte de ses décisions lors de la réunion suivante du conseil pédagogique.

Article 11

Lorsque l'étudiant a accompli des actes incompatibles avec la sécurité des personnes soignées, le directeur de l'institut de formation, en accord avec le responsable du lieu de stage, peut décider de la suspension du stage de l'étudiant, dans l'attente de l'examen de sa situation par le conseil pédagogique qui doit se réunir, au maximum, dans un délai de quinze jours à compter de la suspension.

Lorsque le conseil pédagogique se réunit, il examine la situation et propose une des possibilités suivantes :

- soit autoriser l'étudiant à poursuivre la scolarité au sein de l'institut ; dans ce cas, le conseil pédagogique peut alerter l'étudiant sur sa situation en lui fournissant des conseils pédagogiques pour y remédier ou proposer un complément de formation théorique et/ou pratique ;

- soit soumettre l'étudiant à une épreuve théorique, soit le soumettre à une épreuve pratique complémentaire sous la responsabilité du tuteur, selon des modalités fixées par le conseil. A l'issue de cette épreuve, le directeur de l'institut décide de la poursuite de la formation ou de l'exclusion définitive de l'institut de formation ;

- soit exclure l'étudiant de l'institut de façon temporaire ou définitive.

' Sur la violation de la procédure et l'atteinte aux droits de Mme Y... :

Mme Y... a été convoquée pour un entretien par la directrice de l'A..., Mme B..., qui s'est tenu le 28 octobre 2013, en présence d'un témoin et secrétaire.

Le compte rendu de cet entretien fait apparaître :

- que la directrice a porté à la connaissance de Mme Y... un rapport circonstancié établi par la cadre Mme C... de l'unité 400, où Mme Y... a effectué son dernier stage,

- que Mme X... Y... a fait des observations démontrant qu'elle a eu conscience des raisons précises de la réunion du conseil pédagogique à son intention, notamment en indiquant : «si j'avais une étudiante qui fasse vraiment tout ce qui m'est reproché, je partirais en courant».

- qu'elle a eu communication de son dossier,

- qu'une convocation lui a été remise,

- qu'elle a attesté avoir pris connaissance des «textes réglementaires (arrêté du 21 avril 2007 modifié)»,

La séance du conseil pédagogique a fait l'objet d'un compte rendu très détaillé relatant :

- qu'avant de débuter la rencontre avec l'étudiante, le président a vérifié la bonne réception des documents par chaque membre du conseil dans les délais impartis,

- que tous les documents relatifs à la situation de Mme X... Y... ont été communiqués aux membres du conseil, notamment l'argumentaire de 52 pages adressé par l'étudiante, remis aux membres en début de séance,

- que Mme X... Y... s'est présentée assistée de son mari,

- que le président s'est de nouveau assuré en présence de Mme X... Y... que chaque membre a bien reçu l'ensemble des pièces du dossier,

- que deux témoins ont été entendues, Mme D..., cadre de l'Aural (stage dialyse du 2 septembre au 4 octobre) et Mme C... cadre de l'unité 400 accompagnée de Mme E..., infirmière tutrice (stage service de neurologie, en cours)

- et que les débats ont duré 3 heures.

A l'issue de la réunion, le conseil pédagogique aux termes d'un vote à bulletin secret à proposé l'exclusion définitive de l'étudiante par 13 voix sur 17.

Il n'apparaît aucune irrégularité au regard des règles prescrites aux articles 10 et 11 de l'arrêté du 21 avril 2007.

En particulier, aucune disposition ne prévoit que le directeur soit tenu de préciser, dans la convocation, à l'étudiant le motif de la réunion du conseil pédagogique ou les diverses options du conseil pédagogique.

La mention de la convocation «afin d'envisager la suite de votre formation» n'excluait d'ailleurs pas la cessation de la formation.

En tout état de cause, Mme X... Y... ne peut soutenir valablement qu'elle n'avait pas conscience des motifs de la réunion du conseil pédagogique ni que le conseil pédagogique pouvait proposer son exclusion.

Elle avait reçu communication de son dossier qui comportait notamment un rapport faisant état d'une «inadaptation aux situations de soins la rendant dangereuse»,

La convocation rappelait qu'elle pouvait être assistée d'une personne de son choix, lors du conseil pédagogique, cette faculté n'étant ouverte, en dehors de la procédure disciplinaire, que dans le cas du 6 d) de l'article 10 de l'arrêté.

Dans ses observations transmises au conseil pédagogique, elle déclare espérer que le conseil pédagogique lui permettra de continuer sa formation.

Enfin, contrairement à ce qu'elle soutient de manière erronée, elle n'a pas été convoquée «sur le fondement de l'article 6 a)».

En outre, Mme X... Y... a attesté avoir pris connaissance des dispositions de l'arrêté du 21 avril 2007 modifié et a transmis des observations écrites et fait des observations orales, de sorte qu'aucun grief ne résulte de ce que la convocation lui a rappelé ce droit.

L'arrêté du 21 avril 2007, ne prévoit aucun délai de transmission des observations écrites par l'étudiant, ni de délai de communication de ces observations aux membres du conseil pédagogique.

En tout état de cause, le compte-rendu du conseil pédagogique relate que les observations écrites de Mme X... Y... ont bien été communiquées aux membres du conseil pédagogique qui ont pu en prendre connaissance en début de séance.

En conséquence, le moyen n'est pas fondé.

' Sur l'insuffisance de la motivation de la décision :

Mme Y... invoque un irrespect de la loi du 1er juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs.

Cependant la décision d'exclusion prise par la directrice de l'A... Rockefeller, institution de droit privé, n'est pas un acte administratif.

En conséquence, ce moyen n'est pas fondé.

' Sur la disproportion alléguée de la décision au regard des griefs à l'encontre de Mme Y...

La décision d'exclusion a été régulièrement prise sur proposition, très majoritaire, du conseil pédagogique constitué de professionnels de santé et de représentants des étudiants.

Le compte-rendu détaillé montre que les griefs ont été exposés précisément à Mme X... Y... qui a pu fournir ses explications.

Le conseil a conclu de la manière suivante :

«Tous les membres s'accordent pour reconnaître la complexité de la situation et du dialogue avec Madame X... Y..., d'autant plus que c'est son mari qui répond le plus souvent à sa place et qu'avant de parler, elle lui en demande l'autorisation.

Le premier point de débat est de nature pédagogique

Il porte sur l'évolution des apprentissages de Madame X... Y... :

Les apprentissages de base ne sont pas stabilisés en fin de 3ème année et compromettent la sécurité dans les soins ;

Au bout de 7 semaines de stage et après un nombre de stages importants, elle n'a pas acquis ce qui doit l'être habituellement au bout de 2 semaines en stage écoulées. Elle doit se poser la question de l'adaptation et de la sécurité des patients.

L'absence totale de remise en cause est préjudiciable à sa progression et à son évolution

Elle n'a pas conscience de sa dangerosité dans l'inexactitude des actes infirmiers qu'elle fait

Elle parle d'incompréhension et de difficultés de communication et s'étonne de tant de malentendus autour d'elle, sans se remettre en question

Son projet professionnel n'est pas réaliste dans le contexte actuel

Son auto-évaluation est inadaptée.

Est-elle encore en capacité d'apprendre et de progresser ' Elle n'en fait pas état.

Jusque-là l'étudiante ne valide pas les soins en médecine et chirurgie

Combien de stages faudra-t-il encore pour valider les actes, activités et compétences infirmières alors même qu'elle a bénéficié de conditions d'encadrement très personnalisées '

Le second débat est d'ordre professionnel et éthique :

L'étudiante n'a pas conscience de ses lacunes au niveau clinique et ne peut attester d'une fiabilité au niveau des soins infirmiers alors même qu'elle considère la fiabilité comme sa principale qualité.

Ses insuffisances pratiques ont des effets sur la sécurité des patients et on peut dire à ce titre qu'elle accomplit des actes incompatibles avec la sécurité des patients.

Des patients n'ont pas confiance en elle et refusent qu'elle les prenne en charge.

Les insuffisances pratiques sont réitérées au point de produire 3 rapports circonstanciés par les équipes soignantes des 3 derniers stages qui alertent ainsi sur son absence de compétences et sa dangerosité.

Les équipes soignantes s'épuisent à l'encadrer sans voir de progression significative.

Madame X... Y... ne crédite pas ses futurs pairs d'une confiance suffisante pour travailler en équipe autour de projets de soins

Elle ne peut expliciter ses difficultés sans mettre en cause les professionnels de santé

Elle peut même retourner les situations à son encontre et mettre en doute des équipes soignantes expérimentées

L'argument sur lequel les membres se retrouvent, c'est l'inadaptation aux situations professionnelles et mise en danger des personnes soignées.

En conclusion :

Les membres du Conseil Pédagogique constatent qu'aujourd'hui, on touche les limites du dispositif d'accompagnement et d'apprentissage et que les moyens mis à disposition n'ont jamais été aussi importants, sans résultats probants.

Le Conseil Pédagogique s'accorde sur le fait que l'article 10 alinéa 6a n'est pas applicable-dans la mesure où il y a déjà prolongation de scolarité-seul l'article 10 alinéa 6d peut servir de référence dans ce cas.

Une proposition de vote à bulletin secret est faite avec 4 alternatives possibles : poursuite de scolarité, épreuve pratique complémentaire, exclusion temporaire d'un an, exclusion définitive-de l'A....

Résultats du vote à bulletin secret :

17 votants, 17 suffrages exprimés avec les résultats suivants : - Poursuite de scolarité : 2 voix

Epreuve pratique complémentaire : 0 voix

- Exclusion temporaire d'un an : 2 voix

- Exclusion définitive 13 voix.

L'avis porté par le Conseil Pédagogique à la majorité des voix est donc l'exclusion définitive. Mme B... doit prendre la décision et en informer Mme X... Y... dans un délai de 5 jours.

La séance est levée à 14h00

Validé par Monsieur Jean-François MORAND, Conseiller pédagogique régional ARS».

Il résulte de ces éléments que Mme X... Y... n'a pas acquis les compétences attendues en fin de troisième année.

Ces lacunes ont été pointées par plusieurs cadres de santé, sur plusieurs lieux de stage différents, et réalisés dans divers services.

Elles ont de surcroît généré des situations de mise en danger de patients.

D'autre part, l'A... a bien apporté un soutien personnalisé à Mme X... Y... par des entretiens, des conseils et une offre de stage de rattrapages.

Lors du conseil pédagogique, il a été souligné «les efforts sans précédents mobilisés autour de cette étudiante».

Mme X... Y... a été convoquée à plusieurs reprises par la directrice pour faire le point de sa formation.

En conséquence, Mme X... Y... a manqué à ses obligations d'étudiante, à savoir, acquérir et valider au fur et à mesure et dans le temps de sa formation d'une durée de trois ans, des savoir-faire professionnels suffisants pour pouvoir être présentée au diplôme d'infirmière.

L'exclusion est bien proportionnée aux manquements commis eu égard aux situations de mise en danger des patients commises pendant la prolongation de sa formation.

En conséquence, l'exclusion prononcée par l'A... est bien conforme aux règles posées par l'arrêté du 21 avril 2007 modifié et constitue une rupture légitime du contrat d'enseignement, eu égard aux manquements de Mme X... Y... à ses propres obligations.

Le jugement sera donc infirmé et Mme X... Y... sera déboutée de toutes ses demandes en l'absence de toute faute de l'A....

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour,

- Déboute l'association A... Rockefeller de sa demande en annulation du jugement déféré,

Infirme le jugement déféré et statuant de nouveau,

- Déclare non prescrite l'action de Mme X... Y...,

- sur le fond,

la déboute de toutes ses demandes,

- vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à l'association A... Rockefeller la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 18/03166
Date de la décision : 30/10/2018

Références :

Cour d'appel de Lyon 1B, arrêt n°18/03166 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-30;18.03166 ?
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